40 Alors Yahvé s’adressant à Job lui dit :i
i Ce v. d’introduction manque dans le grec. — Job a voulu disputer avec Dieu. Dieu lui oppose le mystère de sa sagesse, manifestée par ses œuvres.
2 L’adversaire de Shaddaï a-t-il à critiquer ?
Le censeur de Dieu va-t-il répondre ?
3 Et Job répondit à Yahvé :
4 J’ai parlé à la légère : que te répliquerai-je ?
Je mettrai plutôt ma main sur ma bouche.
5 J’ai parlé une fois, je ne répéterai pas ;
deux fois, je n’ajouterai rien.
6 Yahvé répondit à Job du sein de la tempête et dit :
7 Ceins tes reins comme un brave :
je vais t’interroger et tu m’instruiras.
8 Veux-tu vraiment casser mon jugement,
me condamner pour assurer ton droit ?
9 As-tu donc un bras comme celui de Dieu,
ta voix peut-elle tonner pareillement ?
10 Allons, pare-toi de majesté et de grandeur,
revêts-toi de splendeur et de gloire.
11 Fais éclater les fureurs de ta colère,
d’un regard, courbe l’arrogant.
12 D’un regard, ravale l’homme superbe,j
écrase sur place les méchants.
j Pour éviter la répétition, le grec a « l’homme superbe ».
13 Enfouis-les ensemble dans le sol,
emprisonne-les chacun dans le cachot.k
k Littéralement « bande leur visage », « baillonne-les ». — Le « cachot » est le shéol, Nb 6.33, où les Ombres sont muettes.
14 Et moi-même je te rendrai hommage,
car tu peux assurer ton salut par ta droite.
15 Mais regarde donc Béhémoth, ma créature, tout comme toi !
Il se nourrit d’herbe, comme le bœuf.
l C’est la forme plurielle d’un mot qui signifie « bête », « bétail ». Cette forme peut désigner la bête ou la brute par excellence, donc n’importe quel monstre. En fait, Béhémoth a souvent été identifié avec l’éléphant, ou avec un buffle mythique mentionné par les textes d’Ugarit. Il s’agirait ici du buffle du lac Houlé, au nord d’Israël. Mais on a généralement pensé à l’hippopotame, symbole de la force brutale que Dieu maîtrise mais que l’homme ne peut domestiquer.
16 Vois, sa force réside dans ses reins,
sa vigueur dans les muscles de son ventre.
17 Il raidit sa queue comme un cèdre,
les nerfs de ses cuisses s’entrelacent.
18 Ses os sont des tubes d’airain,
sa carcasse, comme du fer forgé.
19 C’est lui la première des œuvres de Dieu.
Son Auteur le menaça de l’épée,
20 lui interdit la région des montagnesm
et toutes les bêtes sauvages qui s’y ébattent.
m On lit gebûl harim yissa’ lô au lieu de kî bûl harim yise’û lô, litt. « car les montagnes lui apportent leur produit », obscur dans ce contexte.
21 Sous les lotus, il est couché,
il se cache dans les roseaux des marécages.
22 Le couvert des lotus lui sert d’ombrage
et les saules du torrent le protègent.
23 Si le fleuve se déchaîne,n il ne s’émeut pas ;
un Jourdain lui jaillirait jusqu’à la gueule sans qu’il bronche.
n « se déchaîne », litt. « est violent »; le grec corrige en « déborde ».
24 Qui donc le saisira par les yeux,
lui percera le nez avec des pieux ?o
o On restitue « Qui donc » mî hu’, tombé par haplographie après pihû, dernier mot du v. 23. — « pieux » sens incertain, litt. « des pièges ».
25 Et Léviathan, le pêches-tu à l’hameçon,
avec une corde comprimes-tu sa langue ?
p Ce nom désigne proprement un monstre du Chaos primitif, 3.8, censé toujours vivant dans la mer. Il est appliqué ici au crocodile. Mais l’animal visible — qui symbolise l’Égypte en Ez 29.3s ; 32.2s — continue à évoquer ici le souvenir du monstre vaincu par Yahvé aux origines, cf. 7.12, lui-même type des puissances hostiles à Dieu.
26 Fais-tu passer un jonc dans ses naseaux,
avec un croc perces-tu sa mâchoire ?
27 Est-ce lui qui te suppliera longuement,
te parlera d’un ton timide ?
28 Conclura-t-il une alliance avec toi,
pour devenir ton serviteur à vie ?
29 T’amusera-t-il comme un passereau,
l’attacheras-tu pour la joie de tes filles ?
30 Sera-t-il mis en vente par des associés,
puis débité entre marchands ?q
q Associés pour la pêche en commun. Ils « vendraient la peau de l’ours » — « marchands », litt. « Cananéens » les commerçants par excellence.
31 Cribleras-tu sa peau de dards,
le harponneras-tu à la tête comme un poisson ?
32 Pose seulement la main sur lui :
au souvenir de la lutte, tu ne recommenceras plus !