Le jour éternel

V.
La lumière des siècles à venir

Lorsque nous reçûmes le témoignage du Père touchant Celui qui est « la lumière du monde, » nous devînmes des « enfants de lumière et du jour. » L’acte qui nous mit en possession du salut, et par lequel nous avons accepté le message de la grâce, changea tout à la fois notre position et notre avenir, modifia nos rapports avec ce monde-ci, et nous mit en relation avec le monde à venir. Nous fûmes rendus « participants de Christ (Hébreux 3.14), c’est-à-dire cohéritiers ou copartageants avec lui dans tout ce qu’il est et dans tout ce qu’il a. Sa lumière devint notre lumière ; plus que cela : il devint lui-même notre lumière, absorbant toutes nos ténèbres et faisant éclater sur nous sa splendeur infinie. Ainsi, la lumière devint notre heureux partage, comme elle avait été celui des Israélites ; car « il y eut de la lumière pour eux dans leurs demeures » (Exode 10.23). Goscen devint le pays de notre choix, parce que c’était la région de la lumière, et nous fûmes ainsi séparés de cette Egypte spirituelle où il n’y a que ténèbres, et ténèbres tellement épaisses, « qu’on peut les toucher à la main. »

Nous sortîmes donc du « royaume des ténèbres. » Dieu nous appelant des ténèbres à sa merveilleuse lumière, nous rompîmes avec le prince des ténèbres de ce siècle. « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière » (Ésaïe 9.2). C’est, en effet, une « grande » et « merveilleuse » lumière ; elle peut bien nous remplir d’étonnement et de joie. Nous l’avons trouvée admirable en elle-même, et plus brillante que ne le serait une lumière sept fois plus grande que celle de la nature. Ce n’est que merveilles de tous côtés, et des merveilles d’autant plus étonnantes que l’œil n’avait point vu ni l’oreille entendu rien de semblable. Mais ce qui est plus extraordinaire encore, c’est que ces merveilles qui vous remplissent d’admiration, ne sont que le commencement ou comme l’ombre d’autres merveilles beaucoup plus grandes qui nous seront pleinement dévoilées dans les siècles à venir.

Le Saint-Esprit, en rendant aux facultés de l’âme leur transparence primitive, les prépare ainsi à recevoir la lumière qu’il veut répandre. Cette lumière pénètre toutes les parties intérieures de l’homme renouvelé ; elle ne porte pas seulement la joie, mais la santé dans ses rayons (Malachie 4.2). « Les yeux de notre entendement sont éclairés » (et non pas simplement ouverts), et par ce moyen nous savons quelle est l’espérance à laquelle Dieu nous appelle, et quelles sont « les richesses de la gloire de son héritage dans les saints » (Éphésiens 1.18). Il semble que l’un des grands objets pour lesquels Dieu nous a éclairés, soit de nous montrer toute la grandeur de notre « espérance, » et tout ce qu’il y a de glorieux dans « l’héritage » qu’il nous destine. Contempler cette gloire dont nous sommes les héritiers malgré notre indignité, c’est ce qui constitue l’un des plus nobles exercices de notre esprit renouvelé et éclairé.

Mais il y a plus que cela. Le feu sacré qui s’alluma d’abord dans nos âmes au contact tout-puissant de l’Esprit, est devenu comme un soleil ; car il est écrit : « Dieu, qui a dit que la lumière resplendit des ténèbres, est celui qui a relui dans nos cœurs pour manifester la connaissance de la gloire de Dieu en la face de Jésus-Christa » (2 Corinthiens 4.6). Ces paroles expriment bien moins l’idée d’une lumière qui a lui sur nous, ou au dedans de nous, que celle d’un foyer qui s’est allumé en nous pour communiquer aux autres la lumière de la connaissance de sa gloire ; de sorte que nous sommes, à quelque degré, ce que Christ est lui-même, « la lumière du monde » (Matthieu 5.14). Le dessein de Dieu est que nous reluisions comme des étoiles ou des soleils, qui, tournant chacun dans son orbite et poursuivant sa carrière, doivent éclairer l’univers à jamais et manifester une gloire comme celle du Fils unique du Père, « le Christ de Dieu. » Autrefois nous étions ténèbres, mais maintenant nous sommes lumière au Seigneur (Éphésiens 5.8), comme si nous étions absolument un composé de lumière par opposition aux ténèbres qui nous enveloppaient de toutes parts.

