Histoire de la Réformation au temps de Calvin

Avant-propos du Tome I

L’auteur, en terminant la préface du premier volume de la première édition de son Histoire de la Réformation du seizième siècle, disait : « Cet ouvrage aura quatre volumes, « cinq au plus, qui paraîtront successivement. » Ces cinq volumes ont paru. On y a raconté les années héroïques de Luther, les effets de la doctrine caractéristique de ce réformateur, le salut par grâce, soit en Allemagne, soit dans d’autres contrées ; on y a décrit cette grande époque, qui renfermait en germe tout le renouvellement de la chrétienté dans les temps modernes. L’auteur a ainsi achevé la tâche qu’il s’était proposée ; toutefois il en restait une autre.

Aux temps de Luther succèdent ceux de Calvin. Celui-ci s’appliqua, comme son prédécesseur, à sonder les saintes Écritures, et il y trouva la même vérité et la même vie ; mais c’est pourtant un autre trait qui caractérise son œuvre.

La rénovation de l’individu, de l’Église, de l’humanité est son thème. Si le Saint-Esprit allume dans l’homme la lumière de la vérité, c’est, selon Calvin, « pour transformer l’homme tout entier. — Au règne de Christ, dit-il, il n’y a que le nouvel homme qui soit florissant, qui ait de la vigueur, et dont il faille faire cas. »

Ce renouvellement est en même temps un affranchissement ; et l’on pourrait donner pour devise à la réformation que Calvin a accomplie, comme au christianisme apostolique lui-même, cette parole de Jésus-Christ : La vérité vous rendra libres. (Jean 8.32)

Quand les dieux des nations tombèrent, quand le Père qui est au ciel se manifesta au monde dans l’Évangile, adoptant pour ses enfants ceux qui recevaient dans leur cœur la nouvelle de la paix de Dieu, tous ces hommes-là devinrent frères, et cette fraternité créa la liberté. Dès lors une grande transformation s’accomplit peu à peu dans les individus, dans les familles, dans la société tout entière. L’esclavage en disparut sans guerre et sans révolution.

Malheureusement le soleil, qui avait pendant quelque temps réjoui les yeux des peuples, se voila ; la liberté des enfants de Dieu se perdit ; on vit de nouveau des ordonnances humaines enchaîner les consciences et engourdir les esprits. La Réformation du seizième siècle rendit aux chrétiens ce que le moyen âge leur avait ravi ; elle les délivra des traditions, des lois, du despotisme de la papauté ; elle mit fin à l’état de minorité et de tutelle dans lequel Rome prétendait retenir à jamais l’humanité, et, en annonçant à tous les hommes un libre accès auprès du Père, elle proclama l’avènement définitif et irrévocable de la majorité des chrétiens.

Cependant une explication est nécessaire. Il est, de nos jours, des philosophes qui font simplement de Christ l’apôtre de la liberté politique. Ces sages-là doivent apprendre que s’ils veulent la liberté au dehors, ils doivent d’abord la posséder au dedans. Prétendre jouir de la première sans la seconde est courir après une pure chimère.

Le plus grand et le plus dangereux des despotismes est celui sous lequel le penchant mauvais de la nature, l’influence funeste du monde, — le péché, font plier tristement la conscience humaine. Sans doute il est beaucoup de pays, surtout parmi ceux que le soleil du christianisme n’a pas encore éclairés, qui sont privés de la liberté civile, et gémissent sous l’arbitraire des puissants. Mais, pour devenir vraiment libres au dehors, il faut que les hommes arrivent d’abord à être libres dans leur cœur. Il y a là toute une vaste contrée qui doit être délivrée de l’esclavage ; — des abîmes que l’homme ne peut franchir seul, des hauteurs que seul il ne peut atteindre, des forteresses qu’il ne peut enlever, des armées qu’il ne peut mettre en fuite. Pour être vainqueur dans cette bataille morale, il faut que l’homme s’unisse à quelqu’un de plus puissant que lui, — au Fils de Dieu.

