Vigouroux – Jérémie 4
Promesses du Seigneur en faveur d’Israël. Il exhorte ceux de Juda à prévenir sa colère, et annonce la désolation terrible qui est près de fondre sur eux. Douleurs que ressent le prophète à la vue de ces maux. Le Seigneur promet de ne pas perdre entièrement son peuple.
4 Si tu reviens, Israël, dit le Seigneur, convertis-toi à moi ; si tu ôtes de devant ma face ce qui te fait tomber (tes pierres d’achoppement), tu ne seras pas ébranlé. [4.1 Pierre d’achoppement ; nom que l’Ecriture donne souvent aux idoles.]2 Tu jureras : Vive le Seigneur (vit, note) ! dans la vérité, l’équité et la justice, et les nations le béniront et le loueront. [4.2 Le Seigneur vit ! formule de serment qui équivaut à : Je jure par le Seigneur.]3 Car ainsi parle le Seigneur aux (à l’) homme(s) de Juda et de Jérusalem : Préparez (Défrichez)-vous une terre nouvelle (novale), et ne semez pas sur les (des) épines. [4.3 Voir Osée, 10, 12. ― Le Prophète, après s’être adressé dans les deux versets précédents aux Israélites captifs, s’adresse ici aux Juifs qui étaient encore dans leur pays. ― Une novale, une terre nouvelle, qui n’a pas encore été cultivée, mais était restée en friche.]4 Soyez circoncis pour le (au) Seigneur, et enlevez les prépuces de vos cœurs, hommes de Juda et habitants de Jérusalem, de peur que mon indignation n’éclate et ne s’embrase comme un (le) feu, et que personne ne puisse l’éteindre, à cause de la malignité (malice) de vos pensées. [4.4 Soyez circoncis au Seigneur ; c’est-à-dire, recevez la circoncision qui plaît au Seigneur ; la circoncision du cœur. Comparer à Deutéronome, 10, 16 ; Romains, 2, 29.]5 Annoncez dans Juda et faites entendre dans Jérusalem ; parlez et sonnez de la trompette dans le pays, criez à haute voix, et dites : Rassemblez-vous, et entrons dans les villes fortes. [4.5 II. Juda est impénitent, malgré l’imminence du danger, du chapitre 4, verset 5 au chapitre 6. ― 1° Le Prophète annonce maintenant l’accomplissement de la sentence divine, en exhortant les habitants d’Israël à fuir devant les Chaldéens, chapitre 4, versets 5 à 7, et à se couvrir de vêtements de deuil, verset 8. ― 2° Juda est dans la terreur, ― oh ! s’il pouvait se convertir ! ― la ville sainte est assiégée, versets 9 à 18. ― 3° Accablé de douleur, le Prophète voit en esprit l’œuvre de dévastation des Chaldéens, et en fait un tableau lugubre, versets 19 à 31. ― 4° La cause de ces calamités, c’est qu’il n’y a plus de justes dans Jérusalem, mais seulement des hypocrites, des idolâtres, des adultères, parmi les petits comme parmi les grands, chapitre 5, versets 1 à 9. ― 5° Les coupables doivent donc périr, par la main d’un peuple lointain, terrible, versets 10 à 18. ― 6° Ils n’ont pas voulu craindre le Tout-Puissant ; ils ont persévéré dans leur impénitence ; ce qu’ils ont refusé d’entendre va s’accomplir, versets 19 à 31. ― 7° Le Chaldéen arrive, il envahit le pays ; il assiège Jérusalem, ― oh ! si Jérusalem pouvait se convertir encore, avant d’être dévastée ! chapitre 6, versets 1 à 8. ― 8° Mais tout le monde est sourd à la voix de Dieu ; aussi personne n’échappera-t-il à la vengeance, versets 9 à 15. ― 9° Exhortations, menaces, tout est inutile, tout est méprisé, aussi les sacrifices sont-ils vains et inutiles, versets 16 à 21. ― 10° Le vengeur de Dieu vient du nord ; il est terrible, il assiège la ville ; Dieu l’a examinée, elle est coupable ; son Seigneur la réprouve, versets 22 à 30.]6 Levez (un) l’étendard dans