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Bible de Jérusalem – Ecclésiaste 7

Deuxième partie

Maximes de sagesse et leur critique.

7 Mieux vaut le renom que l’huile fine,
et le jour de la mort que le jour de la naissance.

2 Mieux vaut aller à la maison du deuil
qu’à la maison du banquet ;
puisque c’est la fin de tout homme,
le vivant doit y prêter attention.

3 Mieux vaut le chagrin que le rire,
car avec un triste visage on peut avoir le cœur joyeux.

4 Le cœur des sages est dans la maison du deuil,
le cœur des insensés, dans la maison de la joie.

5 Mieux vaut écouter la semonce du sage
qu’écouter la chanson des insensés.o

o Les quatre premières comparaisons ici développées sont des maximes austères et paradoxales.

6 Car tel le bruit des épines sous le chaudron,
tel est le rire de l’insensé.

Et cela aussi est vanité,
7 que l’oppression rende fou le sage
et qu’un présent perde le cœur.p

p V. obscur, mais les diverses corrections proposées ne sont pas satisfaisantes. Peut-être Qohélet veut-il seulement exprimer la faiblesse du sage lui-même, qui ne peut supporter sereinement ni le malheur, ni la trop grande faveur.

8 Mieux vaut la fin d’une chose que son début ;q
mieux vaut la patience que la prétention ;

q Ainsi le sage peut devenir fou, et le passé n’être pas meilleur que le présent (v. 10), ce qui reprend le v. 1 mieux vaut la fin de la vie que son début.

9 que ton esprit ne se hâte pas d’être chagrin,
car le chagrin hante les insensés.

10 Ne dis pas :
« Comment se fait-il que les jours anciens aient été meilleurs que ceux-ci ? »
Ce n’est pas la sagesse qui te fait poser cette question.

11 La sagesse est bonne comme un héritage, elle profite à ceux qui voient le soleil.

12 Car l’abri de la sagesse vaut l’abri de l’argent,
et l’avantage du savoir, c’est que la sagesse fait vivre ceux qui la possèdent.r

r Les vv. 11 et 12 semblent être des citations, critiquées par la suite. Trop de sagesse nuit (v. 16).

13 Regarde l’œuvre de Dieu :
qui pourra donc redresser ce qu’il a courbé ?

14 Au jour du bonheur, sois heureux,
et au jour du malheur, regarde :
Dieu a bel et bien fait l’un et l’autre,
afin que l’homme ne trouve rien derrière soi.s

s L’homme ne peut compter sur rien et ignore l’avenir que Dieu seul connaît (cf. Qo 3.11, 22 ; 6.12 ; 8.7, 17 ; 9.12 ; 10.14 ; 11.5).

15 J’ai tout vu, en ma vie de vanité :
le juste périr dans sa justice
et l’impie survivre dans son impiété.t

t La Loi avait formulé le principe de la rétribution collective fidèle, Israël serait heureux ; infidèle, malheureux, cf. Dt 7.12s. ; 11.26s. ; 28 ; Lv 26. Les Sages l’avaient appliqué au sort personnel Dieu rend à chacun selon ses œuvres, Pr 24.12 ; Ps 62.13 ; Jb 34.11. Aux démentis de l’expérience, on répondait le bonheur du méchant est éphémère, le malheur du juste, temporaire. Ainsi pour le Ps 37 ou les amis de Job. Qohéleth réfute cette thèse classique il faut prendre le sort comme il vient, sans vouloir l’expliquer.

16 Ne sois pas juste à l’excès
et ne te fais pas trop sage,
pourquoi te détruirais-tu ?

17 Ne te fais pas méchant à l’excès
et ne sois pas insensé,
pourquoi mourir avant ton temps ?

18 Il est bon de tenir à ceci sans laisser ta main lâcher cela,
puisque celui qui craint Dieu fera aboutiru l’un et l’autre.

u « fera aboutir » yôçî’ ; hébr. yeçe’ mal vocalisé.

19 La sagesse rend le sage plus fortv que dix gouverneurs dans une ville.

v Au lieu de « rend plus fort » ta`oz, ms de Qumrân et grec ont « prête assistance » ta`azer. — Ce verset semble être une citation, suivie d’un commentaire sceptique.

20 Seulement il n’est pas d’homme assez juste sur la terre pour faire le bien sans jamais pécher.

21 Ne prête pas la même attention à toutes les paroles qu’on prononce, ainsi tu n’entendras pas ton serviteur te dénigrer.

22 Car bien des fois ton cœur a su que toi aussi avais dénigré les autres.

23 Tout cela, j’en ai fait l’épreuve par la sagesse ; j’ai dit : « je serai sage », mais c’est hors de ma portée !

24 Hors de portée ce qui fut ;
profond ! profond ! Qui le découvrira ?

25 J’en suis venu, en mon cœur, à connaître, à explorer et à m’enquérir de la sagesse et de la réflexion, à reconnaître que la méchanceté est insensée et la sottise une folie.

26 Et je trouve plus amère que la mort, la femme,
car elle est un piège,
son cœur un filet, et ses bras des liens.
Qui plaît à Dieu lui échappe,
mais le pécheur s’y fait prendre.w

w Cette opinion va être examinée par l’auteur ; il ne prend pas position et s’en explique.

27 Voici ce que j’ai trouvé, dit Qohélet,
en regardant une chose après l’autre pour en tirer une réflexion
28 que mon esprit cherche encore, mais sans la trouver :
un homme sur mille, je l’ai bien trouvé,
mais une femme parmi elles toutes, je ne l’ai pas trouvée.

29 Seulement vois ce que j’ai trouvé :
que Dieu a fait l’hommex tout droit,
mais eux, ils cherchent bien des calculs.

x L’homme, ha’adam, peut ici désigner l’être humain en général, homme et femme. Qohélet renonce à se faire une opinion ; il n’est pas misogyne.

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