La Résurrection de Jésus-Christ

1.5 — Actes.

Actes ch. 1, versets 1 à 12.

J’ai consigné dans mon premier écrit, ô Théophile, tout ce que Jésus avait commencé de faire et d’enseigner, jusqu’au jour où il fut enlevé, après avoir donné par l’Esprit saint ses ordres aux Apôtres qu’il avait choisis, auxquels aussi, après sa passion, il s’était montré vivant, en leur en donnant plusieurs preuves : pendant quarante jours, se faisant voir à eux et leur parlant de ce qui concerne le Royaume de Dieu. Et les ayant rassemblés, il leur ordonna de ne point s’éloigner de Jérusalem, mais d’y attendre la promesse du Père dont vous m’avez entendu parler. Car si Jean a baptisé dans l’eau, vous, vous serez baptisés dans le Saint-Esprit en peu de jours d’ici. Se trouvant donc réunis, ils l’interrogèrent, en disant : Seigneur, est-ce en ce temps-là que tu rétabliras le Royaume d’Israël ? Mais il leur dit : Il ne vous appartient pas de connaître les temps ou les époques que le Père a fixées de sa propre autorité, mais vous recevrez la puissance du Saint-Esprit qui viendra sur vous, et vous serez mes témoins soit à Jérusalem, soit dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’à l’extrémité de la terre. Et après avoir ainsi parlé, il fut enlevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. Et comme leurs regards étaient fixés au ciel pendant qu’il s’éloignait, voici deux hommes, vêtus d’habits blancs, s’étaient approchés d’eux et leur dirent : Hommes Galiléens, pourquoi restez-vous là regardant au ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé d’avec vous dans le ciel viendra ainsi, de la même manière que vous l’avez vu monter dans le ciel. Alors ils retournèrent à Jérusalem de la montagne appelée des Oliviers, qui est près de Jérusalem à la distance d’un chemin de sabbat.

Nous trouvons dans ces versets :

  1. dans le v. 2 une description très sommaire de la dernière apparition ;
  2. dans le v. 3 une caractéristique générale de la période qui s’écoula entre la résurrection et cette dernière apparition ;
  3. dans les v. 4-12 des détails, en grande partie nouveaux, sur ce qui précéda et suivit immédiatement l’Ascension.

Examinons d’abord le v. 3 : Auxquels aussi, après sa passion, il s’était montré vivant, en leur en donnant plusieurs preuves : pendant quarante jours, se faisant voir à eux et leur parlant de ce qui concerne le royaume de Dieu. Voici ce que nous pouvons conclure de ce verset :

1° Cette période éminemment transitoire dura quarante jours, Jésus fut enlevé au ciel quarante jours après être ressuscité et ce fut dans cet intervalle qu’eurent lieu les diverses apparitions dont parlent nos Évangiles. Ce nombre de jours était en quelque sorte fixé d’avance dès que Jésus devait mourir et ressusciter au commencement de la fête de Pâques, que le Saint-Esprit devait être répandu sur les disciples au jour de Pentecôte qui tombait sept semaines après le 15 Nisan (Deutéronome 16.9) ; dès qu’il convenait en outre qu’il s’écoulât quelques jours de recueillement, de prière et de sainte attente entre l’ascension de Jésus et l’envoi du Saint-Esprit — Ce nombre de jours est, du reste, remarquable comme ayant été déjà celui des jours pendant lesquels le Seigneur fut tenté dans le désert après son baptême et avant de commencer l’exercice public de son auguste ministère (Matthieu 4.2 ; Marc 1.13 ; Luc 4.2) — A une époque plus ancienne de l’histoire du peuple d’Israël, ce fut le nombre de jours pendant lesquels le prophète Elie se rendit jusqu’en Horeb, la montagne de Dieu (1 Rois 19.8), avant de recevoir une sublime vision de la gloire de l’Éternel, et la triple mission d’oindre Hazaël, Jéhu et Elisée — Ce fut pendant quarante jours que Moïse resta sur la montagne du Sinaï, avant d’en redescendre portant les deux tables de la loi gravées de la main de l’Etemel (Exode 24.18 ; 34.28 ; Deutéronome 9.9) — Ce fut pendant quarante années que le peuple d’Israël erra dans le désert avant d’entrer dans la Terre promise (Nombres 14.33-34) — Plus anciennement encore, c’était pendant quarante jours que les eaux s’étaient extraordinairement élevées, engloutissant toute une génération désespérément coupable et n’épargnant que la seule famille qui devait devenir la souche d’une nouvelle humanité (Genèse 7.4,12) — On comprend donc comment dans la mystérieuse série des chiffres symboliques de l’histoire du Royaume de Dieu, le chiffre de quarante ait pu être désigné comme étant par excellence celui des préparations. Quel temps de préparation pour les premiers disciples de Jésus que l’intervalle compris entre le jour de la Résurrection et celui de l’Ascension ! Pour le Rédempteur lui-même, quelle solennelle époque de transition !

