L'Exode s'achève sur l'édification de la tente de la rencontre (Ex 40.16-33), que le Seigneur tout aussitôt légitime en venant s'y installer dans la nuée (Ex 40.34-38).
Les premiers mots du Lévitique expriment à leur manière cette même légitimation. Alors que dans l'Exode, le Seigneur parlait à Moïse surtout au sommet du Sinaï, c'est maintenant « de la tente de la rencontre » qu'il le fait (Lv 1.1).
En 27 chapitres, Dieu va transmettre à son peuple « ses lois et ses coutumes », car « c'est en les mettant en pratique que l'homme a la vie » (Lv 18.5). En somme, il va leur expliquer le bon usage de cette « tente », afin qu'elle soit vraiment un lieu de « rencontre » ; il ne faudrait pas qu'une erreur rituelle (1 — 10), une impureté physique (11 — 16), ou une infidélité morale (17 — 26) viennent mettre obstacle à cette communion vitale. C'est pourquoi tout est décrit avec tant de minutie.
Cependant le Lévitique ne présente que certains aspects du culte israélite. C'est peut-être dans le psautier qu'il faut chercher les prières et les chants qui accompagnaient les rites. Ce sont surtout les prophètes (p. ex. Jr 7.3-11 ; Os 6.6) et les sages (Si 34.18 — 35.10) qui rappellent à Israël que l'accomplissement des rites ne suffit pas à procurer le salut. Mais ce que le Lévitique veut faire pénétrer dans la conscience des fidèles, et cela avec une inlassable insistance, c'est que la communion avec le Dieu vivant est la vérité dernière de l'homme.
Le texte, dans son état actuel et canonique, est de rédaction post-exilique, bien qu'il rassemble en un tout relativement cohérent des éléments d'origines diverses, dont certains peuvent remonter à une haute antiquité. A l'époque où le pouvoir politique du sacerdoce va en augmentant, puisqu'il n'y a plus de roi, et que le prophétisme est en voie de disparition, les prêtres de Jérusalem ont rassemblé et complété, pour les besoins du Second Temple, diverses collections de lois et de rituels :
Dans une première section (1 — 7), sont présentées les diverses catégories de sacrifices que l'Israélite peut (ou doit) offrir à Dieu, dans certaines circonstances. Il ne s'agit pas d'une initiation à l'usage des profanes, mais de la codification des rituels, en une sorte de livre de référence pour gens déjà initiés. En particulier, rien n'est dit sur l'origine ou la signification des sacrifices et des rituels. On ne peut que constater, par des allusions ou des comparaisons, qu'Israël a emprunté le principe du sacrifice aux religions de l'Ancien Orient et qu'il a su remplir ce cadre rituel d'un contenu nouveau, correspondant à sa vision du monde et à sa connaissance de Dieu.
La deuxième section (8 — 10) décrit les cérémonies qui se déroulent à l'occasion de l'investiture sacerdotale d'Aaron et de ses fils. Ces trois chapitres auraient pu constituer à l'origine la suite directe de l'Exode, répondant aux prescriptions du chapitre 29. Les prêtres y apparaissent en toute clarté dans leur fonction de médiation, qui implique une exigence particulière de sainteté, puisqu'ils doivent servir d'intermédiaires entre le peuple et le Dieu saint.
La troisième section (11 — 16) répertorie diverses catégories d'impuretés qui empêchent l'homme d'entrer en contact avec Dieu (pratiquement: qui l'empêchent de s'approcher du sanctuaire) : la consommation d'aliments impurs, l'impureté de la femme après un accouchement, la lèpre, l'impureté sexuelle de l'homme ou de la femme. Le chapitre 16 forme en quelque sorte le cœur du livre : il décrit la liturgie majestueuse du Yôm Kippour, le Jour du Grand Pardon, qu'on a pu appeler le « Vendredi-Saint de l'Ancien Testament ».
