Le mot Genèse nous vient de la Bible grecque où le terme genesis traduit l’hébreu toledoth, que l’on rend approximativement par « générations » ou généalogie. Le mot toledoth apparaît pour la première fois en Gn 2.4, où la Bible grecque porte : « Voilà le livre de la genèse (ou de la génération, de l’origine) du ciel et de la terre. » Par la suite, ce mot-clef revient plusieurs fois dans le corps de l’ouvrage. Il scande la narration en rappelant, à chacune des grandes étapes, que l’on poursuit toujours la réflexion théologique concernant les origines, et donc la manière dont le peuple de la Bible doit comprendre sa propre origine et son propre destin. Il y a ainsi les toledoth (généalogies, ou origines) du ciel et de la terre (Gn 2.4), d’Adam (Gn 5.1), de Noé (Gn 6.9), des trois fils de Noé (Gn 10.1), des fils de Sem (Gn 10.10), de Térah, le père d’Abram (Gn 11.27), d’Ismaël, l’ancêtre des douze tribus du nord de l’Arabie (Gn 25.12), d’Isaac (Gn 25.19), d’Esaü, l’ancêtre des Edomites (Gn 36.1), et finalement de Jacob-Israël, l’ancêtre qui donnera son nom au peuple (Gn 37.2). Le titre hébreu du livre est constitué, comme souvent dans la tradition des scribes, par le premier mot du texte : be-ré’shith = au commencement.
De fait, l’accent porte sur l’initiative de Dieu. Le livre révèle que Dieu, qui est à l’origine de tout, conçoit un projet particulier dans le cadre de l’histoire humaine ; il s’y attache dès l’appel adressé aux premiers pères (les patriarches) auxquels il attribue le pays de Canaan. Pourtant, le peuple de la promesse n’en prendra réellement possession qu’après de multiples péripéties, y compris un séjour assez long en Egypte.
La narration biblique sur les origines occupe les onze premiers chapitres. Ceux-ci appartiennent à un genre littéraire assez particulier dont le lecteur doit être averti. Il s’agit en effet d’une succession de tableaux offerts à la méditation de la foi.
A ce titre, ils revêtent certains atours de la parabole. Leur intérêt ne réside pas dans l’anecdote : ce qu’ils racontent ne concerne pas seulement l’homme d’un lointain passé, mais aussi le lecteur de tous les temps. Ces pages primordiales évoquent ainsi les problèmes éternels du sens de la vie, du mal, de la mort et de l’espérance. Voici les principaux thèmes abordés dans ces récits des origines :
Après la dispersion des peuples sur la terre (10), liée à l’effondrement de Babylone (11), le récit campe le portrait de plusieurs figures essentielles pour la mémoire d’Israël, figures qu’on appelle communément les patriarches. C’est à ces grands ancêtres qu’on doit la conscience nationale et la fierté de posséder un pays. Mais là encore, il ne s’agit pas d’une simple aventure humaine. La geste d’Abraham et d’Isaac, celle de Jacob, et même l’histoire de Joseph, sont là pour instruire le peuple de Dieu, pour le convaincre qu’il appartient toujours, des siècles plus tard, à un grand destin. Ainsi la saga des grands ancêtres visite tous les lieux qu’on se disputera, avec des enjeux religieux, au cours de l’histoire tourmentée du pays.
Des éléments de géographie politique peuvent ainsi être aisément repérés tout au long des généalogies et autres récits de mariages ou notices familiales dont le texte est parsemé. Ces repères familiaux exercent le même attrait que les recherches généalogiques d’aujourd’hui et remplissent des fonctions analogues. Par eux on peut savoir d’où l’on vient, expliquer telle relation de voisinage ou tel degré de parenté, et valider la transmission du patrimoine. Un regard porté sur la répartition des territoires entre les tribus issues de Jacob est éclairant sur ce point. Car non seulement on y verra fonctionner le système des droits d’aînesse, respectés ou renversés, mais telles faveurs et telles préséances bien expliquées dans le texte de la Genèse réapparaissent d’une manière assez parlante sur la carte.