2° Pendant ces quarante jours Jésus ne vécut point d’une manière continue avec ses disciples, il n’eut avec eux qu’un commerce intermittent, par voie d’apparitions (ὀπτανόμενος αὐτοις).

3° Pendant cette période Jésus n’eut plus à souffrir comme précédemment pour l’expiation des péchés du monde, ni à servir de lumière et de modèle par l’absolue sainteté d’une vie semblable à toutes les autres quant aux circonstances extérieures qui en formaient comme la trame. Il n’eut pas davantage à entrer en rapport immédiat avec la multitude indifférente ou hostile. A ce triple point de vue, tout était accompli. Depuis sa résurrection Jésus n’eut à voir que ses disciples, mais il avait encore à leur égard une double tâche à remplir. Il devait, d’un côté, les convaincre de sa résurrection en leur apparaissant à différentes reprises et de diverses manières ; et de l’autre, leur donner ou leur renouveler plusieurs instructions concernant le Royaume de Dieu, instructions que seulement alors ils pouvaient commencer à comprendre. Les apparitions dont parlent nos Évangiles correspondent parfaitement à ces deux buts, mais naturellement ce sont surtout les premières en date qui se rattachent au premier but, et surtout les dernières qui se rapportent au second. Parmi les instructions données ou renouvelées alors par Jésus, nous signalerons principalement le rapport entre sa mort et sa résurrection d’une part, et les prophéties de l’Ancien Testament, de l’autre, — la gloire et la puissance que Jésus allait recevoir, — les bienheureuses conséquences de sa mort et de sa résurrection pour la rémission des péchés de tout croyant, — la vocation des Gentils, — la mission que devaient remplir les Apôtres en annonçant partout l’Évangile et en baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, tous ceux qui croiraient, — le secours que Jésus devait leur dispenser par l’envoi du Saint-Esprit, et les magnifiques succès qui accompagneraient leur ministère, — la réhabilitation de Pierre dans l’apostolat et les souffrances qu’il endurerait au service de son divin Maître (Matthieu 28.18-20 ; Marc 16.15-18 ; Luc 24.25, 27, 44-49 ; Jean 20.17, 21-23 ; 21.1-22).

Arrivons à ce qui concerne la dernière apparition ; Luc la résume d’abord au v. 2 en disant : Jusqu’au jour où, après avoir donné par l’Esprit saint ses ordres aux Apôtres qu’il avait choisis, il fut enlevé. Puis il la raconte plus en détail dans les v. 4-12 :

Et les ayant rassemblés, il leur ordonna de ne point s’éloigner de Jérusalem, mais d’y attendre la promesse du Père dont vous m’avez entendu parler. Car si Jean a baptisé dans l’eau, vous, vous serez baptisés dans le Saint-Esprit en peu de jours d’ici. Se trouvant donc réunis, ils l’interrogèrent, en disant : Seigneur, est-ce en ce temps-là que tu rétabliras le royaume pour Israël ? Mais il leur dit : Il ne vous appartient pas de connaître le temps ou les époques que le Père a fixées de sa propre autorité, mais vous recevrez la puissance du Saint-Esprit qui viendra sur vous, et vous serez mes témoins soit à Jérusalem, soit dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’à l’extrémité de la terre. Et après avoir ainsi parlé, il fut enlevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. Et comme leurs regards étaient fixés au ciel pendant qu’il s’éloignait, voici deux hommes, vêtus d’habits blancs, s’étaient approchés d’eux et leur dirent : Hommes Galiléens, pourquoi restez-vous là regardant au ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé d’avec vous dans le ciel viendra ainsi, de la même manière que vous l’avez vu monter dans le ciel.

Alors ils retournèrent à Jérusalem de la montagne appelée des Oliviers, qui est près de Jérusalem, à une distance d’un chemin de sabbat.

