Vigouroux – 1 Maccabées 10
Compétition entre Démétrius Ier et Alexandre Ier Balas. Celui-ci épouse la fille de Ptolémée Philométor. Il fait venir Jonathas à Ptolémaïde, et l’élève en gloire. Démétrius Nicator envoie Apollonius contre les Juifs. Jonathas défait Apollonius.
10 En la cent soixantième année, Alexandre, fils d’Antiochus, surnommé le Noble, monta et occupa (prit) Ptolémaïs ; on l’y reçut, et il régna là. [10.1 L’année cent soixantième du règne des Grecs ; elle répond à la cent cinquante-et-unième avant Jésus-Christ. ― Le noble (nobilis) ou l’Illustre ; c’est-à-dire Antiochus Epiphane. ― Alexandre Ier Balas, qui passait pour fils d’Antiochus Epiphane, fut opposé à Démétrius Ier comme prétendant au trône de Syrie par Attale II, roi de Pergame. A l’instigation d’Attale II, Héraclide, ancien trésorier d’Antiochus Epiphane, le présenta avec Laodicée, qu’on disait fille de ce dernier roi, au sénat romain, afin de les faire reconnaître comme héritiers d’Antiochus Epiphane et leur assurer le secours de la république pour faire valoir leurs droits à la couronne des Séleucides. Les Romains, qui trouvaient sans doute Démétrius Ier trop puissant, adhérèrent à ce projet. Attale II procura une armée à Alexandre, avec l’aide du roi Ptolémée VI Philométor d’Egypte et d’Ariarathe V, roi de Cappadoce, qui avaient à se plaindre de Démétrius. Alexandre s’empara ainsi de Ptolémaïde. Sur Ptolémaïde, voir plus haut, 1 Machabées, 5, 15.]2 Le roi Démétrius l’apprit, et rassembla une très nombreuse armée, et marcha au-devant de lui pour le combattre. [10.2 Démétrius, pour résister à Alexandre balas, est obligé de faire la paix avec Jonathas. Celui-ci était assez puissant, pour faire pencher la balance en faveur de l’un des deux antagonistes. Alexandre chercha à le gagner à son tour ; il le nomma grand prêtre et lui envoya un manteau de pourpre et une couronne d’or, versets 15 à 21. Démétrius Ier enchérit alors sur Alexandre, versets 22 à 45. Jonathas se défia de ses offres et se prononça pour Alexandre, qui bientôt après battit Démétrius dans un combat où périt ce dernier, versets 46 à 50.]3 (Et) Démétrius envoya à Jonathas une lettre avec des paroles de paix, lui promettant de l’agrandir. 4 Car il di(sai)t : Hâtons-nous de faire la paix avec lui, avant qu’il la fasse avec Alexandre contre nous. 5 Car il se souviendra de tous les maux que nous lui avons faits, à lui, à son frère et à sa nation. 6 Il lui donna donc le pouvoir de rassembler une armée, et de fabriquer des armes, et d’être son allié ; et il ordonna qu’on lui remît les otages qui étaient dans la citadelle. 7 Jonathas vint à Jérusalem, et lut les lettres devant tout le peuple et devant ceux qui étaient dans la citadelle. 8 Et ils furent saisis d’une grande crainte, lorsqu’ils apprirent que le roi lui avait donné le pouvoir de rassembler une armée. 9 Les otages furent remis à Jonathas, et il les rendit à leurs parents. 10 Jonathas habita à Jérusalem, et il commença à bâtir et à renouveler la ville. 11 Il commanda à ceux qui faisaient les travaux de construire des murs, et d’entourer la montagne de Sion de pierres carrées pour la fortifier ; et ils firent ainsi. 12 Alors les étrangers qui étaient dans les forteresses que Bacchidès avait bâties s’enfuirent ; 13 et chacun d’eux quitta le lieu où il était, et s’en alla dans son pays. 14 Il resta seulement dans Bethsura quelques-uns de ceux qui avaient abandonné la loi et les préceptes de Dieu, car cette ville leur servait de retraite (refuge). [10.14 Bethsura. Voir 1 Machabées, 4, 61.]15 Le roi Alexandre apprit les promesses que Démétrius avait faites à Jonathas ; on lui raconta aussi les combats et les actes de courage qu’il avait accomplis avec ses frères ; et les peines qu’ils avaient endurées. 