Aux pieds du Maître – Le Ciel et l'Enfer

VI. Le Ciel et l'Enfer

Première partie

Le disciple :

Seigneur, où sont le Ciel et l'Enfer et que sont-ils ?

Le Seigneur :

1. Le ciel et l'enfer sont deux états différents dans le monde spirituel ; états qui ont leur fondement dans le cœur de l'homme. C'est dans ce monde seulement qu'ils ont leur origine. L'homme, qui ne peut pas voir son propre esprit, ne peut pas voir non plus ces deux états de l'esprit. Il ne peut que constater leur présence au dedans de lui, de même qu'il ressent immédiatement la souffrance causée par un coup violent ou la douceur d'un aliment agréable. Ce n'est parfois qu'au bout d'un certain laps de temps que la blessure causée par le coup s'enflamme, amenant une souffrance plus grande, comme aussi ce n'est qu'après avoir été digéré que l'aliment donne des forces nouvelles. Ainsi, la souffrance et la honte qui suivent le péché, tout comme la joie que procure une vie d'obéissance, ne sont ressenties immédiatement que dans une faible mesure ; mais la punition comme la récompense seront intégralement réalisées plus tard, au seuil du monde spirituel.

2. L'homme, tant qu'il vit dans ce monde, n'est jamais pleinement satisfait de rien ; sans cesse, il souhaite un changement, soit dans les saisons, soit dans les choses dont il est entouré, ce qui prouve à l'évidence qu'aucune vraie satisfaction ne peut être trouvée dans ce qui est périssable et sujet à variations. C'est pour cette raison même que l'homme recherche ce qui ne change pas, un état dans lequel rien de ce qui est contraire à sa nature ou à ses désirs ne puisse se produire. Lorsque, dans cette recherche, il a trouvé ces réalités en moi, il n'a plus aucun désir de changement, comme nul ne songe à se plaindre d'un ami qui lui procure une joie parfaite. Il ne désire plus en changer, car cette amitié parfaite est précisément l'objet de toutes nos aspirations. Obtenir une paix véritable et bien réelle, c'est le but recherché par tout être humain.

Parfois, un homme éprouve soudainement une impression de tristesse ou de bien-être, sans avoir rien fait pour cela. Cette impression vient d'une pénétration en lui du monde spirituel, soit du ciel soit de l'enfer, dont l'ombre s'étend quelquefois sur le cœur humain. Peu à peu, cet homme en arrive à être en contact permanent avec l'une ou l'autre de ces deux influences puis, suivant que le pousseront ses habitudes bonnes ou malsaines, il s'identifie avec l'un de ces états et y demeure à toujours. C'est ainsi que le ciel ou l'enfer commence dans la vie d'un homme déjà dès ici bas, et pendant qu'il vit encore dans ce monde. Après sa mort, ayant quitté ce corps de chair, il entre pleinement dans l'état vers lequel il s'est laissé attirer.

3. Il en est qui prétendent que le désir est à la source de toute souffrance, de toute peine et que, par conséquent, nous ne devons pas désirer la joie du ciel, la joie en Dieu. Ils affirment que le salut consiste à tuer tout désir. N'est-ce pas tout aussi insensé que de dire à un homme qui meurt de soif qu'il doit tuer la soif ? La soif, comme le désir, est de ce monde. La tuer, la supprimer, plutôt que l'étancher, l'apaiser, c'est détruire la vie. Ce n'est pas le salut, mais la mort. Par conséquent, de même que l'homme altéré réclame de l'eau et que cette eau a été donnée pour apaiser la soif, de même, dans le domaine de l'esprit, l'âme altérée réclame la vraie joie et la paix véritable. Aussi, lorsque l'esprit trouve Celui qui a créé en lui ces aspirations, il reçoit de Lui une joie et une satisfaction infiniment plus grandes que celles de l'homme altéré qui découvre une source d'eau. Cette paix et cette joie en Dieu, voilà ce que nous appelons le ciel.

4. Dans ce monde, beaucoup ressemblent à l'homme qui mourut de soif, bien qu'entouré d'eau de toutes parts, de l'eau sans limites de l'océan. Cette eau salée ne pouvait ni calmer sa soif ni sauver sa vie : il n'y trouva que la mort. C'est ainsi que beaucoup d'hommes meurent de soif bien qu'entourés d'une mer sans limites de vérité, de vie et d'amour ; la cause de cette mort, c'est leur péché. Mais, pour ceux qui se repentent et se tournent vers moi, des sources d'eau vive jaillissent de mon amour infini si bien que, inondés de cet amour sans bornes, ils trouvent en Celui qui les aime ainsi, le vrai repos et la vie éternelle. C'est ce qu'ils appellent le ciel.

Bien des hommes aiment tellement le monde et lui sont si fortement attachés que, malgré l'attirance vers les choses divines qu'ils ressentent lorsque, en contact avec mes enfants, ils écoutent leur témoignage, ils retombent toujours, comme des pierres attirées à la terre par une invincible force d'attraction. De chute en chute, ils finissent par mourir en enfer. Quant à celui qui, se repentant de tout son cœur, s'attache fortement à moi, je le purifierai par le moyen des épreuves que mon amour lui dispensera et je ferai de son cœur un temple pour le Roi des rois. Et quant aux choses du monde, à la gloire et aux royaumes, l'histoire nous montre que si, aujourd'hui, les rois se glorifient de leur majesté, de leurs couronnes et de leurs trônes, demain, il n'y aura plus ni trône, ni majesté, car tout cela n'est que poussière. La gloire, la grandeur, le trône et la couronne de ceux qui deviennent les enfants du Royaume de Dieu sont éternels. Cette royauté et cette joie célestes ne connaîtront pas de fin.

6. Pour combler leur ambition et augmenter leurs jouissances, les pécheurs volent tout ce qu'ils peuvent des plaisirs des autres. C'est la raison pour laquelle, en sortant de leur maison, ils la ferment à clef [1]. Il sera nécessaire de tout fermer ainsi, aussi longtemps que le cœur de l'homme restera fermé à l'amour de son Créateur. Lorsque le cœur s'ouvre à Celui qui se tient à la porte et qui frappe, (Ap. 3.20) tous ses désirs et ses aspirations sont comblés. Il n'y a plus aucune raison de fermer sa demeure, car alors, plutôt que de se faire du tort mutuellement, les hommes se servent les uns les autres avec amour. En effet, dès que les hommes obéissent à la volonté de leur Père céleste, ils sont contraints par son amour à se dévouer au service de leurs frères et, dans ce service pour l'amour du Père, ils trouvent un bonheur merveilleux en même temps qu'une joie infinie. C'est le ciel même.

7. Le jour où, pour sauver de l'enfer les pécheurs, fils d'Adam, et leur ouvrir le ciel, je donnai ma vie sur la croix, deux brigands étaient là avec moi, l'un à ma droite, l'autre à ma gauche, En apparence, nous souffrions le même supplice ; nous étions crucifiés tous les trois et cependant, au point de vue spirituel quelle différence ! L'un des deux me ferma son cœur et, n'ayant pas voulu se repentir, il mourut dans son péché. L'autre se repentit sincèrement ; il m'ouvrit son cœur à moi qui mourais à cause du péché ; il obtint la vie nouvelle et, ce même jour, il entra dans le paradis. (Luc 23.39-42) Ce paradis n'est pas seulement un état d'après la mort ; il commence dans le cœur de l'homme dès ici-bas, bien que le monde ne puisse pas le voir (Luc 17.21). Un de mes fidèles témoins, mis à mort dans d'affreuses tortures, était tellement rempli de la joie du ciel qu'il disait à ceux qui le martyrisaient : « Je voudrais être capable d'ouvrir mon cœur, pour vous y faire voir cette paix véritable et magnifique que le monde ne peut ni donner ni ôter. Vous seriez alors convaincus de sa réalité. Mais c'est la manne cachée, qui ne peut être vue ni montrée. » Après qu'ils l'eurent fait mourir, ils ouvrirent son cœur pour voir s'ils y trouveraient quelque chose d'extraordinaire, mais ne trouvèrent qu'un simple cœur de chair. Ceux-là seuls qui ont obtenu un cœur nouveau connaissent la réalité et la joie du ciel.

8. Le sein de Marie, dans lequel je demeurai quelques mois sous une forme humaine, fut béni moins richement que ne l'est le cœur de celui chez qui je fais ma demeure pour jamais, le remplissant de la joie du ciel. (Luc 2.27-28).

9. Il y a aussi beaucoup d'hommes qui, malgré leur ardent désir d'une vie Céleste ne l'obtiennent jamais, par suite de leur négligence et de leur ignorance. Un pauvre mendiant s'assit pendant vingt-et-un ans au-dessus de la cachette, inconnue de tous, où l'on avait enfermé un trésor royal. Comme il désirait, espérait même devenir riche un jour, il mendiait des sous de cuivre. Puis il mourut dans la pauvreté et un complet dénuement, ignorant tout, jusqu'à la fin, des immenses richesses au-dessus desquelles il avait été assis pendant si longtemps. Les autorités, qui soupçonnaient ce mendiant d'avoir enterré de l'argent à l'endroit où il se tenait habituellement, firent creuser à cette même place ; on y découvrit un riche trésor qui fut versé dans la caisse royale. Repentez-vous, car le Royaume des cieux est aussi tout près de vous. (Mat. 4.17).

10. Ceux qui n'ont aucune expérience de la vie de l'esprit déclarent que, dans ce triste monde, il est impossible d'avoir la joie du ciel et la vraie paix. Au contraire, ceux qui connaissent la vie nouvelle donnée par l'esprit savent que, dans ce monde froid et troublé, les joies du ciel et des torrents de paix inondent le cœur des croyants, pareils à ces sources chaudes qui parfois jaillissent du sol glacé des contrées les plus froides. C'est le feu sacré de l'Esprit Saint qui brûle ainsi dans le cœur de mes enfants.

11. Dieu créa tous les hommes d'un seul sang, à son image et à sa ressemblance, mais Il a donné à chacun une constitution, une nature et des qualités différentes. Si toutes les fleurs, ici-bas, avaient la même couleur et le même parfum, la beauté disparaîtrait de la face de la terre. La lumière du soleil, lorsqu'elle éclaire des verres de couleurs différentes, ne change pas ces couleurs mais rend manifeste à nos yeux leur variété et leur beauté. C'est ainsi que le Soleil de justice, brillant dans ce monde et dans le monde à venir, rend manifeste l'amour ineffable et la gloire de Dieu dans la personne de ses enfants. De cette manière, Moi en eux et eux en Moi, nous nous réjouirons à toujours et à perpétuité.

Seconde partie

Le disciple :

Seigneur, il en est qui assurent que le réconfort et la joie qu'éprouvent les croyants ne sont que le résultat de leurs propres pensées. Est-ce vrai ?

Le Seigneur :

1. Le réconfort et la vraie joie ressentis par les croyants sont le résultat de ma présence vivifiante et de l'abondance de vie dont les remplit le Saint-Esprit. Ceux qui prétendent que cette joie spirituelle n'est que le résultat de leur imagination sont des insensés, tout comme cet aveugle-né qui, assis dehors par un jour d'hiver, se chauffait au soleil. On lui demanda ce qu'il pensait de la chaleur du soleil et il répondit en niant jusqu'à l'existence même de ce soleil dont il sentait la bonne chaleur. Il disait : « Cette chaleur provient de mon propre corps seulement, c'est maintenant que je la réalise d'une manière extérieure et sensible. C'est un effet de mon imagination. Lorsque les gens prétendent qu'il existe une chose pareille à une boule de feu, suspendue dans les airs sans aucun support, et qu'ils l'appellent soleil, ils ne disent que des non-sens ». « Veillez donc à ce que personne ne vous séduise par la philosophie ou des illusions trompeuses, selon la tradition des hommes » (Col. 2.8).

2. Si la vraie joie dépendait de l'imagination d'un homme, tout le monde de la pensée et de la philosophie en déborderait. Pourtant, à l'exception de mes fidèles, aucun des philosophes ou des docteurs de ce monde ne possède la paix véritable. Ils n'ont rien acquis, si ce n'est une sorte de confort fictif, en suivant des préceptes qu'ils ont eux-mêmes établis.

J'ai, il est vrai, créé dans la nature humaine le besoin et la capacité de recevoir le feu et le souffle de l'esprit, au moyen desquels l'homme peut obtenir la joie et la vie divines, de même que la capacité existe, dans le charbon, d'absorber le feu et de brûler. Sans oxygène, impossible d'avoir du feu ; sans le souffle de l'esprit dans le cœur de l'homme, celui-ci resterait dans les ténèbres, sans jamais devenir capable de recevoir la lumière ni d'obtenir la joie céleste.