Si nous comparons avec soin le v. 2 aux v. 4-12, nous verrons que dans les v. 4-8 Luc développe ce qu’il a dit au v. 2 : après avoir donné par l’Esprit saint ses ordres aux Apôtres qu’il avait choisis — et que dans les v. 9-11 il développe ces autres mots du v. 2 : il fut enlevé.

Avant d’examiner les paroles que Jésus prononça dans cette dernière réunion, rappelons-nous que dans son Évangile (Luc 24.50), Luc nous représente Jésus se trouvant à Jérusalem avec ses disciples, puis les conduisant dehors jusque vers Béthanie. Il semble donc que cette réunion se tint d’abord à Jérusalem, puis continua sur le chemin et dans le voisinage de Béthanie jusqu’à l’endroit où eut lieu l’Ascension. Nous venons de voir que dans les Actes, Luc, après avoir raconté ce glorieux événement, ajoute que les Apôtres retournèrent à Jérusalem, de la montagne appelée des Oliviers, qui est près de Jérusalem, à la distance d’un chemin de sabbat. Cette distance n’est point ici donnée comme étant proprement celle qui séparait de Jérusalem le lieu où Jésus monta au ciel, mais bien plutôt celle qui séparait de cette ville la montagne des Oliviers en général. Un chemin de sabbat était la distance qu’il était permis de parcourir, selon les Pharisiens, un jour du sabbat. M. Pierotti me disait que, selon les traditions juives en Palestine, c’était une distance de deux stades, soit 360 mètres (le stade étant évalué à 180 mètres), et qu’il avait retrouvé cette distance entre le mur du Temple et le tombeau d’Absalom, situé au pied des Oliviers et à 2 stades de Jérusalem, selon Josèphe (Antiq., VII, 10.3).

[Josèphe dit ailleurs que le mont des Oliviers est à une distance de 5 stades de Jérusalem (Antiq., XX, 7.6), et ailleurs encore, à une distance de 6 stades (Guerre des Juifs, V, 2.3). Mais M. Pierotti explique très bien ces différentes indications, en faisant remarquer qu’il y a 2 stades entre le mur du Temple et le pied de la montagne des Oliviers à l’endroit où s’élève le tombeau d’Absalom, 5 stades entre le mur du Temple et la crête de la montagne des Oliviers, un peu plus au nord, et enfin 6 stades, plus au nord encore, entre le coin nord-est du mur du Temple et la partie du mont des Oliviers où Titus fit placer le camp dont parle Josèphe (Guerre des Juifs, V, 2.3).]

« A l’est au delà du Cédron, dit Bovet, s’étend une montagne au triple sommet, que l’on aperçoit d’assez loin déjà, quand on approche de Jérusalem. C’est le mont des Oliviers. Ces sommets, peu distants l’un de l’autre, sont arqués en courbe allongée et présentent à l’œil une ligne douce et reposée, sans rien de hardi ni d’irrégulier. Le mont des Oliviers fait face à Jérusalem et n’en est, pour ainsi dire, éloigné que de quelques pas ; deux minutes suffisent pour descendre des murs de la ville au fond de la vallée du Cédron et la vallée elle-même n’est guère que la largeur d’un ruisseau. Le sommet le plus méridional de la montagne des Oliviers est connu sous le nom de mont des Prophètes, à cause d’une vaste grotte sépulcrale qui s’y trouve et que l’on appelle tombeau des Prophètes. Le sommet le plus au nord est appelé par les Francs le Viri Galilæi : c’est là, dit-on, que des hommes en vêtements blancs, apparurent aux Apôtres après le départ de leur Maître et leur dirent : Hommes Galiléens, pourquoi vous arrêtez-vous à regarder au ciel ? Suivant la même tradition, les Apôtres auraient été en ce moment-là sur le sommet intermédiaire que l’on désigne pour cette raison sous le nom de montagne de l’Ascension. Nous verrons ailleurs que, selon toute apparence, ce n’est point là que cette scène a dû se passer. Au sud de ces trois sommets s’en trouve un quatrième, faisant partie de la même chaîne, mais qu’il faut pourtant distinguer de la montagne des Oliviers proprement dite. On le nomme le mont du Scandale » (Voyage en Terre Sainte).

