Vigouroux – Ésaïe 45
Victoires de Cyrus, règne de justice. Délivrance d’Israël. Le Seigneur reconnu par les nations. Il est le seul Dieu véritable. Tous les peuples le reconnaîtront ; tout Israël se glorifiera en lui.
45 Voici ce que dit le Seigneur à mon christ Cyrus, que j’ai pris par la main (droite) pour lui assujettir (devant sa face) les nations, pour mettre les rois en fuite, pour ouvrir devant lui les portes (de ses villes) sans qu’aucune lui soit fermée : [45.1 Christ ou oint ; c’est-à-dire roi constitué. Il n’est pas prouvé qu’on donnât l’onction aux rois de Perse ; mais le Prophète parle ici conformément à l’usage consacré chez les Hébreux. Comparer à 1 Rois, 10, 1 ; 3 Rois, 1, 45.]2 J’irai devant toi (lui), et j’humilierai les grands (glorieux) de la terre ; je romprai les portes d’airain, et je briserai les gonds (barres) de fer ; [45.2 On a retrouvé à Balawat des débris de portes assyriennes recouvertes de plaques d’airain.]3 et je te donnerai des trésors cachés et des richesses enfouies dans le (des lieux souterrains et) secret(s), afin que tu saches que je suis le Seigneur, qui t’ai appelé par (appelle) ton nom, le Dieu d’Israël ; [45.3 Je te livrerai, etc. Nous savons par l’histoire que Cyrus recueillit des richesses prodigieuses dans toutes ses victoires. ― Qui appelle ton nom ; c’est-à-dire qui t’ai appelé par ton nom. Comparer au verset 1.]4 à cause de Jacob mon serviteur, et d’Israël mon élu, je t’ai appelé par ton nom ; j’ai tracé ton portrait (je t’ai assimilé à mon christ), et tu ne m’as pas connu. [45.4 A cause de Jacob, etc. ; c’est-à-dire pour venger le peuple qui m’adore, que je me suis choisi, et que je protège d’une manière toute particulière. ― Je t’ai assimilé à mon Christ ; vrai roi et pasteur de mon peuple, en te donnant le titre de mon pasteur (voir Isaïe, 44, 28) et de mon Christ (voir Isaïe, 45, 1), en te choisissant pour être sa figure. Le verbe hébreu que la Vulgate a traduit ici et à Isaïe, 44, 5, par assimiler (assimilavi), elle l’a rendu dans Job, 32, 21, par égaler (æquabo), et au verset 22 de ce même chapitre de Job par subsister (subsistam). ― Et tu ne m’as pas connu ; c’est-à-dire tu ne m’as pas honoré comme tu le devais, en abandonnant le culte des idoles. Rien, en effet, ne prouve que Cyrus, tout en avouant que le Seigneur lui avait livré tous les royaumes de la terre (voir 1 Esdras, 1, 2), abandonna la religion des Perses et embrassa celle des Juifs. C’est ainsi que Nabuchodonosor, qui avait reconnu la main du Seigneur (voir Daniel, 2, 47), resta dans l’erreur et dans l’idolâtrie. Cependant tout véritable hébraïsant devra reconnaître que le texte original peut signifier : Et tu ne l’avais pas connu, c’est-à-dire, quoique tu ne le connusses pas auparavant ; ce qui ne préjuge rien sur la conduite postérieure de Cyrus.]5 Je suis le Seigneur, et il n’y en a pas d’autre ; hors de moi il n’y a pas de Dieu. Je t’ai ceint, et tu ne m’as pas connu ; [45.5 Je t’ai ceint de tes armes ; c’est moi qui t’ai armé.]6 afin que l’on sache, du lever du soleil au couchant, qu’il n’y a pas de Dieu hors de moi. Je suis le Seigneur, et il n’y en a pas d’autre. 7 Je forme la lumière et je crée les ténèbres, je fais la paix et je crée les maux : Je suis le Seigneur qui fais toutes ces choses. [45.7 Les maux ; les calamités, les infortunes, comme châtiment des péchés.]8 Cieux, répandez d’en haut votre rosée, et que les nuées fassent pleuvoir le (un) juste ; que la terre s’ouvre, et qu’elle germe le (un) sauveur, et que la justice naisse en même temps. Moi, le Seigneur, je l’ai créé. [45.8 Cieux, versez, etc. ; prière qu’on fait dans l’Eglise pendant l’Avent, pour demander à Dieu les grâces de l’avènement de Jésus-Christ, le juste par excellence et le sauveur des hommes. ― Moi, le Seigneur qui l’a crée. Cette parole s’entend aussi de Jésus-Christ, selon son humanité. Il est fils de Dieu et fils de l’homme. Comme fils de Dieu, il est engendré de toute éternité dans le sein du Père, il est comme lui le principe de la justice et du salut ; comme fils de