En effet, la géographie politique elle-même traduit le cheminement de la bénédiction (cf. Gn 30.24 ; 35.16-19 ; 48.5-49.27). Et que dire du chapitre 49, le discours de Jacob mourant à ses douze fils, véritable testament prophétique où s’étalent, dans un langage à peine crypté, les informations nécessaires à l’intelligence du destin historique, parfois mouvementé, des tribus d’Israël ?
Quatre grandes figures dominent donc la geste patriarcale : Abraham, Isaac et Jacob, et finalement Joseph, le onzième fils de Jacob. La répartition de leurs histoires dans le livre de la Genèse ne s’opère pas de manière absolument méthodique et tranchée. Il est manifeste qu’au moment de la rédaction on s’est trouvé en présence d’une surabondance de récits attachés aux souvenirs des grands ancêtres. Le tableau ci-dessous contribuera à clarifier les choses.
Le « chevalier de la foi », comme l’a dénommé Kierkegaard, porte deux noms dans la Bible. Primitivement appelé Abram (« Le père [est] élevé »), il sera ensuite désigné, à partir de la conclusion de l’alliance au chapitre 17, sous le nom développé d’ Abraham (interprété comme « Père d’une multitude »). Abram, originaire de la ville d’Our, près de Babylone, fait une apparition soudaine dans l’histoire biblique : il prend la décision de tout quitter pour se rendre à l’appel de Dieu. Dès cette page du chapitre 12, le patriarche représente le croyant, capable de décision fondamentale, sous la seule impulsion de la foi et sans aucune garantie humaine.
Rien d’étonnant, dès lors, que jusqu’à nos jours la paternité d’Abraham soit invoquée de multiples façons. Quoi qu’il en soit, la grande épreuve de sa vie, celle qui lui vaudra à coup sûr son titre de père des croyants, va se nouer autour de sa progéniture. Alors qu’Abraham et Sara n’ont pas eu d’enfant et qu’ils approchent de leur fin, Dieu leur promet en effet une descendance. Et quand l’enfant du miracle, Isaac, sera enfin là, Dieu va précipiter Abraham dans une épreuve apparemment absurde en lui demandant de le sacrifier. Le chapitre 22 de la Genèse est un des sommets de la littérature en raison de l’enjeu (la bénédiction est réduite à néant si l’unique héritier de la promesse vient à disparaître) et de l’horreur de l’exigence divine (un sacrifice humain). Abraham sortira vainqueur de cette épreuve, et Isaac aura été épargné. Bien plus, parce qu’Abraham a, dans cette situation extrême, obéi quand même à l’injonction de la foi, l’avenir de sa descendance sera connu e t envié de tous ; toutes les nations de la terre se béniront par sa descendance (Gn 22.18 ; cf. Gn 12.3).
Du mystérieux mont Moriya (Gn 22.2) où s’est déroulé ce drame, on revient alors à Bersabée qui est le point d’ancrage d’Isaac, le patriarche méconnu. Il est vrai que, coincée entre les statures colossales de son père Abraham et de son fils Jacob-Israël, sa vie manque un peu de relief. On notera cependant que la tradition de la Synagogue s’est emparée d’Isaac pour en faire le héros principal de Genèse 22, avec le thème très porteur de l’ aqéda, la « ligature », que le jeune garçon semble accepter sans broncher au moment où son père l’installe sur le bûcher (v. 9n). Le christianisme des premiers siècles n’a pas hésité à y voir la figure du Fils unique offert par l’amour du Père et consentant à son propre sacrifice.
