Vigouroux – Nombres 11
Murmure des Israélites puni par un feu envoyé de Dieu. Choix de soixante-dix anciens pour soulager Moïse. Dieu envoie des cailles.
11 Cependant il s’éleva contre le Seigneur un murmure du peuple, se plaignant de la fatigue qu’il endurait. Le Seigneur, l’ayant entendu, s’irrita, et une flamme (le feu) qui venait du Seigneur, s’étant allumée contre eux, dévora l’extrémité du camp. [11.1 Voir Psaumes, 77, 19 ; 77, 21 ; 1 Corinthiens, 10, 10.]2 Alors, le peuple ayant crié à Moïse, Moïse pria le Seigneur, et le feu s’éteignit. 3 Et il appela ce lieu l’Incendie (du nom d’Embrasement), parce que le feu du Seigneur s’y était allumé contre eux. 4 Car une troupe de petit peuple qui était venu d’Egypte avec eux, éprouva de vives convoitises ; et s’étant assis et pleurant, et ayant aussi attiré à eux les enfants d’Israël, ils commencèrent à dire : Qui nous donnera de la chair à manger ? [11.4 Voir 1 Corinthiens, 10, 3.]5 Nous nous souvenons des poissons que nous mangions pour rien en Egypte ; les concombres, les melons, les poireaux, les oignons et l’ail nous reviennent à l’esprit. 6 Notre âme est desséchée, nos yeux ne voient rien que la manne. 7 Or la manne était comme la graine de la coriandre, de la couleur du bdellium. [11.7 Voir Exode, 16, 14 ; Psaumes, 77, 24 ; Sagesse, 16, 20 ; Jean, 6, 31. ― De la graine de coriandre. Voir Exode, note 16.31. ― De la couleur du bdellium, c’est-à-dire blanche. Le bdellium est une gomme résineuse qui coule de la bdella, espèce de palmier.]8 Le peuple l’allait chercher autour du camp, et l’ayant ramassée, il la broyait sous la meule, ou il la pilait dans un mortier ; ensuite il la cuisait au pot (dans la marmite), et il en faisait des tourteaux (petites miches) qui avai(en)t le goût du pain pétri avec de l’huile. [11.8 Sous la meule. Voir Deutéronome, note 24.6. ― Dans le mortier. Les moulins à eau et à vent ont été inventés assez tard. On avait commencé par piler le grain, entre deux pierres, l’une servant de mortier, l’autre de pilon, avant de le moudre. Un bas-relief égyptien représente deux hommes broyant le grain dans un mortier. Le moulin à bras existait dès le temps d’Abraham, puisqu’il est question de farine fine ou farine moulue, non pilée ou broyée. Voir Genèse, 18, 6. On se sert aussi du mortier, aujourd’hui encore, dans quelques villages d’Orient.]9 Quand la rosée tombait sur le camp durant la nuit, la manne y tombait aussi en même temps. 10 Moïse entendit donc le peuple, qui pleurait chacun dans sa famille, et à l’entrée de sa tente. Alors le Seigneur entra dans une grande fureur, et la chose parut aussi insupportable à Moïse ; 11 et il dit au Seigneur : Pourquoi avez-vous affligé votre serviteur ? Pourquoi ne trouvai-je point grâce devant vous ? et pourquoi m’avez-vous chargé du poids de tout ce peuple ? 12 Est-ce moi qui ai conçu toute cette grande multitude, ou qui l’ai engendrée, pour que vous me disiez : Porte-les dans ton sein, comme une nourrice a coutume de porter son petit enfant, et mène-les au pays que j’ai promis à leurs pères avec serment ? [11.12 Pour laquelle vous avez juré ; que vous avez promise par serment.]13 Où trouverai-je de la chair pour en donner à un si grand peuple ? Ils pleurent et crient contre moi, en disant : Donne-nous de la viande, afin que nous en mangions. 14 Je ne puis porter seul tout ce peuple, parce qu’il est devenu trop lourd pour moi. 15 Si votre volonté s’oppose en cela à mon désir, je vous conjure de me faire plutôt mourir et trouver grâce à vos yeux, pour que je ne sois point accablé de tant de maux. 16 Le Seigneur répondit à Moïse : Assemble-moi soixante-dix des anciens d’Israël, que tu sauras (sais) être les plus expérimentés et les plus propres à gouverner, et mène-les à l’entrée du tabernacle de l’alliance, où ils se tiendront debout avec toi. 17 Je descendrai là pour te parler ; je prendrai de l’esprit qui est en toi, et je leur en donnerai, afin qu’ils soutiennent avec toi le fardeau de ce peuple, et que