l’homme il a été créé de Dieu dans le sein de Marie, de laquelle il est né dans la plénitude des temps.]9 Malheur à celui qui dispute contre son créateur, lui qui n’est qu’un tesson d’argile et de terre. L’argile dit-elle au potier : Que fais-tu ? Ton ouvrage n’est pas d’une main habile (est sans mains, note). [45.9 Voir Jérémie, 18, 6 ; Romains, 9, 20. ― Ton ouvrage est sans mains ; c’est-à-dire ton vase n’a pas d’anses ; tu m’as mal fait, je suis un vase inutile. ― De terre de Samos. Dans l’hébreu : un têt de terre simplement.]10 Malheur à celui qui dit à son (un) père : Pourquoi engendres-tu ? et à sa mère (une femme) : Pourquoi enfantes-tu ? 11 Voici ce que dit le Seigneur, le saint d’Israël, et celui qui l’a formé : Interrogez-moi sur l’avenir ; (donnez-moi des ordres) au sujet de (sur) mes fils et de l’œuvre de mes mains. 12 C’est moi qui ai fait la terre, et qui ai créé l’homme sur elle ; mes mains ont étendu les cieux, et j’ai imposé des lois à toute leur milice. [45.12 Leur milice ; les étoiles.]13 C’est moi qui l’ai suscité pour la justice, et qui aplanirai (dirigerai) toutes ses voies ; il rebâtira ma ville, et libérera mes captifs, sans rançon ni présents, dit le Seigneur, le Dieu des armées. 14 Voici ce que dit le Seigneur : Le travail de l’Egypte, le trafic de l’Ethiopie, et les Sabéens (, hommes) à la taille élevée passeront chez toi, et ils seront à toi ; ils marcheront à ta suite, ils viendront les fers aux mains, ils se prosterneront devant toi, et ils te supplieront en disant : Il n’y a de Dieu que chez toi (vous), et hors de toi (vous) il n’y a pas de Dieu. [45.14 Le travail, etc. Les travaux des Egyptiens consistaient principalement dans la culture de terres et le soin des bestiaux. ― Vers toi, Israël. ― Se prosterneront devant toi ; littéralement t’adoreront. Voir, sur cette expression, Genèse, 18, 2.]15 Vous êtes vraiment un Dieu caché, le Dieu d’Israël, le (un) sauveur. 16 Ils ont été confondus, ils rougissent tous de honte, et ils sont tous couverts de confusion, les fabricants d’erreurs. 17 Israël a reçu du Seigneur un salut éternel ; vous ne serez pas confondus, et vous ne rougirez pas de honte dans les siècles des siècles. 18 Car voici ce que dit le Seigneur qui a créé les cieux, le Dieu (même) qui a formé la terre et qui l’a faite, qui l’a façonnée et qui ne l’a pas créée en vain, mais qui l’a formée pour qu’elle fût habitée : Je suis le Seigneur, et il n’y en a pas d’autre. 19 Je n’ai pas parlé en cachette, dans un lieu ténébreux de la terre ; je n’ai pas dit en vain à la race de Jacob : Recherchez-moi ; je suis le Seigneur qui profère la justice et qui annonce la droiture. 20 Rassemblez-vous et venez ; approchez-vous ensemble, vous qui avez été sauvés des nations ; ils sont dans l’ignorance ceux qui portent un bois sculpté par eux, et qui prient un dieu qui ne peut sauver. 21 Enseignez-les et venez, et délibérez ensemble. Qui a annoncé ces choses dès le commencement ? qui les a prédites depuis longtemps ? N’est-ce pas moi, le Seigneur, et y a-t-il d’autre Dieu que moi ? Je suis le (un) Dieu juste, et personne ne sauve si ce n’est moi. 22 Convertissez-vous à moi, et vous serez sauvés, peuples de toute la terre, car je suis Dieu, et il n’y en a pas d’autre. 23 J’ai juré par moi-même ; une parole de justice est sortie de ma bouche, et elle ne sera pas révoquée (ne reviendra pas, note) : Tout genou fléchira devant moi, et toute langue jurera par mon nom. [45.23 Ne reviendra pas ; ne sera pas retirée, révoquée. — Tout genou fléchira, etc. Ces paroles sont citées par saint Paul (voir Romains, 14, 10-11 ; Philippiens, 2, 10-11), qui les applique à Jésus-Christ. ― Par mon nom ; ces mots sont évidemment sous-entendus ; Dieu avait ordonné à son peuple de ne jurer qu’en son nom. Voir Deutéronome, 6, 13 ; Exode, 23, 13.]24 Et l’on dira : Ma justice et ma force résident dans le Seigneur ; à (vers) lui viendront, pour être confondus, tous ceux qui s’opposaient à lui. 25 Par (Dans) le Seigneur sera justifiée et glorifiée toute la race (postérité) d’Israël.