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Amiot-Tamisier – Jude 1

ÉPÎTRE CATHOLIQUE DE SAINT JUDE

L'auteur de cette épître se présente comme le frère de Jacques, évidemment l'évêque de Jérusalem, dont nous croyons qu'il n'est autre que l'apôtre Jacques le Mineur (Voir Introduction à l'épître de saint Jacques). Qui est-il lui-même ? frère de Jacques au sens propre ou simplement cousin ? Il est impossible d'en décider ; on notera seulement que plusieurs Pères voient en lui l'apôtre Jude Thaddée, mentionné dans les listes évangéliques (Matthieu X, 3 ; Marc III, 18 ; Luc VI, 16 ; comparer Actes I, 13). On peut retenir cette identification comme probable, bien que l'auteur ne prenne pas le titre d'apôtre et semble au v. 17 se distinguer du collège apostolique ; mais une autre interprétation de ce passage peut être légitimement soutenue. La canonicité de l'épître n'a pas suscité d'opposition, sinon d'une manière momentanée, dans quelques Églises de Syrie. ♦ L'épître a été écrite pour mettre les fidèles en garde contre des faux docteurs qui prêchent une licence incompatible avec l'Évangile et professent des erreurs semblables à celles que combat la seconde épître de saint Pierre. Elle semble adressée aux Églises de Syrie ou d'Asie Mineure ; mais les commentateurs ne s'accordent pas sur les destinataires précis : chrétiens d'origine païenne ou d'origine juive ; il y a des arguments dans les deux sens. L'auteur est un Juif qui connaît bien l'Ancien Testament et utilise même des écrits apocryphes. La bonne qualité de son grec ne constitue pas une objection contre l'authenticité, car il a sans doute recouru à un secrétaire helléniste. ♦ La parenté de cette épître avec la deuxième de saint Pierre est évidente. On admet généralement que c'est Pierre qui a utilisé Jude, car il est plus développé, présente pour les faits allégués de l'Ancien Testament un ordre chronologique meilleur et évite les allusions aux apocryphes. Dans ces conditions, il faut placer l'épître de Jude un peu avant la seconde de Pierre, c'est-à-dire probablement après la mort de Jacques, martyrisé en 62, et certainement avant la mort de Pierre (64 ou 67), donc entre 63 et 66. Ceux qui retardent la seconde épître de Pierre jusqu'en 70 ou 8o reculent aussi celle de Jude.

MISE EN GARDE CONTRE LES FAUX DOCTEURS ♦ CHÂTIMENT QUI LES ATTEND ♦ DEVOIR DE RESTER FIDÈLE À L'ENSEIGNEMENT DES APÔTRES

1 Jude, serviteur de Jésus-Christ et frère de Jacques, aux élus aimés en Dieu le Père et gardés pour Jésus-Christ. [1. Le titre de frère de l'apôtre Jacques, universellement vénéré, constituait une recommandation efficace.] 2 Que la miséricorde, la paix et l'amour vous soient donnés en abondance.

3 Mes bien-aimés, ayant à cœur de vous écrire au sujet de notre commun salut, je me suis vu dans la nécessité de le faire, afin de vous exhorter à la lutte pour la foi qui a été transmise aux saints une fois pour toutes. [3-4. La foi, transmise aux saints une fois pour toutes, doit être gardée pure de toute altération.] 4 Il s'est en effet glissé parmi vous certains individus, désignés depuis longtemps pour la condamnation, des impies qui changent en licence la grâce de notre Dieu et qui renient notre seul Maître et Seigneur, Jésus-Christ.

