Théologie de l’Ancien Testament

I. De Jéroboam I à la chute de la dynastie de Homri, de 975 à 884 avant J.-C.

§ 172. De Jéroboam I à Homri.

Jéroboam s’établit d’abord dans l’ancien chef-lieu d’Ephraïm, Sichem (1 Rois 12.25 et sq.).

[C’était là qu’Abimélech, le fils de Gédéon, avait jadis établi sa résidence. Thénius veut que Jéroboam ait ensuite abandonné Sichem pour Pénuël. Mais il est dit simplement que Jéroboam alla fortifier cette ville pour avoir une forteresse de l’antre côté du Jourdain.]

Mais plus tard nous le trouvons à Thirza (1 Rois 14.17), ainsi que ses successeurs immédiats (1 Rois 15.21)f. La première chose que fit le nouveau roi fut d’ajouter le schisme religieux au schisme politique, afin de consolider ce dernier. Cependant, même dans ses innovations, il fut aussi conservateur que possible, il érigea deux sanctuaires nouveaux, mais il plaça le premier à Béthel, l’une des localités qui, vers le sud de son royaume, réveillait le plus d’antiques souvenirs religieux, et le second, vers le nord, à Dan, où une image taillée ne devait pas être trop surprise de se trouver (Juges 18.31). Dans Amos 7.13, le temple de Béthel est appelé le sanctuaire du roi ; nom caractéristique qui montre non seulement que c’était le plus important des deux, mais que dans le royaume des dix tribus la notion de théocratie était complètement éclipsée par celle de religion d’Etat. Ses veaux d’or étaient un retour à Aaron ; 1 Rois 12.28, est une citation de Exode 32.4. Ce n’en était pas moins de l’idolâtrie. Jéhovah, le Saint d’Israël, était rabaissé au niveau d’une force naturelle, et les prophètes ne s’y sont jamais laissé prendre. Plus tard, Guilgal devient le siège d’un culte pareil (Amos 4.4 ; 5.5 ; Osée 4.15 ; 9.15 ; 12.12).

f – On n’a pas encore retrouvé l’emplacement de Thirza, qui était probablement plus au Nord.

[2 Chroniques 11.15, par le d’un culte de boucs institué par Jéroboam. Peut-être un culte pareil existait-il déjà et le roi infidèle ne fit-il que de consacrer cette pratique par son exemple.]

Comme les Lévites et les prophètes établis dans le royaume des dix tribus n’approuvaient pas tout ce que faisait Jéroboam, ils en furent chassés (2 Chroniques 11.13 ; 13.9).

[Ce dernier passage : « Tous ceux qui sont venus pour être consacrés avec un jeune veau et avec sept béliers, ont été choisis pour être sacrificateurs de ce qui n’est pas Dieu, » montre qu’on avait adopté pour la consécration des prêtres des cérémonies qui se rapprochaient beaucoup des ordonnances lévitiques (§ 95).]

Ils émigrèrent en masse dans le royaume de Juda, avec tous les fidèles qui ne voulurent pas prendre part au nouveau culte. Pour les remplacer, on prit d’entre le peuple les premiers venus, tous ceux qui se présentaient (1 Rois 12.31 ; 13.33 ; 2 Chroniques 13.9). Aussi voyez Osée 4.9 ; 6.9 : « les sacrificateurs ayant comploté tuent les gens sur le chemin de Sichem ! » Pour la plus grande commodité de ses sujets, Jéroboam retarda d’un mois la fête des tabernacles (1 Rois 12.32) ; car la moisson ne se terminait pas aussi tôt dans le nord que dans le midi de la Palestine. Au reste, il résulte de plusieurs passages d’Amos et d’Osée qu’il conserva plusieurs des formes du culte mosaïque ; lors même que ces deux prophètes ont écrit un siècle après Jéroboam, il va de soi que les formes légitimes qui existaient de leur temps dans le culte de Béthel, de Guilgal ou de Dan, n’y avaient pas été introduites après Jéroboam, mais qu’elles dataient du moment même de la scission. Osée 2.13, comparé à Osée 10.5 ; Amos 5.21 : 8.5, 10 montrent que les sabbats n’avaient point été abolis, non plus que les nouvelles lunes et les trois grandes fêtes ; c’est ce qui résulte également d’Amos 4.5 ; 5.22, à l’égard des sacrifices mosaïques, et d’Osée 4.7 et sq., à l’égard de la liberté qu’avaient les prêtres de manger une partie des sacrifices pour le péché. Nous avons au § 136 trouvé, dans Amos 4.4, une allusion à la dîme de la troisième année.

[Tout ceci est fort important. Si toutes ces coutumes n’eussent pas eu pour filles l’autorité de l’âge, si elles eussent été d’une introduction récente en Juda, pourquoi Israël les aurait-il conservées ? pourquoi Jéroboam est-il si modéré dans ses innovations ?]

Débarrassé des prêtres et des Lévites, le roi se trouva en face des prophètes. La lutte fut vive. Quelques-uns, se tranquillisèrent en se disant que Jéhovah était pourtant encore la divinité nationale, que dans le culte nouveau l’on avait conservé bien des formes légitimes ; peut être aussi la peur se mit-elle de la partie.

[Il est probable que le culte du veau d’or finit par avoir aussi des prophètes. Mais ce qu’on a peine à concevoir, c’est que Eichhorn ose dire que les prophètes ne se sont pas élevés contre le culte de Béthel et de Dan : voyez aussi Vatke dans sa Religion de l’A. T., page 421.]

Voyez, par exemple, le vieux prophète de Béthel (1 Rois 13.11). Mais le prophète anonyme de 1 Rois 13.1, ne manque pas de courage, et, ce premier avertissement étant demeuré inutile, Ahija est chargé d’annoncer à Jéroboam la ruine de sa maison, et il le fait comme naguère il lui avait annoncé son élévation au trône (1 Rois 14.7). — Nadah, fils de Jéroboam, fut tué avec toute sa famille après un règne de deux ans, par Bahasça, dont le fils Ela fut également renversé par un conspirateur après deux ans de règne. La seconde dynastie eut donc absolument le même sort que la première, car, est-il dit, Bahasça suivit le train de Jéroboam et son péché. Telle est désormais l’expression consacrée pour désigner un mauvais règne. L’extermination de la famille de Bahasça avait été annoncée par le prophète Jéhu, qui la présente non seulement comme la suite de son idolâtrie, mais encore comme le châtiment de sa conduite à l’égard de la famille de Jéroboam (1 Rois 16.7). En effet, c’est en vain que l’on est une verge dans la main de Dieu ; quand on n’agit pas avec foi, quand on ne se livre pas pleinement à Dieu, quand on se laisse aller à sa passion, on est puni à son tour pour le mal qu’on a fait de la part de Dieu. — Zimri, l’assassin de Ela, ayant trouvé la mort la septième année de son règne dans son palais embrasé, le royaume fut sur le point de se partager une fois de plus. Une partie du peuple se déclara pour Tibni, l’autre pour Homri. Ce fut ce dernier qui l’emporta (929 av. J.-C), et sa famille demeura au pouvoir 40 ans.

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