Contre Apion - Flavius Josèphe

LIVRE I

CHAPITRE XX

Autre récit de Bérose.

(142) Voilà ce que Bérose a raconté sur ce roi et bien d'autres choses encore dans le IIIe livre de son Histoire de Chaldée, où il reproche aux écrivains grecs[1] de croire faussement que Sémiramis l'Assyrienne fut la fondatrice de Babylone et de s'être trompés en écrivant que ces ouvrages merveilleux y furent construits par elle. (143) Quant à ces faits les annales chaldéennes doivent être considérées comme dignes de foi, d'autant que les archives des Phéniciens s'accordent aussi avec le récit de Bérose sur le roi de Babylone, attestant qu'il soumit la Syrie et toute la Phénicie. (144) Là-dessus du moins Philostrate tombe d'accord dans ses Histoires, quand il raconte le siège de Tyr[2], et Mégasthène dans le IVe livre de l'Histoire de l'Inde[3], où il essaie de montrer que le roi de Babylone mentionné plus haut surpassa Héraclès par son courage et la grandeur de ses exploits, car, dit-il, il soumit la plus grande partie de la Libye et de l'Ibérie[4]. (145) Quant aux détails qui précèdent[5] sur le temple de Jérusalem, son incendie par les Babyloniens envahisseurs, l'époque où l'on commença à le rebâtir, après que Cyrus eut pris le sceptre de l'Asie, ils seront clairement prouvés par le récit de Bérose, mis sous les yeux du lecteur. (146) Il dit, en effet, dans le IIIe livre : « Nabocodrosor, après avoir commencé la muraille dont j'ai parlé[6], tomba malade et mourut ayant régné quarante-trois ans, et le pouvoir royal revint à son fils Evilmaradouch. (147) Ce prince, dont le gouvernement fut arbitraire et violent, victime d'un complot de Nériglisar, son beau-frère, fut assassiné après deux ans de règne. Lui supprimé, Nériglisar, son meurtrier, hérita du pouvoir et régna quatre ans. (148) Son fils Laborosoardoch, un enfant, détint la puissance royale neuf mois ; mais un complot fut ourdi contre lui parce qu'il montrait une grande méchanceté, et il périt sous le bâton par la main de ses familiers. (149) Après sa mort ses meurtriers se concertèrent et s'accordèrent à donner le trône à Nabonnède, un Babylonien qui avait fait partie de la même conjuration. Sous son règne les murs de Babylone qui avoisinent le fleuve furent restaurés en brique cuite et en asphalte. (150) Il régnait depuis dix-sept ans quand Cyrus partit de Perse avec une armée nombreuse, soumit tout le reste de l'Asie, puis s'élança sur la Babylonie. (151) A la nouvelle de sa marche, Nabonnède s'avança à sa rencontre avec son armée et lui livra bataille ; il fut défait, s'enfuit avec une faible escorte et s'enferma dans la ville de Borsippa. (152) Cyrus prit Babylone, fit abattre les murs extérieurs de la ville, parce qu'elle lui paraissait trop forte et difficile à prendre, et leva le camp pour aller à Borsippa assiéger Nabonnède. (153) Comme celui-ci, sans attendre l'investissement, s'était d'abord rendu, Cyrus le traita humainement, lui donna comme résidence la Carmanie et lui fit quitter la Babylonie. Nabonnède demeura en Carmanie le reste de sa vie et y mourut. »

[1] Ctésias, Deinon, Clitarque, etc., que suivront encore Strabon, Diodore, Quinte-Curce, etc.

[2] La citation de Philostrate est donnée avec plus de précision dans les Antiquités, X, II, 1, § 228. Ici l'allusion au siège de Tyr (dont il ne sera question que plus loin, § 156) reste peu intelligible pour le lecteur.

[3] G. Müller et Gutschmid lisent IIe au lieu de IVe : l'ouvrage de Mégasthène n'avait probablement que trois livres.

[4] Même citation dans les Antiquités, X, II, 1, § 227. Schnabel, à la suite de Gutschmid, estime que Josèphe n'a connu ce texte de Mégasthène qu'à travers Alexandre Polyhistor auquel l'emprunte également Abydénos (ap. Eusèbe, Praep. ev., IX, 41).

[5] Plus haut, § 132. Mais la citation qui va suivre ne prouve rien de ce qu'avance Josèphe.

[6] Probablement le « mur de Médie » mentionné par Xénophon et Strabon (Gutschmid).

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