6 Il y a encore un autre mal que j'ai vu sous le soleil, et qui est même fréquent parmi les hommes :
2 Un homme à qui Dieu a donné les richesses, l'opulence et l'honneur : il ne manque rien à son âme de tout ce qu'il désire ; et Dieu ne lui a pas accordé le pouvoir de jouir de ces biens, mais un étranger les dévorera. Cela est une vanité et une grande misère.
3 Quand un homme aurait eu cent enfants, qu'il aurait vécu beaucoup d'années, et qu'il serait fort avancé en âge ; si son âme n'use point des biens qu'il possède, et qu'il soit même privé de la sépulture, je ne crains pas d'avancer de cet homme, qu'un avorton vaut mieux que lui*.
Non-seulement cet avare a été tourmenté par de continuelles inquiétudes, mais il s'est préparé le châtiment des peines éternelles. (S. JÉRÔME.)
4 Car c'est en vain qu'il est venu au monde ; il s'en retournera dans les ténèbres, et son nom sera effacé par l'oubli.
5 Il n'a point vu le soleil, et n'a point connu la différence du bien et du mal.
6 Quand il aurait vécu deux mille ans, s'il n'a pas joui des biens, tout ne se hâte-t-il pas vers le même lieu ?
7 Tout le travail de l'homme est pour sa bouche ; mais son âme n'en sera pas rassasiée.
8 Qu'a le sage de plus que l'insensé ? Qu'a le pauvre au-dessus de lui, sinon qu'il va là où est la vie* ?
Comparaison entre le riche insensé et le pauvre sage : celui-ci, se contentant du nécessaire, trouve la vie, le bonheur en ce monde, la récompense en l'autre ; celui-là, uniquement occupé des choses du temps, est malheureux en cette vie, et meurt sans espérance pour l'avenir.
9 Il vaut mieux voir ce que l'on désire, que de souhaiter ce que l'on ignore ; mais cela même est une vanité et une présomption d'esprit.
10 Celui qui doit être, est déjà connu par son nom ; on sait qu'il est homme, et qu'il ne peut pas disputer en jugement contre un plus puissant que lui*.
Contre les desseins de Dieu et l'ordre de sa providence.
11 On discourt beaucoup, on se répand en beaucoup de paroles dans la dispute, et ce n'est que vanité.
12 Qu'est-il nécessaire à l'homme de rechercher ce qui est au-dessus de lui, lorsqu'il ignore ce qui lui est avantageux dans sa vie, durant les jours de son pèlerinage et ce temps qui passe comme l'ombre ? Qui pourra découvrir ce qui doit être après lui sous le soleil ?