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Bible de Jérusalem – Luc 16

L’intendant avisé.

16 Il disaitz encore à ses disciples : « Il était un homme riche qui avait un intendant, et celui-ci lui fut dénoncé comme dilapidant ses biens.

z Ce ch. rassemble deux paraboles et plusieurs logia de Jésus, concernant le bon et le mauvais emploi de l’argent. Les vv. 16-18, qui se rapportent à trois sujets différents, en troublent la composition.

2 Il le fit appeler et lui dit : « Qu’est-ce que j’entends dire de toi ? Rends compte de ta gestion, car tu ne peux plus gérer mes biens désormais. » 3 L’intendant se dit en lui-même : « Que vais-je faire, puisque mon maître me retire la gérance ? Piocher ? Je n’en ai pas la force ; mendier ? J’aurai honte... 4 Ah ! je sais ce que je vais faire, pour qu’une fois relevé de ma gérance, il y en ait qui m’accueillent chez eux. »

5 « Et, faisant venir un à un les débiteurs de son maître, il dit au premier : « Combien dois-tu à mon maître ? » ­ 6 « Cent barils d’huile », lui dit-il. Il lui dit : « Prends ton billet, assieds-toi et écris vite cinquante. » 7 Puis il dit à un autre : « Et toi, combien dois-tu ? » ­ « Cent mesures de blé », dit-il. Il lui dit : « Prends ton billet, et écris quatre-vingts. »

8 « Et le maître loua cet intendant malhonnête d’avoir agi de façon avisée.a Car les fils de ce monde-ci sont plus avisés envers leurs propres congénères que les fils de la lumière.

a Selon la coutume alors tolérée en Palestine, l’intendant avait le droit de consentir des prêts sur les biens de son maître et, comme il n’était pas rémunéré, de se payer en forçant sur la quittance le montant du prêt, afin que, lors du remboursement, il profitât de la différence comme d’un surplus qui représentait son intérêt. Dans le cas présent, il n’avait sans doute prêté en réalité que cinquante barils d’huile et quatre-vingts mesures de blé en ramenant la quittance à ce montant réel, il ne fait que se priver du bénéfice, à vrai dire usuraire, qu’il avait escompté. Sa « malhonnêteté », v. 8, ne réside donc pas dans la réduction de quittances, qui n’est qu’un sacrifice de ses intérêts immédiats, manœuvre habile que son maître peut louer, mais plutôt dans les malversations antérieures qui ont motivé son renvoi, v. 1.

Le bon emploi de l’argent.

9 « Eh bien ! moi je vous dis : faites-vous des amis avec le malhonnête Argent,b afin qu’au jour où il viendra à manquer, ceux-ci vous accueillent dans les tentes éternelles.

b L’argent n’est pas mauvais en soi, mais il faut en faire bon usage. S’il est dit « malhonnête », c’est parce qu’il risque toujours de détourner l’être humain des vraies valeurs, amour de Dieu et du prochain. Plus haut (6.24), Luc a stigmatisé la conduite de ceux qui se sont fait un dieu de l’argent (1 Tm 6.10).

10 Qui est fidèle en très peu de chose est fidèle aussi en beaucoup, et qui est malhonnête en très peu est malhonnête aussi en beaucoup. 11 Si donc vous ne vous êtes pas montrés fidèles pour le malhonnête Argent, qui vous confiera le vrai bien ? 12 Et si vous ne vous êtes pas montrés fidèles pour le bien étranger,c qui vous donnera le vôtre ?d

c C’est-à-dire un bien extérieur à l’homme la richesse.

d « le vôtre »; var. « le nôtre ». ­ Il s’agit des biens spirituels qui, ceux-là, peuvent appartenir à l’homme.

13 « Nul serviteur ne peut servir deux maîtres : ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l’Argent. »

Contre les Pharisiens, amis de l’argent.

14 Les Pharisiens, qui sont amis de l’argent, entendaient tout cela et ils se moquaient de lui. 15 Il leur dit : « Vous êtes, vous, ceux qui se donnent pour justes devant les hommes, mais Dieu connaît vos cœurs ; car ce qui est élevé pour les hommes est objet de dégoût devant Dieu.

À l’assaut du Royaume.

16 « Jusqu’à Jean ce furent la Loi et les Prophètes ; depuis lors le Royaume de Dieu est annoncé, et tous s’efforcent d’y entrer par violence.

Pérennité de la Loi.

17 « Il est plus facile que le ciel et la terre passent que ne tombe un seul menu trait de la Loi.

Indissolubilité du mariage.

18 « Tout homme qui répudie sa femme et en épouse une autre commet un adultère, et celui qui épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère.

Le mauvais riche et le pauvre Lazare.e

19 « Il y avait un homme riche qui se revêtait de pourpre et de lin fin et faisait chaque jour brillante chère.

e Histoire-parabole, sans aucune attache historique.

20 Et un pauvre, nommé Lazare, gisait près de son portail, tout couvert d’ulcères. 21 Il aurait bien voulu se rassasier de ce qui tombait de la table du riche...f Bien plus, les chiens eux-mêmes venaient lécher ses ulcères.

f Add. « mais personne ne lui en donnait », cf. 15.16.

22 Or il advint que le pauvre mourut et fut emporté par les anges dans le sein d’Abraham.g Le riche aussi mourut, et on l’ensevelit.h

g Expression judaïque qui répond à l’ancienne locution biblique « être réuni à ses pères », c’est-à-dire aux Patriarches, Jg 2.10 ; cf. Gn 15.15 ; 47.30 ; Dt 31.16. L’image exprime l’intimité, Jn 1.18, et la proximité avec Abraham dans le banquet messianique, cf. Jn 13.23 ; Mt 8.11.

h Vulg. « on l’enterra dans l’enfer ».

23 « Dans l’Hadès, en proie à des tortures, il lève les yeux et voit de loin Abraham, et Lazare en son sein. 24 Alors il s’écria : « Père Abraham, aie pitié de moi et envoie Lazare tremper dans l’eau le bout de son doigt pour me rafraîchir la langue, car je suis tourmenté dans cette flamme. » 25 Mais Abraham dit : « Mon enfant, souviens-toi que tu as reçu tes biens pendant ta vie, et Lazare pareillement ses maux ; maintenant ici il est consolé, et toi, tu es tourmenté. 26 Ce n’est pas tout : entre nous et vous un grand abîmei a été fixé, afin que ceux qui voudraient passer d’ici chez vous ne le puissent, et qu’on ne traverse pas non plus de là-bas chez nous. »

i L’abîme symbolise l’impossibilité pour les élus comme pour les damnés de changer leur destin.

27 « Il dit alors : « Je te prie donc, père, d’envoyer Lazare dans la maison de mon père, 28 car j’ai cinq frères ; qu’il leur porte son témoignage, de peur qu’ils ne viennent, eux aussi, dans ce lieu de la torture. » 29 Et Abraham de dire : « Ils ont Moïse et les Prophètes ; qu’ils les écoutent. » ­ 30 « Non, père Abraham, dit-il, mais si quelqu’un de chez les morts va les trouver, ils se repentiront. » 31 Mais il lui dit : « Du moment qu’ils n’écoutent pas Moïse et les Prophètes, même si quelqu’un ressuscite d’entre les morts, ils ne seront pas convaincus. » »

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