Histoire des Dogmes I — La Théologie Anténicéenne

6.6 — Les mystères chrétiens.

« L’unique moyen d’obtenir la rémission de nos péchés et d’espérer l’héritage des biens promis, dit saint Justin à Tryphon, est de reconnaître le Christ et, après avoir été lavés par ce baptême de la rémission des péchés, qu’Esaïe a prêché, de passer sans péché le reste de votre vie (Dial. 44.4). » Ce baptême, saint Justin en avait décrit le rite dans sa première apologie (surtout lxi). Il était précédé de l’instruction et de la profession de foi des catéchumènes et de leur promesse de vivre selon la doctrine chrétienne (2). Puis les catéchumènes priaient, jeûnaient, faisaient pénitence avec la communauté entière (3). Cette préparation terminée, ils étaient plongés dans l’eau « au nom de Dieu le Père et maître de toutes choses, et de Jésus-Christ notre Sauveur, et du Saint-Esprit » (3, 10, 13). Ce baptême est nécessaire, continue notre auteur, car le Christ a dit : « Si vous ne renaissez, vous n’entrerez point dans le royaume des cieux » (4). Or cette renaissance s’accomplit précisément dans le bain de la régénération. Dans notre première génération en effet, « nous venons au monde avec des habitudes mauvaises et des inclinations perverses », qui ne tardent pas à nous entraîner au péché. Mais le baptême répare ce double mal. Il est τὸ ὑπὲρ ἀφέσεως ἁμαρτιῶν καὶ εἰς ἀναγέννησιν λουτρόν (66.1). Il efface d’abord nos péchés passés, et poussant plus avant son effet, nous renouvelle et nous consacre à Dieu (61.1) ; il fait de nous les enfants « de l’élection et de la science » (10) ; il est une illumination (φωτισμός), « parce que ceux qui reçoivent cette doctrine ont l’esprit illuminéa » (12). En même temps, il est le rite initiateur qui introduit dans l’Église chrétienne (66.1).

a – Déclaration de Justin qui ne va certes pas dans le sens du baptême de nourrissons tout à fait inconscients de cette illumination, mais qui n’a pas l’air de déranger Tixeront…

Nos autres auteurs se sont moins étendus sur le baptême que saint Justin. Théophile d’Antioche cependant note aussi que le baptême opère, avec la rémission des péchés, une régénération (παλιγγενεσία, ii.16). Même enseignement dans saint Irénée : le baptême administré au nom des trois personnes divines est un sceau, une palingénésie (Démo., 3). Il donne le Saint-Esprit (iii.17.2). Le saint docteur suppose formellement qu’on le confère aux petits enfants (ii.22.4).

L’appellation σφραγίς appliquée au baptême est, comme on le sait, un héritage des Pères apostoliques. Elle se retrouve dans l’inscription d’Abercius, qui est, au plus tard, de la fin du iie siècle : λαὸν δ᾽ εἶδον λαμπρὰν σφραγεῖδαν ἔχοντα.

