13 Qui touche à la poix s’englue,
qui fréquente l’orgueilleux en vient à lui ressembler.
2 Ne te charge pas d’un fardeau trop lourd,
ne te lie pas à plus fort et plus riche que toi.
Pourquoi mettre le pot de terre avec le pot de fer ?
S’il le heurte, il se brisera.q
q Comparaison classique qui se trouve déjà dans Ésope.
3 Le riche commet une injustice, il prend de grands airs ;
le pauvre est lésé, il se fait suppliant.
4 tu lui es utile il se sert de toi,
si tu fais défaut, il s’écartera de toi.
5 As-tu quelque bien ? Il vivra avec toi,
il te dépouillera sans aucun remords.
6 A-t-il besoin de toi ? Il t’enjôlera,
te fera des sourires et te donnera de l’espoir,
il t’adressera de bonnes paroles
et dira : « De quoi as-tu besoin ? »
7 Il t’humiliera au cours de ses festins,
jusqu’à te dépouiller par deux et trois fois,
et pour finir il se moquera de toi.
Puis, s’il t’aperçoit, il s’écartera de toi
en hochant la tête à ton sujet.
8 Prends garde de ne pas te laisser séduire,
pour ne pas être humilié dans ta sottise.r
r « dans ta sottise », lat., syr. ; « dans ta joie » grec. — Hébr. « Prends garde de ne pas être trop insolent (?), ne ressemble pas aux insensés. »
9 Quand un grand t’appelle, dérobe-toi,
il t’appellera de plus belle.
10 Ne te précipite pas, de peur d’être repoussé ;
ne te tiens pas trop loin, de peur d’être oublié.s
s Expression frappante de la modération réfléchie et non dépourvue de malice qui caractérise Ben Sira. — Le conseil évangélique de Lc 14.8-10, dont on serait tenté de rapprocher cette maxime, n’a en fait exactement ni le même contenu ni le même motif.
11 Ne t’avise pas d’être familier avec lui,
ne te fie pas à sa faconde.
Par son verbiage il te met à l’épreuve,
comme en se jouant il s’informe.
12 Impitoyable est celui qui colporte les propos ;
il ne t’épargne ni les coups ni les chaînes.
13 Prends garde et fais bien attention,
car tu chemines en compagnie de ta propre ruine.
14 Quand tu entends cela dans ton sommeil, éveille-toi ;
toute ta vie, aime le Seigneur et invoque-le pour ton salut.t
t Gr II et lat.
15 Tout être vivant aime son semblable
et tout homme son prochain.
16 Toute chair s’accouple selon son espèce
et l’homme s’associe à son semblable.
17 Comment pourraient s’entendre le loup et l’agneau ?
Ainsi en est-il du pécheur et de l’homme pieux.
18 Quelle paix peut-il y avoir entre l’hyène et le chien ?
Et quelle paix entre le riche et le pauvre ?u
u Pour Ben Sira, le précepte de ne fréquenter que ses égaux est en continuité avec l’harmonie de la nature et donc conforme à l’ordre divin. La condamnation de la richesse n’est pas absolue, cf. v. 24, mais l’auteur veut empêcher le pauvre de se laisser séduire par le riche qui risque de l’écraser.
19 Les onagres au désert sont le gibier des lions,
ainsi les pauvres sont la proie des riches.
20 Pour l’orgueilleux l’humilité est une abjection :
ainsi le riche a le pauvre en horreur.
21 Quand le riche fait un faux pas, ses amis le soutiennent ;
quand le malheureux fait une chute, ses amis le rejettent.
22 Quand le riche trébuche,v beaucoup le reçoivent dans leurs bras,
s’il dit des sottises, on lui donne raison.
Quand le malheureux trébuche, on lui fait des reproches,
s’il dit des choses sensées, il n’y a pas de place pour lui.
v Ce v. est sans doute à prendre métaphoriquement, « trébucher » peut avoir le sens de « dire des sottises » (hébr. « parle »), cf. 14.1, et la suite montre qu’il s’agit surtout de discours.
23 Quand le riche parle, tous se taisent
et l’on porte aux nues son discours.
Quand le pauvre parle, on dit : « Qui est-ce ? »
Et s’il achoppe on le jette par terre.
24 La richesse est bonne quand elle est sans péché,
la pauvreté est mauvaise aux dires de l’impie.w
w Ou peut-être « à la mesure de l’impiété » (hébr. « à la mesure de l’insolence »). — La richesse n’est pas une tare mais seulement un danger.
25 Le cœur de l’homme modèle son visage,
soit en bien soit en mal.
26 À cœur en fête, gai visage ;
l’invention de proverbes suppose de pénibles réflexions.x
x « cœur en fête », ou « bon cœur », hébr., c’est-à-dire bonne personne. — On voit mal comment, en grec, le second stique se rattache au précédent. Hébr. « isolement et air pensif cogitation de misère », où le contraste ressort.