Guerre des Juifs - Flavius Josèphe

LIVRE 2
Depuis la mort d'Hérode jusqu'au début de l'insurrection (4 av. J.-C. – 66 ap. J.-C.)

CHAPITRE 4
Anarchie en Judée. Révolte en Idumée. Judas en Galilée. L'usurpateur Simon. Athrongéos et ses frères.

Anarchie en Judée. Révolte en Idumée. Judas en Galilée.

1.[1] Le reste du pays était aussi plein de troubles, et l'occasion faisait surgir de nombreux prétendants à la royauté. En Idumée, deux mille anciens soldats d'Hérode prirent les armes et combattirent les troupes royales que commandait Achab, cousin du roi. Celui-ci d'ailleurs se replia sur les places les plus fortes, évitant soigneusement de s'engager en rase campagne. A Sepphoris de Galilée, Judas, fils de cet Ezéchias qui jadis avait infesté le pays à la tête d'une troupe de brigands et que le roi Hérode avait capturé[2], réunit une multitude considérable, saccagea les arsenaux royaux, et, après avoir armé ses compagnons, attaqua ceux qui lui disputaient le pouvoir[3].

[1] Chapitre IV Ant., XVII, 10, 4 (§ 269) — 8 (§ 283).

[2] Cf. liv. I, X, 5.

[3] τοῖς τὴν δυναστείαν ζηλοῦσιν, expression obscure, sens douteux.

L'usurpateur Simon.

2. Dans la Pérée, Simon, un des esclaves royaux[4], fier de sa beauté et de sa haute taille, ceignit le diadème. Courant le pays avec des brigands qu'il avait rassemblés, il brûla le palais royal de Jéricho et beaucoup de villas de gens opulents pour s'enrichir du pillage. Pas une maison de quelque apparence n'eût échappé aux flammes si Gratus, commandant de l'infanterie royale, prenant avec lui les archers de la Trachonitide et les plus aguerris des Sébasténiens, n'eût barré le chemin à ce bandit. Nombre de Péréens tombèrent dans le combat : quant à Simon lui-même, comme il s'enfuyait par un ravin, Gratus lui coupa la retraite et frappa le fugitif d'un coup d'épée oblique qui sépara sa tête du tronc. A la même époque, le palais de Betharamphta[5], voisin du Jourdain, fut également incendié par d'autres insurgés de la Pérée.

[4] Cf. Tacite, Hist., V, 9 : Post mortem Herodis, nihil expectato Caesare, Simo quidam regium nomen inuaserat (Après la mort d'Hérode, et sans attendre les ordres de César, un certain Simon avait usurpé le nom de roi).

[5] Les mss. ont βηθαραμινεσθα, βηθαραμαθου; dans Ant. 277 on lit Ἀμμαθόις (= Ἀραμάθοις). Il s'agit de la localité appelée jadis Beth-haram (Josué. XIII, 27 ; Nombres, XXXII, 36), ensuite Beth-Ramtha (Talmud de Jérusalem, Scheblith, 38d) et qui, reconstruite par Hérode Antipas, prit le nom de Julias ou Livias (Ant., XVIII, 27 : βηθαραμφθᾶ). Cf. Schürer, II2, p. 167.

Athrongéos et ses frères.

3. On vit alors un simple berger aspirer au trône. Il s'appelait Athrongéos et avait pour tout motif d'espérance la vigueur de son corps, une âme dédaigneuse de la mort, et quatre frères tout semblables à lui. A chacun d'eux il confia une bande d'hommes armés, et les expédia en courses comme ses lieutenants et satrapes ; lui-même, jouant au roi, se réservait les affaires les plus considérables. C'est alors qu'il ceignit le diadème ; il se maintint assez longtemps, parcourant la montagne avec ses frères. Ils s'appliquaient surtout à tuer des Romains et des gens du roi, mais ils n'épargnèrent pas davantage les Juifs qui tombaient entre leurs mains, dès qu'il y avait quelque chose à gagner. Ils osèrent un jour cerner près d'Emmaüs un fort détachement de Romains, qui portaient à la légion du blé et des armes. Leur centurion Arius et quarante des plus braves tombèrent sous les traits des brigands ; le reste, qui risquait d'en subir autant, fut sauvé par l'intervention de Gratus accompagné de ses Sébasténiens. Après avoir, au cours de la guerre, surpris ainsi nombre de Juifs et de Romains, ils furent enfin pris, l'aîné par Archélaüs, les deux suivants par Gratus et Ptolémée, à qui le hasard les livra ; le quatrième vint se rendre à Archélaüs par composition[6]. Ce dénouement se produisit plus tard ; à l'époque où nous parlons, ces hommes remplissaient toute la Judée d'une véritable guerre de brigands.

[6] On voit bien quel fut le sort de quatre frères, mais il y en avait cinq (cf. 3 plus haut). On peut se demander si Josèphe ne s'est pas mépris sur le langage de sa source et si, au lieu de quatre frères, Athrongéos n'en avait pas trois seulement ; l'aîné dont il est ici question serait alors le prétendant lui-même.

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