La quatrième section comprend les chapitres 17 — 26, que l'on groupe généralement sous le titre de Loi (ou Code) de Sainteté. Puisque le Seigneur est un Dieu vivant et saint (qadosh, Lv 11.44-45 ; 19.2 ; 20.26 ; 21.8), le peuple qu'il a choisi, qu'il a mis à part pour lui, qui lui est consacré (qadosh, Lv 11.44-45 ; 19.2 ; 20.7-26 ; 21.6-8), doit rechercher tout ce qui facilite la communion avec Dieu et éviter tout ce qui, physiquement ou moralement, met obstacle à cette communion vitale: ne pas consommer de sang, qui est le siège de la vie donnée par Dieu; refuser toutes relations sexuelles anormales ; respecter Dieu en tant que seul Dieu, et l'homme en tant que créature de Dieu ; assurer la dignité du sacerdoce et des sacrifices et célébrer fidèlement les fêtes et les années saintes.
Le chapitre 27, appendice à l'ensemble du livre, traite des problèmes de tarification des vœux et des rachats.
Le Lévitique est apparu trop tard dans la vie d'Israël pour pouvoir influencer de manière sensible les autres livres de l'Ancien Testament. D'autre part, il présente trop exclusivement la « technique » des sacrifices israélites pour se voir cité fréquemment dans le N.T. Les passages les plus souvent cités sont tirés surtout des lois morales du « Code de sainteté ». Mais l'influence d'un livre ne se mesure pas seulement au nombre des citations qui en sont faites. C'est pourquoi l'influence du Lévitique n'est pas négligeable, quoique indirecte ; en effet, le culte pratiqué à Jérusalem selon les règles codifiées dans le Lévitique est à l'arrière-plan des réflexions du N.T. sur le sacerdoce du Christ et son sacrifice. Sans le Lévitique, il nous manquerait beaucoup d'éléments pour comprendre comment saint Paul ou l'Epître aux Hébreux (voir Hébreux, Introduction) ont interprété théologiquement la mort de Jésus.
Le Lévitique est peut-être aujourd'hui, parmi les livres de l'A.T., le moins lu par les chrétiens. Il n'est effectivement pas d'un abord facile et il semble ne parler que de pratiques rendues caduques par la nouvelle Alliance. Encore faut-il s'entendre sur cette « caducité ». En empruntant des gestes religieux à ses voisins ou en en créant de nouveaux pour élaborer son rituel, Israël a cherché à mettre le culte qu'il célébrait en accord avec la foi qu'il professait ; le culte devait exprimer et réaliser la réconciliation et la communion du peuple saint avec le Dieu saint, au nom duquel combattaient les prophètes et tous ceux qui veillaient sur la pureté de la foi d'Israël. Les fêtes, les rites, les gestes varient avec les temps et les lieux, selon ce que l'on veut exprimer et les moyens qu'on a pour le faire. Mais reste le désir d'exprimer la foi par la fête communautaire et le langage du corps. Ni les invectives prophétiques contre un culte mal célébré, ni l'abandon des rites lévitiques par le judaïsme privé de son Temple et par le christianisme qui a reconnu la valeur unique et définitive du sacrifice du Christ, n'abolissent le fait que le Lévitique est présent dans la Bible. Sa présence fait droit au besoin humain d'exprimer la foi par des gestes religieux, en même temps qu'elle annonce et prépare la venue de celui qui apporte dans ses paroles et réalise dans sa vie la réconciliation et la communion des hommes avec Dieu.
1 Le Seigneur appela Moïse et, de la tente de la rencontre, lui adressa la parole : [la tente de la rencontre Ex 25.22.
— la tente (= la demeure) Ex 26.1-30 ; 40.1-35 ; He 9.1-14.]
3 Si c'est un holocauste de gros bétail qu'on veut présenter, on présente un mâle sans défaut ; on le présente à l'entrée de la tente de la rencontre, pour être agréé par le Seigneur ; [Voir au glossaire SACRIFICES ; Lv 5.9-13 (6.2-6) ; Ps 51.16-19 (18-20) ; Os 6.6 ; Mc 12.33.]
10 S'il s'agit de présenter en holocauste du petit bétail, pris parmi les moutons ou les chèvres, on présente un mâle sans défaut ;
14 Si c'est un holocauste d'oiseau qu'on veut présenter au Seigneur, on apporte un présent pris parmi les tourterelles ou les pigeons ;