John Wesley, sa vie et son œuvre

Les dernières lettres de Wesley

Bristol, 13 mars 1790.

A Jasper Winscomb, prédicateur, île de Wight.

Je ne suis pas pressé de multiplier les prédicateurs ni de diviser les circuits. Plusieurs circuits sont plutôt trop petits que trop grands. Je voudrais que nous n’eussions aucun circuit, avec moins de trois prédicateurs et de moins de quatre cents milles de parcours en quatre semaines. En tout cas, aucun circuit ne doit être divisé avant la conférence. Si nous n’y prenons pas garde, nous dégénérerons tous en gens efféminés (milksops). Soldats de Christ, debout !

Madeley, 24 mars 1790.

A Charles Atmore, prédicateur à Newcastle.

Mon cher Charles, — je suis heureux d’apprendre que vous avez créé des écoles du dimanche à Newcastle. C’est l’une des plus nobles institutions qui ont paru en Europe depuis plusieurs siècles, et elles sont destinées à grandir toujours plus, pourvu que les moniteurs et les directeurs fassent leur devoir. Rien ne pourra arrêter les progrès de cette œuvre bénie, si ce n’est la négligence de ceux qui ont à l’accomplir. Ne manquez donc pas de veiller sur eux avec le plus grand soin, afin qu’ils ne se lassent pas de bien faire.

Manchester, 4 avril 1790.

A Thomas Taylor, prédicateur à Hull.

Cher Tommy, — je n’approuve pas que le Dr Coke fasse des collectes dans votre circuit ou dans tout autre. Je le lui ai dit et ne suis pas content qu’il n’en ait pas tenu compte. C’est très mal fait. Il est très probable que des bains de mer seraient utiles au frère Simpson, surtout s’il sait se modérer en toutes choses.

Je ne sais ce que vous entendez par « parler au sujet de l’Église ». Je conseille à tous nos frères, qui ont été élevés dans I’Église anglicane, de ne pas se séparer d’elle, et je m’en tiens là. Les méthodistes doivent répandre la vie dans toutes les dénominations, et ils le feront tant qu’ils ne formeront pas une secte séparée.

Walton, 15 avril 1790.

A Anne Cutler.

Ma chère sœur, — il y a quelque chose qui sort de l’ordinaire dans la conduite de Dieu envers votre âme. Mais j’ai connu plusieurs personnes qu’il a conduites dans la même voie et à qui il a daigné manifester directement les trois personnes de la sainte Trinité. Vous pouvez en tout temps me raconter toutes vos expériences ; mais soyez prudente en en parlant à d’autres, car ils ne vous comprendraient pas. Allez au nom de Dieu et dans le pouvoir de sa force. Demandez un esprit d’entière humilité.

Dumfries, 1er juin 1790.

A Henry Moore, prédicateur à Londres.

Mon chez Henry, — me voilà donc sur les frontières d’Angleterre une fois de plusa. Ma vue est toujours au même point, mais je ne crois pas que je recouvrerai mes forces jusqu’à ce que j’aie recours à cette noble médecine, la prédication du matin… Les paroles du prince d’Orange mourant sont fortement sur mon esprit ce matin : « Que le Seigneur ait pitié de ce peuple ! » Je n’ai jamais vu autant de probabilités de faire du bien en Écosse qu’aujourd’hui, si tous nos prédicateurs voulaient être de vrais méthodistes. Dites à voire chère Nancy de m’aimer toujours autant qu’elle le peut.

a – A son retour d’Écosse, pendant la tournée dans le nord que nous avons racontée plus haut.

Dumfries, 1er juin 1790.

A Mary Clarkeb.

b – Femme d’Adam Clarke, qui fut plus tard le docteur Clarke, le célèbre commentateur de la Bible.

