Ce titre provient de la traduction latine et signifie : Livre de lectures à l'usage de l'Église ; le texte grec le nomme : « Sagesse de Jésus (ou Josué) ben Sira ». Longtemps connu dans sa seule traduction grecque, une heureuse fortune a fait découvrir en Égypte, entre 1896 et 1900, les deux tiers environ du texte hébreu. ♦ C'est l'œuvre d'un auteur unique, comme en témoigne déjà le traducteur dans son prologue ; de fait, la pensée très réfléchie, la mentalité très accusée confirment l'assertion, Cependant le plan d'ensemble est à peine ébauché, quantité d'avis pratiques sont formulés sans ordre apparent. Tout essai de division reste donc quelque peu arbitraire. Voici toutefois les cinq sections qui suivent le prologue : I – XVI, 23 présentent des considérations sur l'origine, la nature et les avantages de la Sagesse. XVI, 24 – XXIII parlent, entre autres, de la condition humaine et de la beauté des œuvres divines. XXIV – XXXIII, 19 : précédant des maximes qui concernent les relations sociales, le chapitre XXIV, d'une importance capitale, décrit l'origine divine de la Sagesse et la montre fixant sa demeure en Israël. XXXIII, 20 – XLII, 14 : le véritable culte qu'il faut rendre à Dieu ; les souffrances et les espérances du peuple élu ; le rôle du scribe. XLII, 15 – L sont une partie très homogène, célébrant les manifestations de la Sagesse dans la nature et en Israël ; d'où l'éloge des hommes illustres, depuis Hénoch jusqu'au grand prêtre Simon II, fils d'Onias (219-199), contemporain de l'auteur. ♦ Ce dernier, Josué Ben Sira, était scribe à Jérusalem (cf. Prologue et L, 29) ; il avait beaucoup voyagé, et s'était tellement assimilé les saints livres que tout ce qu'il dit est citation d'Écriture. De l'hébreu, son œuvre fut traduite en grec par son petit-fils, qui était allé en Égypte en la 38e année d'Évergète (Prologue) : il s'agit de Ptolémée VII, qui, ayant inauguré son règne en 170, demeura seul roi de 145 à 116 ; le voyage du petit-fils de Ben Sira remonte donc à l'année 132 ; on en conclut que son grand-père écrivait entre 200 et 180. C'était l'époque où les souverains syriens essayaient de gagner à l'hellénisme les Juifs de Palestine (voir Introduction aux livres des Machabées ; dès lors, sages et penseurs ne se posaient plus le problème de l'attitude à prendre devant le paganisme ; mais il s'agissait de déterminer les rapports de la foi et de la raison, des traditions juives et de l'humanisme envahisseur. On sait que, par réaction contre les tentatives brutales des Séleucides, les Juifs se refermèrent sur eux-mêmes, et que s'organisa le parti nationaliste des Assidéens : Josué Ben Sira en faisait partie. ♦ Ces circonstances expliquent son attitude et son enseignement. Il dédie son livre à « ceux du dehors », Juifs vivant en milieu hellénisé, compatriotes ignorants qui ne fréquentent pas les écoles des sages, peut-être aussi païens bien disposés. Sa thèse est très nette : il ne peut y avoir de vraie sagesse qu'en Israël ; par révélation divine, elle se trouve liée indissolublement aux institutions et à l'histoire du peuple juif, elle est incarnée dans la Loi ; seuls, par conséquent, les scribes ou docteurs de la Loi en sont les dépositaires et les dispensateurs. On se trouve bien éloigné de l'universalisme de Job ou des hésitations de l'Ecclésiaste ; Ben Sira refuse à l'humanisme grec toute prétention à la sagesse véritable ; cependant, comme les hellénistes, il parle de sagesse : c'est une habileté ; pleinement conscient du devoir missionnaire qui incombe à Israël, il tend ainsi la main aux hellénistes pour les attirer au Judaïsme ; c'est par le prosélytisme, pense-t-il, que la religion du vrai Dieu est accessible aux païens. Si ce nationalisme fut alors une force de résistance efficace, il devait se traduire plus tard en une violente opposition à une évangélisation des Gentils, qui abandonnera les prescriptions rituelles du Judaïsme.
On peut voir dans la loi, dans les prophètes, et dans ceux qui les ont suivis, beaucoup de choses très grandes et très sages, qui rendent Israël digne de louange pour sa doctrine et pour sa sagesse. Or, il convient non seulement que les lecteurs deviennent savants, mais encore que les studieux, par leurs paroles et leurs écrits, puissent être utiles à ceux du dehors.
C'est en cette manière que Jésus, mon aïeul, après s'être appliqué avec grand soin à la lecture de la loi et des prophètes, et des autres livres que nos pères nous ont laissés, a voulu lui-même écrire sur ce qui regarde la doctrine et la sagesse, afin que ceux qui désirent apprendre, s'étant instruits par ce livre, s'appliquent de plus en plus à la considération de leurs devoirs et s'affermissent dans une vie conforme à la loi de Dieu.
Je vous exhorte donc, vous qui voudrez lire ce livre, d'y apporter une disposition favorable et une attention particulière, et de nous pardonner s'il semble qu'en quelques endroits, voulant rendre toute la beauté et toute la force de l'original, nous ne pouvons trouver de paroles qui en expriment tout le sens. Car les mots hébreux n'ont plus la même force lorsqu'ils sont traduits en une langue étrangère. Ce qui n'arrive pas seulement en ce livre-ci ; mais la loi même, les prophètes et les autres livres sont fort différents dans leur version de ce qu'ils sont dans leur propre langue.
Étant donc venu en Égypte en la trente-huitième année du règne de Ptolémée Évergète, et y étant demeuré longtemps, j'y trouvai ce livre qui y avait été laissé, et qui contenait une excellente doctrine.
C'est pourquoi j'ai cru qu'il était utile, et même nécessaire, de travailler avec soin à le traduire. Ainsi, m'étant appliqué à cette traduction pendant quelque temps, avec beaucoup de veilles et de soin, je l'ai achevée enfin, et j'ai mis ce livre en état d'être publié, pour servir à ceux qui voudront penser à eux-mêmes, et apprendre de quelle manière ils se doivent conduire dans la résolution qu'ils auront formée de régler leur vie selon la loi du Seigneur.
1 Toute sagesse vient de Dieu, le souverain Seigneur ; elle a toujours été avec lui, et elle y est avant tous les siècles. [1-10. La Sagesse a été créée ou formée dès l'éternité. Dieu la contemple en soi, avant de la répandre au dehors, dans la variété de ses œuvres. La Sagesse divine apparaît donc comme un acte de la Sagesse-attribut, mais qui n’est pas loin d’avoir la consistance d’une personne.]
11 La crainte du Seigneur est la véritable gloire et un sujet de se glorifier ; c'est une source de joie et une couronne d'allégresse.
20 La crainte de Dieu est la plénitude de la sagesse, et elle rassasie ceux qu'elle possède de l'abondance de ses fruits.
27 La crainte du Seigneur chasse le péché].
32 Mais le culte de Dieu est en exécration au pécheur.
36 Ne soyez point rebelle aux impressions de la crainte de Dieu, et ne vous approchez point de lui avec un cœur double.