a – Les mots πρὸς φωτισμὸν τῆς γνώσεως s’expliquent naturellement par ceux du verset 4 : φωτισμὸν εὺαγγελιου, et ont rapport à la lumière qui se manifeste par nous en conséquence de ce que Dieu a relui dans nos cœurs. Ce qui vient à la suite nous confirme dans cette pensée : « Mais nous avons ce trésor dans des vases de terre, etc. ; » paroles qui expriment l’idée de manifestation bien plus que celle de possession.

Cette lumière ne change pas. « Elle augmente son éclat jusqu’à ce que le jour soit en sa perfection » (Proverbes 4.18). Elle ne peut s’éteindre comme les lampes des vierges folles ; elle ne redoute pas les orages qui agitent ce monde. « La lumière des justes sera gaie, » a dit Salomon ; « mais la lampe des méchants sera éteinte » (Proverbes 13.9). Cette lumière console et réjouit ; nous triomphons en elle par la certitude qu’elle ne sera jamais éteinteb. » Demeurant dans la lumière, répandant la lumière, nous brillerons à jamais.

b – Le terme qui est traduit par « sera gaie, » est rendu dans la version des Septante par celui de « dure à toujours. » Le contexte indique que c’est là le véritable sens. C’est un terme d’opposition entre le juste et le méchant. Le soleil « s’égaye comme un homme vaillant pour faire sa course » (Psaumes 19.5), non seulement à cause de son excellence et de sa splendeur, mais aussi parce que sa lumière « dure à toujours. »

« La lumière est faite pour le juste » (Psaumes 97.11). Elle est comme une semence que l’on aurait déposée en terre, et qui, au bout d’un certain temps, bourgeonnerait et fleurirait. Son excellence serait d’autant plus manifeste qu’elle aurait été cachée pour un temps dans la terre. La dispensation actuelle marque le temps des semailles. « Ce que nous serons n’est pas encore manifesté. » La semence est encore ensevelie dans la terre, ou bien elle paraît tout au plus en herbe ; quoi qu’il en soit, elle est excellente et infiniment précieuse. Et si, dans son état d’imperfection, elle a tant de qualité, quelle ne sera pas sa perfection au jour de la grande moisson ! Nous participons à « l’héritage des saints dans la lumière » (Colossiens 1.12). Dieu, qui nous destine un tel héritage, veut aussi nous rendre capables d’en jouir. Il nous a formés pour cela. Il y a donc ressemblance ou adaptation entre le possesseur et l’objet possédé. La brillante clarté du royaume ne conviendrait pas à un enfant des ténèbres ; par la même raison, un enfant de lumière ne saurait être pleinement satisfait, s’il n’était parfaitement assimilé à cet « héritage dans la lumière. » Les arrhes de l’héritage que nous recevons d’abord, sont proportionnés au degré de lumière qui nous est communiqué, lorsque nous devenons un avec Celui duquel il est dit : « En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes » (Jean 1.4).