16 Et il dit : Est-ce que nous trouverons un homme semblable ? faisons maintenant de lui notre ami et notre allié. 17 Il écrivit une lettre, et il la lui envoya, conçue en ces termes : 18 Le roi Alexandre, à son frère Jonathas, salut. [10.18 La coutume entre les souverains de s’appeler frères est très ancienne (voir 3 Rois, 9, 13 ; 20, 33). D’ailleurs ce même nom se donnait alors assez souvent aux gouverneurs des provinces (voir 2 Machabées, 11, 22). ― Salut est à l’accusatif (salutem) comme complément d’un verbe, tel que donne ou souhaite, sous-entendu.]19 Nous avons entendu dire à ton (votre) sujet que tu (vous êt)es un homme puissant en force (très puissant), et que tu (vous êt)es apte à (digne d’) être notre ami ; [10.19 Très puissant. Comparer à 1 Machabées, 8, 1.]20 c’est pourquoi nous (vous) t’établissons aujourd’hui grand-prêtre de ta (votre) nation, et (nous voulons que) tu (vous) t’appelleras (soyez appelé) l’ami du roi (il lui envoya en même temps la (une robe de) pourpre et une couronne d’or), et nous souhaitons que tu (vous) ressentes(iez) comme nous ce qui nous intéresse, et que tu (vous) nous conserves(iez) ton (votre) amitié. [10.20 L’usage de la pourpre et de la couronne d’or était réservé aux rois, et à ceux à qui ils voulaient bien s’accorder. ― Ami du roi. Voir 1 Machabées, 2, 18.]21 (Et) Jonathas, en l’année cent soixante, se revêtit de la robe sainte, le septième mois, en la fête solennelle des Tabernacles (scénopégie, note) ; et il rassembla une armée, et fit faire beaucoup d’armes. [10.21 Au septième mois. Voir Aggée, 2, 2. ― L’année cent soixantième. Voir le verset 1. ― La scénopégie ; c’est-à-dire la fête des tabernacles. ― Jonathas se revêtit de la robe sainte, insigne du souverain pontificat. Le pontificat était vacant depuis sept ans par la mort de l’impie Alcime, voir 1 Machabées, 9, 56, qu’Antiochus V Eupator avait imposé aux Juifs comme grand prêtre, voir 1 Machabées, 7, vv. 5, 21. Depuis le meurtre d’Onias III et la fuite de son fils en Egypte, il n’y avait plus de successeur légitime du grand prêtre Jésus, dans la famille duquel avaient été pris les souverains pontifes depuis la captivité. Jonathas, étant de race sacerdotale, pouvait recevoir cette dignité.]22 Démétrius apprit ces choses, et il en fut vivement attristé, et il dit : 23 Comment avons-nous fait, qu’Alexandre nous ait prévenus, et qu’il ait gagné l’amitié des Juifs pour se fortifier ? 24 Je leur écrirai, moi aussi, des paroles de supplication, leur offrant des dignités et des présents, afin qu’ils soient avec moi pour me secourir. 25 Il leur écrivit donc en ces termes : Le roi Démétrius, à la nation des Juifs, salut. [10.25 Salut (salutem). Voir le verset 18.]26 Nous avons appris que vous avez gardé l’alliance faite avec nous, que vous êtes demeurés dans notre amitié, et que vous ne vous êtes point unis à nos ennemis, et nous nous en sommes réjouis. 27 Persévérez donc maintenant encore à nous conserver la fidélité, et nous vous rendrons en bienfaits (récompenserons pour) ce que vous avez fait pour nous ; 28 et nous vous remettrons beaucoup de charges (vos redevances), et nous vous ferons des présents. 