Antiquités judaïques - Flavius Josèphe

LIVRE XX

CHAPITRE VII
Claude donne Agrippa la tétrarchie de Philippe et la Batanée ; mariage de Aziz, le roi d'Émèse, avec Drusilla, la sœur d'Agrippa ; Agrippa donne Mariamme à Archélaüs ; le mariage de Drusilla et d'Aziz est rompu, Drusila épouse Félix ; Bérénice se marie avec Polémon, le roi de Cilicie, puis l'abandonne ; Mariamme quitte Archélaüs et s'unit à Démétrius, le premier des Juifs d'Alexandrie.

Mariages de Félix avec Drusilla, du roi Polémon avec Bérénice, de Démétrius d'Alexandrie avec Mariamme.

1. Claude envoya ensuite Félix[1], frère de Pallas, pour s'occuper des affaires de Judée. Après avoir accompli sa douzième année de principat, il donna à Agrippa la tétrarchie de Philippe et la Batanée, en y ajoutant la Trachonitide et Abila, c'est-à-dire la tétrarchie de Lysanias, mais il lui enleva Chalcis qu'il avait gouvernée pendant quatre ans. Ayant reçu ce présent de l'empereur, Agrippa donna en mariage à Aziz, roi d'Émèse[2], qui avait consenti à se faire circoncire, sa sœur Drusilla, qu'Épiphane, fils du roi Antiochus, avait refusé d'épouser parce qu'il ne voulait pas se convertir au judaïsme, bien qu'ayant promis autrefois au père de Drusilla de le faire. De plus, Agrippa donna Mariamme à Archélaüs, fils d'Helcias, auquel son père Agrippa l'avait fiancée, et ils eurent une fille nommée Bérénice.

[1] Antonius Félix, affranchi d'Antonia, mère de Claude, fut procurateur de Judée de 52 à 60.

[2] Aziz, roi d'Emèse (Homs sur l'Oronte), mourut en 54. Son frère Soème le remplaça.

2. Peu après, le mariage de Drusilla et d'Aziz fut rompu pour la cause suivante. Au moment où Félix était procurateur de Judée, il vit Drusilla, et, comme elle l'emportait en beauté sur toutes !es femmes, il s'éprit de passion pour elle. Il lui envoya un Juif cypriote de ses amis, nominé Simon, qui se prétendait magicien, et il essaya de la décider à quitter son mari pour l'épouser, promettant de la rendre heureuse si elle ne le dédaignait pas. Elle, qui était malheureuse et voulait échapper à la haine de sa sœur Bérénice — Félix l'invitait en raison de sa beauté qui, croyait-il, l'exposait à bien des tourments du fait de Bérénice[3] — se laissa persuader de transgresser la loi de ses ancêtres et d'épouser Félix. Elle eut de lui un fils qu'elle nomma Agrippa. Pour la façon dont ce jeune homme périt avec sa femme dans l'éruption du Vésuve sous l'empereur Titus, je l'expliquerai plus tard[4].

[3] αὐτῇ διὰ τὸ κάλλος παρεκάλει, παρ' ἐκείνης οἰόμενος οὐκ ἐν ὀλίγοις βλάπτεται nos (d'apres le texte des manuscrits qui porte αὐτῇ et ἔβλαπτεν qu'accepte Niese) : διὰ γὰρ τὸ κάλλος παρ' ἐκείνης ἐν ουκ ὀλίγοις ἐβλάπτετο ed. princeps et Naber.

[4] Voir la note du § 53.

3. Quant à Bérénice, après la mort d'Hérode, son mari et son oncle, et après un long veuvage, comme le bruit courait qu'elle était la maîtresse de son frère, elle persuada à Polémon, roi de Cilicie, de se faire circoncire et de l'épouser, car elle espérait ainsi prouver que ces accusations étaient calomnieuses. Polémon consentit surtout à cause de la richesse de Bérénice, mais leur union ne fut pas longue et Bérénice abandonna Polémon par légèreté, à ce qu'on dit. Celui-ci, dès la rupture de son mariage, renonça aussi aux coutumes juives. Au même moment Mariamme, après avoir quitté Archélaüs, s'unit à Démétrius, le premier des Juifs d'Alexandrie par la naissance et la fortune, qui était alors alabarque. Elle eut de lui un fils qu'elle nomma Agrippinus. Mais nous parierons plus loin[5] en détail de chacun de ces personnages.

[5] Voir la note du § 53.

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