Quoi qu’il en soit, ce sont les arrhes que nous possédons, ni plus ni moins. D’où il suit que la plus grande partie de l’héritage est encore à venir ; mais nous sommes assurés que quand il plaira au Seigneur de le manifester, nous le posséderons dans toute sa totalité et dans toute sa magnificence. Ce que nous en réalisons maintenant est bien incomplet ; nous n’avons qu’une connaissance partielle et tout à fait imparfaite de cet amour qui « surpasse tout entendement, » ou de cette gloire qui doit être révélée en nous. Comme l’aube du jour, nous tirons toute notre lumière d’un soleil qui ne s’est pas encore levé ; et cette lumière réfléchie, bien qu’elle soit le signe certain du jour qui doit paraître dans toute sa splendeur, ne nous donne cependant qu’une idée imparfaite de ce que seront le ciel et la terre alors éclairés par le soleil lui-même.

C’est bien souvent qu’il est fait mention de cette lumière future que nous attendons au milieu des ombres et des combats de la terre. Nos yeux s’y attachent, et l’espérance que nous en avons, nous console au temps de la détresse, nous soutient et nous encourage au milieu de toutes nos craintes et de nos défaillances.

1° Nous avons « la lumière de l’Eternel » (Ésaïe 2.5). Elle est ainsi appelée, non seulement parce qu’elle procède de Jéhovah lui-même et qu’elle n’est rendue brillante que par lui, mais surtout parce qu’elle fait contraste avec celle de l’homme. Le monde marche depuis longtemps « à la lueur de son propre feu, et dans les étincelles de son propre embrasement » (Ésaïe 50.11). Or, ces étincelles qu’ils ont eux-mêmes allumées, cette lumière confuse dont ils se glorifient sera bientôt éteinte, et « ils mourront dans les tourments, » tandis que nous vivrons et marcherons en la pure et resplendissante lumière de Jéhovah. Fort heureusement qu’il ne sera plus question désormais de la lumière, de la sagesse, des systèmes, des inventions de l’homme, qui reproduisent tout au plus l’ombre d’un clair de lune. Nous en sortirons définitivement pour entrer dans cette région nouvelle où Dieu lui-même, dans la plénitude de sa lumière, de son amour et de sa gloire, sera tout en tous, la lumière de Jéhovah étant là dans sa plénitude il est évident qu’aucune erreur, aucune incertitude, aucun doute, aucune chute ne sera plus possible. Nous en serons affranchis aussi véritablement et aussi entièrement que nous serons exempts de toute peine. Il n’a pas encore paru le jour duquel nous pouvons dire : « Si quelqu’un marche de jour, il ne bronche point, parce qu’il voit la lumière de ce monde » (Jean 11.9) ; car, de tous côtés, vous voyez les hommes marchant de nuit et bronchant, « parce qu’il n’y a point de lumière avec eux. » Mais ce jour éternel ne se fera pas longtemps attendre ; et alors ce qui est écrit touchant le juste qui demeure dans la lumière, sera pleinement vérifié : « Il n’y a rien en lui qui le fasse broncher » (1 Jean 2.10).

Il ne faudrait pas cependant que, sous le prétexte d’un manque de lumière, nous cherchions à justifier nos chutes, nos péchés ou notre incrédulité ; car il y a assez de lumière dans le temps actuel, pour que nous soyons préservés de toutes ces choses ; autrement le Fils de Dieu serait venu en vain. Mais quand la pleine lumière sera manifestée, l’offense sera tout autant impossible qu’elle est inexcusable aujourd’hui. Toutes les autres lumières qui ne sont pas la vraie lumière, ressemblent à ces météores qui sont sans principe et sans but, dont l’éclat passager nous trompe ou nous égare ; tandis que la lumière de Jéhovah n’a rien de douteux ou d’incertain, elle ne nous induit jamais en erreur sur les objets qu’elle nous représente. Et lorsqu’elle développera devant nous toutes les gloires de l’éternité et nous y rendra profondément sensibles, nous n’aurons pas l’ombre d’incertitude à cet égard ; enfin nous ne serons plus comme ceux qui songent. Il y aura de l’étonnement, peut-être ; mais pas d’illusion. Nos yeux, parfaitement dessillés, ne nous tromperont point, et la réalité de nos impressions se démontrera bien mieux que ces paroles ne peuvent le rendre :