Sion, fortifiez-vous, ne vous arrêtez pas, car je ferai venir de l’aquilon le malheur et une grande ruine (destruction). [4.6 Voir Jérémie, 1, 14.]7 Le lion s’élance de sa tanière, le brigand des nations s’est levé : il est sorti de son lieu pour réduire ton pays en désert ; tes villes seront détruites, et elles resteront sans habitant. [4.7 Le lion, etc. Nabuchodonosor est comparé au lion à cause de sa force, et à un brigand, à cause de ses violences et de l’injustice de ses conquêtes.]8 C’est pourquoi ceignez-vous de cilices, pleurez et poussez des cris (hurlez), car la colère et (de) la fureur du Seigneur ne se sont (s’est) pas détournée(s) de nous. [4.8 La colère de la fureur ; hébraïsme, pour la colère très grande, très violente ; ou bien pour la colère et la fureur. Comparer à Jérémie, 32, 37.]9 En ce jour-là, dit le Seigneur, le cœur du roi (dé)périra, et aussi le cœur des princes ; les prêtres seront stupéfaits, et les prophètes consternés. 10 Et je dis (j’ai dit) : Hélas ! hélas ! hélas ! Seigneur Dieu ; vous avez donc trompé ce peuple et Jérusalem, en disant : Vous aurez la paix ; et voici que le glaive va les percer jusqu’à l’âme. 11 En ce temps-là, on dira à ce peuple et à Jérusalem : Un vent brûlant souffle (s’élève) dans les routes (voies) du désert, dans la route (voie) de la fille de mon peuple, non pour vanner et pour nettoyer (le blé). [4.11 Le désert de la voie de la fille, etc. ; le désert, qui conduit à la fille de mon peuple, à Jérusalem.]12 Un vent violent me vient de là (plein viendra d’elles vers moi), et maintenant je prononcerai mes jugements (mon arrêt) contre eux. [4.12 Un vent plein ; fort, impétueux. ― D’elles (ex his) ; c’est-à-dire des voies du désert (voir verset 11) : c’est, selon nous, le vrai sens de l’hébreu, aussi bien que de la Vulgate, car nous regardons comme forcée et inexacte la traduction : Un vent plus fort que pour ces choses ; c’est-à-dire, un vent plus fort qu’il ne le faut pour vanner et nettoyer le blé.]13 Voici, il montera comme les (une) nuée(s), et ses chars seront comme la tempête, ses chevaux plus agiles (rapides) que les aigles. Malheur à nous, car nous sommes dévastés ! 14 Purifie ton cœur du (de sa) mal(ice), Jérusalem, afin d’être sauvée ; jusques à quand les pensées nuisibles (funestes) demeureront-elles en toi ? 15 Car une (la) voix de (celui qui annonce de) Dan l’annonce, et fait connaître l’idole depuis la montagne d’Ephraïm. [4.15 Qui annonce de Dan ; l’approche des ennemis. La ville de Dan et la montagne d’Ephraïm étaient entre Babylone et Jérusalem. ― Qui fait connaître l’idole ; l’arrivée de l’idole. L’image du dieu Bel était représentée sur les étendards de l’armée chaldéenne.]16 Dites aux nations : Voici qu’on a appris à Jérusalem qu’il vient des gardiens (gardes) d’une terre éloignée, qui f(er)ont entendre leurs cris (voix) contre les villes de Juda. 17 Comme les gardiens des (d’un) champ(s), ils l’entoureront en cercle, parce qu’elle a excité ma colère, dit le Seigneur. 