Vigouroux – Ézéchiel 21
Menaces contre la terre d’Israël. Epée du Seigneur préparée contre son peuple. Nabuchodonosor délibère s’il doit marcher contre les Ammonites ou contre Jérusalem. La couronne est cédée à Sédécias. Prophétie contre les Ammonites et contre les Babyloniens.
21 La parole du Seigneur me fut adressée en ces termes : [21.1 et suivants. 2° Prophétie de l’incendie de la forêt et du glaive du Seigneur, du chapitre 20, verset 45 au chapitre 21. ― 1° Un feu allumé par la colère divine consumera la forêt du sud, chapitre 20, versets 45 à 49 ; 2° ce qui signifie que le glaive du Seigneur fera périr la population de Juda, chapitre 21, versets 1 à 17 ; 3° le glaive du Seigneur, c’est l’armée de Nabuchodonosor, qui frappera le royaume de Juda et les enfants d’Ammon, versets 18 à 32. Cette dernière partie de la prophétie contient un passage remarquable qui annonce, verset 27, la venue du Messie : Jusqu’à ce que vînt celui à qui appartient le jugement. On reconnaît universellement que ces mots sont une allusion à la prophétie de Jacob, voir Genèse, 49, 10 : « Jusqu’à ce que vienne Schilôh » ; voir Galates, 3, 19 ; ils annoncent que le Sauveur sera la justice même et rendra la justice. Voir Psaume 71 ; Isaïe, 9, 6 ; 42, 1 ; Jérémie, 23, 5 ; 33, 17.][20.45 Ici commence dans le texte hébreu le chapitre 21, dont la première prophétie est en effet une suite et une explication de celle-ci.]2 Fils de (d’un) l’homme, tourne ton visage vers le chemin du midi, parle vers le vent d’Afrique (l’Africus), et prophétise à la forêt du champ du midi. [21.2 La voie du midi, etc. Cette région méridionale est la Judée, située au midi de la Mésopotamie où était alors Ezéchiel. ― Vers l’Africus ; du côté où souffle le vent qui vient de l’Afrique, vent du sud-ouest.]3 Tu diras à la forêt du midi : Ecoute la parole du Seigneur ; ainsi parle le Seigneur Dieu : Voici, je vais allumer un feu en toi, et je brûlerai en toi tout arbre vert et tout arbre sec ; la flamme allumée ne s’éteindra pas, et tout visage y sera brûlé depuis le midi jusqu’à l’aquilon ; 4 et toute chair verra que moi, le Seigneur, je l’ai incendiée, et le feu (j’ai allumé la flamme et elle) ne s’éteindra pas. 5 Je dis alors : Hélas (Ah) ! hélas (ah) ! hélas (ah) ! Seigneur Dieu ; ils disent de moi : Est-ce que cet homme ne parle pas en paraboles ? [21.5 Est-ce qu’il, etc. Cet homme ne parle-t-il pas toujours en paraboles obscures, et auxquelles on ne peut rien comprendre ? Vaine excuse alléguée par les Juifs pour ne pas changer de conduite.]6 La parole du Seigneur me fut adressée en ces termes : [21.6 Disant (dicens). Voir, sur ce mot, Ezéchiel, 3, 16.]7 Fils de (d’un) l’homme, tourne ton visage contre Jérusalem, parle au sanctuaire, et prophétise contre la terre d’Israël. 8 Tu diras à la terre d’Israël : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Voici que je viens à toi ; je tirerai mon épée de son fourreau, et je tuerai en toi le juste et l’impie. 9 Et parce que je dois exterminer en toi le juste et l’impie, mon épée sortira de son fourreau contre toute chair, depuis le midi jusqu’au septentrion, 10 afin que toute chair sache que moi, le Seigneur, j’ai tiré mon épée de son fourreau et qu’elle n’y rentrera plus (j’ai tiré de son fourreau mon irrévocable glaive). 11 Et toi, fils de (d’un) l’homme, gémis, les reins brisés (jusqu’au brisement de tes reins), et gémis en leur présence avec amertume. 