Contre Apion - Flavius Josèphe

LIVRE II

CHAPITRE XIV

Réfutation des erreurs d'Apollonios Molon et de Lysimaque sur les lois juives.

(145) Mais puisque Apollonios Molon, Lysimaque et quelques autres, tantôt par ignorance, le plus souvent par malveillance, ont tenu, sur notre législateur Moïse et sur ses lois, des propos injustes et inexacts, accusant l'un de sorcellerie et d'imposture, et prétendant que les autres nous enseignent le vice à l'exclusion de toute vertu, je veux parler brièvement et de l'ensemble de notre constitution et de ses détails, comme je le pourrai[1]. (146) Il apparaîtra clairement, je pense, qu’en vue de la piété, des rapports sociaux, de l'humanité en général, et aussi de la justice, de l'endurance au travail et du mépris de la mort, nos lois sont fort bien établies. (147) J'invite ceux qui tomberont sur cet écrit à le lire sans jalousie. Ce n'est point un panégyrique de nous-mêmes que j'ai entrepris d'écrire, mais après les accusations nombreuses et fausses dirigées contre nous, la plus juste apologie, à mon avis est celle qui se tire des lois que nous continuons à observer. (148) D'autant plus qu'Apollonios n'a pas réuni ses griefs en un faisceau comme Apion ; mais les a semés çà et là, tantôt nous injuriant comme athées et misanthropes, tantôt nous reprochant la lâcheté, et, au contraire, à d'autres endroits, nous accusant d'être téméraires et forcenés. Il dit aussi que nous sommes les plus mal doués des barbares et que pour cette raison nous sommes les seuls à n'avoir apporté pour notre part aucune invention utile à la civilisation. (149) Toutes ces accusations seront, je pense, clairement réfutées s'il apparaît que c'est le contraire que nous prescrivent nos lois et que nous observons rigoureusement. (150) Si donc j'ai été obligé de mentionner les lois contraires, en vigueur chez d'autres peuples, il est juste que la faute en retombe sur ceux qui veulent montrer par comparaison l'infériorité des nôtres. Ces éclaircissements leur interdiront je pense, de prétendre ou que nous n'avons pas ces lois dont je vais citer les principales, ou que nous ne sommes pas, parmi tous les peuples, le plus attaché à ses lois.

[1] Le plaidoyer pour la législation juive ainsi annoncé (ch. XV et suiv.) présente de nombreuses concordances avec les Hypothetica de Philon dont Eusèbe a conservé un extrait, Praep. Ev., VIII, 6-7, pp. 355 c-361 b (cf. Wendland, Die Therapeuten und die phil. Schrift vom beachaul. Leben, 709-12 ; B. Motzo, Atti della R. Ac. di Torino, XLVII, 1911-2, 760 ; I. Lévy, La Légende de Pythagore. p. 212). Josèphe est tributaire de la source même où a puisé Philon, une apologie du judaïsme composée suivant toute apparence à Alexandrie vers le début de l'époque romaine. Il affecte de défendre la pure loi de Moïse, tandis que Philon reconnaît (l. l., 358 d) que les prescriptions qu'il énumère ne sont pas toutes contenues dans le Pentateuque et proviennent en partie de « lois non écrites ».

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant