Jean Calvin, l’homme et l’œuvre

Note bibliographique

La tâche de celui qui veut écrire une vie de Calvin a été facilitée par plusieurs bibliographies très détaillées de tous ses écrits. La meilleure est celle d’Alfred Erichson, le plus récent éditeur des Œuvres de Calvin : celle qu’il fit pour les derniers volumes de la séried et qu’il a également publiée séparément en un format plus condensé et plus commode sous le titre de Bibliographia Calviniana. Une liste utile à consulter se trouve aussi dans le second volume de la Cambridge Modern History. Philip Schaff, dans le septième volume de son History of the Christian Church a fait une nomenclature qui, bien que plus ancienne, est très utile aussi, à cause des aperçus qu’elle renferme sur la valeur relative des auteurs cités.

dOpera, lix, 462-586. Erichson est mort le 12 avril 1901.

Toutes les collections antérieures des œuvres complètes de Calvin ont été remplacées par l’édition magistrale des Joannis Calvini Opera quae supersunt omnia commencée en 1863 et terminée en 1900, sous la direction des savants éditeurs strasbourgeois, Jean-Guillaume Baum, Edouard Cunitz, Edouard Reuss, Paul Lobstein, Alfred Erichson et leurs collaborateurs.

[Brunswick. Ce sont les volumes xxix-lxxxvii du Corpus Reformatorum. A. Erichson en a exposé le plan et l’exécution dans le Bulletin de la Société de l’Histoire du Protestantisme français, xlix, 613 (1900).]

Cette série renferme dans les volumes i-xa les traités théologiques de Calvin ; dans les volumes xb-xx les lettres de Calvin ou celles qui lui ont été adressées, dans les volumes xxiii-lv ses travaux exégétiques et homilétiques. Quand cette édition se trouve citée dans le cours du présent ouvrage, c’est sous le nom de Opera.

Il faut ajouter aux lettres que contiennent les Opera la Correspondance des Réformateurs dans les pays de langue française, si soigneusement annotée par Aimé Louis Herminjarde et dont neuf volumes avaient paru quand leur publication a été interrompue par la mort du savant de premier ordre qui les éditait. Les derniers volumes d’Herminjard ont eu l’avantage de paraître après la section correspondante des Opera. L’éditeur a pu ainsi les citer dans ses références aux lettres de Calvin, et profiter du résultat de recherches postérieures. L’édition des Lettres françaises de Calvin faite par M. Jules Bonnet ne doit être employée qu’en la comparant à celle plus critique des Opera ou encore à celle d’Herminjard.

e – Genève, 1866-1897. La série se termine avec l’année 1544. Herminjard est mort à Lausanne le 11 décembre 1900.

Le volume xxi des Opera renferme les premières Vies de Calvin par ses amis Bèze et Colladon, publiées en 1504, 1565 et 1575 dans leurs éditions originales.

La plus importante des biographies modernes, la première en date et la plus complète, si l’on tient compte de l’époque où elle a été écrite, est celle de Paul Henry, pasteur de l’Église française de Berlin : Das Leben Johann Calvins, des grossen Reformators, en trois volumes, Hambourg, 1835-1844. Pour son temps, c’était la biographie la plus circonstanciée, mais aussi la plus élogieuse du réformateur genevois, son plus habile panégyrique. Cet ouvrage a été complètement dépassé par des publications plus récentes.

Un travail dont le but est tout l’inverse du précédent, mais qui ne peut prétendre à aucune valeur scientifique, étant tout au contraire violemment polémique et sans scrupules, c’est L’Histoire de la vie, des ouvrages et des doctrines de Calvin par le catholique Vincent Audin, publiée à Paris en 1841, en deux volumes.

En 1850, un historien anglais, Thomas-Henry Dyer, a publié à Londres, en un seul fort volume, The Life of John Calvin. Il se base surtout sur une étude minutieuse et très personnelle de la correspondance de Calvin, et s’est aussi servi de l’ouvrage de Paul Henry ; toutefois ses opinions sont fort différentes de celles du biographe berlinois. Il critique Calvin, il est même sévère pour lui, mais son livre a beaucoup de valeur. Il ne s’étend pas sur les origines du réformateur et ses débuts, mais raconte en détail les démêlés qu’il eut à soutenir à Genève.

Félix Bungener a fait paraître à Paris, en 1862 et 1863, un volume d’histoire populaire, intitulé Calvin, sa vie, son œuvre et ses écrits. Quoique bien écrit, cet ouvrage n’ajoute pas grand chose à ce que l’on savait déjà sur le sujet.

L’une des meilleures parmi les anciennes biographies de Calvin est celle du pasteur bâlois Ernst Stähelin, Johannes Calvin, Leben und ausgewählte Schriften, publiée à Eiberfeld, en deux volumes, en 1863. Ce travail, consciencieusement rédigé, se distingue par l’effort que l’auteur a tenté pour caractériser la personnalité du réformateur.

L’ouvrage de Jean-Henri Merle d’Aubigné, professeur à l’École de Théologie de la Société Evangélique de Genève, dont le premier volume a paru en 1863 sous ce titre : Histoire de la Réformation en Europe au temps de Calvin, mérite surtout d’être mentionné à cause de son énorme diffusion, en particulier dans les pays de langue anglaise. Son histoire de la Réforme genevoise va jusqu’en 1542. Bien que l’auteur ait mis des documents originaux à la base de son travail, il est extrêmement partial, peint ses portraits sans ombres et sacrifie sans cesse à l’effet dramatique.

Une biographie bien supérieure est celle du professeur vieux-catholique à l’université de Bonn, Frédéric-Guillaume Kampschulte, Johann Calvin, seine Kirche und sein Staat in Genf. Le premier des trois volumes dont devait se composer l’ouvrage est sorti de presse en 1869 ; le second était terminé au moment de la mort de l’écrivain — 3 décembre 1872 — mais, bien que confié à son ami, le professeur Carl-Adolphe Cornelius, de Munich, il n’a été publié qu’en 1899 et cela par les soins du Dr Walter Gœtz, de l’université de Leipzig.

Le troisième n’a jamais été commencé. Bien que, sans contredit, peu sympathique à Calvin, trop disposé à critiquer le réformateur et très influencé par les Galiffe, qui regardaient Calvin comme un usurpateur étranger à Genève, le travail de Kampschulte, quoique inachevé, est, soit pour son exactitude scientifique, soit pour sa connaissance des événements auxquels Calvin prit part, indispensable à qui veut étudier le réformateur.

[Jacques-Auguste Galiffe et Jean-Barthélemy-Gaifre Galiffe, de Genève, père et fils, soutinrent avec beaucoup de savoir la thèse qui représente Calvin comme un intrus étranger, imposant sa tyrannie à Genève qui jusqu’à lui avait été libre. Les principaux ouvrages de Galiffe père sont : Matériaux pour l’histoire de Genève, Genève, 1829, et Notices généalogiques sur les familles genevoises, ibid., 1836. Ceux du fils sont : Quelques pages d’histoire exacte (procès Perrin et Maigret), dans les Mémoires de l’Institut national genevois pour 1862, et Nouvelles pages d’histoire exacte (procès d’Ameaux), ibid. pour 1863. Ils représentent dans les temps modernes l’opposition des anciennes familles genevoises contre Calvin. Tout en reconnaissant que le jugement de Kampschulte est prédisposé à la sévérité, nous croyons qu’il y a de l’exagération dans les critiques que lui adresse Doumergue (ii, 717-721) ; celui-ci déclare cependant : « Pour des historiens catholiques, il est certain que Kampschulte et Cornelius ont fait preuve, vis-à-vis de Calvin, d’une impartialité remarquable, » bien que cette impartialité lui paraisse insuffisante.]

En la personne d’Amédée Roget, professeur à l’université de Genève, cette ville a possédé un historien de valeur. Son Histoire du peuple de Genève depuis la Réforme jusqu’à l’Escalade, en sept volumes, 1870-1883f, décrit la période qui s’étend de 1536 à 1567 et par conséquent toute l’activité de Calvin à Genève. Ce récit, très impartial, parlant des choses d’une manière tout à fait objective, a une grande valeur, due en particulier aux nombreuses citations tirées des archives genevoises que l’auteur connaissait à fond.

f – Publiée à Genève. Roget comptait poursuivre son ouvrage, mais la mort l’a interrompu le 29 septembre 1883.

En 1888, un jeune savant français, Abel Lefranc, aujourd’hui professeur au Collège de France, a fait un brillant début dans la carrière en publiant, à Paris, une étude fort importante sur la Jeunesse de Calvin.

Quatre ans plus tard, feu le professeur Philip Schaff a donné, dans le septième volume de son History of the Christian Church, une esquisse soigneusement faite de la carrière de Calvin et de son influence. Elle se distingue par les mérites et par les défauts habituels à cet auteur.

M. Eugène Choisy, savant pasteur genevois, a publié, en 1897, La théocratie à Genève au temps de Calvin. C’est un exposé succinct, mais d’une réelle valeur, des principes qui guidaient Calvin dans sa politique genevoise.

Un article très remarquable est celui de feu le professeur Rudolf Stähelin dans la troisième édition (due à Albert Hauck) de la Realencyclopädie für protestantische Theologie und Kircheg.

giii, 654-683, Leipzig, 1897. R. Stähelin est mort le 13 mars 1900.

Un pasteur de Halle, August Lang, a étudié à fond et avec succès la conversion de Calvin, ses premiers écrits théologiques et ce qu’il devait aux premiers réformateurs. La discussion s’est poursuivie dans des articles de la plus grande importance, dus à la plume du professeur Karl Müller de Tubingue et du professeur Paul Wernle de Bâle.

