Philadelphe Delord

Avant-propos

Je ne suis qu’un débris, un pauvre éclat de verre
Sur lequel, par faveur, un rayon s’est posé,

disait Philadelphe Delord …

Ce rayon néanmoins, attire de plus en plus l’attention : il conduit à Valbonne où les pèlerinages se multiplient les uns après les autres. De nombreuses agences de voyage la mettent sur leur feuille de route. Bientôt ce monastère perdu dans une forêt domaniale, transformé en Home d’accueil pour lépreux, sera aussi réputé que la Valsainte et la Grande Chartreuse.

Après avoir séjourné auprès des « hanséniens », m’être familiarisé avec eux (moi qui, par crainte atavique et quasi-religieuse, les avais tenus à distance), j’aurais pu me borner à un reportage sur Valbonne, sanatorium moderne d’où les horreurs des maladreries médiévales ont disparu.

J’ai fait une part équitable à cette documentation en présentant les lépreux comme des êtres proches de nous et non comme des intouchables ou des réprouvés.

Mais, était-il indiqué de parler de Valbonne d’aujourd’hui en laissant son fondateur dans l’incognito ?

Plus son œuvre me séduisait, plus je désirais le connaître et le faire connaître, lui. Je réalisais ainsi le vœu du Directeur de la Collection « les Vainqueurs », ami d’ancienne date du héros, qui fut le premier à vouloir lui rendre hommage et me suggéra cet ouvrage.

Rien de suivi n’ayant été écrit sur Philadelphe Delord, aucune bibliothèque ne pouvant me venir en aide, je demandai alors à sa veuve et à ses enfants de me parler de lui librement, sans contrainte, au hasard des souvenirs.

Assis sur une terrasse de l’abbaye, appuyés à la margelle d’un puits, déambulant dans le petit ou le grand cloître, les familiers m’ont raconté son histoire. Ainsi est née cette biographie.

Le charme, le bon sens, la persévérance, la largeur de cœur et d’esprit, l’absence d’étroitesse et de conformisme religieux de Delord, mais aussi la profonde piété d’un fils du Réveil du Tarn m’ont gagné tout autant que sa cause.

Je remercie en premier lieu les membres de sa famille de m’avoir si aimablement documenté. Ma gratitude va également à mon ami le professeur Maurice Roch, à MM. les docteurs Ph. Bourdillon, Al. Monod, au professeur Ch. Du Bois qui ont mis à ma disposition d’importantes études sur la lèpre et les léprologues.

Les temps sont révolus où un lépreux n’était qu’un paria. Au lieu de l’attacher dans des grottes, on s’ approche de lui. Il a droit à son jardin, à sa bibliothèque, à sa radio, à tout ce qui soulage le corps et remonte le moral.

Pour savoir de quelle manière lui venir en aide, nous pouvons consulter Ph. Delord. Comme le disait un ami au lendemain de son départ : « Il nous reste encore sa vie. »

E. C.
« Le Pommier ».

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