18 Tes voies et tes pensées t’ont attiré cela (ces maux) ; c’est là (le fruit de) ta malice, car elle est amère et (parce qu’) elle t’a atteint au cœur. [4.18 Voir Sagesse, 1, vv. 3, 5. ― Ta malice ; pour l’effet, le fruit de ta malice.]19 Mes entrailles, mes entrailles sont percées de douleur, mon cœur est troublé au-dedans de moi ; je ne puis me taire, car j’ai entendu le bruit de la trompette, le cri du combat. [4.19-31 « Qui parle ici ? Est-ce Dieu ? est-ce le prophète ? C’est l’un et l’autre à tour de rôle ; mais Jérémie ne prend pas le loisir de nous avertir du changement… C’est merveille que la mobilité, la promptitude, la souplesse de ces âmes (des prophètes), courant d’une impression à l’autre : vives, rapide, exactes à sentir chaque chose à mesure qu’elle se présente et autant qu’elle le mérite, frappent vite, juste et fort, toutes les notes de la gamme du sentiment. De là, ces visions qui se pressent, puis ces exclamations, ces apostrophes, ces élans de la passion ardente, mais rationnelle toujours. » (G. LONGHAYE.)]20 On annonce ruine sur ruine, tout le pays a été ravagé, mes tentes (tabernacles) ont été abattues tout à coup, et mes pavillons renversés. [4.20 Tabernacles (tabernacula) ; est la même chose que tentes. ― Pavillons ou tentes ; littéralement peaux ; parce que cette sorte d’habitation étaient anciennement faite avec des peaux. Comparer à Cantique, 1, 4.]21 Jusques à quand verrai-je des fuyards, et entendrai-je le bruit de la trompette ? 22 Car mon peuple est fou (insensé), et ne m’a pas connu. Ce sont des enfants (fils) insensés et sans intelligence ; ils sont sages (intelligents) pour faire le mal, et ils ne savent pas faire le bien. [4.22 Parce que. Devant ces mots sont sous-entendus ces autres : Tous ces maux sont venus ou arrivés.]23 J’ai regardé la terre, et voies (voici) qu’elle était vide et comme un néant (de nulle valeur) ; (j’ai regardé) les cieux, et ils étaient sans lumière. 24 J’ai vu les montagnes, et voici qu’elles tremblaient (étaient ébranlées) ; et toutes les collines étaient ébranlées (ont été bouleversées). 25 J’ai regardé, et il n’y avait pas d’hommes ; et tous les oiseaux du ciel s’étaient retirés. 26 J’ai regardé, et voici que le Carmel est un (était) désert, et que toutes ses villes ont été détruites devant la face du Seigneur, et par le souffle de sa colère (devant la face de la colère de sa fureur). [4.26 La colère de sa fureur. Voir le verset 8.]27 Car voici ce que dit le Seigneur : Toute la terre sera déserte, mais je ne ferai pas une entière destruction (je n’achèverai pas sa ruine). 28 La terre sera en deuil, et les cieux en haut se désoleront (s’affligeront), parce que j’ai parlé. J’ai formé mon dessein, et je ne m’en suis pas repenti, et je ne le rétracterai pas. 29 Toute la ville est en fuite, au bruit des cavaliers et de ceux qui lancent les flèches ; ils se retirent aux lieux escarpés, et ils montent sur les rochers ; toutes les villes sont abandonnées, et il n’y a plus d’homme qui les habite. 30 Mais toi, dévastée, que feras-tu ? Quand tu te revêtirais de pourpre, quand tu te parerais de bijoux (d’un collier) d’or, et que tu te peindrais les yeux avec du fard (de l’antimoine), tu travaillerais en vain à t’embellir ; tes amants te méprisent (ils t’ont méprisée, ceux qui t’aimaient), ils en veulent à ta vie (ton âme). [4.30 Mais toi ; fille de Sion. Comparer au verset 31. ― Tu peindrais, etc. ; selon l’hébreu tu te fendrais, etc. ― L’antimoine est d’un grand usage dans l’Orient pour peindre et noircir les yeux, et pour élargir les paupières, afin de faire les yeux plus grands et mieux fendus. ― C’est ton âme qu’ils chercheront ; hébraïsme, pour ils chercheront à t’ôter la vie.]31 Car j’entends une (j’ai entendu la) voix comme d’une femme en travail, des cris d’angoisse comme d’une femme qui enfante ; c’est la voix de la fille de Sion mourante, et qui étend les mains : Malheur à moi, car mon âme m’abandonne à cause de ceux qui ont été tués.