C’est sans doute à Jacob que se rapporte le passage de Deutéronome Dt 26.5-9, qui est souvent considéré comme un très ancien credo d’Israël. Nous avons là l’institution d’un usage liturgique encore vivant aujourd’hui dans la célébration juive de la Pâque. Cette instruction en forme de rappel conduit le croyant à affirmer que son père (Jacob, selon toute vraisemblance) était un Araméen nomade ; il est descendu en Egypte avec peu de gens... Puis, entrant toujours davantage dans le jeu de cette nostalgie théologique, le croyant affirmera : Les Egyptiens nous ont maltraités, humiliés et soumis à un dur esclavage. Par la foi, le destinataire de la Bible s’associe donc à la famille de Jacob. C’est de cette manière qu’il s’intègre, lui aussi, dans les alliances et les promesses dont Jacob a été le dépositaire.
Le personnage est insolite : tour à tour calculateur ou dévot, il n’hésite pas à recourir à la ruse pour s’adjuger les bénédictions de la foi. Témoin les cris déchirants d’Esaü après le vol de la bénédiction et la fuite éperdue vers l’oncle Laban, commencement d’un véritable voyage initiatique – qui est aussi celui du croyant. Deux grands moments théologiques marquent cette épopée. C’est d’abord (chap. 28) la nuit où le patriarche, voyant en rêve une sorte d’escalier qui relie la terre au ciel, comprend que le lieu où il se trouve est sacré. A cet endroit, il reçoit une promesse formelle : il héritera, pour lui et pour sa descendance, la terre où il est couché. Beth-El (« Maison d’El » ou « Maison de Dieu », cf. Gn 28.19n), lieu de cette révélation, deviendra un sanctuaire national. Lorsqu’il revient de Transjordanie, deux fois marié et père de onze enfants, riche de biens et d’expérience, c’est la nuit prodigieuse du Yabboq (chap. 32). Là, durant des heures, il est aux prises avec un adversaire divin qu’il ne laissera pas partir avant l’approche de l’aube. Celui-ci lui décerne alors son deuxième nom : Israël, peut-être à interpréter au sens de « vainqueur de Dieu ». L’événement légitime un autre sanctuaire, celui de Penouel1, où l’on rencontre Dieu face à face.
1 Sur l’identification probable de Penouel avec le sanctuaire de Deir ‘Allah découvert par les fouilles archéologiques en 1967, voir « Les inscriptions de Deir ‘Allah ».
Que le SEIGNEUR m’ajoute (hébreu yoseph) un autre fils ! (Gn 30.24). Voilà l’exclamation de Rachel à la naissance de Joseph (Yoseph). La longue et belle histoire de ce personnage invite le lecteur à réfléchir sur la signification du séjour d’Israël en Egypte, loin de sa terre. Toutes les angoisses qui la tiennent en suspens se résolvent dans un dénouement providentiel qui doit servir de leçon pour d’autres temps et d’autres circonstances : Le mal que vous comptiez me faire, Dieu comptait en faire du bien (Gn 50.20). Premier-né de Rachel, l’épouse chérie de Jacob, et fils préféré de son père, Joseph étonne et irrite ses demi-frères par ses rêves. Il fait preuve à leurs yeux d’une arrogance insupportable. Les frères, jaloux, cherchent un jour à le faire disparaître. Il est récupéré par des Bédouins qui iront le vendre, en Egypte au chef des gardes du pharaon. Ses frères n’en savent rien. Conduit par la providence et la sagesse divines (Gn 39.3 ; 41.37), Joseph ne tardera pas à être promu vice-roi d’Egypte (Gn 41.41).
