Théologie de l’Ancien Testament

3. Les trois fêtes à pèlerinages.

§ 153. Pâques — Ordonnances touchant la fête de Pâque.

Elles sont nombreuses : Exode 12.1- 28, 43-49 ; 13.3-9 ; 23.15 ; Lévitique 23.5 ; Nombres 28.16-25 ; Deutéronome 16.1 et sq. — La première a été donnée à Moïse et Aaron avant qu’eût eu lieu l’événement que la Pâque devait solenniser, circonstance qu’il ne faut pas perdre de vue, et qui sert à expliquer les quelques divergences qu’il y a entre ce chapitre et les autres lois pascales. Depuis Exode 12.21, nous avons la communication de cette loi par Moïse au peuple, graduellement, pièce après pièce, selon que le nécessitait la marche des événements.

Quatre jours avant la Pâque, on mettait à part un agneau ou un chevreau d’un an par famille. Les familles trop peu nombreuses se réunissaient quelques-unes ensemble, car, d’après Josèphe (Bell. jud. 6.9, 3), il fallait dans la règle être de 10 à 20 personnes pour consommer l’agneau pascal. Le choix de cette victime se faisait avec une certaine solennité ; on la consacrait à Dieu, puis on recommandait à tous les assistants de la considérer comme un objet sacré. Le quatorze Abib ou Nisan, on purifiait les maisons de tout levain et de tout pain levé, car (Deutéronome 16.3) on ne devait rien manger de levé pendant toute la semaine sainte. Puis, on immolait l’agneau entre les deux soirs (§ 131). Il est probable que tous les préparatifs de la fête se faisaient encore le quatorze Nisan, que l’immolation avait lieu au passage d’un jour à l’autre, et que le repas faisait décidément partie du quinzième. En Egypte, ce furent sans doute les pères de famille eux-mêmes qui égorgèrent l’agneau de Pâque, et qui firent aspersion de son sang sur les deux poteaux et sur le linteau de la porte de leurs maisons. Plus tard, ce furent les prêtres qui immolèrent l’agneau de Pâque ; ils le firent dans le parvis du temple et la cérémonie de l’aspersion des portes tomba tout naturellement (Deutéronome 16.5-7 ; Exode 23.17). Au reste, sous Ezéchias encore, ce ne fut qu’à la place des Israélites qui ne se trouvaient pas en état de pureté que fonctionnèrent les prêtres (2 Chroniques 30.16), et ce n’est que sous Josias (2 Chroniques 35.11) que les pères de famille furent complètement remplacés par les Lévites. Voyez aussi Esdras 6.20. Toutefois, il ne fut jamais défendu aux laïques d’officier en ce grand jour. Comment les Lévites auraient-ils pu immoler tant de victimes en un espace de temps si limité ? D’après 2 Chroniques 35.7, le roi Josias ne fournit pas moins de 30 000 agneaux pour ceux du commun peuple, et Josèphe rapporte que, lors de la dernière fête de Pâque qui se célébra à Jérusalem, il n’y eut pas moins de 256 500 victimes immolées. — Dans le sanctuaire, le sang, au lieu de servir à teindre la porte, était répandu sur l’autel ; la graisse y était brûlée. La loi ne statue rien à cet égard, mais pourquoi n’en croirions-nous pas ici la tradition ? (Mischna Pesach 5, 6, 10). D’après 2 Chroniques 35.12, les morceaux de la victime que l’on consumait par le feu constituaient une sorte d’holocauste, עלה. Après cela l’animal était consommé dans la nuit même, tout entier et sans qu’on en eût rompu un os, avec des pains sans levain, מצות, et des herbes amères, מר.ֻרים (laitue sauvage). Il était défendu d’en rien porter hors de la maison, ni d’en rien laisser de reste ; si l’on n’avait pas pu le consommer tout entier, il fallait le lendemain matin brûler ces restes.