[Die äliesten theologischen Arbeiten Calvins, dans les Neue Jahrbücher für deutsche Theologie de 1893, Bonn, pp. 273-300 ; Die Bekehrung Johannes Calvins, dans les Studien zur Geschichte der Theologie und Kirche, Leipzig, 1897, i, 1-57 ; Der Evangelienkommentar Martin Butzers, Leipzig, 1900. Il a aussi écrit sur la vie de famille de Calvin et ses relations avec Luther et Mélanchthon. Calvins Bekehrung, dans les Nachrichten von der Königl. Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen pour 1905, pp. 188-255. Noch einmal die Bekehrung Calvins, dans la Zeitschrift für Kirchengeschichte, xxvii, 84-99 (1906).]

En 1899, feu le professeur Carl-Adolphe Cornelius de Munich, l’ami et le coreligionnaire vieux-catholique de Kampschulte, a réuni les études qu’il avait faites en vue de terminer le travail inachevé de celui-ci. Il les a groupées en un volume avec quelques autres monographies sous le titre de : Travaux historiques concernant surtout la période de la Réformation. Dans ce livre, il étudie le voyage de Calvin en Italie et son œuvre à Genève jusqu’en 1548. Son ouvrage est fait dans le même esprit que celui de Kampschulte, avec la même connaissance approfondie de toutes les sources accessibles. Pour cette période-là, Cornelius est indispensable à qui veut étudier Calvin.

[Carl-Adolphe Cornelius mort le 10 février 1903. Historische Arbeiten vornehmlich zur Reformationszeit, Leipzig. La plupart de ces études avaient d’abord paru dans les Abhandlungen der königlichen Akademie, Munich, 1886-1895.]

L’année 1899, où parut le volume de Cornelius, vit également la publication du premier tome de la remarquable biographie qui sera un monument élevé non seulement au réformateur de Genève, mais aussi à son laborieux biographe, le professeur Emile Doumergue, de la Faculté de Théologie de Montauban. Trois des cinq volumes projetés ont paru, le second en 1902 et le troisième dans les dernières semaines de 1905. Le premier fait connaître l’histoire de Calvin jusqu’à la publication de l’Institution, le second jusqu’à son rappel à Genève, le troisième enfin est consacré à décrire cette ville ainsi que l’intérieur et l’entourage de Calvin. On n’a pas entrepris jusqu’ici de faire une biographie aussi détaillée d’aucun autre des chefs de la Réforme. L’ouvrage de Doumergue est intitulé : Jean Calvin : les hommes et les choses de son tempsh. L’intérêt et la beauté du livre sont rehaussés, non seulement par d’abondantes reproductions photographiques, mais encore par des dessins d’une réelle valeur artistique dus au crayon d’Henri-Armand Delille. Il laisse peu à désirer pour l’ampleur et la minutie de l’exposé. Mais on lui a fréquemment reproché, et avec raison, d’être un perpétuel panégyrique. M. Doumergue est, avant tout, un admirateur de son héros, mais un admirateur qui ne s’épargne pas la peine, et s’il est incontestablement entraîné à des exagérations, c’est en raison même de son enthousiasme. Son jugement critique est également mis parfois en défaut par son désir d’extraire des sources tout ce qu’on peut en tirer et de présenter Calvin sous le jour le plus favorable. Malgré cela, cet ouvrage a une grande valeur pour tous ceux qui désirent étudier Calvin. L’auteur du présent livre tient à reconnaître tout ce qu’il doit à M. le professeur Doumergue et espère que cette œuvre monumentale, déjà si avancée, pourra se poursuivre sans interruption jusqu’à son complet achèvement.

h – Publié à Lausanne (G. Bridel). Ce sont des in-quarto qui ont presque la dimension des in-folio du xvie siècle. Le premier volume contient 648 pages, le second 829 et le troisième 734.

Dans le second volume de The Cambridge Modern History, publié en 1904 sous le titre de Calvin and the Reformed Church, le Dr Andrew Martin Fairbairn, Principal de Mansfield College, Oxford, a donné un court résumé de l’œuvre de Calvin. Ce travail se distingue surtout par une profonde pénétration des mobiles qui dirigeaient le réformateur et de leur importance spirituelle.

Aucune notice bibliographique, si restreinte soit-elle, ne serait complète, si l’on ne mentionnait pas le Bulletin historique et littéraire publié par la Société de l’Histoire du Protestantisme français à Paris. Cette publication, sous l’excellente direction de M. le pasteur Nathanaël Weiss, est actuellement dans sa cinquante-cinquième année (1906). On y trouve en abondance des études, documents et comptes rendus d’une incontestable utilité pour quiconque veut faire de Calvin le sujet de ses études.

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