« C’est bien ici l’air que je respire, et c’est bien là le soleil qui m’éclaire. — Voilà le trésor qu’il m’a donné ; je le sens comme je le vois. »

En vérité, peut-on concevoir jusqu’à quel point cette lumière de Jéhovah est vraie, réelle, excellente et immuable ? Elle fait plus que compenser les tristesses qui accompagnent la vie la plus sombre sur cette terre. Comme la source de la vie est par devers le Seigneur, c’est aussi « par sa clarté que nous sommes éclairés » (Psaumes 36.9).

Elle est appelée « la lumière des vivants » (Psaumes 66.13). Ce n’est pas seulement parce qu’elle procède de Celui qui est notre vie, ou parce que c’est la vie qui nous donne la lumière, ainsi qu’elle est encore appelée : « la lumière de la vie » (Jean 8.12) ; mais parce qu’elle est véritablement la vie des hommes ressuscités. Sans la restreindre absolument à un seul point de vue, on peut dire que l’expression « la lumière des vivants » a plus particulièrement rapport à la résurrection. Si l’on fait attention aux paroles qui précèdent, il est évident qu’elle doit être prise dans ce sens : « Tu as délivré mon âme de la mort. » Ces paroles de David expriment la condition d’un homme qui est ressuscité avec Christ ; il parle comme s’il en avait conscience lui-même. « Celui qui croit en moi, vivra quand même il serait mort. » Mais il parle aussi comme un homme qui marche dans un chemin raboteux, et qui est sujet à broncher. De là, il ajoute : « Ne garderas-tu pas mes pieds de broncher ? » Il n’oublie pas la bonté qui l’a déjà secouru et délivré, et il est assuré que Celui qui a accompli l’un, accomplira aussi l’autre. Puis, il compte sur ce glorieux résultat de la délivrance et de la protection qu’il réclame. « Afin que je marche devant Dieu en la lumière des vivants. » C’est éclairé par la lumière de la résurrection qu’il porte ses pensées en avant. Sa prière est qu’il soit « gardé par la puissance de Dieu, par la foi, afin d’obtenir le salut qui est prêt à être révélé dans les derniers temps » (1 Pierre 1.5) ; et pour cela il fait appel à l’amour et à la fidélité de ce Dieu qui a déjà tant fait pour lui. Celui qui m’a vivifié lorsque j’étais mort dans mes fautes et dans mes péchés, pourrait-il m’abandonner dans ce sombre sentier ? Ne me conduira-t il pas plutôt à la lumière et à la gloire de la résurrection des justes ?

Ainsi, ce que nous attendons, c’est la lumière de la résurrection, la lumière des vivants. C’est bien véritablement une « lumière parfaite » comme l’amour dans lequel marcheront les ressuscités ; et de même que « l’amour parfait » bannit toute crainte, la lumière parfaite dissipera toutes les obscurités. Maintenant nous n’aimons et nous ne voyons qu’imparfaitement ; notre connaissance est également bornée. « Mais quand la perfection sera venue, alors ce qui est en partie sera aboli. Car nous voyons maintenant par un miroir obscurément, mais alors nous verrons face à face ; maintenant je connais en partie, mais alors je connaîtrai selon que j’ai été aussi connuc  » (1 Corinthiens 13.10, 12).

c – N’est-ce pas la lumière de la résurrection dont parle Job 33.30 : Afin que « pour retirer son âme de la fosse elle soit éclairée de la lumière des vivants. » Tout le passage vous frappe à cause du rapport qu’il a avec 1 Jean 1.9 : « Si nous confessons nos péchés, etc. » Dieu nous y est représenté comme celui qui regarde avec pitié les enfants des hommes, se rendant attentif à leur confession. Lorsque, quelqu’un dit : « J’ai péché, j’ai renversé le droit, et cela ne m’a point profité, » « Dieu est fidèle et juste pour lui pardonner ses péchés. » Il le délivre et le fait passer de la mort à la vie. Etant donc délivré de la fosse et vivifié avec Christ, l’homme marche en la lumière des vivants.

