10 La troisième année de Cyrus, roi des Perses, une parole fut révélée à Daniel, surnommé Baltassar, une parole véritable, et une grande force. Il comprit ce qui lui fut dit ; car on a besoin d'intelligence dans les visions.
2 En ces jours, moi, Daniel, je pleurai pendant trois semaines*.
La tristesse du prophète venait de ce qu'une partie des Juifs seulement était sortie de la captivité pour rentrer dans sa patrie, et que ceux qui étaient rentrés avaient à lutter contre de nombreuses difficultés pour la reconstruction du temple. (Voy. I Esdr., IV, 7 et suiv.)
3 Je ne mangeai d'aucun pain agréable au goût, il n'entra ni chair ni vin dans ma bouche, et je ne fis usage d'aucune huile, jusqu'à ce que ces trois semaines fussent accomplies.
4 Le vingt-quatrième jour du premier mois, j'étais sur le bord du grand fleuve qui est le Tigre.
5 Je levai les yeux, et je vis tout à coup un homme vêtu de lin, dont les reins étaient ceints d'or très pur.
6 Son corps était comme une chrysolithe, son visage brillait comme l'éclair, et ses yeux étaient comme des lampes ardentes ; ses bras et tout le reste du corps jusqu'aux pieds resplendissaient comme un airain étincelant, et le son de sa voix était semblable au bruit d'une multitude.
7 Moi, Daniel, je vis seul cette vision, et ceux qui étaient avec moi ne la virent point, mais ils furent saisis d'une grande frayeur, et s'enfuirent dans un lieu caché.
8 Étant donc resté seul, je contemplai cette grande vision, et toute ma force m'abandonna, mon visage pâlit, je tombai épuisé, et je n'eus plus aucune vigueur.
9 Le bruit d'une voix retentissait à mon oreille, et en l'entendant j'étais prosterné, saisi de frayeur, et le visage contre terre.
10 Alors une main me toucha, et me fit lever sur les genoux et sur les mains.
11 Et la voix me dit : Daniel, homme de désirs, comprends les paroles que je te fais entendre, et tiens-toi debout, car je suis envoyé vers toi. Et lorsqu'il eut dit ces paroles je me levai tout tremblant.
12 Et il me dit : Daniel, ne crains pas ; car dès le premier jour où tu as appliqué ton cœur à comprendre et à t'affliger en la présence de ton Dieu, tes paroles ont été entendues, et je suis venu à cause d'elles.
13 Le prince du royaume des Perses* m'a résisté pendant vingt et un jours ; mais Michel, l'un des premiers princes, est venu à mon secours, et je suis demeuré là auprès du roi des Perses.
Saint Thomas et plusieurs interprètes entendent par ce prince du royaume des Perses un mauvais ange, le démon, qui s'opposait au retour des Juifs dans leur patrie. D'autres l'entendent du bon ange protecteur des Perses, qui s'y opposait, afin de procurer la conversion des Perses par leurs rapports avec les Juifs réfugiés chez eux.
14 Je suis venu pour t'apprendre ce qui doit arriver à ton peuple dans les derniers jours ; car cette vision ne s'accomplira qu'après beaucoup de temps.
15 Comme il m'adressait ces paroles, je me prosternai la face contre terre, et je gardai le silence.
16 Et voilà que celui qui avait la ressemblance d'un fils de l'homme me toucha les lèvres, et, ouvrant la bouche, je parlai, et je dis à celui qui était debout devant moi : Mon seigneur, à votre vue tout ce qu'il y a de vigueur en moi s'est évanoui, il ne m'est resté aucune force.
17 Et comment le serviteur de mon seigneur pourra-t-il lui parler ? car je suis resté sans force, et ma respiration même s'est arrêtée.
18 Alors celui qui ressemblait à un homme me toucha de nouveau, me fortifia, et me dit :
19 Ne crains point, homme de désirs, la paix soit avec toi ; reprends tes forces, et sois ferme. Et comme il me parlait, je me sentis fortifié, et je dis : Parlez, mon seigneur, car vous m'avez donné des forces.
20 Alors il me dit : Sais-tu pourquoi je suis venu à toi ? Maintenant je retourne pour combattre le prince des Perses ; lorsque je m'éloignais, le prince des Grecs est venu à paraître.
21 Cependant je t'annoncerai ce qui est marqué dans l'Écriture de la vérité, et nul ne m'assiste dans toutes ces choses, sinon Michel, votre prince*.
On voit par ce passage que l'archange saint Michel était l'ange protecteur du peuple élu. L'Église catholique l'honore pareillement comme son protecteur, et il apparaît en cette qualité dans l'Apocalypse, ch. XII, v. 7, où il soutient un combat contre Satan.