29 Et dès à présent je (vous) remets à vous et à tous les Juifs les tributs, et je vous dispense des impôts de sel, et je vous remets les couronnes et la troisième partie de la semence, [10.29 Je vous remets, etc. Les Juifs devaient payer l’usage du sel, quoique les salines qui étaient autour de la mer Morte leur en fournissaient en abondance (voir 1 Machabées, 11, 35) ; ils devaient aussi donner au roi des couronnes tous les ans (voir 1 Machabées, 13, 39). ― Les couronnes étaient en or. C’étaient primitivement des dons volontaires qui avaient été faits aux rois par des princes ou des villes, mais souvent ils avaient été rendus obligatoires et constituaient un véritable tribut équivalent à une somme d’or déterminée.]30 et je vous abandonne à partir d’aujourd’hui et pour l’avenir la moitié des fruits des arbres, choses qui faisaient partie de mes droits, ne voulant plus qu’on les prélève sur le pays de Juda, ni sur les trois villes de la Samarie et de la Galilée qui lui ont été ajoutées, à partir d’aujourd’hui et dans tous les temps ; [10.30 Les trois cités ; le grec lit nome, ou canton ; l’historien Josèphe, toparchie, ou gouvernement d’une contrée, d’une province. Or les principales villes de ces trois cantons réunis étaient Lyda, Ramatha et Aphéréma. Comparer à 1 Machabées, 11, 34. ― Dans aucun temps (in totum tempus). Comme nous l’avons déjà remarqué, en hébreu, le tout joint à une négation signifie nul, pas un seul.]31 je veux aussi que Jérusalem soit sainte et libre avec son territoire, et que les dîmes et les tributs lui appartiennent. 32 Je renonce aussi à la possession de la citadelle qui est à Jérusalem, et je la donne au grand prêtre, afin qu’il y établisse, pour la garder, les hommes qu’il aura choisis. 33 Et je laisse libres, sans rançon, tous ceux des Juifs qui ont été emmenés captifs du pays de Juda, dans tout mon royaume, et je les affranchis tous des tributs, même sur (des charges dues pour) leurs bestiaux. [10.33 Tous les Juifs ; littéralement, et par hébraïsme, toute âme, c’est-à-dire, toute personne de Juifs. ― Et même, etc. ; c’est-à-dire, qu’ils soient tous affranchis, même des corvées et des charges publiques, pour lesquelles on les obligeait de fournir leurs animaux de service.]34 Et que tous les jours solennels, les sabbats, les nouvelles lunes (néoménies), les fêtes de prescription, les trois jours avant une fête solennelle, et les trois jours après une fête solennelle, soient tous des jours d’immunité et de franchise pour tous les Juifs qui sont dans mon royaume ; [10.34 Les jours ordonnés (dies decreti) ou privilégiés, comme la fête de Judith, celle des Sorts, de la dédicace du temple, etc. ― Les jours solennels sont les fêtes de Pâques, de la Pentecôte et des Tabernacles. ― Les néoménies, premier jour du mois.]35 et que personne n’ait le pouvoir de rien faire et de susciter des affaires contre quelqu’un d’entre eux, en quelque cause que ce soit. [10.35 Pour aucun motif (in omni causa). Voir le verset 30.]36 De plus on enrôlera des Juifs dans l’armée du roi, jusqu’au nombre de trente mille hommes, et ils seront entretenus comme doivent l’être toutes les armées du roi, et on en choisira d’entre eux qui seront dans les forteresses du grand roi ; [10.36 Que dans l’armée, etc. Chez les Grecs, l’état militaire était le plus honorable, parce que c’était celui des citoyens libres.]37 et on en établira quelques-uns sur les affaires du royaume qui sont traitées en confiance (demandent une grande fidélité), et des chefs seront pris parmi eux, et ils vivront selon leurs lois, comme le roi l’a ordonné pour le pays de Juda. [10.37 Qu’ils marchent, etc. ; hébraïsme, pour, qu’ils suivent, qu’ils se conforment, etc.]38 Et les trois villes de la province de Samarie, qui ont été annexées à la Judée, seront assimilées à la Judée, afin qu’elles ne dépendent que d’un seul, et qu’elles n’obéissent pas à une autre puissance que celle du grand prêtre. [10.38 Les trois cités, etc. Voir le verset 30.]39 Je donne aussi Ptolémaïde et son territoire en don au sanctuaire de Jérusalem, pour (fourniront) les dépenses nécessaires au sanctuaire (pour les choses saintes). [10.39 Fourniront ou bien seront, est sous-entendu. On sait en effet que le verbe substantif être, se sous-entend