3. Le cœur et les pensées de l'homme doivent être préparés à vibrer sous l'action du Saint-Esprit, exactement comme les cordes d'une cithare ou d'un violon qui, lorsqu'elles ont été accordées, vibrent harmonieusement au moindre attouchement du plectrum ou de l'archet. Si elles ne sont pas accordées, l'archet ne produira, au contraire, que des sons discordants. Les sons harmonieux produits par l'accord de toutes les cordes de l'instrument dépendent aussi de l'air environnant. Le mouvement des cordes, en effet, se communique à l'air dont les vibrations atteignent notre oreille et y produisent une impression délicieuse. De même aussi, le souffle vivifiant de l'esprit est indispensable pour créer dans la volonté et l'imagination de l'homme la céleste musique de l'union avec Dieu. A cette seule condition, un accord parfait pourra être produit dans la vie de l'homme dès ici-bas, et pour toujours au ciel, dans l'éternité.

Le disciple :

Parfois, je fais l'expérience que toute ma joie et ma paix semblent s'évanouir en un instant. Seigneur, est-ce la conséquence d'un péché caché que j'ai commis, ou bien cet état a-t-il quelque autre cause dont je ne me rends pas compte ?

Le Seigneur :

4. Il arrive, certainement, que cet état soit dû à une désobéissance, mais quelquefois aussi, bien que je semble laisser mes enfants abandonnés et sans paix, ce n'est que pour un peu de temps. Je veux ainsi leur faire voir leur complète faiblesse, afin qu'ils sachent que, sans moi, ils ne sont que des ossements desséchés. (Ez. 37.1-4). S'ils demeuraient longtemps dans une paix que rien ne viendrait troubler, ils pourraient oublier leur ancien état de péché et, comme Satan, s'enfler d'orgueil en se croyant des dieux. (1 Tim. 3.6 ; Jude 6 ; comparer Es. 14.12-17) Plus encore, c'est une manière de les instruire. S'ils restent alors humblement et fidèlement attachés à moi, leur Créateur, ils seront bénis dans le ciel au siècle des siècles.

5. Il arrive aussi que, lorsque je remplis le cœur de mes enfants de ma présence et de la plénitude du Saint Esprit, leur âme en reçoit une joie et un bonheur divins. Le corps terrestre est incapable de supporter cet état glorieux et béni ; il en est comme épuisé ou bien il tombe dans une sorte d'inconscience, car la chair et le sang ne peuvent pas hériter du Royaume de Dieu, ni ce qui est mortel prendre la place de l'immortel, jusqu'à ce que l'homme mortel soit rendu glorieux, ayant échappé au pouvoir de la vanité et de la mort. (1 Cor. 15.50-53 ; Rom. 8.19-22). Alors enfin, ma volonté sera faite sur la terre par toute créature, comme elle l'est dans le ciel. Alors, le chagrin et la tristesse, la mort et le deuil, les cris et la douleur, seront abolis à jamais et mes enfants bien-aimés régneront pour toujours dans le royaume de mon Père, où tout est joie par le Saint-Esprit. (Rom. 14.17 ; Ap. 21.4 ; 22)

Prière

Seigneur, mon cœur déborde de reconnaissance pour tes dons et tes bénédictions de toute sorte. La reconnaissance du cœur et des lèvres serait insuffisante si je ne mettais pas ma vie à ton service pour te rendre témoignage par mes actions. A Toi la gratitude et la louange, car Tu as sorti de son néant un être sans valeur tel que moi, pour en faire ton élu, et tu m'as rendu heureux dans ton amour et dans le sentiment de ta présence. Je ne te connais pas parfaitement ; je ne connais même pas mes propres besoins mais toi, ô Père, tu connais parfaitement tes créatures et leurs besoins. Je suis incapable de m'aimer moi-même autant que tu m'aimes. En réalité, m'aimer moi-même, c'est aimer de tout mon cœur, de toute mon âme, l'amour sans bornes qui m'a créé et qui est Toi-même. Tu m'as créé avec un seul cœur, afin qu'il soit à Un seul, à Toi, qui m'as créé.

Seigneur, être assis à tes pieds est mille fois meilleur et plus précieux que d'être assis devant n'importe quel trône terrestre ; c'est vraiment être assis pour toujours dans le Royaume éternel. En ce moment, je m'offre moi-même en holocauste, sur l'autel, à tes pieds bénis. Accepte-moi quand et comme tu le voudras. Use de moi selon ton plaisir. Tu es à moi et je suis à Toi. Tu m'as créé à ton image, d'un peu de poussière, et tu m'as accordé le droit de devenir ton enfant. L'honneur, la gloire et la louange soient à Toi au siècle des siècles.

Amen.


[1] En Orient, il est d'un usage courant de ne pas fermer sa demeure lorsqu'on en sort.

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