Vigouroux – Job 18
Baldad accuse Job de désespoir, et exagère les malheurs et la mauvaise fin des méchants.
18 Baldad le Suhite prit la parole et dit : [18.1 IIe discours de Baldad, chapitre 18. Il reproche à Job d’être dur à l’égard de ses amis et de se plaindre injustement au sujet de ses souffrances. ― 1° Combien de temps, méprisant ses amis, attaquera-t-il la Providence qui gouverne le monde et qui punit toujours à la fin les méchants ? Versets 2 à 11 ― 2° Oui, le méchant périt avec toute sa race, sa mémoire s’évanouit et il ne reste plus de lui que le souvenir confus de la catastrophe qui l’a englouti, versets 12 à 21.]2 Jusques à quand vous répandrez-vous en paroles ? Comprenez d’abord, et ensuite nous parlerons. [18.2 Lancerez-vous… Comprenez, etc. Baldad emploie ici le pluriel, probablement parce qu’il s’adresse à Job et à tous ceux qui pensent comme lui. Ce pluriel est aussi dans l’hébreu ; mais les Septante ont le singulier.]3 Pourquoi passons-nous pour des brutes (animaux stupides), et pourquoi sommes-nous immondes (méprisables) à vos yeux ? 4 Toi qui perds ton âme dans ta fureur, la terre sera-t-elle abandonnée à cause de toi, et les rochers transportés de leur place ? 5 La lumière de l’impie ne s’éteindra-telle pas ? et la flamme de son foyer (feu) ne sera-t-elle pas sans éclat ? [18.5 La lumière chez les Hébreux était le symbole de la prospérité.]6 La lumière sera obscurcie dans sa tente (son tabernacle), et la lampe qui brille au-dessus de lui s’éteindra. [18.6 La lampe, etc. ; allusion à l’usage de tenir dans les maisons des lampes suspendues au-dessus de la tête.]7 Ses pas robustes seront entravés, et ses conseils le jetteront dans le précipice. [18.7 Ses pas fermes et rapides ; littéralement les pas de sa force. ― Seront resserrés. Comparer à Proverbes, 4, 12. Les pas sont resserrés, lorsque le chemin est très étroit ou embarrassé ; car dans ce cas on ne peut ni faire de grands pas, ni marcher vite. Les Arabes disent aussi grands pas, pas resserrés, pour grande fortune, prospérité, et adversité, état de misère.]8 Car il a engagé ses pieds dans les (un) rets, et il marche au milieu de leurs mailles. 9 Son pied sera pris dans le filet, et la (une) soif (ardente) le brûlera par ses ardeurs. 10 Le piège est caché pour lui sous la terre, et les lacs (qu’on lui a préparés) sur le sentier. 11 Les terreurs l’assiégeront de toutes parts, et envelopperont ses pieds. [18.11 Les frayeurs, etc. ; métaphore empruntée de la chasse, où l’on effraye la bête pour qu’elle aille se jeter dans le piège qu’on lui a tendu. Comparer à Isaïe, 24, 17 ; Jérémie, 48, 43-44.]12 La faim exténuera sa force, et la disette envahira ses flancs. 13 La mort la plus terrible (cruelle) dévorera sa beauté, et elle consumera ses bras. [18.13 La mort la plus cruelle ; littéralement et par hébraïsme la mort la première-née. Le texte hébreu porte le premier-né de la mort, c’est-à-dire la maladie la plus mortelle. ― La beauté de sa peau. Allusion à la lèpre qui dévore Job et qui s’attaque d’abord à la peau.]14 Ce en quoi il mettait sa confiance sera arraché de sa tente (son tabernacle), et la mort, comme un roi, le foulera aux pieds. 15 Les compagnons de celui qui n’est plus habiteront dans sa tente (son tabernacle), et on répandra du soufre dans sa demeure (son tabernacle). [18.15 Soit répandu du soufre, et du feu tombant du ciel, comme à Sodome et à Gomorrhe (voir Genèse, 19, 24). Peut-être que Baldad fait allusion au feu céleste qui consuma les brebis et les serviteurs de Job (voir Job, 1, 16). Ou bien qu’on répande du soufre dans son tabernacle pour le purifier, parce qu’il a été souillé par la présence de son cadavre.]16 En bas, (que) ses racines se desséche(ro)nt ; (qu’) en haut, ses branches seront (soient) brisées. 17 Sa mémoire périra de dessus la terre, et son nom ne sera plus (pas) célébré dans les places publiques. [18.17 Voir Proverbes, 2, 22.]18 On (Il, note) le chassera de la lumière dans les ténèbres, et il sera transporté hors de ce monde (l’univers). [18.18 Il le chassera. C’est probablement Dieu que représente ici le pronom il. Nous avons déjà remarqué que Job sous-entend souvent le mot Dieu. D’autres traduisent : On le chassera.]19 Il n’aura pas de postérité, pas de descendants parmi son peuple, et il n’en restera rien dans le pays. 20 Ceux qui viendront après lui seront étonnés de sa perte, et ceux de son temps en seront saisis d’horreur. [18.20 Son jour fatal ; le jour de sa mort. ― Les derniers ; ceux qui viendront après lui. ― Les premiers ; c’est-a-à-dire ses contemporains.]21 Telles seront les tentes (tabernacles) du méchant, et telle la place (tel est le terme) de celui qui ignore Dieu.