Le Bienfait de Jésus-Christ crucifié envers les chrétiens

I
Du péché originel et de la misère de l’homme.

L’Écriture sainte nous dit que Dieu créa l’homme à son image et à sa ressemblance, exempt de souffrance quant au corps, et quant à l’âme, juste, vrai, pieux, miséricordieux et saint. Mais lorsque, vaincu par la convoitise de la science, il mangea du fruit défendu par Dieu, il perdit cette image et cette ressemblance divines, et fut semblable à la brute et au démon qui l’avait trompé. Son âme devint injuste, menteuse, cruelle, impie, ennemie de Dieu, et son corps fut assujetti à la souffrance, à mille maux et infirmités. Et de même que nos premiers parents, s’ils fussent restés obéissants à Dieu, nous auraient fait hériter leur justice et leur sainteté, de même, s’étant révoltés contre Dieu, ils nous ont laissé pour héritage leur injustice, leur impiété, leur inimitié envers Dieu, de sorte qu’il nous est désormais impossible, par nos propres forces, d’aimer Dieu et de nous conformer à sa volonté.

Nous sommes devenus ennemis de Celui qui, pour être juste juge, doit punir nos péchés, sans que nous ayons aucun droit de compter sur sa miséricorde. En somme, la nature humaine a été tout entière corrompue par le péché d’Adam ; et, tandis qu’avant la chute l’homme était supérieur à toutes les autres créatures, il leur fut dès lors assujetti ; il devint esclave du démon, du péché et de la mort, et fut condamné à la misère de l’enfer. Son jugement fut tellement perverti, qu’il commença à nommer le bien mal et le mal bien, estimant vrai ce qui est faux, et prenant le mensonge pour la vérité. Dès lors le prophète a pu dire : « Que tout homme est menteur (Psaumes 116.11), et qu’il n’y en a aucun qui fasse le bien » (Psaumes 14.3).

Comme un roi, fort et bien armé, gouverne son palais, ainsi le démon règne sur le monde dont il est le seigneur et le prince. Il n’est pas de langue qui puisse exprimer la millième partie des calamités qui sont venues sur nous, lorsque, après avoir été créés par Dieu lui-même, nous avons perdu sa divine image et sommes devenus semblables au diable. Rendus conformes à sa nature, nous voulons tout ce qu’il veut et refusons pareillement tout ce qui lui déplaît. Livrés ainsi au pouvoir de cet esprit malin, il n’y a pas de péché, quelque grave qu’il soit, que nous ne soyons prêts à commettre, quand la grâce de Dieu ne nous en empêche pas. Ce manque de justice, cette inclination au mal et à l’impiété se nomme péché originel. Nous le portons avec nous dès le sein de notre mère et naissons enfants de colère. Il a son origine dans nos premiers parents, et il est la source de tous nos vices et de toutes nos injustices.

Si nous voulons être délivrés du mal et retrouver l’innocence primitive avec l’image de Dieu, il est absolument nécessaire qu’auparavant nous connaissions notre misère.

Aucun homme n’appelle le médecin, s’il ne se sent malade ; aucun ne reconnaît l’excellence du médecin, ni l’obligation qu’il a envers lui, s’il n’a pas su combien sa maladie a été dangereuse et mortelle. Il en est de même à l’égard de Christ, l’unique Médecin de nos âmes. Personne ne peut le connaître, s’il ne sent que son âme est malade ; personne ne peut comprendre l’excellence de Christ, ni ses obligations envers lui, s’il n’a été auparavant pénétré de l’extrême gravité de ses péchés et de la maladie mortelle que nous avons tous contractée par la contagion de nos premiers parents.

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