Vigouroux – 1 Maccabées 5
Guerres de Judas contre les Iduméens et contre les Ammonites. Expéditions de Simon dans la Galilée, et de Judas dans le pays de Galaad. Joseph et Azarias, laissés en Judée, s’avancent témérairement contre Gorgias, et sont vaincus. Judas, revenu en Judée, marche contre les Iduméens et les Philistins.
5 Lorsque les nations d’alentour eurent appris que l’autel et le sanctuaire avaient été rebâtis comme auparavant, il arriva qu’elles furent très irritées ; 2 et elles résolurent d’exterminer ceux de la race de Jacob qui étaient parmi eux, et commencèrent à tuer quelques-uns du peuple et à poursuivre les autres. 3 Et Judas faisait la guerre aux fils d’Esaü dans l’Idumée et à ceux qui étaient dans (l’)Acrabathane, parce qu’ils tenaient les Israélites comme investis, et il les frappa d’une grande plaie. [5.3 Acrabathane ; lieu situé vers l’extrémité méridionale de la mer Morte, frontière de l’Idumée. C’est probablement le défilé qui est nommé ailleurs la Montée du Scorpion. Comparer à Nombres, 34, 4 ; Josué, 15, 3, etc.]4 Il se souvint aussi de la malice des enfants de Béan, qui étaient un piège et un scandale pour le peuple, lui dressant des embûches dans le chemin. [5.4 Les fils de Béan sont inconnus d’ailleurs. Il y avait près de la mer Morte une ville nommée Béon (voir Nombres, 32, 3) ; c’est peut-être la même que Béan.]5 Il les bloqua dans des tours, et il les y investit ; et il les anathématisa, et brûla leurs tours avec tous ceux qui étaient dedans. [5.5 L’anathème ; c’est-à-dire, l’extermination entière.]6 Il passa de là chez les fils d’Ammon, et il y trouva une forte troupe, et un peuple nombreux, et Timothée, leur chef ; [5.6 Les fils d’Ammon habitaient au nord-est de la mer Morte, entre l’Arnon et le Jabok. Ils avaient pour capitale Rabbath-Ammon, sur le cours supérieur du Jabok. ― Timothée, qui porte un nom grec, ne devait pas être Ammonite, mais le général syrien de ce nom (voir 2 Machabées, 10, 24).]7 il leur livra beaucoup de combats, et il les défit et les tailla en pièces. 8 Et il prit aussi la ville de Gazer et ses filles ; et il revint en Judée. [5.8 Ses filles ; c’est-à-dire, suivant le style de l’Ecriture, les villes ou les villages qui en dépendaient. ― Gazer, ville de la tribu de Gad, qui, à l’époque des rois, était tombée au pouvoir des Moabites et appartenait maintenant aux Ammonites. C’est probablement l’es-Ssir actuel, à la source de l’ouadi de ce nom, à l’ouest de Rabbath-Ammon ou Philadelphie et au nord d’Hésébon.]9 Les nations qui étaient en Galaad s’assemblèrent contre les Israélites qui étaient sur leur territoire, pour les exterminer ; mais ils s’enfuirent dans la forteresse de Dathéman, [5.9 Datheman, forteresse d’ailleurs inconnue ; le grec lit Dathema, que quelques-uns confondent avec Rethma (voir Nombres, 33, 18). Il est certain qu’en hébreu les lettres d et r ont la plus grande ressemblance.]10 et ils envoyèrent des lettres à Judas et à ses frères, leur disant : Les nations se sont assemblées contre nous de tous côtés, pour nous exterminer ; 11 elles se préparent à venir pour s’emparer de la forteresse où nous nous sommes réfugiés, et Timothée est le chef de leur armée. [5.11 Timothée, selon plusieurs interprètes, n’est pas celui du verset 6, lequel fut tué avec son frère Chéréas à Gazara l’année précédente (voir 2 Machabées, 10, 37).]12 Viens donc maintenant, et délivre-nous de leurs mains, car une multitude des nôtres est (déjà) tombée. 13 Tous nos frères qui étaient dans la région de Tubin ont été tués ; ils ont emmené en captivité leurs femmes, leurs enfants et leurs dépouilles, et ils ont tué là près de mille hommes. [5.13 Tubin, probablement la terre de Tob, au-delà du Jourdain, dans le pays de Galaad (voir Juges, 11, vv. 3, 5).]14 On lisait encore leurs lettres, et voici que d’autres messagers vinrent de Galilée, ayant leurs tuniques déchirées, et portant des nouvelles semblables ; 15 ils disaient que ceux de Ptolémaïs, de Tyr et de Sidon, s’étaient assemblés contre eux ; et toute la Galilée est remplie d’étrangers pour nous perdre (entièrement). [5.15 Ptolémaïde, l’Accho du livre des Juges, port de la Méditerranéen, à l’embouchure du Bélus, près du mont Carmel, appelée plus tard Saint-Jean d’Acre. Elle avait pris d’un des Ptolémées d’Egypte son nom grec de Ptolémaïde. ― La Galilée, partie septentrionale de la Palestine, où les étrangers, c’est-à-dire les païens, étaient mêlés aux Juifs.]16 Lorsque Judas et le peuple eurent entendu ces discours, une grande assemblée se réunit, afin de délibérer sur ce qu’ils feraient pour leurs frères, qui étaient dans la tribulation et qui étaient (vivement) attaqués par ces hommes (leurs ennemis). 