A ce moment la famine s’abat sur Canaan. Elle conduit dix fils de Jacob à se rendre en Egypte pour y acheter du grain. Après bien des péripéties, Benjamin l’unique frère de sang de Joseph, les accompagne en Egypte. Mais Joseph ne se laissera reconnaître par ses frères que lorsque ceux-ci auront pris pleinement conscience de leur forfait. Le clan séjournera en Egypte assez longtemps. Quelque quatre cents ans, diront les textes (Gn 15.13 ; Ex 12.40s ; Ga 3.17). Mais on ne sait pas bien où les faire débuter, car aucune indication chronologique n’est fournie par l’histoire biblique de Joseph. Et l’on ne dispose d’aucune source égyptienne sur ce point. Cet ensemble, qui s’apparente à la littérature de sagesse (voir « La littérature de sagesse »), traite à sa manière le dossier des relations entre Israël et les autres nations en particulier en situation d’exil ou de diaspora (voir « L’Exil et la Bible » et « La diaspora ou les Juifs hors de leur pays »). Le séjour involontaire de Joseph en Egypte aura finalement eu des conséquences heureuses (Gn 50.20). Et pas seulement pour sa propre famille : le pays d’accueil aura aussi tiré avantage de la sage politique menée par l’inspiré de Dieu. Certaines pages de Jérémie (Gn 29.4ss) ou de Daniel (chap. 1–6) suggèrent une orientation analogue.
Nous avons là, esquissée, la grande idée du règne de Dieu sur toute l’humanité, avec ses attentes de justice et de paix. Ainsi le livre de la Genèse constitue une longue méditation sur la vocation particulière d’un peuple élu au sein duquel, paradoxalement, tout lecteur est invité à se situer. Quand tous les âges d’or seraient définitivement derrière nous, ces textes sont un contrat d’espérance qui incite à prendre en considération l’exemple, même imparfait, de la foi des premiers pères.
1 Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. [Ce premier v. comporte sept mots en hébreu. – Au commencement : hébreu be-ré'shith : c'est le titre du livre dans la Bible juive. Pour souligner ce mot et son caractère de commencement absolu, les mss hébreux en ont exceptionnellement écrit la première lettre plus grande que les autres (il y a 31 grandes lettres de cette sorte dans la Bible hébraïque ; voir Dt 6.4n). Dans l'écriture hébraïque telle qu'elle est fixée depuis près de 23 siècles, cette lettre (beth, la seconde de l'alphabet hébreu) a la forme d'une parenthèse ouverte. Les sages d'Israël y ont vu une barrière interdisant de spéculer sur tout préalable au commencement dont il est ici question. Autre traduction possible acte primordial : Dieu créa... ; même mot hébreu Gn 49.3 (prémices, voir aussi Os 9.10n) ; Lv 2.12+ ; cf. Es 46.10 ; Am 6.1n ; Pr 1.7 ; 4.7 ; 8.22ss ; voir aussi Jn 1.1s ; 1Jn 1.1. – Dieu : le mot hébreu 'élohim (qui, lui, commence par 'aleph, première lettre de l'alphabet hébreu) a la forme du pluriel (d'excellence ? d'abstraction ? voir aussi v. 26n ; 3.5n ; Ez 28.2n ; Jb 3.4n). Puisqu'il régit ici un verbe au singulier il désigne sans ambiguïté le Dieu unique (cf. 2.4n). – créa : le verbe hébreu bara', qui revient sept fois dans ce récit, pourrait venir d'une racine signifiant couper, tailler (cf. ses emplois, à une autre forme, en Jos 17.15,18, défricher ; Ez 21.24, inscrire ; 23.47, abattre [par l'épée]), ici peut-être au sens de donner forme aux choses. Dans ce sens, il semble se rapporter toujours à une action de Dieu ; il s'agit parfois d'une intervention qui suscite du nouveau dans l'histoire de son peuple (Es 43.1,7,15). Sur la création du monde, voir l'emploi du même terme en Dt 4.32 ; Es 42.5 ; voir aussi, quant à l'idée, Jr 32.17 ; Ps 8 ; 89.10-13 ; 104 ; 136.5 ; Jb 38–39 ; Mc 13.19 ; Ac 14.15 ; Rm 1.20 ; Ep 3.9 ; Ap 4.11. – le ciel (ou les cieux : le terme n'existe qu'au pluriel en hébreu) / la terre : cf. v. 8,10 ; Es 65.17+. – En modifiant quelquefois la vocalisation traditionnelle de l'hébreu, certains traduisent : Quand Dieu commença à créer le ciel et la terre, (2) la terre était... ou Au commencement, quand Dieu créa le ciel et la terre, (2) la terre était...]