C’est entre le sommet appelé le mont des Prophètes et ce mont du Scandale que passe le chemin qui conduit de Jérusalem à Béthanie et à Jéricho. Béthanie elle-même, appelée maintenant El Asarieh ou Azirieha est située, comme nous l’avons dit, dans un repli de terrain sur la pente orientale de la montagne des Oliviers et à une distance de Jérusalem d’environ 15 stades (Jean 11.18).

a – Le sommet intermédiaire est le plus élevé, aussi Tobler dit-il que la montagne ressemble à une tête s’élevant au-dessus de deux épaules.

Mais écoutons encore Bovet : « En descendant (de la mosquée de l’Ascension) le versant et sans quitter le chemin battu, on trouve bientôt devant soi, un peu à droite, un nouveau sommet, en forme de dôme, que l’on n’aperçoit pas de Jérusalem. Je le gravis en quelques minutes. On ne peut hésiter, ce me semble, à considérer ce sommet comme celui sur lequel a eu lieu l’ascension du Sauveur. Car l’ascension, nous dit St-Luc dans l’Évangile, eut lieu en Béthanie, et le même historien nous rapporte dans les Actes qu’après l’ascension les Apôtres descendirent de la montagne des Oliviers. Le sommet sur lequel je me trouve est le seul qui concilie ces deux récits, et il les concilie parfaitement ; cette idée est venue se présenter à moi sur les lieux mêmes ; j’ai su plus tard qu’elle était maintenant assez généralement admise. Si, comme le veut l’opinion vulgaire, l’ascension avait eu lieu sur le sommet où est la mosquée de ce nom, St. Luc n’aurait jamais pu dire qu’elle avait eu lieu à Béthanie ou sur son territoire : car le sommet dit de l’Ascension est plus près de Jérusalem que de Béthanie. Cette bourgade est située, au contraire, droit au pied du dôme dont je parle et qu’on appelle encore aujourd’hui la montagne de Béthanie, Djebel-el-Asarieh. »

Constatons encore que Robinson, après s’être rendu de Jérusalem à Béthanie par la route ordinaire qui passe entre le mont des Prophètes et le mont du Scandale, retourna à Jérusalem en traversant la crête de la montagne et prit ce chemin comme étant plus court que l’autreb. Ce dernier chemin semble donc bien celui que durent prendre aussi les Apôtres pour retourner à Jérusalem.

b – Robinson, Biblical Researches in Pal. Selon M. Pierotti, il y a quinze stades de Jérusalem à Béthanie, en suivant la grande route romaine qui de Jérusalem conduit à Jéricho, mais seulement huit stades en traversant la montagne des Oliviers, au sommet dit de l’Ascension.

Si dans ses premières apparitions, Jésus commença par persuader ses disciples de sa résurrection, on peut dire que dans celles qui suivirent, il dut donner surtout diverses instructions sur le Royaume de Dieu, puis des ordres ou des promesses, conséquences de ces instructions. Luc pouvait donc dire avec raison : jusqu’au jour où après avoir donné ses ordres aux Apôtres qu’il avait choisis, il fut enlevé. Mais il est évident que les deux lignes de démarcation ne furent point tranchées. Ainsi nous trouvons les trois éléments dans le récit que fait Jean de la première apparition du Seigneur à l’ensemble de ses disciples : Jésus leur montre ses mains et son côté ; puis il leur dit : Comme le Père m’a envoyé, je vous envoie, et enfin il ajoute en soufflant sur eux : Recevez le Saint-Esprit. Il semble impossible de séparer complètement les paroles que Jésus prononça dans la grande réunion qu’il eut avec ses disciples en Galilée, et ce qu’il leur dit immédiatement avant de s’élever au ciel. Matthieu, Marc et Luc ont réuni en un seul bloc les instructions, les promesses et les ordres que Jésus adressa à ses disciples depuis le moment où il les eut convaincus de sa résurrection : Matthieu, en les rattachant à la grande réunion tenue en Galilée (Matthieu 28.18-20) ; Marc et Luc, à la réunion du soir du premier dimanche (Marc 16.15-18 ; Luc 24.44-49).