S’il est quelqu’un dans la société actuelle qui soit fatigué de la lutte, qui s’afflige en se voyant toujours surmonté par le mal, qui désire respirer l’air pur et léger des hautes régions de la liberté…, qu’il vienne à l’Évangile ; qu’il cherche l’union avec le Sauveur, et il trouvera, près de lui, des puissances qui lui feront remporter de suprêmes victoires.

Il en est, nous le savons, et parmi les meilleurs, que le mot de liberté épouvante. Mais ces hommes respectables ont beau dire. Christ est un libérateur : Le Fils, dit-il, vous affranchira. Voudraient-ils donc en faire un tyran ?

Il en est, nous le savons aussi, parmi les ennemis les plus intelligents du christianisme, qui, en voyant défiler dans l’histoire de l’Église une longue et triste procession d’actes despotisques, les mettent sans façon sur le compte du christianisme même. Qu’ils se détrompent : cette oppression, qui les révolte, est païenne peut-être, judaïque, papale, mondaine… ; mais elle n’est pas chrétienne. Toutes les fois que le christianisme reparaît dans le monde avec son esprit, sa foi, sa vie primitive, il apporte aux hommes la délivrance et la paix.

En effet, la liberté que le christianisme donne n’est pas seulement pour les individus, elle atteint la société tout entière. L’œuvre de rénovation de Calvin, en particulier, qui fut sans doute avant tout une œuvre intérieure, était ensuite destinée à exercer une grande influence sur les peuples. Luther changea des princes en héros de la foi, et nous avons décrit avec admiration leurs triomphes à Augsbourg et ailleurs. La réformation de Calvin s’adressa surtout au peuple, et créa, dans son sein, des martyrs en attendant qu’elle en fît sortir les conquérants spirituels du monde. Depuis trois siècles elle produit, dans l’ordre social, parmi les nations qui l’ont reçue, des transformations inconnues aux temps antérieurs. Et, à cette heure encore, et plus que jamais peut-être, elle communique aux hommes qui la reçoivent un esprit puissant, qui les rend des organes d’élite, propres à répandre la vérité, la moralité, la civilisation jusqu’aux extrémités de la terre.

La pensée de ce travail n’est pas nouvelle ; elle date de plus de quarante ans. Un savant, dont le nom est cher à tous ceux qui ont vu de près la simple beauté de son caractère et lu avec soin ses écrits sur l’histoire de l’Église, Néander, parlant avec l’auteur, à Berlin, en 1818, le pressa d’entreprendre l’Histoire de la Réformation de Calvin. L’auteur répondit qu’il désirait d’abord raconter celle de Luther ; mais qu’il avait pourtant l’intention de retracer successivement deux tableaux si semblables et pourtant si divers.

L’Histoire de la Réformation en Europe, au temps de Calvin, doit naturellement commencer par Genève.

La Réformation de Genève s’ouvre par la chute d’un évêque-prince ou, si l’on veut, d’un évêque-roi. Ceci la caractérise ; et si nous passions sous silence les luttes héroïques qui ont amené cette chute, nous nous exposerions à de justes reproches de la part des hommes éclairés.

Il se peut que ce grave événement, que nous sommes appelés à décrire (la fin d’un état ecclésiastique), donne lieu à quelques comparaisons avec les temps actuels ; nous ne les avons pourtant pas cherchées. La grande question, qui occupe dans ce moment l’Europe, fut aussi celle qui occupa Genève dans les temps que nous allons raconter. Mais cette partie de notre histoire a été écrite avant ces dernières et émouvantes années, durant lesquelles s’est posée et se pose sans cesse, devant les souverains et devant les peuples, la question si importante et si complexe du maintien ou de la chute du pouvoir temporel des papes. L’historien, en racontant les faits du seizième siècle, n’a eu d’autres préoccupations que celles que l’histoire elle-même faisait naître.

Ces préoccupations-là étaient naturelles. Descendant de ces huguenots de France que la persécution a chassés de leur pays au seizième et au dix-septième siècle, l’auteur s’est attaché à cette cité hospitalière qui a reçu ses pères, et dans laquelle il a trouvé une nouvelle patrie. Les huguenots de Genève ont captivé son attention. La décision, les sacrifices, la persévérance, l’héroïsme avec lesquels les Genevois maintinrent alors leur liberté menacée, l’a profondément ému. L’indépendance d’une ville conquise par tant de courage, de privations, de périls, de douleurs, est sans doute, aux yeux de tous, une chose sacrée ; et nul ne voudra y porter la main. Peut-être même que cette histoire renferme, pour les peuples, des leçons auxquelles l’auteur n’a point toujours pensé en l’écrivant. Lui sera-t-il permis d’en signaler une ?