Ma chère sœur, — la grande question est : Que pouvons-nous faire pour Adam Clarke ? Voulez-vous sauver sa vie ? Regardez s’il y a quelque circuit où il pourrait avoir beaucoup de repos et peu d’ouvrage ; ou bien voulez-vous, lui et vous, passer le mois de septembre dans mon appartement de Kingswood, à condition qu’il ne prêchera que deux fois par semaine et ira à cheval tous les jours aux eaux de Holwells ? Je crois qu’il doit faire cela ou mourir, et je n’ai pas envie (ni vous non plus) qu’il nous quitte avant le temps. Quant aux dépenses que cela entraînera, nous vous faciliterons la chose. C’est là ce que je vois de mieux à faire. En attendant, qu’il fasse ce qu’il peut, et pas davantage.

Il est probable que je vous serai conservé un peu plus longtemps ; mes forces ne diminuent guère. J’ai fait hier quatre-vingts milles et ai prêché le soir sans souffrance. Le Seigneur fasse ce qui lui semblera bon. La paix soit avec vos esprits !

Sunderland, 14 juin 1790.

A William Black, prédicateur en Nouvelle-Écosse.

Mon cher frère, — vous avez bien fait de m’envoyer des nouvelles de vos petites sociétés. C’est là un bon commencement, quoique ce ne soit encore, en bien des lieux, que le temps des petits commencements, et que Dieu n’ait pas fait prospérer son œuvre parmi vous aussi rapidement qu’aux Etats-Unis. Mais une âme vaut mieux que toutes les marchandises du monde, et vous gagnez des âmes pendant que les autres gagnent de l’argent.

Il n’y a jamais eu, dans l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande, une aussi grande soif qu’aujourd’hui de la pure Parole de Dieu. Il en est de même dans les petites îles de Man, Wight, Jersey, Guernesey et Aurigny, dans l’Océan occidental. Dans la seule île de Man (qui n’a que trente milles de long), les sociétés comptent environ 2400 membres. Je viens de finir ma tournée en Écosse, où je n’ai jamais eu d’aussi grands auditoires. C’est ainsi qu’il plaît à Dieu de me donner un peu plus à faire avant de me rappeler à lui.

Que sont devenus les frères Scurr, Dodson et nos autres amis du Yorkshire ? Quelques-uns d’eux sans doute sont partis pour un meilleur pays, mais il vous en reste probablement quelques-uns. Je suppose que vous entretenez des rapports fréquents. Aimez-vous comme des frères.

Bristol, 9 septembre 1790.

A Adam Clarke, prédicateur à Dublin.

Cher Adam, — … Vous aurez besoin de tout le courage et de toute la prudence que Dieu vous a donnés, ou plutôt vous aurez besoin d’en renouveler continuellement la provision. Vous aurez à faire votre chemin très doucement mais très fermement entre les écueils qui sont des deux côtés. Dans le grand réveil de Londres, ma première difficulté fut d’adoucir ceux qui étaient opposés à l’œuvre, et ma seconde de combattre et de faire cesser les extravagances de ses partisans. Et ce fut là de beaucoup la partie la plus difficile de ma tâche car plusieurs de ces derniers ne voulaient accepter aucun frein. Mais je posai cette règle, très calmement d’ailleurs : « Vous devez vous soumettre ou sortir. » Attendez-vous, en faisant votre devoir, à être blâmé des deux côtés à la fois. Voici quelques directions que je vous donne ; 1° Veillez à ce qu’aucune réunion de prières ne dure au delà de neuf heures du soir, surtout le dimanche. Que la chapelle soit vide lorsque sonne neuf heures. 2° Qu’il n’y ait pas d’exhortations aux réunions de prières. 3° Prenez garde aux jalousies et à la tendance à juger le prochain. 4° Ne pensez jamais qu’un homme est un ennemi de l’œuvre, parce qu’il réprouve les irrégularités. La paix soit avec vous et avec les vôtres !

Bristol, 15 septembre 1790.

A Robert-C. Brackenbury.

Cher monsieur, — … Mon corps semble avoir à peu près fini son œuvre et être complètement usé. Le mois dernier, ma force était presque entièrement partie, et je serais volontiers resté tranquille du matin au soir. Mais, Dieu soit béni, je puis encore me traîner un peu et même prêcher une fois par jour. Lundi je m’aventurai à en faire un peu plus, et, après avoir prêché trois fois (dont une en plein air). je trouvai ma force tellement restaurée que j’aurais pu prêcher de nouveau sans inconvénient.