5 Je veux vous rappeler, à vous qui avez déjà appris toutes ces choses, que le Seigneur, après avoir fait sortir son peuple du pays d'Égypte, a fait périr ensuite ceux qui s'étaient montrés incrédules ; [5-7. Preuves bibliques du châtiment qui menace les impies : les Juifs incrédules durant le séjour au désert (Nombres XIV ; Psaume XCV, 8-11 ; comparer I Corinthiens X, 1-11 ; Hébreux III, 7 ; IV, 11) — les anges coupables, infidèles à leurs éminentes fonctions et à la société intime de Dieu (« leur propre demeure »), et à cause de cela enchaînés éternellement dans les ténèbres (littéralement, sous les ténèbres) en attendant le jugement définitif — enfin les Sodomites et les habitants des villes voisines, châtiés par le feu éternel pour leurs vices contre nature (Genèse XIX).] 6 et qu'il réserve pour le jugement du Grand Jour, enchaînés éternellement dans les ténèbres, les anges qui n'ont pas gardé [la dignité de] leur rang et ont abandonné leur propre demeure. 7 Pareillement Sodome, Gomorrhe et les villes voisines qui avaient pratiqué la même sorte d'impudicité par leurs péchés contre nature, gisent là en exemple, subissant la peine d'un feu éternel. 8 De même ces gens, dans leur délire, souillent leur chair, méprisent la [divine] Souveraineté et blasphèment les Gloires. [8-11. Désordres moraux des faux docteurs qui, en outre, méprisent la Souveraineté de Dieu et blasphèment les anges (probablement les bons anges) en se moquant de leur puissance ou en niant l'existence de certains d'entre eux. La conduite de ces libertins contraste avec la réserve de l'archange saint Michel, contestant avec le diable qui voulait lui soustraire le corps de Moïse, sans doute pour en faire un objet d'idolâtrie ; il n'a pas porté de jugement contre lui et a remis le litige aux mains de Dieu. Saint Jude emprunte cet épisode à un apocryphe juif, l'Assomption de Moïse, ou à une tradition dont ce livre s'est fait l'écho. II Pierre II, 4-12, 15-16 reproduit et amplifie en partie ces considérations, mais il suit l'ordre chronologique et supprime l'allusion à saint Michel.] 9 Cependant l'Archange Michel, lorsqu'il contestait avec le diable et lui disputait le corps de Moïse, n'osa pas porter contre lui une accusation injurieuse ; il dit seulement : Que le Seigneur te punisse ! 10 Mais ces individus injurient ce qu'ils ignorent, et ils trouvent leur perte dans ce qu'ils connaissent d'une manière naturelle, à la façon des bêtes sans raison. 11 Malheur à eux ! Ils ont suivi la voie de Caïn, ils sont tombés par esprit de lucre dans l'égarement de Balaam et ils ont trouvé leur ruine dans la révolte de Coré.

12 Ils sont le scandale de vos agapes, où ils font impudemment bonne chère et se repaissent eux-mêmes : nuées sans eau emportées par le vent ; arbres de fin d'automne, sans fruit, deux fois morts, déracinés ; [12-16. Vigoureuse diatribe contre l'immoralité des faux docteurs ; à rapprocher de II Pierre II, 13-14, 17-22. La prophétie d'Hénoch est empruntée assez librement à l'apocryphe de ce nom : I, 9. Les saintes myriades sont les anges ; comparer Deutéronome XXXIII, 2 ; Hébreux XII, 22.] 13 vagues furieuses de la mer projetant l'écume de leurs propres hontes ; astres errants auxquels d'épaisses ténèbres sont réservées pour l'éternité !

14 C'est pour eux aussi qu'Hénoch, le septième [patriarche] après Adam, à prophétisé en ces termes : Voici que le Seigneur vient avec ses saintes myriades, 15 afin d'exercer le jugement sur tous et de confondre tous les impies pour toutes les œuvres d'impiété qu'ils ont commises et pour toutes les paroles insolentes qu'ont proférées contre lui ces pécheurs impies. 16 Ce sont des gens qui murmurent, des mécontents qui vivent au gré de leurs convoitises, dont la bouche profère des propos ampoulés et qui flattent les autres pour en tirer profit.

17 Mais vous, mes bien-aimés, souvenez-vous de ce qui a été prédit par les apôtres de notre Seigneur Jésus-Christ, 18 lorsqu'ils vous disaient : Il y aura à la fin des temps des railleurs qui vivront au gré de leurs convoitises impies, 19 fauteurs de discordes, êtres sensuels qui ne possèdent pas l'Esprit.

20 Mais vous, mes bien-aimés, édifiez-vous sur le fondement de votre très sainte foi, priez dans l'Esprit-Saint, 21 conservez-vous dans l'amour de Dieu, dans l'attente de la miséricorde de notre Seigneur Jésus-Christ, en vue de la vie éternelle. 22 Ayez pitié de ceux qui hésitent ; 23 sauvez-les en les arrachant au feu ; pour les autres, ayez une pitié mêlée de crainte, haïssant jusqu'au vêtement souillé par leur chair.

24 A celui qui peut vous préserver de toute chute et vous faire paraître devant sa gloire sans reproche et dans l'allégresse, [24-25. Doxologie finale, l'une des plus belles du Nouveau Testament.] 25 au Dieu unique notre Sauveur, par Jésus-Christ notre Seigneur, gloire, majesté, force et puissance de toute éternité, maintenant et dans tous les siècles ! Amen !

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