2 La terre était un chaos, elle était vide ; il y avait des ténèbres au-dessus de l'abîme, et le souffle de Dieu tournoyait au-dessus des eaux. [La terre... : autre traduction or la terre... – chaos (même terme Dt 32.10 ; 1S 12.21n ; Es 24.10 ; 29.21 ; 40.17,23 ; 41.29 ; 44.9 ; 45.18s ; 49.4 ; 59.4 ; Ps 107.40 ; Jb 6.18 ; 12.24 ; 26.7) / vide : hébreu tohou / bohou (aussi Es 34.11 ; Jr 4.23), d'où vient notre expression tohu-bohu. – ténèbres : cf. v. 4s. – au-dessus de ou à la surface de : la même expression revient ici deux fois ; elle sera rendue face à au v. 20. – abîme : le mot hébreu tehom désigne ici l'océan primitif. Contrairement au mythe babylonien (Enuma Elish) où la création résulte d'un combat avec la déesse Tiamat (nom probablement apparenté à tehom), il joue dans ce v. un rôle purement passif : c'est l'état antérieur à la création proprement dite. On retrouve le même terme dans des contextes comparables en Ps 33.7 ; 104.6 ; Jb 38.16 ; Pr 3.30 ; 8.24ss ; il peut être un simple équivalent de « mer » (Ps 135.6 ; Jb 28.14 ; 38.30 ; 41.24), mais il peut également évoquer une inondation (Ez 26.19 ; Jon 2.6 ; Ha 3.10 ; Ps 42.8). L'abîme a un rôle positif en Gn 49.25 ; Dt 8.7n ; 33.13 ; Ez 31.4 ; Ps 78.15 ; Pr 8.28 : c'est de lui que viennent les eaux souterraines qui alimentent les sources. Mais il apparaît souvent comme une menace, notamment dans l'« anticréation » que représente le déluge Gn 7.11 ; 8.2 ; cf. Ex 15.5,8 ; Es 51.10 ; 63.13 ; Ez 26.19 ; Am 7.4 ; Jon 2.6 ; Ps 36.7 ; 71.20 ; 106.9 ; 107.26. Les textes le personnifient fréquemment (Ps 42.8 ; 77.17 ; 148.7 ; Ha 3.10). – le souffle ou l'Esprit : le mot hébreu rouah signifie souffle, vent ; certains pensent que l'expression traduite par le souffle de Dieu signifie simplement ici un vent violent ; cf. 30.8n ; 1S 14.15 ; Ps 36.7 ; 68.16 ; 80.11 ; 104.6 ; Ct 8.6n. Tg un esprit d'amour. – tournoyait ou planait : le verbe correspondant se retrouve en Dt 32.11 où il peut comporter une nuance de protection (voir aussi Gn 8.12-16) ; une forme proche, mais pas nécessairement apparentée, est traduite par frémir en Jr 23.9n ; autre traduction agitait les eaux (cf. v. 6).]
3 Dieu dit : Qu'il y ait de la lumière ! Et il y eut de la lumière. [Dieu dit v. 6,9,11,14,20,24,26,28s (10 fois en tout). Targum (Tg) Neofiti : La Parole de Yahvé dit (de même dans la suite). Sur le thème de la parole créatrice, voir Ps 33.6,9 ; Jn 1.1-3 ; Hé 11.3 ; 2P 3.5 ; cf. Sagesse 9.1 : « Dieu... qui as fait l'univers par ta parole... » – Qu'il y ait (cf. v. 6,14) de la lumière : cf. 2Co 4.6.]