12 Et lorsqu’ils te diront : Pourquoi gémis-tu ? tu diras : A cause de ce que j’entends ; car l’ennemi vient, et tous les cœurs sécheront, toutes les mains seront sans force, tous les esprits seront abattus, et l’eau coulera le long de tous les genoux. Le voici, il (Voici que cela) vient, et cela arrivera (s’accomplira), dit le Seigneur Dieu. [21.12 Qui vient ; littéralement, parce qu’il vient ; mais c’est un pur hébraïsme dont le vrai sens est celui que nous avons rendu dans notre traduction. ― L’eau coulera, etc. Voir Ezéchiel, 7, 17.]13 La parole du Seigneur me fut adressée en ces termes : 14 Fils de (d’un) l’homme, prophétise, et dis : Ainsi parle le Seigneur Dieu : Parle (Dis). L’épée, l’épée est aiguisée, elle est polie. 15 C’est pour tuer les (des) victimes qu’elle est aiguisée, c’est pour étinceler qu’elle est polie ; toi qui ébranles le sceptre de mon fils, tu as coupé tous les arbres. 16 Je l’ai donnée à polir pour qu’on la tienne à la main ; cette épée est aiguisée, elle est polie, afin qu’elle soit dans la main de celui qui tue. 17 Crie et pousse des hurlements, fils de (d’un) l’homme, car elle est tirée contre mon peuple, contre tous les princes (chefs) d’Israël qui fuient ; ils sont livrés à l’épée avec mon peuple. Frappe donc sur ta cuisse, [21.17 Frappe sur ta cuisse. Ce geste se fait souvent dans l’admiration, mais ici il marque la douleur. Comparer à Jérémie, 31, 19.]18 car je l’ai approuvée (éprouvé), lors même qu’elle brisera le sceptre, et que celui-ci ne subsistera plus, dit le Seigneur Dieu. [21.18 Ce sceptre. Voir verset 10. ― Lorsqu’il ; c’est-à-dire le glaive.]19 Toi donc, fils de (d’un) l’homme, prophétise, et frappe tes mains l’une contre l’autre ; et que l’épée soit doublée, et que l’épée meurtrière soit triplée. C’est là l’épée du grand carnage, qui les fait s’épouvanter, [21.19 Frappe des mains ; littéralement, de main à main ; soit en signe d’applaudissement aux vengeances du Seigneur (voir verset 17), soit en signe de douleur et d’indignation contre les infidélités du peuple (voir Ezéchiel, 22, 13). ― Qu’il soit triplé, etc. Saint Jérôme voit dans ces mots les trois invasions de Nabuchodonosorn : l’une, qui eut lieu lorsque ce prince se rendit Joakim tributaire (voir 4 Rois, 24, 1) ; la seconde, lorsqu’il fit Joachin captif (voir 4 Rois, 24, 15), et la troisième, lorsqu’il transporta Sédécias à Babylone (voir 4 Rois, 25, 27).]20 qui fait sécher les cœurs, et qui multiplie les ruines. A toutes leurs portes je placerai (j’ai été) la terreur de cette épée perçante, polie pour étinceler et affilée pour tuer. 21 Aiguise-toi, va à droite ou à gauche, partout où tes désirs t’appellent. 22 Moi aussi j’applaudirai en frappant des mains, et j’assouvirai (par toi) ma colère (mon indignation). C’est moi, le Seigneur, qui ai parlé. [21.22 Je frapperai des mains. Comparer au verset 14.]23 La parole du Seigneur me fut adressée en ces termes : 24 Toi, fils de (d’un) l’homme, trace-toi deux chemins, pour que l’épée du roi de Babylone y passe ; ils sortiront tous deux d’un même pays ; sa main tirera au sort ; il le tirera à l’entrée du chemin de la ville. [21.24 Pose-toi ; c’est-à-dire représente, trace. ― C’est de la main, etc. La manière de conjecturer, de deviner par la main, ou de tirer au sort, est décrite au verset 21.]25 Tu traceras un chemin par où l’épée viendra à Rabbath des enfants d’Ammon, et dans Juda, à