Théologie de l’Ancien Testament

§ 128. Suite. Combustion de la victime sur l’autel.

Après avoir fait du sang de la victime l’usage que nous venons de voir, on en brûlait le corps sur l’autel ; dans les holocaustes, le corps tout entier, chair et graisse ; dans les autres sacrifices, la graisse seule. Les entrailles étaient lavées, avant d’être consumées ; mais on ne les examinait point pour chercher à connaître la volonté du ciel ; cette coutume païenne, qui se retrouve en particulier chez les Phéniciens, est absolument bannie du culte mosaïque. Quant à la peau de la victime, l’Israélite devait l’enlever et la mettre en pièces « d’après ses morceaux » Lévitique 1.6 ; 8.20, c’est à dire la découper soigneusement.

On se demande naturellement pourquoi la victime devait être ainsi consumée ? Hengstenberg s’est fait ici le champion d’une idée qui n’a absolument aucun appui dans la Bible : le feu de l’autel doit être le symbole du feu de l’enfer. Le péché n’est point assez puni par la mort ; il y a encore un châtiment après cette vie. — Mais quel est le mot hébreu que nous traduisons par consumer ? Chose curieuse, ce n’est jamais שרף Saraph, brûler, détruire par le feu ; mais toujours Iktir הקטיר, faire fumer, faire monter en vapeur. Voyez Lévitique 1.9,13,17 ; 4.10,19 et sq. Comparez au contraire Lévitique 4.12 ; 16.27. Il est vrai que l’acte de consumer la victime, consomme le sacrifice. Il y a abandon complet de l’animal de la part de l’Israélite, et pour lui cette tête de bétail prise dans son troupeau ou achetée à prix d’argent, est détruite. Mais de la part de Dieu, il y a au contraire acceptation de l’offrande ; avec la fumée et la vapeur du sacrifice, c’est vraiment l’essence de l’animal qui monte vers le ciel ; voyez dans Lévitique 1.9,13,17, le triple retour de la formule : « une victime brûlée, d’un parfum agréable à l’Éternel. » Comment parler ainsi d’une fumée qui devrait figurer celle des tourments éternels ? Quel Dieu que celui qui s’en délecterait !

Il est évident qu’avec le Dieu de Moïse, c’est symboliquement qu’il faut entendre cette odeur d’apaisement que flaire l’Éternel et ce parfum d’agréable odeur qui monte jusqu’à Lui. Déjà dans Homère, ce qui rend les sacrifices agréables aux Immortels, ce sont les dispositions de piété dans lesquelles on les leur offrek.

k – Nægelsbach, théol. homérique, page 304.

Le feu qui consume la victime vient originairement de l’Éternel, car cette combustion doit signifier que Dieu accepte et s’approprie le sacrifice. Un feu étranger ne pourrait pas avoir ce sens. Voyez Lévitique 9.24 ; Juges 6.21 ; 1 Rois 18.38 ; 1 Chroniques 21.26 ; 2 Chroniques 7.1.

Ce feu doit brûler continuellement ; il ne faut pas le laisser s’éteindre (Lévitique 6.9, 13). D’abord il pouvait se présenter à tout moment des Israélites demandant à offrir des sacrifices, et il était expédient qu’il y eût du feu toujours tout prêt ; puis surtout il fallait soigneusement entretenir ce feu à cause de son origine céleste ; une fois éteint, quel homme aurait pu en procurer un pareil ? Ajoutons que ce feu brûlant perpétuellement était bien propre à faire comprendre que Dieu mérite et réclame une adoration ininterrompue.

C’était à l’autel d’airain qu’on empruntait le feu de l’autel d’or. Cela n’est pas dit expressément, mais on peut le conclure de Lév. ch. 10, où nous voyons un châtiment terrible atteindre les fils d’Aaron qui allument leurs encensoirs avec un feu étranger.

Cette flamme qui est descendue du ciel et qui brûle là dans le parvis au milieu du camp, est le symbole de la sainteté divine qui se révèle en Israël. Dieu n’accepte les offrandes et ne les prend en quelque sorte pour lui que par l’intermédiaire de cet élément qui provient immédiatement de Lui. Il y a là un enseignement : nous ne pouvons vraiment nous donner à Dieu qu’à la condition d’être purifiés et sanctifiés par le saint Esprit de Dieu. « Chacun sera salé de feu » (Marc 9.48). Cet Esprit, il est vrai, devient un feu consumant pour ceux qui s’approchent de Dieu à la légère (Lévitique 10.2). Le foyer que l’Éternel a en Jérusalem (Ésaïe 31.9 ; Ézéchiel 43.15 et sq.), ne représente donc pas seulement l’influence sanctifiante à laquelle Dieu soumet son peuple, mais aussi les justes châtiments qu’il exerce contre les profanes. « Les pécheurs sont effrayés dans Sion et le tremblement saisit les hypocrites ; qui est-ce d’entre nous, disent-ils, qui pourra résister au feu dévorant et séjourner auprès des flammes éternelles ? » (Ésaïe 33.14. Voyez aussi Ésaïe 10.17 ; Malachie 4.1, dont nous avons déjà parlé au § 48.)

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