L’émancipation politique de Genève diffère de plusieurs révolutions modernes en ce qu’on y trouve admirablement combinés les deux éléments qui rendent salutaires les mouvements des nations, savoir : l’ordre et la liberté. On a vu de nos jours des peuples se lever au nom de la liberté, et ne se souvenir du droit en aucune manière. Il n’en fut pas ainsi dans Genève. Longtemps les Genevois s’obstinèrent à maintenir l’ordre établi ; et ce ne fut que quand ils eurent vu, pendant une longue suite d’années, les princes-évêques se liguer avec les ennemis de l’État, favoriser des usurpations et se livrer à des actes contraires aux chartes de leurs ancêtres, qu’ils acceptèrent le divorce, substituèrent à l’état ancien un nouveau, ou plutôt revinrent à un état plus ancien encore. Nous les voyons mettre toujours en avant les antiques libertates, franchesiæ, immunitates, usus, consuetudines civitatis gebennensis, rédigées pour la première fois en 1387, mais dont l’origine est signalée dans l’acte même, comme étant bien plus ancienne encore. L’auteur (on le verra) est ami de la liberté ; mais la justice, la moralité, l’ordre, sont à ses yeux des éléments tout aussi nécessaires à la prospérité des peuples. Il abonde sur ce point dans le sens de l’un des maîtres les plus écoutés de la civilisation moderne, M. Guizot, quoiqu’il ne soit pas d’accord avec lui sur d’autres.

Pour écrire cette histoire, nous avons eu recours aux sources, et en particulier à quelques manuscrits importants, les Registres manuscrits du Conseil de Genève, l’Histoire manuscrite du syndic Roset, celle de Gauthier, le manuscrit des Mamelus (Mamelouks) et plusieurs lettres et actes notables conservés dans les Archives de Genève. Nous avons de plus étudié dans la bibliothèque de Berne des manuscrits dont on avait jusqu’à cette heure peu ou point profité ; quelques-uns sont indiqués dans les notes ; d’autres le seront plus tard. Outre ces sources, nous avons profité d’écrits et de documents d’un grand intérêt, appartenant au seizième siècle, et publiés de nos jours par de savants archéologues genevois, en particulier par MM. Galiffe, Grenus, Revillod, E. Mallet, Chaponière, Fick. Nous avons fait aussi un grand usage des mémoires de la Société d’histoire et d’archéologie de Genève. Pour ce qui regarde la France, l’auteur s’est servi souvent de divers documents du seizième siècle, peu ou point connus, surtout pour ce qui concerne les rapports du gouvernement français avec les protestants allemands. Il a profité aussi de plusieurs manuscrits, et il a pu de cette manière faire connaître quelques faits qui appartiennent au commencement de la vie de Calvin, et qui n’ont point encore été racontés. Ces faits sont tirés en partie des lettres latines du réformateur, qui n’ont été imprimées jusqu’à présent, ni en latin, ni en français, mais qui forment partie du beau recueil que se propose de nous donner M. Jules Bonnet, si cette publication trouve dans le public chrétien les justes encouragements que méritent les travaux, le désintéressement et le zèle de son savant éditeur.

L’auteur ayant habituellement recours aux documents français du seizième siècle, en a fait souvent passer dans le texte les passages les plus caractéristiques. L’œuvre de l’historien n’est ni un travail d’imagination comme celle du poète, ni une simple conversation sur les choses passées, comme quelques écrivains de nos jours paraissent le croire. C’est l’exposition fidèle des choses passées elles-mêmes, et quand on peut les raconter en se servant des expressions de ceux qui les ont vues, on est plus sûr de les présenter telles qu’elles furent.

