Traité de la vérité de la religion chrétienne

13. Où l’on examine les prophéties qui marquent ce qui est arrivé au Messie après sa mort.

Il reste maintenant que nous trouvions dans les oracles des prophètes la sépulture de Jésus-Christ, sa résurrection, son ascension, et sa séance à la droite du Père.

Sa sépulture est clairement exprimée par ces paroles du ch. 52 d’Esaïe : Or, on avait ordonné son sépulcre avec les méchants ; mais il s’est trouvé avec le riche dans sa mort. Sur quoi nous ne nous arrêtons point, parce que nous avons déjà expliqué cet oracle.

Pour sa résurrection, il est impossible de ne pas l’insérer des écrits des prophètes, lorsque, d’un côté, ils Bous enseignent que le Christ doit être retranché de la terre des vivants, souffrant une mort honteuse et maudite ; et que, de l’autre, ils lui attribuent une gloire et une domination éternelles, étant absolument impossible d’accorder ces deux choses, si ce n’est par sa résurrection.

Mais afin qu’on ne doute point que ce ne soit du même Messie que les prophètes ont prédit qu’il souffrirait la mort, et qu’il obtiendrait un empire éternel, on doit se souvenir que, dans le chapitre LU d’Esaïe, il est dit d’une même personne, que nous avons déjà prouvé être le Messie, qu’elle mettrait son âme en oblation pour le péché, et qu’ensuite elle se verrait de la postérité, et ferait prospérer le bon plaisir de Dieu, etc. ; ce qui suppose nécessairement une résurrection.

Et c’est ce que David, type du Messie, exprime excellemment au psaume 16, en ces termes : Car tu n’abandonneras point mon âme au sépulcre, et ne permettras point que ton saint, ou ton bien-aimé, ou ton débonnaire, sente corruption. Il paraît encore ici que l’esprit prophétique qui animait le prophète, donnait une étendue à ses conceptions et à ses paroles, qui empêche qu’on ne puisse les rapporter à David seul ; car, que voudrait dire le prophète, si cela était, que son âme, qui se prend ici pour le corps, ne serait point mise au sépulcre, et que, pour être l’Oint du Seigneur, son saint ou son bien-aimé, il éviterait la mort ? Mais y aurait-il rien de plus faux que cette pensée, puisque David est mort véritablement, et que son sépulcre a demeuré parmi les Juifs jusqu’au temps de saint Pierre, qui employait ce même raisonnement pour persuader les Juifs incrédules ? Cette preuve est d’autant plus démonstrative contre les rabbins, qu’ils reconnaissent que David a été le type du Messie, et que plusieurs choses sont attribuées à celui-là qui ne conviennent qu’à celui-ci ; mais pour les autres incrédules, qu’ils voient la résurrection de Jésus-Christ clairement prédite au 52me chapitre d’Esaïe.

L’ascension de Jésus-Christ, et sa séance à la droite de Dieu, ne sont pas marquées dans les oracles des prophètes avec moins de clarté ; mais, comme le dessein de rapporter tous ceux qui marquent ce double événement nous mènerait trop loin, nous nous contenterons du psaume 110, parce qu’il est tout à fait remarquable, et que d’ailleurs il n’est sorte d’échappatoire que les rabbins n’aient inventé pour en détourner le sens, et surtout pour expliquer ces paroles : Le Seigneur a dit à mon Seigneur : Sieds-toi à ma droite jusqu’à ce que j’aie mis tes ennemis pour le marchepied de tes pieds, en sorte qu’elles ne soient point favorables à notre Messie.

Les uns veulent que ce psaume ait été composé par Melchisédech sur le sujet de la victoire qu’Abraham remporta sur les rois qui avaient emmené Lot prisonnier ; comme s’il y avait dans le texte : L’Éternel a dit à mon Seigneur : Abraham, sieds-toi à ma droite jusqu’à ce que j’aie, etc., comme si Melchisédech, sacrificateur du Dieu souverain, bénissant Abraham en cette qualité, et par conséquent plus grand qu’Abraham à cet égard, pouvait appeler raisonnablement ce patriarche son Seigneur ; ou comme si ces paroles : l’Éternel transmettra de Sion le sceptre de ta force, convenaient au temps d’Abraham, où l’on ne faisait pas encore mention de Sion, ni de sceptre, marque de royauté.

Les autres prétendent que ce psaume a été composé par Eliéser, serviteur d’Abraham, et sont réfutés par cette dernière considération, aussi bien que par tous les traits de la prophétie.

Les autres disent, avec aussi peu de vraisemblance, que David composa ce cantique dans la vue du roi Ezéchias, dont il prédisait la gloire ; comme s’il y avait quelque apparence à dire que David appelle Ezéchias son Seigneur.

Enfin, il y en a qui soutiennent que ce psaume a été composé sur le sujet de David par quelque lévite qui voulut publier sa gloire et sa grandeur, et, comme veulent quelques autres, à l’occasion du danger que courut David lorsque Abisçaï le secourut et le garantit de la javeline du Philistin Jiscbibenodb ; ce qui obligea les gens de David à jurer, disant : Tu ne sortiras plus avec nous en bataille, de peur que tu n’éteignes la lampe d’Israël.

b2 Samuel 21.16-18.

Mais quand on ne considérerait que ces paroles : l’Éternel l’a juré, et ne s’en repentira point : tu es sacrificateur à toujours selon l’ordre de Melchisédech, on voit bien que ce n’est point de David dont il est parlé dans cette prophétie, étant certain que David n’a été ni sacrificateur éternel, ni sacrificateur selon l’ordre de Melchisédech.

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