6 Dieu dit : Qu'il y ait une voûte au milieu des eaux pour séparer les eaux des eaux ! [voûte ou étendue (hébreu raqia‘, Ez 1.22-25 ; 10.1 ; Ps 19.2 ; 150.1 ; Dn 12.3 voûte céleste) ; Vg a traduit firmamentum, qui suggère un élément solide (ferme) et qui a donné notre mot firmament. Le terme hébreu évoque une plaque ou une feuille de métal aplatie ou courbée à coups de marteau (Ex 39.3 ; Es 42.5n ; 44.24 ; Ps 136.6n ; Jb 37.18n) ; ici il faut sans doute se représenter une sorte de plafond voûté qui sépare les eaux d'en haut et les eaux d'en bas pour ménager l'espace de la vie (v. 7 ; cf. 6.17n ; 7.11ss) ; sur les représentations de l'univers présentes dans la Bible, voir aussi Ex 20.4 ; Es 40.22 ; Ps 104.2s,13 ; 148.4 ; Jb 26.10 ; Ap 4.6. – A la fin du v. LXX ajoute : Il en fut ainsi et l'omet au v. 7.]
9 Dieu dit : Que les eaux qui sont au-dessous du ciel s'amassent en un seul lieu, et que la terre ferme apparaisse ! Il en fut ainsi. [en un seul lieu : LXX en une seule masse. – terre ferme, litt. la sèche ; le même mot revient en Ex 4.9 ; 14.16n,22,29 ; 15.19 ; Jos 4.22 ; Jon 1.9,13 ; 2.11 ; Ps 66.6 ; il est rendu par terre desséchée en Es 44.3. – Il en fut ainsi : LXX ajoute : les eaux qui sont au-dessous du ciel s'amassèrent en leurs masses, et la terre ferme apparut ; Ps 24.2 ; 33.7 ; 104.6-9 ; 136.6 ; Jb 26.10 ; 38.8-11.]
14 Dieu dit : Qu'il y ait des luminaires dans la voûte céleste pour séparer le jour et la nuit ! Qu'ils servent de signes pour marquer les rencontres festives, les jours et les années, [luminaires : le terme hébreu est apparenté au mot traduit par lumière au v. 3 ; dérivé du verbe traduit par éclairer au v. 15, il désigne parfois un porte-lampes (Ex 25.6 etc. ; voir aussi ses emplois en Ez 32.8n ; Ps 74.16n ; 90.8n ; Pr 15.30n). Le récit présente les astres comme des lumières créées (Es 40.26 ; Ps 136.7-9) qui ont pour fonctions essentielles d'éclairer la terre (v. 15,17 ; Jr 31.35) et de marquer les temps (sur le mot traduit par signes, voir 4.15n ; Jr 10.2), notamment les jours des rencontres festives ou fêtes religieuses (Lv 23.2n ; voir calendrier et fêtes ; le même mot hébreu est traduit par temps fixé en Ex 13.10n etc. ; voir aussi Jos 8.14n ; 1S 20.35n). Il s'oppose ainsi aux religions qui les considèrent comme des divinités (Dt 4.19). Voir aussi Ps 74.16n ; 104.19n ; 148.3-6 ; Jc 1.17.]
20 Dieu dit : Que les eaux grouillent de petites bêtes, d'êtres vivants, et que des oiseaux volent au-dessus de la terre, face à la voûte céleste ! [grouillent / petites bêtes : les deux termes sont apparentés en hébreu (comparer l'emploi de bestioles et fourmiller aux v. 24n,26n) ; voir 7.21. – êtres vivants : le mot hébreu néphesh, ici rendu par être, est celui que les traductions traditionnelles ont traduit quelquefois, conventionnellement, par âme : ici il désigne les animaux (de même aux v. 21,24 ; 2.19 ; 9.10ss) comme ailleurs les humains (2.7). Dans ce dernier cas, on peut le traduire par personne ou individu (14.21), ou encore par un simple pronom (ma néphesh == moi, je, cf. 27.4n). Il peut aussi prendre les sens plus particuliers de souffle (v. 30), vie (9.4s ; 12.5n ; 19.17ss ; 32.31), désir (23.8n), voire gorge ou gosier (Nb 11.6 ; Es 5.14 ; 29.8 ; Jon 2.6 ; Ps 63.6), qui correspondent peut-être mieux à son étymologie (respirant / aspirant ?) ; voir aussi Mt 10.28n ; Jn 10.11n. – face à (v. 2n) la voûte céleste v. 6n ; LXX ajoute et il en fut ainsi.]