17 Alors Judas dit à Simon, son frère : Choisis-toi des hommes, et va, et délivre tes frères en Galilée ; moi et mon frère Jonathas, nous irons dans le pays de Galaad. 18 Il laissa Joseph, fils de Zacharie, et Azarias, chefs du peuple, avec le reste de l’armée dans la Judée, pour la garder [5.18 Joseph et Azarias ne nous sont pas autrement connus.]19 et il leur donna cet ordre : Gouvernez ce peuple, et n’engagez pas le combat contre les nations, jusqu’à ce que nous soyons revenus. 20 On donna à Simon trois mille hommes pour aller en Galilée, et à Judas huit mille pour aller en Galaad. 21 Simon alla donc dans la Galilée, et livra de nombreux combats aux nations, qui furent écrasées (défaites) devant lui, et il les poursuivit jusqu’à la porte 22 de Ptolémaïs ; et près de trois mille d’entre les nations tombèrent, et il s’empara de leurs dépouilles. 23 Puis il prit avec lui ceux (les Juifs) qui étaient en Galilée et dans Arbates, avec leurs femmes et leurs enfants, et tout ce qui leur appartenait, et il les amena en Judée avec une grande joie. [5.23 Arbates, que quelques-uns croient être pris de l’hébreu Araboth ou mieux Haraboth, lieux stériles, incultes, plaines, pourrait cependant signifier une ville, ou une petite contrée de la Galilée, puisque Abialbon, un des vaillants guerriers de David, est qualifié d’Arbathite, c’est-à-dire, natif d’Arbates (voir 2 Rois, 23, 31).]24 Cependant Judas Machabée et Jonathas, son frère, franchirent le Jourdain, et marchèrent durant trois jours dans le désert. 25 Et les Nabuthéens vinrent à leur rencontre, et les reçurent dans un esprit de paix. Ils leur racontèrent tout ce qui était arrivé à leurs frères dans le pays de Galaad, [5.25 Les Nabuthéens ; le grec porte ici Nabatéens, et 1 Machabées, 9, 35, Naccatéens. On les fait descendre de Nabaïoth, fils aîné d’Ismaël (voir Genèse, 25, 13) ; mais il faut avouer que cette filiation ne repose sur aucun témoignage des écrivains sacrés.]26 et comment beaucoup d’entre eux avaient été enfermés dans Barasa, dans Bosor, dans Alimes, dans Casphor, Mageth et Carnaïm, qui étaient toutes des villes fortes (fortifiées) et grandes. [5.26 Les villes ici mentionnées étaient situées dans le pays de Galaad, mais elles sont en partie inconnues. ― Bosor. Voir Deutéronome, 4, 43. ― Barasa est probablement Bosra, une des villes les plus importantes du Hauran. ― Carnaïm, Astaroth-Carnaïm, à l’est de la mer Morte, aujourd’hui Tell Aschtere, entre Noua et Mezareib. ― Casphor, appelée Casbon, verset 26, la même probablement que Casphin (voir 2 Machabées, 12, 13), est identifiée par plusieurs avec le Khastin actuel, à l’est du lac de Tibériade.]27 (Ils ajoutèrent :) On les tenait (tient) aussi renfermés dans les autres villes de Galaad, et on avait (leurs ennemis ont) résolu de faire marcher le lendemain leur armée contre ces villes, de les prendre et de les perdre (tous) en un même jour. 28 Alors Judas prit aussitôt avec son armée le chemin qui mène au désert de Bosor, et il s’empara de la ville : il tua tous les mâles par le tranchant de l’épée, enleva tout leur butin, et brûla la ville. 29 Ils sortirent de là pendant la nuit, et allèrent jusqu’à la forteresse. [5.29 La forteresse de Datheman. Voir le verset 9.]30 Au point du jour, comme ils levaient les yeux, voici qu’ils virent une troupe innombrable d’hommes qui portaient des échelles et des machines, pour s’emparer de la forteresse et prendre les Juifs (se rendre maître de ses défenseurs). 31 Judas vit donc que l’attaque avait commencé, et (que) le cri de guerre montait jusqu’au ciel comme le son de (et ils firent retentir) la(es) trompette(s), et un grand cri s’élevait de la ville. 