La lumière est nécessaire à la communion des saints. « Si nous marchons dans la lumière, comme Dieu est en la lumière, nous avons communion l’un avec l’autre » (1 Jean 1.7). Les ténèbres, du moins dans le sens que nous l’entendons du péché, ont pour effet de séparer et de désunir. La lumière, au contraire, est ce qui nous rapproche et nous unit les uns aux autres comme membres de la même famille. Nous en faisons l’expérience en proportion de ce que nous sortons des ténèbres, et que nous participons à la lumière. Le principe d’assimilation et de concentration est dans la lumière. Nous en avons la démonstration dans les faits qui s’accomplissent même ici-bas. Si donc notre marche dans la lumière produit une sainte communion malgré l’éloignement et l’oubli qui existe au milieu de nous, quelle ne sera pas notre communion dans cette terre ou l’éloignement et l’oubli ne seront plus ? L’innombrable multitude dont se composera la société des enfants de lumière, sera tellement pénétrée de cette lumière qu’elle formera comme une masse réunie de splendeur. Unis entre eux, et unis au Fils éternel de Dieu d’une manière indissoluble, ils jouiront de la communion la plus intime, de telle sorte que rien ne troublera jamais ces rapports fraternels.

C’est une sainte lumière. L’opposition que l’apôtre constate (Jean 1.7-8) entre les ténèbres et la lumière, par rapport au péché et à la sainteté, nous montre que la sainteté de Dieu a pour symbole la lumière. Quel symbole pouvait mieux lui convenir ? La lumière est, de toutes les choses qui ont été créées, la plus douce et la plus pure. Nous ne pouvons tacher ou souiller un seul de ses rayons. Non seulement elle ne peut se corrompre, mais elle communique sa pureté à d’autres objets. La toile aux couleurs sombres blanchit au soleil, et emprunte ainsi la pureté de la lumière dont elle subit l’influence. Il en est de même de la lumière qui nous attend dans le Royaume. Non seulement elle est sainte par elle-même, mais elle est sanctifiante dans ses effets de sorte qu’en vivant au milieu de ses gloires, nous en recevrons le pur et divin éclat ; en d’autres termes, nous lui serons parfaitement assimilés. Les sombres tristesses de la vie présente ont sans doute la tendance de nous purifier, de telle sorte, que les moments les plus sombres de cette vie sont souvent ceux qui nous font faire le plus de progrès dans la sainteté. Néanmoins, le concours de cette lumière du monde à venir sera jugé d’autant plus nécessaire pour le perfectionnement et la perpétuité d’une telle vertu, que les ténèbres du présent siècle mauvais auront déjà contribué à son développement et à sa maturité ici-bas.

C’est la lumière de l’allégresse. N’est-ce pas avec raison que l’on dit de notre belle nature que ce qui en rend l’aspect si charmant, c’est la lumière même ? Non seulement la lumière est le sujet de ses doux transports, mais c’est l’agent dont Dieu se sert pour répandre la joie dans tout l’univers. Tous les autres éléments, dans la nature, ne sauraient produire une plus grande somme de joie. Oh ! combien notre terre ne doit-elle pas à la lumière du soleil ! Est-il une ombre, si obscure qu’elle soit, dans les lieux les plus profonds de la forêt, comme dans les régions les plus intérieures de l’âme angoissée qu’elle ne puisse dissiper ? Et n’est-il pas vrai que la lumière est douce, et qu’il « est agréable aux yeux de voir le soleil ? » (Ecclés.10.7) En cet endroit, où Dieu, s’adressant à Israël, parle du soleil qu’il fera lever sur lui aux derniers jours, il ajoute comme une conséquence : « Les jours de ton deuil seront finis » (Ésaïe 60.20) ; et quand il veut lui rappeler une de ses délivrances passées, voici comment il exprime sa béatitude : « Il y eut pour les Juifs de la prospérité, de la joie, de la réjouissance et de l’honneur » (Esther 8.16). Lorsque, dans les temps à venir, toutes les ombres auront disparu, quelle joie inexprimable n’y aura-t-il pas parmi les habitants de ce pays où la lumière brillera à jamais ! Si un rayon du soleil visible produit un si agréable effet, quelle expression de joie n’y aura-t-il pas en la présence du « Père, » en présence, dis-je, de Celui qui est « la lumière même et en qui il n’y a nulles ténèbres ? » (1 Jean 1.5) Il faut que ce soit tout aussi véritablement la lumière de la joie que c’est la lumière de l’amour et de la sainteté.