24 Dieu dit : Que la terre produise des êtres vivants selon leurs espèces : bétail, bestioles, animaux sauvages, chacun selon ses espèces ! Il en fut ainsi. [bétail ou bêtes, selon la traduction la plus fréquente du terme hébreu correspondant (34.23 ; 36.6 etc.) ; cependant le mot semble ici désigner les animaux domestiques, par opposition aux animaux sauvages ; cf. 7.21n. – bestioles : le terme hébreu désigne tout ce qui se déplace à ras de terre, petits reptiles, petits mammifères (p. ex. souris), batraciens et insectes ; cf. v. 26n ; voir aussi 8.17. – animaux sauvages : litt. animaux de la terre, de même dans la suite ; cf. v. 28-30 ; 9.10 ; expression probablement équivalente en 2.19s ; 3.1,14n ; cf. Ez 34.28+ ; Jb 5.22 ; voir aussi 1S 17.46 ; Ps 79.2.]
26 Dieu dit : Faisons les humains à notre image, selon notre ressemblance, pour qu'ils dominent sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur le bétail, sur toute la terre et sur toutes les bestioles qui fourmillent sur la terre. [Faisons : sur le pluriel, cf. v. 1n ; 3.22n ; il faut probablement l'entendre ici comme une simple tournure de délibération, cf. 2S 24.14 ; Es 6.8 ; quelques-uns y voient cependant une réminiscence de la représentation de Dieu entouré d'un « conseil » ou d'une « cour », à l'image des souverains (1R 22.19 ; Jb 1.6s ; 2.1s). – les humains : ici et en 5.1s, ce terme, au singulier ou au pluriel, traduit le mot hébreu 'adam, qui a donné le nom propre Adam et qui sera souvent rendu par homme ou hommes dans le reste de la Bible (2.5,7 etc.). Ici ce mot hébreu est avant tout un collectif qui désigne le genre humain. Du reste le verbe qui suit (qu'ils dominent) est au pluriel dans le texte ; cf. Jb 15.7n. – image / ressemblance 5.1-3 ; 9.6 ; cf. Es 40.18n ; Ez 1.5n ; 1Co 11.7 ; Col 3.10 ; Jc 3.9 ; Sagesse 2.23 : « Dieu a créé l'homme pour qu'il soit incorruptible et l'a fait image de ce qu'il possède en propre. » – sur toute la terre : Syr porte ici sur tous les animaux de la terre (v. 24n). – qui fourmillent : le verbe hébreu (déjà v. 21) est apparenté au nom traduit par bestioles (v. 24n) ; de même dans la suite. – Cf. Instruction de Mérikaré 130ss : « Bienheureux les hommes, le troupeau du dieu. Il a fait le ciel et la terre selon leurs désirs, et il a repoussé le monstre des eaux. Il a fait le souffle de vie pour leurs narines. Eux, qui sont issus de son corps, sont ses images. Il se lève dans le ciel selon leur désir. Il a fait pour eux des plantes, des animaux, des oiseaux et des poissons pour les nourrir. »]
Œuvres de Dieu
Jours
Le cadre de vie (séparations)
Les habitants
Jours
1 (v. 3-5)
lumière / ténèbres (jour / nuit)
soleil / lune-étoiles
(v. 14-19) 4
2 (v. 6-8)
eaux de dessus / de dessous (ciel / mer)
oiseaux / poissons
(v. 20-23) 5
3 (v. 9-13)
mer / terre ferme, végétation
animaux terrestres, humains
(v. 24-31) 6
7
Repos de Dieu
(2.1-3)