Parmi les ordres que Jésus donna à ses disciples au moment même où il allait les quitter, il faut compter évidemment l’ordre de ne point s’éloigner de Jérusalem qu’ils n’eussent reçu le Saint-Esprit (Actes 1.4), ordre déjà mentionné Luc 24.49 — Mais il dut s’y trouver aussi l’injonction principale d’annoncer l’Évangile et de l’annoncer à toute nation. Dans le récit même des Actes, nous lisons au v. 8 : Vous serez mes témoins soit à Jérusalem, soit dans toute la Judée et la Samarie et jusqu’à l’extrémité de la terre. Ne manquons pas d’observer la gradation : d’abord à Jérusalem, puis dans toute la Judée et la Samarie, et enfin jusqu’à l’extrémité de la terre, gradation si opportunément rattachée à la dernière apparition. Il est, du reste, probable que le commandement de la mission avait été déjà donné lors de la grande réunion en Galilée, sous la forme si générale et si solennelle que nous trouvons dans Matthieu 28.19 : Allez et instruisez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et dans Marc 16.15 : Allant dans tout le monde, annoncez l’Évangile à toute créature.

Lors de la réunion du premier dimanche, Jésus, selon Jean, avait annoncé l’envoi du Saint-Esprit d’une manière symbolique en soufflant sur ses disciples et en leur disant : Recevez le Saint-Esprit. Immédiatement avant l’Ascension, Jésus parle de cet envoi en le comparant au baptême administré par Jean-Baptiste : Jean a baptisé dans l’eau, dit-il, vous, vous serez baptisés dans le Saint-Esprit en peu de jours. Jean-Baptiste avait dit lui-même : Pour moi, je vous baptise dans l’eau pour la repentance, mais celui qui vient après moi… vous baptisera dans l’Esprit saint et le feu (Matthieu 3.11 ; Marc 1.7-8 ; Luc 3.16).

Ce fut aussi dans la dernière réunion que les disciples, après que le Seigneur leur eut annoncé qu’ils seraient baptisés dans le Saint-Esprit en peu de jours, se hasardèrent à lui dire : Seigneur, est-ce en ce temps-là, que tu rétabliras le royaume pour Israël ? A quoi Jésus répondit, en coupant court à leur impatiente curiosité : Il ne vous appartient pas de connaître les temps ou les époques que le Père a fixées de sa propre autorité, mais vous recevrez la puissance du Saint-Esprit et vous serez mes témoins…

v. 9. Et après avoir ainsi parlé, il fut enlevé pendant qu’ils le regardaient, et une nuée le déroba à leurs yeux. Luc raconte dans son Évangile, comme nous l’avons vu, que Jésus ayant élevé les mains, bénit ses disciples et que pendant qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et fut enlevé au ciel (Luc 24.50-51). Dans les Actes il donne un nouveau détail en disant qu’une nuée le déroba à leurs yeux. En méditant cette sublime scène, j’ai été conduit à penser que cette miraculeuse nuée ne pouvait pas avoir eu simplement pour but de dérober la vue du Seigneur aux regards de ses disciples, que dans ce moment si solennel elle devait avoir sa haute signification comme signe, comme symbole et qu’elle devait être rapprochée sous ce rapport de la nuée qui, sous l’ancienne Alliance, annonça maintes fois la présence de l’Éternel, et dans la vie même de Jésus-Christ, apparut au moins lors de sa transfiguration. C’est avec joie que j’ai reconnu plus tard que cette idée n’était pas nouvelle et qu’elle était indiquée déjà par Preiswerk, Mallet et Lange.

v. 10 et 11. Et comme leurs regards étaient fixés au ciel, voici deux hommes vêtus d’habits blancs, s’étaient approchés d’eux et leur dirent : Hommes Galiléens, pourquoi restez-vous là regardant au ciel ? Ce Jésus qui a été enlevé d’avec vous dans le ciel viendra ainsi, de la même manière que vous l’avez vu monter dans le ciel. On a supposé que ces deux hommes, vêtus d’habits blancs, étaient Moïse et Elie, qui apparurent aux disciples lors de la Transfiguration. Il nous paraît plus naturel d’admettre que ce furent deux anges, appelés hommes ici comme dans Luc 24.4 et Marc 16.5, à cause de la ressemblance de leur aspect avec celui des hommes ou à cause de la forme humaine qu’ils avaient momentanément revêtue.

