Bible Annotée

Matthieu 26.46

Levez-vous, allons ! voici, il approche celui qui me livre ! Quel contraste entre ces vives paroles, qui signalent un péril imminent, et le sommeil des disciples ! Maintenant le Sauveur, relevé de son abattement, s'avance plein de calme et de courage au-devant de ses ennemis.

– Au terme de ce récit, nous devons nous demander quelles ont été dans l'âme de Jésus les causes de cette souffrance cruelle qu'il a endurée. Il faut bien avouer que cette question nous met en présence du mystère « sur lequel les anges se penchent, désirant de voir jusqu'au fond. » (1 Pierre 1.12)

On a répondu que c'était le sentiment profond de la perversité humaine, de l'ingratitude de son peuple, de l'abandon de ses disciples, en un mot, ce poids immense d'iniquités qui s'accumulaient sur lui. On a répondu surtout que c'était le frémissement de la nature en présence des souffrances les plus atroces, de la mort la plus ignominieuse.

Tout cela peut être vrai. Mais cette mort qu'il avait prévue et si souvent annoncée, pour laquelle il savait qu'il était venu, (Jean 12.27) qu'il avait préfigurée dans la cène, quelques heures auparavant, dont il avait parlé avec un calme si sublime (voir les discours dans saint Jean et la prière sacerdotale), cette mort qui de sa part était libre et volontaire, était-elle bien la cause unique de ses angoisses, de sa défaillance ? ne nous paraîtrait-il pas alors moins courageux que tant de martyrs qui ont affronté avec héroïsme des supplices pareils ?

Une certaine critique, pour laquelle rien n'est sacré, n'a pas manqué de lui en faire un reproche ; elle a même trouvé une contradiction entre le calme majestueux des derniers entretiens de Jésus avec ses disciples et les profondes angoisses de Gethsémané ; et cette contradiction, elle s'en est armée pour contester la vérité historique du quatrième évangile.

Il faut regarder plus avant. La mort, dans le sens que l'Ecriture donne à ce mot, n'est pas seulement la destruction du corps, « salaire du péché, » elle atteint tout notre être ; elle devient, sous le jugement de Dieu, « la mort seconde, » la condamnation. Or Jésus, nous le savons de sa propre bouche, allait payer de sa vie la rançon des pécheurs ; (Matthieu 20.28) il allait « répandre son sang pour les péchés de plusieurs » (verset 28 : comparer Jean 1.29 ; 1 Jean 2.2 ; 2 Corinthiens 5 ; 21 ; Galates 3.13) ; en un mot, chef et représentant de notre humanité, il se mettait à la place du pécheur, sous le jugement de Dieu.

De là ces angoisses, ce poids de souffrance morale sous lequel il craint de succomber. (Comparer Matthieu 27.46) Il s'agit donc ici d'une tentation spéciale, terrible, d'une lutte contre la puissance des ténèbres. (Luc 22.53 ; Jean 14.30)

Jésus invoque son Père, dont il n'a point perdu l'amour et la faveur, il