Sur l’eucharistieb et le service divin, on connaît la précieuse description qu’a laissée saint Justin dans sa première Apologie, lxv-lxvii, et qu’il a complétée dans le Dialogue avec Tryphon, xli, lxx, cxvii. A côté du sens d’action de grâces, et du sens actif de consécration (εὐχαριστία τοῦ ἄρτου καὶ τοῦ ποτηρίου (Dial., 117.1), le mot εὐχαριστία a aussi le sens de pain et vin consacrés : ἡ τροφὴ αὔτη καλεῖται παρ᾽ ἡμῶν εὐχαριστία (Apol, lxvi, 1). De cette eucharistie donc la matière est le pain et le vin mêlé d’eau. Le président de l’assemblée (ὁ προεστώς) les eucharistie « par un discours de prière qui vient de Jésus-Christ » (δι᾽ εὐχῆς λόγου τοῦ παρ᾽ αὐτοῦ), c’est-à-dire par les paroles mêmes de l’institution que saint Justin rapporte dans la phrase suivante (Apol, lxvi, 2, 3). Dès lors, on ne prend pas « ces choses comme du pain vulgaire ou comme un breuvage vulgaire, mais, de la manière dont, fait chair par le Verbe de Dieu, Jésus-Christ notre Sauveur eut une chair et du sang pour notre salut, ainsi aussi l’aliment eucharistie par un discours de prière qui vient de lui — aliment dont notre sang et nos chairs sont nourris en vue de la transformation — est la chair et le sang de ce Jésus fait chair, ainsi nous l’a-t-on enseigné » (ib., 2). Le pain et le vin sont donc devenus le corps et le sang de Jésus-Christ, corps et sang aussi véritables et physiques que le corps et le sang de son incarnation, corps et sang matériels qui nourrissent notre sang et nos chairs. En conséquence, « il n’est permis à personne de prendre part à cet aliment sinon à celui qui croit vrai ce que nous enseignons, et qui a été baptisé du baptême de la rémission des péchés et de la nouvelle naissance, et qui vit comme le Christ a enseigné » (ib., 1). Ce dernier mot marque la pureté nécessaire pour communier. Mais, en principe, l’eucharistie est distribuée à tous les frères présents au service liturgique, et envoyée aux absents par les diacres (Apol, lxvii, 5). Un des effets de cette manducation est la transformation indiquée par l’apologiste, ἐξ ἧς (τροφῆς) αἷμα καὶ σάρκες κατὰ μεταβολὴν τρέφονται ἡμῶν, c’est-à-dire le principe d’immortalité qu’elle dépose en nos corps. Saint Justin ajoute que la célébration des mystères a lieu le dimanche : elle est accompagnée de prières, de l’action de grâces du célébrant, du baiser de paix, de la lecture des Mémoires des apôtres ou des écrits des prophètes, de l’instruction et exhortation du président de l’assemblée (identique au célébrant), et enfin des offrandes des fidèles pour les indigents et les pauvres.

b – Voir ici P. Batiffol, L’Eucharistie, 5e édit., Paris, 1913.

Dans les chapitres indiqués du Dialogue, saint Justin, argumentant contre Tryphon, met surtout en relief le caractère sacrificiel de l’eucharistie. Il en trouve la figure anticipée dans l’offrande de farine prescrite par Lévitique.14.10 ; et il le voit annoncé dans les prophéties de Malachie.1.10-12, et d’Esaïe.33.13-19. L’eucharistie, c’est-à-dire le pain et le vin consacrés sont un sacrifice (ϑυσία), que Jésus-Christ a ordonné d’offrir en souvenir de sa passion et de son sang (εἰς ἀνάμησιν τοῦ πάϑους ––– εἰς ἀνάμνησιν τοῦ αἵματατος αὐτοῦ ––– ἐν ᾗ (τροφῇ) καὶ τοῦ πάϑους δ᾽ πέπονϑε δι᾽ αὐτοὺς ὁ υἱὸς τοῦ ϑεοῦ μέμνηται) : sacrifice qui est offert dans le monde entier et le seul que Dieu agrée.

Dispersée un peu partout dans son grand ouvrage contre les hérésies, la doctrine eucharistique de saint Irénée n’est pas moins ferme que celle de saint Justin. Lui aussi rapporte l’institution de l’eucharistie par Notre Seigneur, et commence déjà à affirmer l’identité du pain et du vin consacrés et du corps et du sang de Jésus-Christ (iv.17.5). Cette identité est toujours affirmée comme une chose acquise (iv.31.2 ; v.2.3,22, tellement acquise et tellement reçue même des adversaires que l’évêque de Lyon ne craint pas d’y appuyer son argumentation contre les gnostiques. Ceux-ci ne veulent pas que Jésus-Christ soit le Fils du Créateur, parce que le Père n’est pas le Créateur. Mais alors, demande Irénée, comment admettent-ils que le pain eucharistié est le corps du Seigneur, et le calice le calice de son sang ? (iv.18.4). Ce pain et ce vin n’appartiennent pas au Sauveur, mais au démiurge : il n’a pas le droit de les faire siens : « Quomodo autem iuste Dominus, si alterius Patris exsistit, huius conditionis quae est secundum nos accipiens panem suum corpus esse confitebatur, et temperamentum calicis suum sanguinem confirmavit ? » (iv.33.2 ; v.2.22). Les gnostiques enseignent que la chair se dissout dans la corruption et ne ressuscite pas. Peut-on dire cela de la chair « qui est nourrie du corps du Seigneur et de son sang ? Qu’ils changent donc d’opinion, ou qu’ils s’abstiennent d’offrir ce que l’on vient de dire » (iv.18.5). Si la chair n’est pas capable d’immortalité, « neque calix eucharistiae communicatio sanguinis eius (Christi) est, neque panis quem frangimus communicatio corporis eius est » (v.2.2,3).