continuellement dans le style biblique. D’ailleurs le nominatif Ptolemaida ne laisse aucun doute ici. Nous ne croyons donc pas que le relatif que (quas) de la Vulgate soit une faute. A la vérité, le texte grec ne porte pas ce pronom, mais il met à l’accusatif Ptolémaïde, comme complément direct du verbe j’ai donné. Ptolémaïde était occupée alors par Alexandre (voir verset 1) ; la promettre aux Juifs, c’était les engager puissamment à aider Démétrius à s’en rendre maîtres.]40 Et je donne chaque année quinze mille sicles d’argent, sur les revenus du roi, qui m’appartiennent ; [10.40 Quinze mille sicles. Voir Ezéchiel, 45, 12.]41 tout ce qui reste et que n’ont pas payé ceux qui étaient préposés aux affaires pendant les années précédentes, ils le donneront pour les travaux du temple (de la maison du Seigneur). 42 Et en outre, les cinq mille sicles d’argent qui se prenaient chaque année sur les revenus du sanctuaire (les lieux saints), appartiendront aussi aux prêtres qui font les fonctions du ministère. 43 Et tous ceux qui, étant redevables au roi en quelque affaire que ce soit, se réfugieront dans le temple de Jérusalem et dans tout son territoire, seront exonérés, et ils auront la libre jouissance de tout ce qu’ils ont dans mon royaume. 44 Les dépenses pour bâtir et restaurer les bâtiments du sanctuaire (des lieux saints) seront prélevées sur les revenus du roi ; 45 pour construire les murs de Jérusalem et les fortifier tout autour, on prendra aussi sur les revenus du roi ; de même pour élever des murailles en Judée. 46 Lorsque Jonathas et le peuple entendirent ces paroles, ils ne les crurent pas et ne les reçurent pas, car ils se souvinrent des grands maux qu’il (que Démétrius) avait faits en Israël, et de quelle manière il les avait accablés. [10.46 Voir 1 Machabées, 7, 11.]47 Mais ils se complurent dans Alexandre, parce qu’il leur avait tenu le premier des paroles de paix ; et ils lui portèrent secours tous les jours. 48 Le roi Alexandre rassembla une grande armée, et marcha contre Démétrius. 49 Les deux rois engagèrent le combat, et l’armée de Démétrius s’enfuit ; Alexandre le poursuivit, et fondit sur eux. [10.49 Sur eux (super eos), sur Démétrius et ses soldats.]50 Et le combat fut très rude, jusqu’à ce que le soleil fût couché ; et Démétrius fut tué en ce jour-là. [10.50 Démétrius Ier, après avoir vaillamment combattu, tomba dans un marais et c’est là qu’il périt, couvert de blessures. Il avait régné une douzaine d’année (162-150).]51 Alexandre envoya des ambassadeurs à Ptolémée, roi d’Egypte, et lui fit parler en ces termes : [10.51 Ptolémée Philométor. ― Ptolémée VI Philométor (180-145) avait épousé sa sœur Cléopâtre et il en avait eu une fille, appelée aussi Cléopâtre, voir verset 57, qu’Alexandre demanda en mariage, dans le but sans doute de fortifier sa domination en Syrie. Ptolémée VI avait favorisé dès le commencement les prétentions d’Alexandre, voir plus haut, 1 Machabées, note 10.1 ; il devait donc être très disposé à consentir à ce mariage, qui entrait probablement dans ses plans, car il devait espérer pouvoir ainsi acquérir de l’influence en Syrie et recouvrer un jour les provinces de Cœlésyrie et de Phénicie que l’Egypte avait perdues depuis le règne d’Antiochus III le Grand. La suite de l’histoire dévoile ses vues intéressées et ambitieuses.]52 Comme je suis rentré dans mon royaume, que je suis assis sur le trône de mes pères, que j’ai recouvré mon empire, battu Démétrius et pris possession de notre pays, 53 et que je lui ai livré bataille, et qu’il a été défait par nous avec son armée, et que nous nous sommes assis sur le siège de son royaume, 54 faisons maintenant amitié l’un avec l’autre ; donne(z)-moi ta (votre) fille pour épouse, et je serai ton (votre) gendre, et je te (vous) ferai, ainsi qu’à elle, des présents dignes de toi (vous). 