Lors de la première Pâque, les Israélites prirent leur repas debout, les reins ceints, les pieds chaussés, le bâton de voyage à la main. Plus tard cet usage tomba en désuétude. Il va de soi que les femmes prenaient part au repas ; tel est l’avis de la Mischna ; la Gemara veut seulement qu’elles n’y aient pas été obligées comme les hommes. Quant aux étrangers, ceux-là seulement osaient célébrer la Pâque, qui s’étaient incorporés au peuple d’Israël par la circoncision (Exode 12.44,48).

Pâque (pésach, פשח, chez les Septante πασχα, forme araméenne au status emphat.), signifie passage, car l’Éternel lors de la dixième plaie passa outre devant les maisons des Israélites. Voyez Ésaïe 31.5, comparé à Ésaïe 30.29.

[Josèphe, Ant. 2.14, 6 : ὑπερβασία. Les Pères ont rapproché ce mot du grec πασχω, mais sans aucune raison. Que dire de Baur qui pense que la fête de Pâque provient du passage du soleil au signe du bélier, si ce n’est qui ? pésach signifie sauter un endroit et non pas passer d’un endroit à l’autre. Cette seule, remarque renverse toute cette hypothèse, qui voit dans la Pâque juive une imitation de la fête thébéenne du printemps, où l’on offrait un bélier au soleil au moment où il entrait dans le signe de Amun, le dieu-bélier.]

Pour conserver vivant le souvenir de cette grande délivrance, le père de famille en faisait le récit à ses enfants, puis toute l’assistance entonnait le Hallel. Les Psaumes 113 et 114 se chantaient après que la coupe avait circulé pour la seconde fois, immédiatement avant qu’on se mît à manger, et les Psaumes 115 à 118 avant la quatrième coupe.

[On appelle souvent les Psaumes 113 à 118 le grand Hallel. Proprement c’est, le Psaume 136 qui porte ce nom. D’après le Haggada-schel-Pésach, le père de famille en récitait les 26 versets et l’assemblée répondait 26 fois : Sa miséricorde dure éternellement.]

Les sept jours suivants sont appelés les jours des pains sans levain (proprement : Fête des (pains) doux, חג המצות ; Lévitique 23.6-8), parce que pendant toute cette semaine on continuait à ne pouvoir manger aucun pain levé. On offrait en ces jours-là des sacrifices de prospérité et il se peut que l’expression de manger la Pâque s’applique aussi quelquefois aux repas de famille qui suivaient les sacrifices. De même il est probable que l’on renvoyait volontiers à la semaine de Pâque les repas de consécration des premiers-nés, dont il est parlé Deutéronome 15.19 et sq. (§ 136). Le premier et le septième jour de la semaine sainte étaient des jours de repos. Il est vrai que Deut. ch. 16 ne parle de repos qu’à propos du septième jour (comp. Exode 13.6) ; mais cela vient, de ce que la chose n’avait pas besoin d’être dite du premier jour, qui était bien connu pour être le plus solennel de tous. Le Deutéronome observe le même silence quand il parle des fêtes de Pentecôte et des Tabernacles.

D’après Lévitique 23.11, 15, la première gerbe de la moisson devait être tournoyée devant l’Éternel le matin du jour qui suivait le sabbat. Quel sabbat ? Le premier ! disent les Pharisiens ; et de cette manière l’inauguration religieuse de la moisson aurait eu lieu le 16 Nisan. Le sabbat hebdomadaire tombait entre les deux jours de repos du commencement et de la fin de la fête, rapportent d’autres traditions. Mais Josué 5.14, parle décidément en faveur de la première opinion, car nous voyons là que le lendemain du grand jour de Pâque, le peuple mange des produits du pays, ce qui suppose la fête des premiers épis déjà célébrée.

[Hitzig et Hupfeld supposent, mais tout à fait gratuitement, que l’année commençait toujours par un sabbat et que, par conséquent, le premier et le dernier jour de la semaine de Pâque étaient aussi toujours des sabbats. — Quant à l’arrière-Pâque de Nombres 9.11 et sq., nous en avons déjà parlé au § 145.]

chapitre précédent retour à la page d'index chapitre suivant