Nul doute sur le réalisme d’Irénée : le pain et le vin eucharistiés sont vraiment le corps et le sang de Jésus-Christ. Comment acquièrent-ils ce nouvel être ? Par une invocation, une parole de Dieu qui les fait devenir ce corps et ce sang : « Quand donc le calice [de vin] mêlé [d’eau] et le pain reçoivent la parole de Dieu et qu’ils deviennent l’eucharistie, [c’est-à-dire] le corps du Christ… ».

v.2.3 : Ὃποτε οῦν καὶ τὸ κεκραμένον ποτήριον καὶ ὁ γεγονὼς ἄρτος ἐπιδέχεται τὸν λόγον τοῦ ϑεοῦ, καὶ γίνεται (ἡ) εὐχαριστία σῶμα χριστοῦ. Le sens du texte n’est pas douteux. Mgr Batiffol propose de supprimer et de sous-entendre, après εὐχαριστία, les mots ὅπερ ἐστί, comme dans le texte suivant, car on ne peut dire que l’eucharistie devient le corps du Christ.

Et un peu plus bas : le pain et le vin « recevant la parole de Dieu deviennent l’eucharistie, ce qui est le corps et le sang du Christc ». Et ailleurs : « De même que le pain qui est de la terre, recevant l’invocation de Dieu, n’est plus un pain commun, mais l’eucharistie, composée par deux éléments, l’un terrestre, l’autre céleste, de même nos corps recevant l’eucharistie ne sont plus corruptibles, ayant l’espérance de la résurrection pour l’éternité ».

cΠροσλαμβανόμενα τὸν λόγον τοῦ ϑεοῦ εὐχαριστία γίνεται ὅπερ ἐστὶ σῶμα καὶ αἷμα τοῦ Χριστοῦ.

[iv.18 : Ὡς γάρ ἀπὸ γής ἄρτος προσλαμβανόμενος τὴν ἔκκλησιν [επίκλησιν] τοῦ ϑεοῦ οὐκέτι κοινός ἄρτος εστίν, αλλ᾽ εὐχαριστία, εκ δύο πραγμάτων συνεστηκυῖα, ἐπιγείου τε καὶ οὐρανίου, οὕτω κτλ. Le mot ἔκκλησις et ailleurs, à propos des prestiges de Marcus (i.13.2), le mot λόγος τῆς ἐπικλήσεως employés par saint Irénée, ont fait croire à quelques auteurs que la liturgie de l’évêque de Lyon contenait déjà l’épiclèse. C’est à tort : ces mots n’ont ici que le sens général d’invocation, prière. S. lrénée est dans la tradition de Justin. Le λόγος τοῦ ϑεοῦ qui convertit le pain et le vin, c’est très probablement les paroles de l’institution, quoique l’expression puisse, à la rigueur, s’entendre de toute la prière liturgique. — Sur la doctrine eucharistique des gnostiques, v. Batiffol, op. cit., p. 189.]