tu ne sois point trop chargé en le portant seul. 18 Tu diras aussi au peuple : Purifiez-vous, vous mangerez demain de la chair ; car je vous ai entendu dire : Qui nous donnera de la viande à manger ? Nous étions bien dans l’Egypte (en). Le Seigneur vous donnera donc de la chair, afin que vous en mangiez, [11.18 Ainsi le Seigneur vous donnera. Ce passage étant inintelligible dans la Vulgate, nous l’avons traduit d’après l’hébreu.]19 non un seul jour, ni deux jours, ni cinq, ni dix, ni vingt, 20 mais pendant un mois entier, jusqu’à ce qu’elle vous sorte par les narines, et qu’elle vous fasse soulever le cœur ; parce que vous avez rejeté le Seigneur qui est au milieu de vous, et que vous avez pleuré devant lui, en disant : Pourquoi sommes-nous sortis d’Egypte ? 21 Moïse lui dit : Il y a six cent mille hommes de pied dans ce peuple, et vous dites : Je leur donnerai de la viande à manger pendant tout un mois ! (.) 22 Ferez-vous égorger une multitude de brebis ou de bœufs, afin qu’elle puisse suffire à leur nourriture ? ou rassemblerez-vous tous les poissons de la mer afin de les rassasier ? [11.22 Voir Jean, 6, 10.]23 Le Seigneur lui répondit : La main du Seigneur est-elle impuissante ? Tu vas voir présentement si l’effet suivra ma parole. [11.23 Voir Isaïe, 59, 1.]24 Moïse, étant donc venu vers le peuple, lui rapporta les paroles du Seigneur ; et ayant rassemblé soixante-dix hommes (choisis) parmi les anciens d’Israël, il les plaça près du tabernacle. 25 Alors le Seigneur étant descendu dans la nuée, parla à Moïse, prit de l’esprit qui était en lui, et le donna à ces soixante-dix hommes. L’Esprit s’étant donc reposé sur eux, ils commencèrent à prophétiser, et continuèrent toujours depuis. 26 Or deux de ces hommes, dont l’un se nommait Eldad, et l’autre Médad, étant demeurés dans le camp, l’esprit se reposa sur eux ; car ils étaient aussi parmi les inscrits, mais ils n’étaient point sortis pour aller au tabernacle. 27 Et tandis qu’ils prophétisaient dans le camp, un jeune homme (enfant) courut à Moïse, et lui dit : Eldad et Médad prophétisent dans le camp. 28 Aussitôt Josué, fils de Nun, qui excellait entre tous les serviteurs de Moïse, lui dit : Moïse, mon seigneur, empêchez-les. 29 Mais Moïse lui répondit : Pourquoi es-tu jaloux à mon sujet ? Plût à Dieu que tout le peuple prophétisât, et que le Seigneur répandît son esprit sur eux ! 30 Après cela Moïse revint au camp avec les anciens d’Israël. 31 En même temps un vent soulevé par le Seigneur, saisissant des cailles au-delà de la mer, les amena, et les fit tomber dans le camp et autour du camp, en un espace aussi grand qu’est le chemin que l’on peut faire en un jour ; et elles volaient en l’air, n’étant élevées au-dessus de la terre que de deux coudées. [11.31 Voir Psaumes, 77, 26-27.]32 Le peuple, se levant donc, amassa durant tout ce jour, et la nuit suivante, et le lendemain, une si grande quantité de cailles, que ceux qui en avaient le moins en avaient dix mesures, et ils les firent sécher tout autour du camp. [11.32 Littéralement Amassa des cailles, qui peu, dix mesures.]33 Ils avaient encore de la chair entre les dents, et ils n’avaient pas achevé de manger cette viande, que la fureur du Seigneur s’alluma contre le peuple, et le frappa d’une très grande plaie. [11.33 Voir Psaumes, 77, 30.]34 C’est pourquoi ce lieu fut appelé les Sépulcres de (la, note) concupiscence, parce qu’ils ensevelirent le peuple qui avait désiré de la chair. 35 Et étant sortis des Sépulcres de (la) concupiscence, ils vinrent à Haséroth, où ils demeurèrent. [11.35 Sépulcres de la concupiscence, en hébreu Qibroth Hattaavah, probablement l’Erweis el Ebierig actuel, éminence parfaitement adaptée pour un grand rassemblement de peuple et couverte à plusieurs lieurs à la ronde des vestiges d’un grand rassemblement et du séjour d’un grande multitude. ― Haséroth paraît désigner un campement permanent d’un peuple pasteur, comme on en trouve encore aujourd’hui des restes, dans le désert du Sinaï.]