C’est une lumière unique dans sa splendeur. Voici ce qui est écrit au sujet de la Nouvelle Jérusalem : « Sa lumière était semblable à une pierre très précieuse, comme à une pierre de jaspe, tirant sur le cristal » (Apocalypse 21.11). Nous ne saurions dire ni bien comprendre tout ce qu’il y a de caractéristique dans cette divine splendeur ; cependant la métaphore qui est ici employée dans ce passage de l’Apocalypse, paraît désigner évidemment une lumière portée à son plus haut degré de perfection, mais une lumière qui est merveilleusement attrayante. Ce qu’il y a de vif, de subtil ou de nuisible dans la lumière naturelle n’existe pas dans celle-ci. Elle est douce et moelleuse, et tandis qu’elle reproduit la couleur de chair de l’humanité, elle n’en conserve pas moins, comme la couleur du jaspe, sa transparence cristalline. Cette couleur particulière attribuée à la lumière de la Cité est attribuée ailleurs à Christ lui-même. « Celui qui y était assis était semblable à une pierre de jaspe et de sardoine » (Apocalypse 4.3). La lumière que nous aurons en partage est donc cette gloire même qui appartient spécialement à l’homme-Dieu, — la « Parole faite chair. » Ce n’est pas la gloire immédiate de la Divinité, mais un mélange brillant et merveilleux qui tient à la fois de l’humain et du divin, partie créée et partie incréée, partie céleste et partie terrestre. Ce resplendissement, fruit de l’incarnation, paraîtra dans tout l’univers, pénétrant toutes choses d’une gloire, d’une beauté qui eussent été voilées aux regards de l’homme, et qu’il nous eût été également impossible de concevoir, si le Fils de Dieu ne s’était pas uni à notre humanité : C’est pourquoi, pendant qu’il est dit de la Cité, que « la clarté de Dieu l’a éclairée, » le Saint-Esprit ajoute : « Et l’Agneau est son flambeau » (Apocalypse 21.23). Aucune autre lumière ne pourrait nous convenir comme celle-ci, même dans le Royaume. De quelle lumière sont éclairés les anges qui n’ont jamais péché, c’est ce que nous ignorons ; mais la lumière de l’Agneau est celle qui seule peut remplir notre destination. C’est la lumière des rachetés. A cette lumière, nos yeux se sont ouverts pour la première fois, lorsque nous avons cru ; nous l’avons trouvée absolument nécessaire et parfaitement propre à répandre la vie et la paix dans nos âmes. De quelle consolation et de quelle joie ne devrait-elle pas nous remplir, même pendant que nous sommes encore dans cette vallée d’humiliation ! C’est cette clarté de l’Agneau qui nous saluera au matin de la résurrection, quand nous serons réveillés pour aller à la rencontre du Seigneur, en l’air. C’est la lumière d’un soleil radieux et doux comme celui de l’amour incarné, qui reluira sur nous, et nous enveloppera de tout l’éclat de sa magnificence ; une lumière qui, bien que découlant du trône, ne laissera pas que de nous rappeler la croix ; une lumière qui, de son siège élevé, à savoir la Nouvelle Jérusalem, nous ramènera infailliblement, par sa couleur nuancée, à Bethléhem, à Gethsémané, et à Golgotha.