Il se produit donc, en vertu de la parole de Dieu, de la prière liturgique, dans le pain et le vin une conversion qui les fait devenir, être le corps et le sang de Jésus-Christ. Et cela physiquement, car Irénée remarque que de cette eucharistie la substance de notre chair est nourrie et augmentéed. Et cette eucharistie, saint Irénée dit qu’elle est composée de deux éléments, l’un terrestre, l’autre céleste, non pas dans le sens d’une consubstantiation, puisque les éléments sont devenus le corps et le sang de Jésus-Christ, mais ou bien dans le sens des apparences extérieures et de la réalité interne, ou mieux en ce sens que l’eucharistie contient et l’humanité et la divinité du Sauveur.

dv.2.3 : ἐκ τοῦ ποτηρίου αὐτοῦ ὅ ἐστι τὸ αἷμα αὐτοῦ τρέφεται, καὶ ἐκ τοῦ ἄρτου, ὅ ἐστι τὸ σῶμα αὐτοῦ αὔξεται.

Le caractère sacrificiel de l’eucharistie a trouvé également en saint Irénée un témoin formel. Après avoir refait le récit de l’institution, il ajoute que par là Jésus-Christ « novi testamenti novam docuit oblationem, quam Ecclesia ab apostolis accipiens in universo mundo offert Deo, ei qui alimenta nobis praestat », et il rappelle le texte classique de Malachie.1.10-11. Ce sacrifice est pur et agréable à Dieu (iv.17.5 ; 18.1).

En dehors de saint Justin et de saint Irénée, les auteurs conservés de la seconde moitié du iie siècle n’ont point parlé de l’eucharistie. Mais il faut mentionner, outre les indications très claires des monuments figurés dont il a été déjà question, les deux inscriptions de Pectorius d’Autun et d’Abercius d’Hiérapolis qui contiennent à ce mystère des allusions évidentes. On sait que, dès la haute antiquité, le poisson était regardé comme le symbole du Christ, le mot ἰχϑύς se composant des premières lettres des mots Ἰησοῦς Χριστὸς ϑεοῦ υἱὸς σωτήρ. Or dans les premiers vers de l’inscription de Pectorius, écrits, semble-t-il, à la fin du iie siècle, après une mention du baptême, nous lisons :

« Ami, refais ton âme aux flots éternels de la sagesse qui donne les trésors. Reçois l’aliment doux comme le miel du Sauveur des saints. Mange à ta faim : tu tiens le poisson dans tes mains. »

Et dans celle d’Abercius :

« Partout la foi était mon guide, et partout elle m’a donné en nourriture l’ἰχϑύς de la source, le grand, le pur que la Vierge immaculée a pêché et offre à manger aux amis ; elle a aussi du vin délicieux mélangé d’eau qu’elle donne avec le pain. »

Il suffit de rapprocher ces mots de la description donnée par saint Justin pour en comprendre tout le sense.

e – Il est évident, pour le lecteur non prévenu, que ces deux inscriptions expriment un témoignage de gratitude et d’adoration envers Jésus-Christ, confessé comme la vraie nourriture de l’âme, et qu’elles ne contiennent pas la moindre idée d’une transformation matérielle des éléments de l’eucharistie. (ThéoTEX)

Sur la pénitence et les exercices extérieurs qu’elle comportait, la période que nous étudions ne donne que peu de renseignements, assez cependant pour nous apprendre, comme l’a fait Hermas, que Dieu et l’Église ne repoussent jamais les pécheurs, et que l’Église intervenait dans l’action de la pénitence et la réconciliation des pénitents. Les déclarations de saint Justin sont très générales et proclament simplement l’infinité de la miséricorde de Dieu, disposé à sauver tous les coupables repentants et à leur pardonner. Plus précises sont les conclusions que l’on peut tirer de certains faits : des essais de pénitence de l’hérétique Cerdon, par exemple ; de la pénitence accordée a Marcion et dont il ne put profiter ; de la réconciliation à l’Église de l’hérétique Natalius ; de celle des apostats repentants de Lyon en 177. « Dans sa lettre à l’Église d’Amastris et à celles du Pont, écrit Eusèbe, Denys (de Corinthe)… donne plusieurs avis sur le mariage et la continence, et engage ses correspondants à recevoir les pécheurs repentants de n’importe quelle faute que ce soit, une faute ordinaire ou même le péché d’hérésie. »