55 Le roi Ptolémée répondit, en disant : Heureux le jour où tu (vous êt)es rentré dans le pays de tes (vos) pères, et où tu t’es (vous vous êtes) assis sur le trône de leur royaume ! (.) 56 Et maintenant je ferai ce que tu as (vous avez) écrit ; mais viens (venez) au-devant de moi à Ptolémaïs, afin que nous nous voyions mutuellement, et que je te (vous) donne ma fille comme tu (vous) l’as (avez) dit. [10.56 Venez… à Ptolémaïde. Alexandre était sans doute à Antioche.]57 Ptolémée sortit donc d’Egypte avec sa fille Cléopâtre, et vint à Ptolémaïs, en l’année cent soixante-deux. [10.57 Cléopâtre, que l’on a justement appelée « femme funeste aux Séleucides, » devenue l’épouse d’Alexandre Balas en 150, ne resta que quatre ans avec lui. Les succès d’Alexandre l’ayant rendu indolent et inactif, son beau-père Ptolémée VI abandonna sa cause et se ligua contre lui avec Démétrius II Nicator, voir verset 67, auquel il donna, en 146, comme épouse sa fille Cléopâtre, enlevée à Alexandre. Elle eut de son nouveau mari deux fils, Séleucus V et Antiochus VIII Grypus. Démétrius II ayant été fait prisonnier par les Parthes, Cléopâtre donna sa main au frère du roi vaincu, Antiochus VII Sidète, qui occupa le trône pendant la captivité de Démétrius II. Celui-ci ayant recouvré sa liberté et sa couronne, la reine se retira à Ptolémaïde. En 125, Démétrius, obligé de fuir devant Alexandre II Zébina, alla à Ptolémaïde réclamer du secours auprès de son ancienne épouse. Elle le repoussa et on l’accusa même de l’avoir fait assassiner à Tyr. Elle fit périr aussi son propre fils Séleucus V, mais son autre fils, Antiochus VIII Grypus, mit fin à tous ses crimes en la contraignent à boire le poison que cette mère dénaturée avait préparé pour lui.]58 Le roi Alexandre vint à sa rencontre, et Ptolémée lui donna Cléopâtre, sa fille, et il célébra les noces à Ptolémaïs, à la manière des rois, avec une grande magnificence. 59 Le roi Alexandre écrivit aussi à Jonathas, afin qu’il vint au-devant de lui. 60 Il alla avec magnificence à Ptolémaïs, et il y rencontra les deux rois ; il leur donna beaucoup d’argent et d’or, et des présents, et il trouva grâce devant eux. 61 Alors quelques hommes pervers d’Israël s’assemblèrent contre lui, des hommes impies (pestes publiques), qui l’accusèrent ; mais le roi ne les écouta pas. 62 Et il ordonna qu’on dépouillât Jonathas de ses vêtements et qu’on le revêtît de pourpre ; ce qui fut fait. Et le roi le fit asseoir près de lui ; 63 et il dit à ses princes : Allez avec lui au lieu de la ville, et publiez que personne ne porte aucune plainte contre lui, et que personne ne lui fasse de peine pour quelque cause que ce soit. 64 Et il arriva que lorsque ceux qui portaient plainte contre lui virent sa gloire qu’on publiait, et la pourpre dont il était revêtu, ils s’enfuirent tous. 65 Le roi l’éleva en grand honneur, l’inscrivit parmi ses principaux amis, et l’établit chef et participant au gouvernement (l’associa à sa domination). [10.65 Parmi ses principaux amis. Il avait déjà reçu le titre d’ami, voir verset 20 ; maintenant il reçoit le titre supérieur d’ami principal. Voir 1 Machabées, 2, 18.]66 Et Jonathas revint à Jérusalem en paix et avec joie. 67 En la cent soixante-cinquième année, Démétrius, fils de Démétrius, vint de Crète au pays de ses pères. [10.67 Démétrius II Nicator, fils de Démétrius Ier Soter, vint de Crète, en 148, afin de reconquérir le royaume de son père. C’était l’aîné des deux fils de Démétrius Ier. Celui-ci, au commencement de sa guerre avec Alexandre Ier Balas, avait envoyé ses deux fils avec de grands trésors, à l’un de ses amis à Cnide en Carie, afin