32 Et il dit à son armée : Combattez aujourd’hui pour vos frères. 33 Et il marcha en trois corps derrière les ennemis ; et ils firent retentir les trompettes, et poussèrent des cris dans leur prière. 34 Le camp de Timothée reconnut que c’était Machabée, et ils s’enfuirent devant lui ; les Juifs les frappèrent d’une grande plaie, et près de huit mille hommes d’entre eux tombèrent ce jour-là. 35 Judas alla ensuite à Maspha ; il l’attaqua et la prit ; il en tua tous les mâles, s’empara de ses dépouilles et la brûla. [5.35 Maspha désigne ici une ville du pays de Galaad dont la situation précise n’est pas connue. ― Casbon est Casphor. Voir le verset 26.]36 De là il s’avança, et prit Casbon, Mageth, Bosor et les autres villes de Galaad. 37 Après cela, Timothée assembla une autre armée et campa en face de Raphon, au-delà du torrent. [5.37 Après cela ; littéralement, après ces paroles (post hæc verba). Nous avons déjà remarqué plus d’une fois qu’en hébreu, le mot parole signifie aussi chose, fait, événement. ― Du torrent de Jéboc ou Jaboc sur la frontière des Ammonites (voir Deutéronome, 3, 16 ; Josué, 12, 2). ― Raphon, ville de la Décapole, qui n’était pas éloignée d’Astaroth-Carnaïm. ― Au-delà du torrent, probablement l’Hiéromax ou Mandhour, qui grossit considérablement au moment de la fonte des neiges.]38 Juda envoya reconnaître cette armée, et on lui fit un rapport, en disant : Toutes les nations qui nous environnent se sont réunies auprès de lui, formant une armée tout à fait (très) nombreuse ; [5.38 Disant ; littéralement disant que (dicens quia) ; ce que, en vertu d’un hébraïsme, est ici purement pléonastique, car il signifie proprement disant.]39 ils ont aussi fait venir les Arabes à leur secours, et ils sont campés au-delà du torrent, prêts à venir (vous) t’attaquer. Judas marcha alors à leur rencontre. 40 Et Timothée dit aux chefs de son armée : Lorsque Judas se sera approché du torrent avec son armée, s’il passe vers nous le premier, nous ne pourrons pas lui résister, car il aura tout l’avantage sur nous ; [5.40 Il sera très puissant ; littéralement et par hébraïsme : Pouvant, il pourra.]41 mais s’il craint de passer, et s’il campe au-delà du fleuve, passons à eux, et nous aurons l’avantage sur lui. 42 Lorsque Judas se fut approché du torrent d’eau, il plaça les scribes du peuple près du torrent, et il leur donna cet ordre : Ne laissez aucun homme en arrière ; mais que tous viennent au combat. [5.42 Les scribes du peuple, ou officiers qui tenaient les rôles, levaient les troupes, les congédiaient, et étaient chargés de ce qui regardait les approvisionnements de l’armée.]43 Puis il passa l’eau le premier, et tout le peuple après lui. Et toutes les nations furent battues en leur présence, et elles jetèrent leurs armes et s’enfuirent dans le temple qui était à Carnaïm. 44 Il prit la ville et brûla le temple, avec tous ceux qui étaient dedans ; et Carnaïm fut écrasée et elle ne put tenir devant Judas. 45 Alors Judas rassembla tous les Israélites qui étaient dans le pays de Galaad, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, avec leurs femmes, et leurs enfants, et une très grande armée, pour les emmener dans le pays de Juda. 46 Ils vinrent jusqu’à Ephron ; or cette ville était grande, située à l’entrée du pays, et très fort(ifié)e ; et on ne pouvait se détourner d’elle ni à droite ni à gauche, mais le chemin passait au milieu d’elle. [5.46 Ephron était située dans un étroit défilé à l’est du Jourdain. Son site n’a pas été retrouvé.]47 Ceux qui étaient dans la ville s’enfermèrent et obstruèrent les portes avec des pierres. Judas leur envoya porter des paroles de paix, 48 en ces termes : Trouvez bon que nous passions par votre pays pour aller dans le nôtre, et personne ne vous nuira ; nous ne passerons qu’à pied (ferons que passer). Mais ils ne voulurent pas leur ouvrir. [5.48 Nous ne ferons, etc. ; littéralement, seulement par les pieds nous passerons. ― Leur, c’est-à-dire, à Judas et aux siens.]49 Alors Judas fit publier dans le camp que chacun attaquât la ville dans l’endroit où il était. 