Vigouroux – Job 2
Job est frappé d’une plaie horrible. Sa femme lui (l’) insulte. Trois amis, venus pour le consoler, restent auprès de lui sans lui parler.
2 Or il arriva que les fils de Dieu étant venus un (certain) jour se présenter devant le Seigneur, et Satan étant aussi venu parmi eux se présenter devant le Seigneur, [2.1 Job n’était pas au terme de ses malheurs : 5° Satan revient à la charge contre lui, au bout d’un temps indéterminé, et demande à le frapper dans sa personne après l’avoir frappé dans ses biens. Dieu le lui permet, et le saint patriarche est atteint d’une des plus terribles maladies de peau qui désolent l’Orient, l’éléphantiasis. Devenu ainsi la proie de la lèpre, Job, doit se retirer hors du village qu’il habite, chapitre 2, versets 1 à 8.]2 le Seigneur lui dit : D’où viens-tu ? Il répondit : J’ai fait le tour de la terre, et je l’ai parcourue tout entière (traversée). 3 Le Seigneur dit encore à Satan : As-tu considéré mon serviteur Job, qui n’a pas d’égal sur la terre, qui est un homme simple et droit, qui craint Dieu et fuit le mal, et qui maintient encore son innocence ? Cependant tu m’as porté à agir (excité) contre lui pour l’affliger sans motif. [2.3 En vain ; c’est-à-dire, c’est en vain que tu l’as fait éprouver ; cette épreuve n’a pas ébranlé sa fidélité. D’autres traduisent, sans motif, à tort, sans qu’il l’ait mérité.]4 Satan lui répondit : L’homme donnera peau pour peau, et tout ce qu’il a pour sauver sa vie ; [2.4 L’homme donnera peau pour peau, etc. ; c’est-à-dire qu’il donnera volontiers la peau des autres pour conserver la sienne ; il donnera ses enfants même, ses bestiaux et tout ce qu’il possède pour sauver sa propre vie. Ainsi Job a perdu ses biens, ses enfants ; mais il espère en avoir d’autres. S’il était frappé en son propre corps, s’il venait à perdre sa santé, il ne soutiendrait pas cette épreuve ; sa fidélité en serait ébranlée.]5 mais étendez votre main, et frappez ses os et sa chair, et vous verrez s’il ne vous maudira pas en face. [2.5 Qu’il vous maudira. Voir Job, 1, 5.]6 Le Seigneur dit donc à Satan : Va, (Voilà qu’) il est en ta main ; mais ne touche pas à sa vie. 7 Satan, étant sorti de devant le Seigneur, frappa Job d’un ulcère malin (d’une plaie horrible), depuis la plante des pieds jusqu’à la tête. [2.7 Satan… frappa Job d’une plaie horrible. D’après tous les caractères de la maladie de Job disséminés dans le cours du livre, J. D. Michaelis a prouvé que la maladie dont Job fut frappé est l’éléphantiasis. Elle commence par l’éruption de pustules, qui ont comme la forme de nœuds, d’où son nom latin de lepra nodosa ; elle couvre ensuite comme un chancre toute la surface du corps et le ronge de telle façon que tous les membres semblent s’en détacher. Les pieds et les jambes s’enflent et se couvrent de croûtes au point d’être pareils à ceux de l’éléphant, d’où le nom d’éléphantiasis. Le visage est boursouflé et luisant, comme si on l’avait oint avec du suif, le regard est fixe et hagard, la voix faible ; le malade finit quelquefois par tomber dans un mutisme complet. En proie à d’atroces douleurs, objet de dégoût pour lui-même et pour les autres, éprouvant une faim insatiable, accablé de tristesse, ne pouvant dormir ou bien tourmenté par d’affreux cauchemars, il ne trouve aucun remède au mal qui le ronge. Ce cruel état peut durer vingt ans et plus. Il meurt quelquefois subitement, après une fiable fièvre ou étouffé par la maladie.]8 Et Job, assis sur un fumier, ôtait avec un tesson la pourriture de ses ulcères (raclait la sanie). [2.8 Assis sur le fumier. Voir la note 18 à la fin du volume.]9 Alors sa femme lui dit : Tu demeures encore dans ta simplicité ? Maudis Dieu, et meurs. [2.9 Dieu ménage à Job une nouvelle épreuve : les reproches de sa femme. C’est là sa sixième épreuve. Au lieu de l’encourager à la patience, elle voudrait le pousser au désespoir, mais il lui fait cette réponse admirable : Si nous avons reçu les biens de la main de Dieu, pourquoi n’en recevrions-nous pas aussi les maux ?]10 Il lui dit : Tu parles comme une femme qui n’a pas de sens. Si nous avons reçu les biens de la main du Seigneur, pourquoi n’en recevrons-nous pas les maux ? Dans toutes ces choses Job ne pécha pas par ses lèvres. 11 Cependant trois amis de Job apprirent tous les maux qui lui étaient arrivés, et ils vinrent chacun de leur pays : Eliphaz de Théman, Baldad de Suha, et Sophar de Naamath. Car ils s’étaient concertés pour venir le voir ensemble, et le consoler. [2.11 La septième épreuve de Job fut la visite de ses amis. C’est d’abord une visite muette. Elle prépare la discussion ou le combat qui va être l’objet de la majeure partie du poème. La suite nous montrera que cette épreuve fut la plus difficile par laquelle Job eut à passer. Ils viennent pour le consoler, mais au lieu d’adoucir ses peines, ils ne font que les aggraver par les accusations injustes dont ils le chargent. Il est probable que quelque temps s’était écoulé entre le moment où Job fut frappé et l’arrivée de ses amis.]12 Et ayant levé de loin les yeux, ils ne le reconnurent pas ; et (jetant un grand cri,) ils pleurèrent à haute voix, déchirèrent leurs vêtements, et jetèrent de la poussière en l’air au-dessus de leur tête. 13 Et ils se tinrent assis à terre avec lui sept jours et sept nuits, et nul ne lui dit une parole, car ils voyaient que sa douleur était extrême (violente). [2.13 Le deuil durait sept jours ; mais il ne faut pas croire que les amis de Job ne l’aient pas quitté un seul instant, pendant tout ce temps, et qu’ils ne lui avaient pas adressé une seule parole. Ce sont là des expressions hyperboliques que l’on trouve assez souvent dans la Bible, et en général dans les écrivains orientaux. ― Ils s’assirent avec lui. Quand ils le voient, ils le saluent à distance, avec ces marques extraordinaires de douleur qui sont en usage en Orient, et ils passent sept jours et sept nuits sans proférer une parole. Ce silence si prolongé prouve qu’à la vue de tant de maux, ils ne sentent pas la force de le consoler. Il faut que Job ouvre le premier la bouche, et ne recevant d’eux aucun mot d’encouragement, il ne peut qu’exhaler ses plaintes.]