de les soustraire aux dangers de la guerre. Ayant appris que le nouveau roi de Syrie vivait dans la mollesse, le jeune Démétrius débarqua en Cilicie avec une armée levée par le Crétois Lasthène. Alexandre avait fait probablement de Ptolémaïde sa résidence ordinaire depuis son mariage avec Cléopâtre. Effrayé à la nouvelle de l’arrivée de son compétiteur, il se rendit à Antioche, laissant Apollonius comme gouverneur de la Cœlésyrie. Démétrius II avait gagné Ptolémée VI Philométor. Avec son aide, il défit sur la rivière Œnoparos, dans la plaine d’Antioche, Alexandre Balas, qui fut contraint de s’enfuir en Arabie, où il périt assassiné, voir 1 Machabées, 11, 16-17. Démétrius II fut ainsi reconnu de tous roi de Syrie. Il ne se montra pas d’abord hostile aux juifs, voir 1 Machabées, 11, 20. Aussi une sédition ayant éclaté contre lui à Antioche, les Juifs le défendirent contre les séditieux. Mais comme il ne tint pas les promesses qu’il leur avait faites, ils passèrent du côté de ses ennemis, ainsi que les anciens soldats syriens qu’il avait licenciés. Un général d’Alexandre Balas, peu après le triomphe de Démétrius II, avait fait proclamer roi un fils mineur d’Alexandre, Antiochus VI Dionysos, voir 1 Machabées, 11, 39. Tryphon battit Démétrius et se rendit maître d’Antioche. La guerre continua entre eux plusieurs années, jusqu’à ce que Démétrius II fut fait prisonnier dans une campagne contre le roi parthe Mithridate Ier Arsace, voir 1 Machabées, 14, 1. Il ne recouvra sa liberté qu’au bout de dix ans. Pendant ce temps, son frère Antiochus VII Sidètes avait occupé le trône et renversé Tryphon. Antiochus VII périt dans une guerre contre les Parthes et Démétrius II remonta sur le trône. Alexandre II Zébina le lui disputa et le vainquit à Damas. Démétrius II alla demander en vain du secours à Ptolémaïde à sa femme Cléopâtre. Il fut peu après assassiné à Tyr en 125.]68 Le roi Alexandre l’apprit et en fut très attristé, et il retourna à Antioche. 69 Le roi Démétrius institua général Apollonius, qui gouvernait la Cœlésyrie, et il rassembla une grande armée ; et il vint à Jamnia, et envoya dire à Jonathas, le grand prêtre, [10.69 Apollonius, probablement fils de l’Apollonius dont parle le second livre des Machabées, 3, vv. 5, 7, avait été l’ami et le confident de Démétrius Ier pendant que celui-ci était retenu comme otage à Rome. C’est ce qui explique pourquoi il abandonna si facilement le parti d’Alexandre Balas, en faveur du fils de son ancien ami, et obtint aussitôt la confiance de Démétrius II. ― La Cœlésyrie proprement dite désignait la longue et large vallée comprise entre le Liban et l’Antiliban, mais le gouvernement de la Cœlésyrie comprenait aussi la Phénicie et la Palestine jusqu’à Raphia.]70 ces paroles : (Toi) Seul tu nous résistes, et je suis devenu un sujet de risée et d’opprobre, parce que tu exerces le (un) pouvoir contre nous dans les montagnes. 71 Maintenant donc, si tu te confies dans tes forces, descends à nous dans la plaine, et mesurons-nous-y ensemble ; car avec moi est la valeur de la guerre (force des combats). 72 Interroge et apprends qui je suis, et quels sont ceux qui combattent avec moi ; eux aussi disent que votre pied ne pourrait tenir ferme devant notre face, car deux fois tes pères ont été mis en fuite dans leur pays ; [10.72 Que par deux fois, etc. Cela se rapporte peut-être à la défaite de Joseph et d’Azarias (voir 1 Machabées, 5, 60), et au combat où Judas fut tué (voir 1 Machabées, 9, vv. 6, 18).]73 et maintenant comment pourras-tu résister à la (ma) cavalerie et à une si grande armée, dans une plaine où il n’y a ni pierre, ni rocher, ni aucun lieu pour fuir ? 