Cet avis de Denys était évidemment aussi celui de saint Irénée. L’évêque de Lyon, en effet, ne se contente pas de déclarer que Dieu donne la vie à ceux qui sont ἐκ μετανοίας, comme aux justes qui ont persévéré (i.10.1) : il suppose manifestement que les marcionites et les valentiniens qu’il combat seront sauvés s’ils font pénitence (iii.14.4) ; et il dit que, de fait, beaucoup d’hérétiques rentrèrent dans l’Église à la voix de Polycarpe, quand celui-ci vint à Rome sous Anicet (iii.3.4). Toutefois, les indications les plus précises sont celles que l’on trouve au livre I, chapitres 6 et 13 de l’Adversus haereses, à propos des femmes séduites par les gnostiques, et qui avaient perdu dans leur commerce leur vertu avec leur foi. Les chrétiens ne les abandonnèrent pas et s’efforcèrent de les ramener à la vérité et au bien (13, 5). Beaucoup y revinrent en effet, et saint Irénée nous les montre confessant leurs fautes et passant leur vie dans l’exomologèse publique (τὸ ἅπαντα χρόνον ἐξομολογουμένη ––– εἰς φανερὸν ἐξομολογοῦν, 13, 5, 7) ; tandis que d’autres, désespérant de la vie de Dieu, se retiraient complètement de l’Église, et que d’autres encore ne prenaient aucun parti. Saint Irénée, à la vérité, ne dit pas expressément que les pénitentes aient été réconciliées au moins à la fin de leur vie ; mais on peut le conclure de l’ensemble de sa doctrine.

Le mariage a attiré l’attention de nos auteurs surtout au point de vue polémique, contre les païens et contre les hérétiques. Parmi ces derniers, quelques-uns, comme Tatien et les encratites, condamnaient absolument le mariagef, d’autres, comme les montanistes, ou exagéraient l’obligation de la continence, ou prohibaient les secondes noces. Les païens, de leur côté, reprochaient aux chrétiens des promiscuités révoltantes. Contre les premiers, nos auteurs affirment nettement l’honnêteté du mariage : le condamner, c’est indirectement blâmer le créateur qui a fait les sexes différents pour la propagation du genre humain (i.28.1). Contre les montanistes, ils font remarquer que la continence parfaite, si glorieuse qu’elle soit, ne saurait être la vocation commune ni imposée à tous indistinctement.

f – On sait combien ce thème revient souvent dans les actes apocryphes des apôtres, par exemple dans ceux de saint Thomas.

[C’était l’objet probablement de la lettre de Denys de Corinthe aux églises du Pont dont il a été question ci-dessus, et où il donnait plusieurs avis περὶ γάμου καὶ ἁγνείας. C’était sûrement celui de sa lettre aux habitants de Cnosos (Eusèbe, H. E., 4.23.6-7).]

Mais d’autre part, et pour réfuter les calomnies païennes, ils relèvent la réserve que gardent les chrétiens dans la vie conjugale. Les chrétiens n’usent du mariage que pour avoir des enfants : ils ne regardent comme permises ni la polygamie simultanée, ni les secondes noces après le divorceg. Quant aux secondes noces après la mort du premier conjoint, on sait qu’Athénagore, sans les condamner absolument, les voit de mauvais œil. Elles ne sont d’après lui qu’un honnête concubinage (εὐπρεπὴς μοιχεία), et celui qui y convole n’est qu’un fornicateur occulte (μοιχὸς παρακεκαλυμμένος). L’idéal chrétien c’est la monogamie (μονογαμία τηρεῖται). Athénagore ajoute du reste que les chrétiens suivent dans leurs mariages « les lois qu’ils ont établies » (τοὺς ὑφ᾽ ἡμῶν τεϑειμένους νόμους), différentes des lois civiles, et qui régissaient déjà les unions des fidèles.

g – Athén., Suppl., 33 ; Justin, Dial., cxli, 4 ; I Apol., xv, 5. C’est en ce dernier sens que plusieurs critiques entendent ce passage de l’Apologie (cf. xv, 3). Mais d’ailleurs, saint Justin approuve la conduite d’une femme chrétienne qui avait divorcé avec son mari païen incontinent (II Apol., ii, 1-7).

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