Théologie de l’Ancien Testament

§ 187. Guédalja et le reste du peuple.

Nébukadnézar laissa en Palestine un certain nombre de Juifs, parmi lesquels Jérémie, qu’il fit traiter avec toutes sortes d’égards (Jérémie 39.11-14 ; 40.1-6). Nébusaradan leur distribua des champs et des vignes (Jérémie 39.10), et le roi leur donna pour gouverneur Guédalja, le fils de ce Ahikam qui était un homme haut placé du temps de Josias et qui avait délivré Jérémie de la main de ses ennemis, sous Jéhojachim (Jérémie 26.24,16). Guédalja était bien probablement de ceux qui, avec Jérémie, avaient regardé la révolte contre les Chaldéens à la fois comme un grand péché et comme une grande faute, et qui avaient recommandé à leurs concitoyens la soumission aux maîtres que Dieu leur avait donnés. Nébukadnézar connaissait bien ce parti et savait qui s’y rattachait ; de là ses égards pour Jérémie et sa confiance en Guédalja.

[Quelques rabbins ont cherché à expliquer Ia confiance que Nébukadnézar témoigne à Guédalja, par le fait qu’il aurait passé aux Chaldéens avant la prise de Jérusalem. Mais c’est là une pure supposition et une supposition inutile.]

Le nouveau gouverneur s’établit à Mitspa, non loin de Jérusalem, avec une petite garnison chaldéenne (Jérémie 41.3). On a conclu de Jérémie 41.5, qu’à cette occasion on se hâta d’établir à Mitspa un lieu de culte ; mais c’est tout simplement des ruines du temple de Jérusalem qu’il est question dans ce passage.

Quand l’armée ennemie se fut retirée, un grand nombre de Juifs que la guerre avait dispersés dans les pays d’alentour rentrèrent en Judée. Plusieurs étaient des officiers qui avaient porté les armes contre Nébukadnézar. Ils se rendirent à Mitspa, où Guédaljales accueillit avec bienveillance et les assura de sa protection pour le cas où ils promettraient fidélité aux Chaldéens. Une notable partie du peuple aurait pu jouir ainsi de tous les bienfaits de la paix sur le sol de la patrie, si malheureusement un de ces officiers, Ismaël, fils de Nathanja, de race royale, ne s’était mis, à l’instigation du roi ammonite Baalis, à la tête d’une conspiration contre Guédalja, lequel, après une courte lieutenance de deux mois, fut assassiné avec les Chaldéens et les Juifs qui tenaient pour lui. C’était pendant un repas auquel il avait convié entre autres tous les conjurés. Il avait été averti que quelque chose se tramait contre lui, mais il n’avait pas cru possible une trahison aussi noire et il tomba sous les coups de ses convives. Voyez 2 Rois 25.25, et surtout Jérémie ch. 41.

[Josèphe (Ant. X, 9, 3) prête à Ismaël des vues d’ambition personnelle et le soupçonne d’avoir tué Guédalja pour s’élever à sa place. Je crois que son seul mobile fut sa haine pour l’ami des Chaldéens. Quant au roi des Ammonites, il était probablement mû par un double sentiment : haine pour les Juifs et inquiétude à la vue de cette Judée réduite tout près de lui en province chaldéenne. Au commencement du règne de Sédécias, Baalis, le roi des Ammonites, figure sans doute au nombre des alliés de Juda (Jérémie 27.3), mais il suffit de lire Ézéchiel 25.2 et sq., pour se convaincre que les Ammonites savaient haïr ceux qu’ils feignaient d’aimer.]

Pour échapper à la vengeance de Nébukadnézar les malheureux Juifs, qui venaient à peine de reprendre haleine, s’enfuirent en Egypte. Jérémie, après avoir vainement cherché à les en dissuader, les y accompagna ; il eut la douleur de les y voir se livrer tout de plus belle à l’idolâtrie, et pousser la folie jusqu’à attribuer leurs malheurs au fait qu’ils avaient été infidèles aux idoles (Jérémie 44.17 et sq.).

[C’est en Egypte bien probablement qu’il mourut, lapidé par ses compatriotes, à ce que rapportent les Pères. Autant il fut haï et persécuté de son vivant, autant plus tard sa mémoire fut vénérée. Lisez le songe de Judas Macchabée (2 Maccabées 15.14) et Matthieu 16.14.]

« Nébukadnézar viendra et frappera l’Egypte », avait dit Jérémie (Jérémie 43.8-13 ; 44.30). Ses prédictions s’accomplirent. Cinq ans après la ruine de Jérusalem, Nébukadnézar envahit l’Egypte, en tua le roi et en emmena une foule de Juifs (Jos. Ant.10.9.7). Peut-être même en s’en retournant à Babylone emporta-t-il le reste des Juifs qui pouvaient encore se trouver en Palestine (Jérémie 52.30). Ce qu’il y a de certain, c’est que la Judée ne renferma plus désormais (Zacharie 7.14 ; 2 Chroniques 36.21) que des Philistins et des Iduméens. Ces derniers en particulier, qui convoitaient depuis longtemps ce territoire (Ézéchiel 35.10), s’établirent si solidement dans le midi de la Judée que, non seulement du temps des Macchabées, mais même sous Hérode, Hébron faisait partie de l’Idumée (3 Esdras.4.50 ; Jos. Bell. jud. 4.9.7).

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