chapitre précédent retour chapitre suivant

Bible de Jérusalem – Judith 8

III. Judith

Présentation de Judith.

8 En ces mêmes jours, Judithn fut informée de ces faits. Elle était fille de Merari, fils d’Ox, fils de Joseph, fils d’Oziel, fils d’Elkia, fils d’Ananias, fils de Gédéon, fils de Raphen, fils d’Achitob, fils d’Élias, fils d’Helkias, fils d’Éliab, fils de Nathanaël, fils de Salamiel, fils de Sarasadé, fils d’Israël.o

n Le nom de Judith (cf. Gn 26.34) semble ici choisi pour sa signification « la Juive ». Judith, émule de Yaël, Jg 4.17-22, est le type de la vraie fille d’Israël. Dans son chant de triomphe, 16.2, 4, etc., elle parlera comme la nation personnifiée.

o Cette généalogie omet le nom de Siméon (qu’on trouve dans des mss et des versions), cf. 9.2. Mais le v. 2 suppose un nom de tribu.

2 Son mari, Manassé, de même tribu et de même famille, était mort à l’époque de la moisson des orges. 3 Il surveillait les lieurs de gerbes dans les champs quand, frappé d’insolation, il dut s’aliter et mourut dans sa ville, à Béthulie, où on l’ensevelit avec ses pères dans le champ situé entre Dotaïn et Balamôn. 4 Devenue veuve, Judith vécut en sa maison durant trois ans et quatre mois. 5 Sur la terrasse elle s’était aménagé une chambre haute. Elle portait un sac sur les reins, se vêtait d’habits de deuil 6 et jeûnait tous les jours de son veuvage, hormis les veilles de sabbat, les sabbats, les veilles de néoménies, les néoménies, ainsi que les jours de fête et de liesse de la maison d’Israël. 7 Or elle était très belle et d’aspect charmant. Son mari Manassé lui avait laissé de l’or, de l’argent, des serviteurs, des servantes, des troupeaux et des champs, et elle habitait au milieu de tous ses biens 8 sans que personne eût rien à lui reprocher, car elle craignait Dieu grandement.

Judith et les anciens.

9 Elle apprit donc que le peuple, découragé par la pénurie d’eau, avait murmuré contre le chef de la cité. Elle sut aussi tout ce qu’Ozias leur avait dit et comment il leur avait juré de livrer la ville aux Assyriens au bout de cinq jours.

10 Alors elle envoya la servante préposée à tous ses biens appeler Chabris et Charmis, anciens de la ville. 11 Quand ils furent chez elle, elle leur dit :
« Écoutez-moi, chefs des habitants de Béthulie. Vraiment vous avez eu tort de parler aujourd’hui comme vous l’avez fait devant le peuple et de vous engager contre Dieu, en faisant serment de livrer la ville à nos ennemis si le Seigneur ne vous portait secours dans le délai fixé ! 12 Allons ! Qui donc êtes-vous pour tenter Dieu en ce jour et pour vous dresser au-dessus de lui parmi les enfants des hommes ? 13 Et maintenant vous mettez le Seigneur Tout-Puissant à l’épreuve ! Vous ne comprendrez donc rien au grand jamais ! 14 Si vous êtes incapables de scruter les profondeurs du cœur de l’homme et de démêler les raisonnements de son esprit, comment donc pourrez-vous pénétrer le Dieu qui a fait toutes ces choses, scruter sa pensée et comprendre ses desseins ? Non, frères, gardez-vous d’irriter le Seigneur notre Dieu ! 15 S’il n’est pas dans ses intentions de nous sauver avant cette échéance de cinq jours, il peut nous protéger dans le délai qu’il voudra, comme il peut nous détruire à la face de nos ennemis. 16 Mais vous, n’exigez pas de garanties envers les desseins du Seigneur notre Dieu. Car on ne met pas Dieu au pied du mur comme un homme, on ne lui fait pas de sommations comme à un fils d’homme. 17 Dans l’attente patiente de son salut, appelons-le plutôt à notre secours. Il écoutera notre voix si tel est son bon plaisir.p

p Comme Job, Jb 38.2, etc., les anciens de Béthulie ont tort de discuter les desseins divins. Ils doivent comme lui s’humilier et se taire. Mais l’auteur de invite à plus de confiance filiale que celui de Jb.