50 Les hommes vaillants s’avancèrent donc (attaquèrent) ; et il donna l’assaut à cette ville pendant tout le jour et toute la nuit, et la ville fut livrée entre ses mains. 51 Ils firent périr tous les mâles par le tranchant de l’épée ; il la détruisit jusqu’aux fondements, en prit le butin, et traversa toute la ville sur les cadavres. 52 Ils franchirent ensuite le Jourdain dans la grande plaine qui est en face de Bethsan. [5.52 La grande plaine, ou le grand champ d’Esdrélon, appelée aussi la vallée de Jezrahel. ― Bethsan, la Scythopolis des Grecs, était située au-dessous du lieu où le Jourdain sort du lac de Génésareth.]53 Et Judas était à l’arrière-garde, la ralliant, et il encourageait le peuple tout le long du chemin, jusqu’à ce qu’ils furent arrivés au pays de Juda. 54 Ils montèrent sur la montagne de Sion avec joie et allégresse, et ils offrirent des holocaustes, parce qu’aucun d’eux n’avait péri, jusqu’à ce qu’ils furent (fussent) revenus en paix. 55 Pendant le(s) jour(s) où Judas, avec Jonathas, était au pays de Galaad, et Simon, son frère, dans la Galilée, devant Ptolémaïs, 56 Joseph, fils de Zacharie, et Azarias, chef du détachement (prince de l’armée), apprirent leurs succès et les combats qu’ils avaient livrés ; 57 et ils dirent : Faisons-nous aussi un nom, et allons combattre contre les nations qui nous environnent. 58 Il donna donc des ordres à ceux qui composaient son armée, et ils marchèrent sur Jamnia. [5.58 Jamnia dans le pays des Philistins. Voir plus haut, 1 Machabées, 4, 15.]59 Gorgias sortit de la ville avec ses hommes, et alla au-devant d’eux pour les combattre. [5.59 D’eux ; des Israélites. ― Gorgias. Voir plus haut, 1 Machabées, 3, 38.]60 Et Joseph et Azarias furent mis en fuite jusqu’à la frontière de la Judée ; et près de deux mille hommes du peuple d’Israël tombèrent ce jour-là, et la déroute fut grande parmi le peuple, 61 parce qu’ils n’avaient pas écouté Judas et ses frères, s’imaginant qu’ils agiraient vaillamment (signaleraient leur courage). 62 Mais ils n’étaient pas de la race de ces hommes par qui le salut a été opéré en Israël. 63 Or les hommes de Judas furent en (très) grand honneur devant tout Israël, et devant toutes les nations où l’on entendit leur nom. 64 Et on se réunissait auprès d’eux avec des acclamations de joie. 65 Judas sortit ensuite avec ses frères, et ils attaquèrent les enfants d’Esaü dans le pays qui est au midi ; il prit Chébron et ses filles, et brûla tout autour par le feu ses murs et ses tours. [5.65 Il frappa. C’est Judas qui est le sujet de ce verbe et de tous les suivants qui sont au singulier. ― Chébron, probablement la même qu’Hébron, ville célèbre dans la partie méridionale de Juda. Les deux noms en effet ont dû avoir en hébreu la même lettre initiale dont la prononciation pouvait être différente, par rapport aux circonstances de temps et de lieux. On dit encore aujourd’hui Chette et Neth, pour désigner la huitième lettre de l’alphabet hébreu.]66 Puis il décampa pour aller au pays des étrangers, et il parcourait la Samarie. [5.66 La Samarie. L’ancienne Italique et Josèphe lisent Marisa, au lieu de Samaria. Comme il est peu vraisemblable que Judas Machabée soit allé passer au nord de la Samarie, en partant d’Hébron au sud pour revenir ensuite dan le pays des Philistins, la leçon Marisa paraît préférable. C’était une ville de Juda, dans le voisinage de Beit-Djibrin.]67 En ce jour-là des prêtres périrent à la guerre, en voulant signaler leur courage et en allant au combat sans avoir reçu d’ordre (réflexion). [5.67 Voulant, etc. Nous avons cru devoir traduire littéralement d’après le grec, parce que la Vulgate, quoique rendant fidèlement ce texte, ne saurait s’accommoder aux exigences de notre langue.]68 Judas se détourna ensuite sur (pour aller vers) Azot, au pays des étrangers ; il renversa leurs autels et brûla par le feu les statues de leurs dieux (taillées au ciseau) ; il prit le butin des villes, et revint dans le pays de Juda. [5.68 Pour aller ; mots sous-entendus en vertu d’un hébraïsme usité dans la Bible. Voir le 2° à la fin des Observations préliminaires des Psaumes. ― Vers Azot, dans la plaine de la Séphéla, au nord d’Accaron. ― Dans la terre des étrangers, c’est-à-dire des Philistins.]