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Bible de Jérusalem – Lamentations 1

LES LAMENTATIONS

Introduction aux Lamentations de Jérémie

Première lamentationa

Aleph.

1 Quoi ! elle est assise à l’écart,
la Ville populeuse !
Elle est devenue comme une veuve,
la grande parmi les nations.
Princesse parmi les provinces,
elle est réduite à la corvée.

a Le poète décrit l’état misérable de Jérusalem. Sion personnifiée prend la parole au v. 9, puis au v. 11, pour une plainte, vv. 12-16, puis pour une prière, v. 18s, qui est à la fois une confession, une espérance et une imprécation. — Grec et Vulg. insèrent ici cette introduction « Il arriva, après la réduction d’Israël en captivité et de Jérusalem en désert, que le prophète Jérémie s’assit pleurant ; il proféra cette lamentation sur Jérusalem et dit. »

Bèt.

2 Elle passe des nuits à pleurer
et les larmes couvrent ses joues.
Pas un qui la console
parmi tous ses amants.b
Tous ses amis l’ont trahie,
devenus ses ennemis !

b Les anciens alliés de Juda, cf. Jr 4.30 ; 30.14 ; Ez 16.37-40 ; 23.22-29.

3 Gimel. Juda est exilée,c soumise à l’oppression,
à une dure servitude.
Elle demeure chez les nations
sans trouver de répit.
Tous ses poursuivants l’atteignent
en des lieux sans issue.

c Contrairement à l’ordinaire, Juda est ici personnifié au féminin.

Dalèt.

4 Les chemins de Sion sont en deuil,
nul ne vient plus à ses fêtes.
Toutes ses portes sont désertes,
ses prêtres gémissent,
ses vierges se désolent.
Elle est dans l’amertume !

Hé.

5 Ses oppresseurs ont le dessus,
ses ennemis sont heureux,
car Yahvé l’a affligée
pour ses nombreux crimes ;
ses petits enfants sont partis captifs
devant l’oppresseur.

Vav.

6 De la fille de Sion s’est retirée
toute sa splendeur.
Ses princes étaient comme des cerfs
qui ne trouvent point de pâture ;
ils cheminaient sans force
devant qui les chassait.

Zaïn.

7 Jérusalem se souvient
de ses jours de misère et de détresse,
(de tous ses trésors qui existaient
depuis les jours anciens)d
quand son peuple succombait aux coups de l’adversaire
sans que nul la secourût.
Ses adversaires la voyaient,
ils riaient de sa ruine.

d Glose rompant le rythme.

Hèt.

8 Jérusalem a péché gravement,
aussi est-elle devenue chose impure.
Tous ceux qui l’honoraient la méprisent :
ils ont vu sa nudité.
Elle, elle gémit
et se détourne.

Tèt.

9 Sa souillure colle aux pans de sa robe.
Elle ne songeait pas à cette fin ;
elle est tombée si bas !
Personne pour la consoler.
« Vois, Yahvé, ma misère :
l’ennemi triomphe. »

Yod.

10 L’adversaire a étendu la main
sur tous ses trésors :e
elle a vu les païens
pénétrer dans son sanctuaire,
auxquels tu avais interdit
l’entrée de son assemblée.

e Ceux du Temple, cf. Jos 6.24 ; 1 R 14.26 ; 2 R 24.13, mais sans doute aussi les fonds privés qu’on y déposait, cf. 2 M 4.3s.

Kaph.

11 Son peuple tout entier gémit,
en quête de pain ;
on donne ses bijoux pour de la nourriture,
pour retrouver la vie.
« Vois, Yahvé, et regarde
combien je suis méprisée.

Lamed.

12 Vousf tous qui passez par le chemin,
regardez et voyez
s’il est une douleur pareille
à la douleur qui me tourmente,
dont Yahvé m’a affligée
au jour de sa brûlante colère.

f « Vous » Vulg. ; « Pas pour vous » hébr.

Mem.

13 D’en haut il a envoyé un feu
qu’il a fait descendre dans mes os.
Il a tendu un filet sous mes pas,
il m’a renversée,
il m’a rendue désolée,
malade tout le jour.

Nun.

14 Il a guetté mes crimes :
de sa main il m’enlace,
son joug est sur mon cou,
il fait fléchir ma force.
Le Seigneur m’a mise à leur merci,
je ne puis plus tenir !g

g Ce v. est corrigé d’après Vulg., grec luc. et syr. L’hébr., corrompu, se traduirait litt. « il est lié, le joug de mes crimes, dans sa main ils s’enlacent, ils sont montés sur mon cou, il fait fléchir ma force. Le Seigneur m’a mise à la merci de... je ne puis plus tenir ». — Ici et à plusieurs reprises dans la suite, « le Seigneur » représente la lecture massorétique du nom sacré « Yahvé » (prononcé Adonaï, litt. « mon Seigneur »), passée dans le texte écrit au lieu du nom lui-même. La graphie primitive, YHWH, a été conservée par quelques mss.

Samek.

15 Tous mes braves, le Seigneur les a rejetés
du milieu de moi.
Il a convoqué contre moi une assemblée
pour anéantir mon élite.
Le Seigneur a foulé au pressoir
la vierge, fille de Juda.

Aïn.

16 C’est pour cela que je pleure ;
mes yeux fondent en larmes,h
car il est loin de moi, le consolateur
qui me rendrait la vie.
Mes fils sont bouleversés,
car l’ennemi est trop fort. »

h Littéralement « mon œil, mon œil... »; la répétition pourrait être un effet de style, cf. 3.20, mais peut aussi simplement exprimer le pluriel.

Phé.

17 Sion tend les mains,
pas un qui la console.
Yahvé a mandé contre Jacob
ses oppresseurs de toutes parts ;
Jérusalem est devenue
chose impure parmi eux.

Çadé.

18 « Yahvé, lui, est juste,
car à ses ordres je fus rebelle.
Écoutez donc, tous les peuples,
et voyez ma douleur.
Mes vierges et mes jeunes gens
sont partis en captivité.

Qoph.

19 J’ai fait appel à mes amants :
ils m’ont trahie.
Mes prêtres et mes anciens
expiraient dans la ville,
cherchant une nourriture
qui leur rendît la vie.

Resh.

20 Vois, Yahvé, quelle est mon angoisse !
Mes entrailles frémissent ;
mon cœur en moi se retourne :
Ah ! je n’ai fait qu’être rebelle !
Au-dehors l’épée me prive d’enfants,
au-dedans, c’est comme la mort.

Shin.

21 Entends-moi qui gémis :
pas un qui me console !
Tous mes ennemis ont appris mon mal,
ils se réjouissent de ce que tu as fait.
Fais venir le Jour que tu avais proclamé,
pour qu’ils soient comme moi !i

i « Entends » syr. ; « ils ont entendu » hébr. — « Fais venir » syr. ; « Tu as fait venir » hébr. — Le Jour de Yahvé, désastreux pour Israël dans l’optique préexilique, cf. Am 5.18 ; So 1.14, va devenir tel pour les nations, cf. Jl 3.14.

Tav.

22 Que toute leur méchanceté te soit présente
et traite-les
comme tu m’as traitée
pour tous mes crimes !
Car nombreux sont mes gémissements,
et mon cœur est malade. »

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