Je suis heureux que le frère D. ait plus de lumière à l’égard de la pleine sanctification. Cette doctrine est le grand dépôt que Dieu a confié au peuple appelé méthodiste ; et il semble qu’il l’ait suscité surtout pour la propager.

Londres, 23 octobre 1790.

A James Macdonald, prédicateur à Newry.

Mon cher frère, vous avez grandement raison de bénir Dieu pour l’œuvre glorieuse qu’il a récemment accomplie chez vous, et je ne doute pas qu’elle continuera et grandira, si les personnes qui en ont été les objets continuent à marcher humblement et fidèlement avec Dieu. Exhortez tous nos frères à s’approcher de Dieu au moyen du jeûne et de la prière ; le premier de ces moyens a été presque universellement négligé par les méthodistes, en Angleterre et en Irlande. C’est pourtant une remarque vraie de Kempis : « Plus tu renonceras à toi-même, plus tu croîtras en grâce. »

Londres, 8 novembre 1790.

A un prédicateur.

… Notre peuple ne peut pas croître en grâce, s’il ne se livre pas à la lecture. Un peuple qui lit se développe et s’instruit. Un peuple qui parle beaucoup n’en sait pas long. Efforcez-vous de persuader cela à vos gens, et vous verrez bientôt le fruit de vos travaux.

A Alexandre Mather, prédicateur.

Non, Aleck, non ! Le danger de ruine pour le méthodisme n’est pas là ! Il est d’un tout autre côté. Nos prédicateurs, du moins quelques-uns, sont déchus ; ils ne sont pas spirituels. Ils ne vivent pas pour Dieu. Ils sont amollis, énervés, effrayés de l’ignominie et de la fatigue. Ils n’ont pas l’esprit que Dieu donna à Thomas Lee à Pateley Bridge, ou à vous-même à Boston. Donnez-moi cent prédicateurs qui ne craignent que le péché et ne désirent que Dieu, et je ne me soucie pas plus que d’un fétu qu’ils soient ministres ou laïques ; ils ébranleront les portes de l’enfer et établiront le royaume des cieux sur la terre.

Londres, 26 novembre 1790.

A Adam Clarke, prédicateur à Dublin.

Cher Adam,. — le récit que vous m’envoyez de la continuation d’une grande œuvre de Dieu à Jersey me donne une vive satisfaction. Conserver la grâce de Dieu est plus que l’obtenir ; un à peine sur trois le fait. Et il faut dire cela fortement et explicitement à ceux qui ont goûté le parfait amour. Si nous trouvons que quelqu’un de nos prédicateurs locaux ou de nos conducteurs parle directement ou indirectement contre cette grâce, qu’il cesse d’être prédicateur ou conducteur. Je me demande même s’il peut continuer à faire partie de la société.

3 janvier 1791.

A Adam Clarke, prédicateur à Dublin.

Cher Adam, — vous m’étonnez quand vous me parlez d’une affliction si grande au sujet de la mort d’un enfant. C’est certainement la preuve d’une affection mal réglée. Si vous les aimez ainsi, tous vos enfants vous seront enlevés. Comment se conduisit M. de Renty, lorsque sa femme fut mourante ? Voilà un exemple pour un chrétien.

Londres, 18 janvier 1791.

A Mary Clarke.

… Le frère Clarke et vous avez de nombreuses preuves que ceux que le Seigneur aime il les châtie. Il connaît la voie où vous marchez ; quand vous aurez été éprouvés, vous en sortirez purifiés comme l’or.

Londres, 29 janvier 1791.

A John Booth, prédicateur à Keighley.

Mon cher frère, — vous me donnez un très agréable compte rendu des progrès de l’œuvre de Dieu dans votre circuit. Quant aux pauvres et infatués fanatiques de Keighley, le mieux est que vous ne parliez jamais d’eux en public ; mais, lorsque l’occasion se présente, frappez à la racine leurs erreurs en prouvant clairement la vérité qu’ils nient. Et, lorsque vous en rencontrez quelqu’un en particulier, parlez alors et ne vous épargnez pas. Toutes les fois que vous avez l’occasion de parler aux croyants, pressez-les de tendre à la perfection. N’épargnez aucune peine, et que Dieu, notre Dieu, vous bénisse.