74 Lorsque Jonathas eut entendu les paroles d’Apollonius, il fut ému dans son cœur ; et il choisit dix mille hommes, et sortit de Jérusalem, et Simon son frère vint à son secours ; 75 et ils campèrent près de Joppé, et on lui ferma la ville, parce qu’une garnison d’Apollonius était à Joppé, et il l’assiégea. [10.75-76 La garnison syrienne fit fermer les portes de la ville à l’armée de Jonathas, mais les habitants les lui ouvrirent, malgré la garnison. Joppé ou Jaffa est à quatre heures et demie de marche de Jamnia où était Apollonius.]76 (Mais) Ceux qui étaient dans la ville, épouvantés, lui ouvrirent ; et Jonathas se rendit maître de Joppé. 77 Apollonius l’apprit, et s’approcha avec trois mille cavaliers et une grande armée. 78 Il marcha vers Azot, comme pour aller plus loin, et tout à coup il se jeta dans la plaine, parce qu’il avait une multitude de cavaliers et qu’il avait confiance en eux. Jonathas le suivit vers Azot, et ils engagèrent la bataille. [10.78 Vers Azot. Voir plus haut, 1 Machabées, 5, 68.]79 Apollonius avait laissé (laissa) secrètement dans son camp mille cavaliers derrière eux. 80 Jonathas apprit qu’il y avait derrière lui une embuscade. Ils (et les ennemis) entourèrent son camp, et lancèrent des traits contre le (son) peuple, depuis le matin jusqu’au soir. 81 Mais le peuple demeura ferme, comme Jonathas l’avait ordonné ; et leurs chevaux (des ennemis) se fatiguèrent. 82 Alors Simon fit avancer son armée et attaqua l’infanterie, car les cavaliers étaient fatigués ; et ils furent écrasés (défaits) par lui, et s’enfuirent. [10.82 La légion (legionem) dans le grec, phalange. Voir 1 Machabées, 9, 12.]83 Et ceux qui se dispersèrent à travers la plaine s’enfuirent à Azot et entrèrent dans le temple de Dagon (Bethdagon, note), leur idole, pour s’y mettre en sûreté. [10.83 Et ceux qui ; le grec porte, et la cavalerie, ce qui a fait penser que les copistes ont mis dans la Vulgate et qui, pour et equi, et les chevaux, les cavaliers.]84 Mais Jonathas brûla Azot et les villes qui étaient alentour, et il prit leurs dépouilles, et il brûla par le feu le temple de Dagon, avec tous ceux qui s’y étaient réfugiés. [10.84 Bethdagon, c’est-à-dire, maison ou temple de Dagon, comme la Vulgate elle-même l’explique au verset suivant. Or Dagon était une idole des Philistins, laquelle a donné son nom à plusieurs villes.]85 Et ceux qui tombèrent par l’épée, avec ceux qui furent brûlés, étaient environ huit mille hommes. 86 Jonathas leva de là son camp et marcha contre Ascalon ; et ceux de la ville sortirent au-devant de lui (et le reçurent) avec une grande magnificence. [10.86 A Ascalon, dans la plaine de la Séphéla, au nord de Gaza, sur la Méditerranée ; position très forte.]87 Jonathas revint ensuite à Jérusalem avec les siens, qui avaient (portant) de nombreuses dépouilles. 88 Et il arriva que lorsque le roi Alexandre apprit ces choses, il accorda encore à Jonathas de plus grands honneurs. [10.88 Ces choses (sermones istos). Voir 1 Machabées, 5, 37.]89 Et il lui envoya une agrafe d’or, comme c’est la coutume d’en donner aux parents des rois ; il lui donna de plus Accaron et tout son territoire, pour qu’il la possédât en propre. [10.89 L’agrafe d’or était une grande marque de distinction parmi les Grecs, les Perses, les Macédoniens et les Romains ; elle servait à rattacher l’épaule la partie de devant à celle de derrière, de l’habit de dessus. ― Les parents des rois (cognati regum). Les rois appelaient par distinction et par honneur, parents, des personnes revêtues de la première dignité, mais qui souvent ne tenaient nullement à eux ni par le sang ni par les alliances. Ils traitaient de même leurs simples amis. ― Accaron, l’une des principales villes du pays des Philistins, dans la plaine de la Séphéla, au sud-ouest de la Palestine.]