18 « À vrai dire, il ne s’est trouvé, naguère pas plus qu’aujourd’hui, ni une de nos tribus, ni une de nos familles, ni un de nos bourgs, ni une de nos cités qui se soit prosterné devant des dieux faits de main d’homme, comme cela s’est produit jadis, 19 ce qui fut cause que nos pères furent livrés à l’épée et au pillage et succombèrent misérablement devant leurs ennemis. 20 Mais nous, nous ne connaissons pas d’autre Dieu que Lui. Aussi pouvons-nous espérer qu’il ne nous regardera pas avec dédain et ne se détournera pas de notre race.q

q Thèse déjà affirmée par Achior et que reprendra Judith devant Holopherne. Judith fait avec ses compatriotes un examen de conscience national celui-ci montre que le peuple est exempt de l’idolâtrie jadis dénoncée par les prophètes (comme il le fut effectivement à la fin de l’époque du second Temple).

21 « Si en effet on s’empare de nous, comme vous l’envisagez, toute la Judée aussi sera prise et nos lieux saints pillés. Notre sang devra alors répondre de leur profanation. 22 Le meurtre de nos frères, la déportation du pays, le dépeuplement de notre héritage retomberont sur nos têtes parmi les nations dont nous serons devenus les esclaves et nous serons alors pour nos nouveaux maîtres un scandale et une honte, 23 car notre servitude n’aboutira pas à un retour en grâce, mais le Seigneur notre Dieu en fera une punition infamante. 24 Et maintenant, frères, mettons-nous en avant pour nos frères, car leur vie dépend de nous, et le sanctuaire, le Temple et l’autel reposent sur nous.

25 « Pour toutes ces raisons, rendons plutôt grâces au Seigneur notre Dieu qui nous met à l’épreuve, tout comme nos pères.r

r Leçon de l’histoire patriarcale (que l’auteur de Jb n’en avait pas dégagée) le malheur du juste n’est pas un châtiment, mais une épreuve.

26 Rappelez-vous tout ce qu’il a fait à Abraham, toutes les épreuves d’Isaac, tout ce qui arriva à Jacob en Mésopotamie de Syrie alors qu’il gardait les brebis de Laban, son oncle maternel. 27 Comme il les éprouva pour scruter leur cœur, de même ce n’est pas une vengeance que Dieu tire de nous, mais c’est plutôt un avertissement dont le Seigneur frappe ceux qui le touchent de près. »

28 Ozias lui répondit : « Tout ce que tu viens de dire, tu l’as dit dans un excellent esprit et personne n’y contredira. 29 Bien sûr, ce n’est pas d’aujourd’hui que se manifeste ta sagesse. Dès ta prime jeunesse le peuple tout entier a reconnu ton intelligence tout comme l’excellence foncière de ton cœur. 30 Mais les gens avaient tellement soif ! Ils nous ont contraints de faire ce que nous leur avions promis et de nous y engager par un serment irrévocable. 31 Et maintenant, puisque tu es une femme pieuse, prie le Seigneur de nous envoyer une averse qui remplisse nos citernes afin que nous ne soyons plus épuisés. »

32 — « Écoutez-moi bien, leur répondit Judith. Je vais accomplir une action dont le souvenir se transmettra aux enfants de notre race d’âge en âge. 33 Vous, trouvez-vous cette nuit à la porte de la ville. Moi, je sortirai avec ma servante et, avant la date où vous aviez pensé livrer la ville à nos ennemis, par mon entremise le Seigneur visitera Israël. 34 Quant à vous, ne cherchez pas à connaître ce que je vais faire. Je ne vous le dirai pas avant de l’avoir exécuté. » —

35 « Va en paix ! lui dirent Ozias et les chefs. Que le Seigneur Dieu te conduise pour tirer vengeance de nos ennemis ! » 36 Et, quittant la chambre haute, ils rejoignirent leurs postes.

chapitre précédent retour chapitre suivant