Londres, 31 janvier 1791.

A Miss Cambridge.

Ma chère sœur, — j’ai reçu votre lettre il y a une heure. Je vous remercie de m’écrire si longuement et si librement. Usez-en toujours ainsi envers moi comme avec un ami qui vous aime bien. M. Barber à la gloire de Dieu à cœur, comme ses collaborateurs. Rendez-leur tout honneur, et obéissez-leur en toute chose autant que la conscience le permet. Mais elle ne vous permet pas d’être silencieuse quand Dieu vous commande de parler ; toutefois, je tiens à ce que vous donniez aussi peu de sujets de plainte que possible. Je vous conseille par conséquent de ne jamais parler dans une localité où un prédicateur parle à la même heure, de peur de lui enlever ses auditeurs. Evitez aussi même l’apparence de l’orgueil ou de la prétention. S’il vous faut des livres ou quelque autre chose, faites le-moi savoir ; j’ai fort à cœur votre bonheur. Pendant le peu de temps que j’ai à passer sur la terre, priez pour votre affectionné frère.

Près de Londres, 1er février 1791.

A Ezéchiel Cooper, prédicateur en Amérique.

Mon cher frère, — ceux qui désirent m’écrire ou me dire quelque chose n’ont pas de temps à perdre, car le temps m’a secoué par la main, et la mort n’est plus bien loin derrière moi. Mais j’ai lieu d’être reconnaissant pour le temps qui est passé ; j’ai ressenti peu des infirmités de la vieillesse jusqu’à quatre-vingt-six ans. Ce n’est que depuis un an et demi que ma force et ma vue ont faibli. Néanmoins, si je ne puis plus courir, je puis encore griffonner un peu et me traîner. Et probablement je ne serais pas capable d’en faire autant si je n’étais soutenu par les prières que plusieurs parmi vous font en ma faveur.

J’ai publié un récit de l’œuvre que Dieu a faite dans la Grande-Bretagne et en Irlande depuis plus d’un demi-siècle. Nous aurions besoin que quelqu’un d’entre vous y joignît une relation de ce que le Seigneur a fait en Amérique, depuis le temps ou Richard Boardman accepta l’invitation de s’y rendre et quitta sa patrie pour vous être utile. Veillez bien à ne jamais donner accès à l’idée de vous séparer de vos frères d’Europe. Ne perdez pas une occasion de déclarer à tous les hommes que les méthodistes sont un seul peuple par tout le monde, et que leur détermination arrêtée est de demeurer unis. « Que les montagnes s’élèvent entre nous et que les océans roulent leurs flots sans réussir jamais à nous séparer. »

Londres, 9 février 1791.

A Adam Clarke, prédicateur à Dublin.

Cher Adam, — vous avez bien raison de louer Dieu, qui vous donne de la force selon vos jours. Il vous a soutenu d’une manière peu commune dans vos afflictions si compliquées. Vous pouvez bien dire : « Je mettrai ma confiance en toi aussi longtemps que je vivrai. » Je voudrais que le Dr Whitehead considérât votre cas et nous dit ce qu’il en pense. Je crains non pas que vous fassiez trop peu, mais trop. Faites peu à la fois, afin que vous puissiez faire davantage.

Mon affection aux sœurs Cookman et Boyle, mais il est douteux pour moi que je traverse jamais plus les mers.

Quel est le prédicateur qui a omis pour la première fois de réunir la société ? Je m’étonne qu’il n’ait pas détruit l’œuvre.

Vous avez bien fait de fonder la Société des étrangers : c’est une excellente institution.

… Envoyez-moi vos pensées relativement au magnétisme animal. Je m’oppose à cette duperie de Satan. Deux de nos prédicateurs ici sont en danger de se laisser prendre à cette séduction satanique. S’ils persistent à la défendre, je devrai les exclure.

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