Il y a toutefois un inconvénient à cette méthode : le langage du seizième siècle n’est pas toujours compris de la majorité des lecteurs. Quand donc l’auteur a cité, soit de la prose, soit des vers, il a dû quelquefois substituer à l’expression de ces temps anciens celle de nos jours. C’est une liberté non seulement autorisée, mais commandée. Une publication archéologique demande avant tout la reproduction exacte, servile même, des expressions du temps ; une publication historique veut avant tout être comprise. L’auteur s’est souvent contenté d’indiquer l’expression moderne en note ou en parenthèse.

Cependant la reproduction des documents contemporains n’est pas toute l’œuvre de l’historien. Il ne doit pas simplement extraire du sépulcre, où ils dorment, les débris des hommes et des choses du temps passé, pour les exposer au grand jour. Nous estimons beaucoup un tel travail et ceux qui le font, car il est nécessaire ; et pourtant nous ne le croyons pas suffisant. Des ossements secs, ne sont point la fidèle représentation des hommes d’autrefois. Ce n’est pas comme squelettes qu’ils ont existé, c’est comme des êtres pleins de mouvement et de vie. L’historien n’est pas simplement un fossoyeur ; il lui faut, — étrange présomption qui est pourtant une incontestable vérité, — il lui faut une puissance qui fasse revivre les morts.

Des historiens de l’antiquité ont réalisé cet idéal. C’est ainsi qu’Hérodote, lisant aux jeux Olympiques et à la fête des Panathénées la brillante Histoire, où il avait recueilli les restes des peuples, savait en former des tableaux pleins de lumière et de vie. Aussi les Grecs, réunis pour l’écouter, accueillaient-ils ces scènes vivantes avec des cris d’enthousiasme, et les émotions les plus variées de la terreur et de la joie. Quelques historiens modernes ont su reproduire ces narrations animées de l’antiquité.

L’auteur, incapable lui-même d’accomplir cette tâche, réduit à ne présenter aux lecteurs qu’une simple et modeste chronique, a pourtant besoin d’exprimer son admiration pour ceux qui ont su faire revivre les âges endormis. Il croit fermement que si l’histoire doit avoir de la vérité, il faut qu’elle ait de la vie. Les choses des temps passés ne ressemblèrent pas, aux jours où elles furent, à ces grands musées de Rome, de Naples, de Paris, de Londres, dans les galeries desquels nous voyons, rangées, les unes après les autres, des statues de marbre, des momies et des tombes ! Il y avait alors, soyez-en sûrs, des êtres vivants qui pensaient, qui sentaient, qui parlaient, qui agissaient, qui combattaient. Le tableau même, quoi que l’histoire puisse faire, aura toujours moins de vie que la réalité.

Il est des gens qui, dès qu’ils rencontrent une parole, une conversation dans un récit, s’imaginent aussitôt que ce sont là de pures inventions. A les entendre, on devrait croire que les personnages qui ont joué un rôle dans le monde ont été tous des muets. Il faut l’avouer, certaines histoires semblent presque l’indiquer ; elles ne sont pas des tableaux parlants. Si c’est là un genre, il est, nous semble-t-il, aussi contraire à la vérité historique qu’à la vérité morale. Les hommes marquants de notre temps parlent. Je n’en voudrais pour preuve que tel premier ministre de l’Angleterre, tel président des États-Unis, tel orateur des chambres de la France, tel tribun de nos républiques suisses. C’est le plus souvent par des discours ou même de simples mots, que s’accomplissent les grands événements qui constituent l’histoire. Malgré certains critiques, j’ose soutenir fermement que les hommes des temps anciens ont connu l’usage de la parole aussi bien que nous, autant que nous, et peut-être plus et mieux que nous. On entendra, par exemple, dans cette histoire, un grand parleur, connu jusqu’à présent par un long silence, dans les souterrains d’un vieux château, plutôt que par sa brillante conversation, Bonivard. Quand l’historien rencontre une parole de l’un des acteurs du grand drame des choses humaines, il doit la saisir aussitôt, comme une perle, et l’enfiler dans son tissu pour en relever les pâles couleurs, et lui donner plus de solidité et d’éclat. Que la parole de ce personnage se trouve dans ses lettres, dans ses écrits ou dans ceux des chroniqueurs, n’importe ! Partout où il la trouve, l’historien la prendra. Oh ! qu’il est agréable d’entendre les hommes parler, de les voir penser, sentir, agir comme ils l’ont fait dans la réalité. Que j’aime mieux cette histoire vraie, que ces compositions purement intellectuelles où les acteurs sont privés de la parole et même de la vie. Si l’historien, au lieu de nous conduire dans les scènes animées, et au milieu des passions et du tumulte du monde, nous mène tristement dans les salles mornes et silencieuses d’un couvent de la Trappe, je n’ai pas grande envie de le suivre. Quoi ! point de discours, point d’affection, point de joie, point de larmes, point de ces vives images des hommes et des choses que le génie antique savait si bien tracer ! Rien de ce qui constitue l’homme ; et à la place une froide et muette abstraction qui n’a jamais existé… L’ambition d’un tel historien me semble, je l’avoue, n’être pas très élevée.