C’est une lumière éternelle. Quoique prononcées en vue d’Israël, ces paroles du prophète ne sont pas moins applicables à l’Eglise :

« Tu n’auras plus le soleil pour la lumière du jour ;
Et la lumière de la lune ne t’éclairera plus ;
Mais l’Eternel te sera pour lumière éternelle ;
Et ton Dieu pour ta gloire.
Ton soleil ne se couchera plus ;
Car l’Eternel te sera pour lumière éternelle ;
Et les jours de ton deuil ne seront plus » (Ésaïe 60.19-20).

Nous n’avons pas ici seulement une promesse générale à l’égard de cette lumière, comme si le prophète se fût borné à dire : « Tu seras éclairé à toujours, et aucune ombre ne passera plus sur toi. » Ce qui fait le sujet principal de cette promesse, c’est que Dieu lui-même est la lumière éternelle. Il n’est pas dit simplement que Jéhovah nous donnera sa lumière, mais qu’il sera lui-même notre lumière à jamais. « L’Eternel Dieu nous est un soleil » (Psaumes 84.11). Ce soleil n’a point de coucher. Outre qu’il ne sera jamais remplacé par un autre, il ne se couvrira jamais d’un voile ; il n’y aura plus d’éclipse, plus aucun nuage qui puisse le dérober à nos yeux. Le même soleil qui se lève dès le matin continuera à nous éclairer d’âge en âge. Il sera notre lumière perpétuelle, et si telle est la lumière de l’éternité, quel jour ne se prépare-t-il pas pour nous ! Les premières lueurs qui ont paru au travers de nos pesantes ténèbres sont vraiment remarquables ; la pleine manifestation de cette lumière, annoncée par la joyeuse matinée, sera bien plus remarquable encore ; mais la lumière permanente se répandant partout comme en plein midi, et donnant à tous la bienheureuse assurance d’une durée éternelle, sera incomparablement plus grande. En ce jour-là, les soixante et dix années passées sons les tentes de Kédar, ce temps de notre séjour temporel, « oui, ce peu de temps » de lutte et de fatigue ici-bas, nous paraîtra comme un rien. O héritiers du royaume, enfants du monde à venir, sachez quelle est votre espérance ! Regardez à travers le nuage qui couvre votre habitation, car le jour éternel est là. Ce jour de gloire vous appartient, et vous en voyez les premières lueurs. Il ne vous convient pas de perdre courage ou de désespérer. Vous devez savoir endurer la croix à cause de la joie qui vous est proposée. Oubliant les choses qui sont derrière, vous devez vous avancer vers celles qui sont devant, et courir vers le prix de la céleste vocation qui est de Dieu en Jésus-Christ. Ne consultez point la chair et le sang. Ne vous plaignez pas des ennuis ni de la longueur du chemin. La nuit est passée, et le jour est approché.

O hommes de la terre, enfants du présent siècle mauvais, quel avenir vous attend ! Une nuit éternelle ! les ténèbres accablantes du dehors ! Comment les supporterez-vous ? Pensez-vous que vos joies charnelles du temps présent fassent compensation pour l’angoisse qui va venir ? L’hilarité d’une heure vous dédommagera-t-elle d’un deuil éternel ? Donnez gloire à l’Eternel votre Dieu, avant qu’il fasse venir les ténèbres et avant que vos pieds bronchent sur les montagnes couvertes de ténèbres ; vous attendrez la lumière, et Dieu la changera en une ombre de mort, en une profonde obscurité (Jérémie 13.16). « Pendant que vous avez la lumière, croyez à la lumière, afin que vous soyez des enfants de lumière ! » (Jean 12.36)

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