Théologie Systématique – I. Méthodologie

II.2.2 De la Théologie pratique

La Théologie pratique se distingue très nettement de la discipline précédente, science descriptive, par son caractère impératif ou délibératif, et elle se distingue en même temps de l’éthique chrétienne, qui est la seconde partie de la Théologie systématique, science impérative comme elle, en ce qu’elle s’adresse spécialement aux conducteurs de l’Eglise contemporaine. La Théologie pratique règle l’exercice de leurs fonctions, la théorie même et de l’Eglise et du ministère ayant été établie dans la Théologie systématique. La quatrième des grandes disciplines théologiques est donc la conclusion de toutes les études précédentes ; elle est dans ses subdivisions diverses, la théorie ou l’art de l’application des données de la révélation chrétienne aux besoins de l’Eglise et du monde. La division de cette science nous sera donc tout naturellement indiquée par les conditions où se trouvent actuellement l’Eglise et le monde auxquels l’Evangile est destiné. En tant que l’activité des conducteurs de l’Eglise s’adresse tout d’abord à ses propres membres, puis aux parties de l’humanité qui sont encore étrangères à l’Eglise et, en troisième lieu, aux membres d’Eglises dissidentes ou rivales, la Théologie pratique se subdivisera en trois rameaux principaux, la théorie de l’édification de l’Eglise (Eucodomiquec), la théorie de l’extension de l’Eglise ou de la Mission (Alieutique), et la théorie de la défense de l’Eglise particulière dont je fais partie (Polémique).

c – Nous écrivons ce mot en italiques pour marquer qu’il est de notre fabrication.

LEucodomique ou théorie de l’édification de l’Eglise, se subdivise à son tour en deux rameaux, selon que le ministère des conducteurs de l’Eglise s’adresse aux collectivités qui y sont renfermées : théorie du culte ou Liturgique, ou à ses membres considérés individuellement : Théologie ou Prudence pastoraled.

d – Ce nom de prudence pastorale donné anciennement à cette discipline, et qui est tombé en désuétude, ne s’oppose point à l’imprudence : il est synonyme de science, comme dans jurisprudence.

La Liturgique comprend elle-même la théorie du culte des adultes, dont la principale branche est l’homilétique ; et celle du culte des membres mineurs de l’Eglise (catéchétique). La Théologie pastorale à son tour comprend la théorie de la cure d’âmes, ayant pour objet les membres de l’Eglise malades ou affligés ; et la théorie de la discipline ecclésiastique qui a pour objet ses membres indignes ou infidèles.

La théorie de la Mission ou Alieutique, est une science de date récente ; et l’époque qui a repris l’œuvre de l’évangélisation du monde avec une ardeur oubliée depuis les premiers temps de l’Eglise, méritait bien de lui donner son nom. Elle comptera parmi ses auxiliaires naturelles : l’Histoire des religions, sortie d’elle et qu’elle a le droit de rappeler à elle. L’Alieutique, elle non plus, ne doit point dégénérer jusqu’à devenir une théorie de la civilisation des peuples non chrétiens. L’objet de cette science doit demeurer celui de la Mission elle-même : la conversion de ces peuples à Jésus-Christ mort et ressuscité. Elle sera un résumé systématique des expériences, faites par les agents de la Mission chrétienne chez les peuples non chrétiens aux différentes époques, et un « exposé des conclusions pratiques à en tirer pour l’œuvre actuelle de l’évangélisation de ces peuples.

La Polémique se distingue de l’Apologétique, en ce que cette dernière vise les adversaires du Christianisme, étrangers par conséquent à toute Eglise ; tandis que l’autre, se renfermant dans l’enceinte de l’Eglise universelle et supposant reconnus de part et d’autre les principes fondamentaux du Christianisme, connaît des discussions et des conflits suscités entre les dénominations ecclésiastiques particulières. Car chacun est toujours le dissident de quelqu’un ; et les raisons diverses qui me déterminent soit à faire un choix entre les différentes dénominations, à rester fidèle à l’une d’entre elles, ou même à en créer une nouvelle, auront toujours le droit de se produire et d’être défendues en face de ceux qui les contestent ou qui les condamnent.

La Polémique est donc une science d’occasion ; elle est suscitée par l’attaque, et elle règle les conditions légitimes, fournit les moyens de la défense. Elle est une protestation renouvelée contre le scepticisme ecclésiastique toujours prompt à renaître de la lassitude des discussions ; et nous ajoutons que comme l’indifférentisme en matière de formes ecclésiastiques ne saurait profiter, s’il profite à quelqu’un, qu’aux Eglises établies ou nationales, c’est-à-dire à celles dont on est membre du droit de la naissance, la Polémique restera toujours le droit et souvent le devoir et une des conditions d’existence des Eglises dites dissidentes.

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L’Encyclopédie des sciences théologiques comprend donc quatre disciplines principales : l’exégèse, la Théologie systématique, la Théologie historique et la Théologie pratique ; une discipline préliminaire et mixte : la Critique sacrée, ou Introduction générale et particulière aux livres de l’Ancien et du Nouveau Testament, et une discipline auxiliaire, d’un caractère mixte également, et faisant la transition de l’exégèse à la Théologie systématique : la Théologie biblique.

Les quatre disciplines principales que nous venons de nommer et leurs accessoires épuisent, croyons-nous, la matière de la science théologique.

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