Jérusalem, la ville très forte (fortifiée). [21.25 Afin que vienne, etc. Nabuchodonosor veut aller à Rabbath, capitale des Ammonites, parce que les Ammonites, les Iduméens et les Moabites s’étaient ligués avec Sédécias contre le roi de Babylone, come nous l’apprend Jérémie (voir Jérémie, 27, 3).]26 Car le roi de Babylone s’est arrêté dans un carrefour, à la tête de deux chemins, cherchant un présage (augure) ; il a mêlé des flèches, il a interrogé les idoles, il a consulté les entrailles. [21.26 Mêlant les flèches. Lorsqu’un général voulait savoir quelle ville il devait d’abord attaquer, il écrivait sur les flèches d’un carquois les noms des différentes villes qu’il voulait attaquer, et il les mettait dans le carquois, et celle qu’il tirait indiquait la ville qui devait être prise la première. C’est ainsi que, la flèche qui portait le nom de Jérusalem ayant été tirée la première, Nabuchodonosor prit aussitôt le chemin de cette ville.]27 A sa droite, le sort est tombé sur Jérusalem, où il dressera des béliers, commandera le carnage, poussera des cris de guerre, dressera des béliers contre les portes, élèvera des retranchements et bâtira des fort(ification)s. 28 A leurs yeux, il paraîtra avoir consulté en vain les oracles, et imité le repos du sabbat ; mais lui, il se souvient de l’iniquité, et il les prendra (Jérusalem). 29 C’est pourquoi ainsi parle le Seigneur Dieu : Parce que vous avez rappelé le souvenir de votre iniquité et révélé vos prévarications, et que vos péchés ont paru dans toutes vos pensées ; parce que, dis-je, vous en avez rappelé le souvenir, vous serez pris par sa main. 30 Mais toi, profane, chef impie d’Israël, toi dont vient le jour marqué pour la punition de ton iniquité, 31 ainsi parle le Seigneur Dieu : Ote(z) la tiare, enlevez (enlève) la couronne ; n’est-ce pas elle qui a élevé l’humble et humilié le grand ? 32 J’en ferai voir l’iniquité, l’iniquité, l’iniquité ; [mais cela n’arrivera que lorsque sera venu celui à qui appartient le jugement], et je le lui livrerai. [21.32 Mais cela, etc. il est impossible de ne pas considérer cette phrase comme une parenthèse, les verbes étant au passé dans l’hébreu aussi bien que dans la Vulgate. C’est pour cela que nous l’avons mise entre des crochets.]33 Et toi, fils de (d’un) l’homme, prophétise, et dis : Ainsi parle le Seigneur Dieu aux enfants d’Ammon, touchant (et pour) leur opprobre ; tu leur diras : Epée, épée, sors du fourreau pour tuer ; sois polie, pour massacrer et pour briller. 34 Pendant qu’on voit pour toi des visions vaines et qu’on te prédit des mensonges, tu tomberas (afin que tu tombes) sur le cou des impies blessés, dont vient le jour marqué (d’avance) pour la punition de leur iniquité. 35 Rentre dans ton fourreau, au lieu où tu as été créée ; je te jugerai dans le pays de ta naissance. (!) [21.30-32 Cette dernière prophétie regarde en partie Nabuchodonosor, et en partie ses successeurs et la monarchie même des Babyloniens, qui, après avoir été l’instrument des vengeances du Seigneur contre tant de peuples, fut elle-même ensuite détruite par Cyrus.]36 Je répandrai sur toi mon indignation, je soufflerai sur toi avec le feu de ma fureur, et je te livrerai aux mains d’hommes insensés, qui travaillent (ont machiné) pour la mort. 37 Tu seras la pâture du feu, ton sang coulera au milieu du pays, et tu seras livré à l’oubli ; car c’est moi, le Seigneur, qui ai parlé.