30 Et maintenant, je suis la risée
de gens qui sont plus jeunes que moi,
et dont les pères étaient trop vils à mes yeux
pour les mêler aux chiens de mon troupeau.o
o La classe des indigents, rebut de la société, cf. 24.4s. Job est maintenant rejeté au-dessous d’eux.
2 Aussi bien, la force de leurs mains m’eût été inutile :
ils avaient perdu toute vigueur,
3 épuisée par la disette et la famine,
car ils rongeaient la steppe,
ce sombre lieu de ruine et de désolation ;
4 ils cueillaient l’arroche sur le buisson
faisaient leur pain des racines de genêt.
5 Bannis de la société des hommes,
qui les hue comme des voleurs,
6 ils logent au flanc des ravins,
dans les grottes ou les crevasses du rocher.
7 Des buissons, on les entend braire,
ils s’entassent sous les chardons.
8 Fils de vauriens, bien plus, d’hommes sans nom,
ils sont rejetés par le pays.p
p « sont rejetés » nikretû conj. ; « sont frappés » nikke’û hébr.
9 Et maintenant, voilà qu’ils me chansonnent.
Qu’ils font de moi leur fable !
10 Saisis d’horreur, ils se tiennent à distance,
devant moi, ils crachent sans retenue.
11 Et parce qu’il a détendu mon arc et m’a terrassé,
ils rejettent la bride en ma présence.
12 Leur engeance surgit à ma droite,
ils font glisser mes pieds
et fraient vers moi leurs chemins sinistres.
13 Ils me ferment toute issue,
en profitent pour me perdre et nul ne les arrête,q
q « ne les arrête » `oçer conj. ; « ne les aide » `ozer hébr. — Job compare les injures qu’il a subies au siège et à l’assaut d’une ville.
14 ils pénètrent comme par une large brèche
ils se roulent sous les décombres.
15 Les terreurs se tournent contre moi,
mon assurance est chasséer comme par le vent,
mon salut disparaît comme un nuage.
r « est chassée » teradef grec ; « chasse » tirdof hébr.
16 Et maintenant, la vie en moi s’écoule,
les jours d’affliction m’ont saisi.
17 La nuit, le mals perce mes os
et mes rongeurs ne dorment pas.
s « le mal » mahaleh conj. ; « de sur moi » me`alay hébr. — « mes rongeurs », c’est-à-dire « mes souffrances »; grec « mes nerfs ».
18 Avec violence il m’a prist par le vêtement,
serré au col de ma tunique.
t « m’a pris » yitpos grec ; « s’est déguisé » yithappes hébr.
19 Il m’a jeté dans la boue,
je suis comme poussière et cendre.
20 Je crie vers Toi et tu ne réponds pas ;
je me présente sans que tu me remarques.u
u On ajoute la négation (« sans que... ») avec 1 ms hébr. et Vulg.
21 Tu es devenu cruel à mon égard,
ta main vigoureuse sur moi s’acharne.
22 Tu m’emportes à cheval sur le vent
et tu me dissous dans une tempête.
23 Oui, je sais que tu me fais retourner vers la mort,
vers le rendez-vous de tout vivant.
24 Pourtant, n’ai-je pas tendu la main au pauvre,
quand, dans sa détresse, il réclamait justice ?v
v « n’ai-je pas tendu », corr. d’après grec ; « il ne tendait pas » hébr. — « au pauvre » be`anî conj. ; « dans la ruine » be`î hébr. « réclamait justice » ledin shiwwea` conj. ; lahen shûa` hébr. inintelligible.
25 N’ai-je pas pleuré sur celui dont la vie est pénible,
éprouvé de la pitié pour l’indigent ?
26 J’espérais le bonheur, et le malheur est venu ;
j’attendais la lumière : voici l’obscurité.
27 Mes entrailles bouillonnent sans relâche,
les jours d’affliction m’ont atteint.
28 Je marche, assombri, sans soleil,
si je me dresse dans l’assemblée, c’est pour crier.
29 Je suis devenu le frère des chacals
et le compagnon des autruches.
30 Ma peau sur moi s’est noircie,
mes os sont brûlés par la fièvre.
31 Ma harpe est accordée aux chants de deuil,
ma flûte à la voix des pleureurs.