Il n’est pas souvent question d’apparition d’anges dans les récits de nos Évangiles, mais chaque fois qu’il en est question, que le moment est solennel ! C’est la naissance du Précurseur prédite à Zacharie (Luc 1.14), — la naissance de Jésus annoncée à Marie (Luc 1.26-27), — ou à Joseph (Matthieu 1.20) ; — c’est le Seigneur qui, dans le désert, vient de surmonter la triple tentation (Marc 1.13), — c’est l’agonie de Gethsémané (Luc 22.43), — la résurrection du Fils de l’homme, et enfin son ascension ! Les deux anges qui apparurent alors aux disciples leur parlèrent pour confirmer et compléter l’impression qu’ils éprouvaient déjà en voyant Jésus s’élever au ciel, puis disparaître caché dans la nuée, — pour leur signifier que c’était bien au ciel que Jésus se rendait, — pour leur déclarer en même temps que Jésus redescendrait du ciel comme ils venaient de l’y voir monter. De même qu’il était monté accompagné de la nuée de gloire, il devait redescendre accompagné de la même nuée, et ici la parole des anges se rattachait étroitement à l’antique prophétie de Daniel 7.13, — puis aux prophéties faites par le Seigneur lui-même concernant son glorieux retour et rattachées par Lui à la prophétie de Daniel : Marc 13.26 : Et alors ils verront le Fils de l’homme venant dans les nuées (ou : dans une nuée, selon Luc 21.27) avec beaucoup de puissance et de gloire ; — Matthieu 25.31 : Or quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire et tous les anges avec lui, alors il s’assiéra sur le trône de sa gloire ; — Matthieu 26.64 : Jésus lui dit : C’est toi qui l’as dit, d’ailleurs je vous le déclare : dès à présent vous verrez le Fils de l’homme assis à la droite de la Puissance et venant sur les nuées du ciel (comp. Luc 22.69).

Comme Jésus l’avait annoncé dans le Sanhédrin, avant de revenir dans sa gloire sur les nuées du ciel, il devait, selon une prophétie messianique plus ancienne encore que celle de Daniel (Psaumes 110), être assis à la droite de la Puissance, c’est-à-dire du Tout-Puissant, — il devait être souverainement élevé, associé au gouvernement de l’univers, — et retrouver ainsi la gloire dont il jouissait dès avant que le monde fût (Jean 17.5,24).

Avec l’Ascension commençait précisément cette nouvelle phase de l’existence de Christ qu’il avait si largement prophétisée à ses disciples dans la dernière soirée qui précéda sa mort, lorsqu’il leur avait dit que Dieu le glorifierait bientôt en lui-même (Jean 13.32), — qu’il allait vers le Père (Jean 14.12, 28 ; 16.10 ; 17.11). Il l’avait aussi prophétisée après sa résurrection, lorsqu’il avait dit à Marie-Madeleine : Va vers mes frères et leur dis : Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu (Jean 20.17).

Plusieurs mois auparavant il avait clairement annoncé à ses disciples où il irait lorsqu’ils le verraient monter : Cela vous scandalise-t-il ? leur avait-il dit (Jean 6.61-62), et si vous veniez à voir le Fils de l’homme montant où il était auparavant … ?

Quelle lumière l’Ascension, qui venait d’avoir lieu, ne devait-elle pas répandre dans les esprits des disciples sur la mystérieuse scène de la Transfiguration, cette prophétie en action de la glorification céleste de Jésus, dont Pierre, Jacques et Jean ne devaient parler qu’après la résurrection de leur Maître ! Et que le souvenir de la Transfiguration devait éclairer à son tour ce qui venait de se passer sous les regards de tous les Apôtres !

Le Seigneur, après leur avoir ainsi parlé, raconte Marc, fut enlevé dans le ciel et s’assit à la droite de Dieu. Sans doute les Apôtres ne virent que l’enlèvement, mais ne comprend-on pas qu’après tout ce qui avait eu lieu, tout ce que leur avait dit le Seigneur et ce que deux anges venaient de leur déclarer, ils devaient croire avec certitude que s’il avait été ainsi enlevé, c’était bien pour s’asseoir à la droite de Dieu, pour être glorifié, souverainement élevé ? Et cette foi n’allait-elle pas encore être confirmée de la manière la plus intime et en même temps la plus éclatante par l’envoi du Saint-Esprit que Jésus leur avait promis en peu de jours, — de ce Saint-Esprit par lequel ils devaient entrer dans une communion toute nouvelle avec leur divin Maître, et dont les effets extraordinaires pour la glorification du nom de Christ parmi les hommes, devaient si hautement proclamer que Jésus n’avait quitté ses disciples que pour continuer du sein de sa céleste gloire la réalisation sur la terre, du Royaume de Dieu ?

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