Quand Prométhée eut achevé son œuvre, quand il eut fait un homme d’argile et lui eut donné les formes les plus exactes et les plus élégantes, ce civilisateur, comme le représente Eschyle dans sa trilogie, resta devant cette image, silencieux, mécontent, attristé Pour répondre à l’idéal qu’il avait conçu, pour faire de son ouvrage le juste objet de l’admiration des hommes, il sentit qu’il fallait lui donner la vie, et dans son audace, se mesurant avec Jupiter, il entreprit de faire descendre dans son sein le feu du ciel. « L’histoire, comme l’a dit un des maîtres de notre siècle, est d’elle-même pittoresque et dramatique ; pour qu’elle devînt terne et froide, il a fallu la barbarie du moyen âgea. »

a – Daunou, professeur d’histoire et pair de France, Études historiques

L’auteur, ayant ainsi indiqué les deux grandes méthodes historiques, et s’étant prononcé pour la meilleure, doit exprimer un regret :

Le précepte est aisé, mais l’art est difficile.

Et, en regardant son ouvrage, il doit répéter avec douleur cette confession d’un poète de l’antiquité :

Deteriora sequor !

Cet écrit n’est point une biographie de Calvin, comme quelques-uns pourraient le croire. Le nom du grand réformateur figure, il est vrai, dans le titre, et nous serons heureux, quand l’occasion s’en présentera, de restituer à cette figure, si étrangement méconnue de nos jours, ses véritables couleurs. Nous savons qu’en le faisant, nous heurterons certains préjugés enracinés, et nous déplairons à ceux qui admettent sans critique, à son sujet, les fables de la légende romaine. Tacite, il est vrai, assure que la malignité a une fausse apparence de liberté : Malignitati falsa species libertatis inest ; que l’histoire est plus favorablement écoutée quand elle noircit et dénigre : Obtrectatio et livor pronis auribus accipiuntur. Mais quel historien pourrait avoir la coupable ambition de plaire aux dépens de la vérité ? Il y a plus, nous croyons que si notre siècle se trouve encore dans de grandes erreurs sur beaucoup d’hommes et beaucoup de choses, il est capable, plus que ceux qui l’ont précédé, et surtout que celui de Tacite, d’entendre la vérité, de l’examiner, de l’apprécier, et de la recevoir.

Toutefois, nous le répétons, ce n’est pas l’histoire de Calvin, c’est celle de la Réformation en Europe au temps de ce réformateur, que nous désirons raconter. Déjà d’autres volumes sont assez avancés, et nous aimerions en publier deux nouveaux l’année prochaine. Mais nous serait-il permis, en finissant, de transcrire ici une parole de la sainte Écriture, qui nous est souvent venue à l’esprit en faisant un nouveau travail ? La voici :

Vous ne savez pas ce qui arrivera le lendemain, car qu’est-ce que votre vie ? Ce n'est certes qu’une vapeur qui paraît pour un peu de temps, et qui ensuite s’évanouit. Vous devez donc dire : Si le Seigneur le veut, et si nous vivons, nous ferons ceci ou cela. (Jacques 4.14-15)

Eaux-Vives, Genève, automne 1862.

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