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Bible de Jérusalem – Job 3

II. Dialogue

1. PREMIER CYCLE DE DISCOURS

Job maudit le jour de sa naissance.

3 Enfin Job ouvrit la bouche et maudit le jour de sa naissance.

2 Il prit la parole et dit :

3 Périsse le jour qui me vit naître
et la nuit qui a dit : « Un garçon a été conçu. »q

q Deux malédictions parallèles, celle du jour de la naissance et celle de la nuit de la conception.

4 Ce jour-là, qu’il soit ténèbres,
que Dieu, de là-haut, ne le réclame pas,
que la lumière ne brille pas sur lui !
5 Que le revendiquent ténèbre et ombre épaisse,
qu’une nuée s’installe sur lui,
qu’une éclipse en fasse sa proie !r

r « ombre épaisse » çalmût conj. ; « ombre de la mort » çalmawet hébr. — « éclipse » kamrîr yôm conj. ; « comme des amertumes du jour » kimerîrê yôm hébr.

6 Oui, que l’obscurité le possède,
qu’il ne s’ajoute pas aux jours de l’année,s
n’entre point dans le compte des mois !

s « Oui » tiré du v. 7, et on supprime « cette nuit-là », dû à une contamination du même v. — « s’ajoute » syr., Vulg. ; « se réjouisse » hébr.

7 Cette nuit-là, qu’elle soit stérile,
qu’elle ignore les cris de joie !
8 Que la maudissent ceux qui maudissent les jourst
et sont prêts à réveiller Léviathan !u

t Soit les ennemis de la lumière, ceux qui agissent dans les ténèbres, cf. Job 24.13s ; 38.15 ; soit ceux qui, comme Job, maudissent le jour de leur naissance ; soit plutôt des sorciers ou jeteurs de sorts capables, croyait-on, par leurs imprécations et sortilèges, de changer les jours fastes en jours néfastes, ou bien d’attirer les éclipses, lorsque « Léviathan » engloutissait momentanément le soleil.

u Léviathan (ou encore le Dragon, le Serpent Fuyard), cf. Job 26.13 ; 40.25 ; Isa 27.1 ; 51.9 ; Am 9.3 ; Ps 74.14 ; 104.26, était dans la mythologie phénicienne un monstre du chaos primitif cf. Job 7.12 ; l’imagination populaire pouvait toujours craindre qu’il ne se réveillât, attiré par une malédiction efficace contre l’ordre existant. Le dragon de Ap 12.3, qui incarne la résistance à Dieu de la puissance du mal, revêt certains traits de ce serpent chaotique.

9 Que se voilent les étoiles de son aube,
qu’elle attende en vain la lumière
et ne voie point s’ouvrir les paupières de l’aurore !
10 Car elle n’a pas fermé sur moi la porte du ventre,
pour cacher à mes yeux la souffrance.

11 Pourquoi ne suis-je pas mort au sortir du sein,
n’ai-je péri aussitôt enfanté ?

12 Pourquoi s’est-il trouvé deux genoux pour m’accueillir,
deux mamelles pour m’allaiter ?
13 Maintenant je serais couché en paix,
je dormirais d’un sommeil reposant,
14 avec les rois et les grands ministres de la terre,
qui se sont bâti des mausolées,v

v Littéralement « qui bâtissent des ruines (horabôt) pour eux ». L’expression pourrait signifier, à la lumière d’Isa 58.12 et 61.4, « rebâtir des ruines » les rois de Babylonie et d’Assyrie se glorifient souvent de l’avoir fait. Mais le pronom « pour eux » renvoie plutôt à des demeures funéraires édifiées à l’avance dans des lieux déserts ou solitaires. C’était tout spécialement le cas en Égypte. Il se peut que le mot horabôt ait suffi à désigner, chez les Hébreux, les mastabas ou les pyramides.

15 ou avec les princes qui ont de l’or en abondance
et de l’argent plein leurs tombes.w

w Littéralement « leurs maisons », c’est-à-dire leurs « maisons d’éternité », cf. Qo 12.5, ou demeures funéraires, cf. aussi Ps 49.12. De fait, les fouilles archéologiques (notamment à Ur et en Égypte) ont révélé les richesses accumulées dans les tombes royales ou princières.

16 Ou bien, tel l’avorton caché, je n’aurais pas existé,
comme les petits qui ne voient pas le jour.

17x prend fin l’agitation des méchants,
là se reposent les épuisés.

x Au shéol, cf. Nb 16.33.

18 Les captifs de même sont laissés tranquilles
et n’entendent plus les cris du surveillant.
19 Là voisinent petits et grands,
et l’esclave est libéré de son maître.
20 Pourquoi donner à un malheureux la lumière,
la vie à ceux qui ont l’amertume au cœur,
21 qui aspirent après la mort sans qu’elle vienne,
fouillent à sa recherche plus que pour un trésor ?
22 Ils se réjouiraient en face du tertre funèbre,y
exulteraient de trouver la tombe.

y « (en face du) tertre funèbre » gal ou golel conj. ; « (jusqu’à jubilation) » gîl hébr.

23 Pourquoi ce don à l’homme dont la route est cachée
et que Dieu entoure d’une haie ?

24 Pour nourriture, j’ai mes soupirs,
comme l’eau s’épanchent mes rugissements.
25 Toutes mes craintes se réalisent
et ce que je redoute m’arrive.
26 Pour moi, ni tranquillité, ni paix,
ni repos : rien que du tourment !

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