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Amiot-Tamisier – Galates 1

ÉPÎTRE DE SAINT PAUL AUX GALATES

Sur les destinataires et la date de l'épître aux Galates, les commentateurs se partagent entre deux opinions. Les uns pensent que saint Paul a évangélisé, non la Galatie proprement dite, mais la Galatie méridionale, qui comprenait les provinces de Pisidie, de Lycaonie, d'Isaurie et une partie de la Phrygie, rattachées administrativement à la Galatie après la conquête romaine, au cours de son premier voyage missionnaire, de 46 ou 47 à 49 (Actes XIII, 14 – XIV, 23). L'épître aux Galates aurait été écrite peu de temps après, en 49, avant l'assemblée de Jérusalem qui, en 49 ou 50, décida que les convertis du paganisme ne devaient pas être astreints à la pratique de la Loi mosaïque (Actes XV, 4, 29). ♦ D'autres interprètes, plus nombreux, estiment que l'épître est adressée aux habitants de l'ancien royaume de Galatie, ou Galatie du Nord, plusieurs années après l'assemblée de Jérusalem, et après le second voyage missionnaire de saint Paul, entre 53 ou 56. ♦ La première opinion nous paraît de beaucoup la plus sûre. Les textes des Actes relatifs à la Galatie se comprennent bien mieux de la Galatie du Sud, pour peu qu'on étudie avec soin l'itinéraire de saint Paul. Et surtout on conçoit mal que, si l'apôtre écrit après l'assemblée de Jérusalem, il ne fasse pas appel au décret par lequel elle avait résolu la question qui remplit toute l'épître. A quoi bon démontrer laborieusement l'abrogation de la Loi mosaïque, préalablement reconnue à Jérusalem ? ♦ L'intervention de saint Paul fut motivée par les menées de judéo-chrétiens venus de la Ville Sainte, qui prétendaient imposer aux convertis issus du paganisme la circoncision et les autres observances de la Loi. Leur propagande s'exerça à Antioche (Actes XV, 1-2) et en Galatie méridionale (Galates, I, 7 ; IV, 29 ; V, 10, 12 etc.), jetant le trouble dans les Églises et bouleversant les consciences. A Antioche, saint Pierre lui-même se laissa intimider par les judaïsants et revint momentanément aux pratiques mosaïques (Galates II, 11, 13). Saint Paul lui en fit de vifs reproches (Galates II, 14) et envoya alors aux Églises Galates une lettre frémissante d'émotion pour détourner les fidèles de s'assujettir à la Loi juive. ♦ La question des observances mosaïques était en effet, humainement parlant, une question de vie ou de mort pour l'Église. Jamais le monde païen n'aurait consenti à devenir chrétien, s'il lui avait fallu préalablement se faire juif ; les progrès de l'Évangile auraient été arrêtés net. La clairvoyance de saint Paul a conjuré le péril et nous a valu une épître admirable ; l'apôtre y démontre, avec une éloquence irrésistible et une densité d'expression parfois déconcertante, que la Loi mosaïque n'a été qu'un régime transitoire, destiné au seul peuple juif, et qui devait disparaître à la venue du Christ. Seule la foi peut obtenir au pécheur pardon et justification : foi en l'accomplissement futur des promesses messianiques pour Abraham et l'humanité antérieure au Christ, foi en la réalisation de ces promesses par Jésus-Christ, sous le régime inauguré par la rédemption. La démonstration est conduite avec une rigueur inattaquable, bien que sous une forme parfois paradoxale. Elle fournit à saint Paul l'occasion d'exposer, en même temps que ses vues sur l'histoire religieuse de l'humanité, les aspects fondamentaux de la révélation et de la vie chrétienne. Elle porte en elle-même la marque de son authenticité.

ADRESSE ♦ REPROCHES DE SAINT PAUL AUX GALATES ♦ IL A REÇU SON ÉVANGILE DIRECTEMENT DE JÉSUS-CHRIST ♦ SA CONVERSION ♦ SES PREMIÈRES PRÉDICATIONS

1 Paul, apôtre, non de la part des hommes, ni par l'intermédiaire d'un homme, mais par Jésus-Christ et Dieu le Père qui l'a ressuscité des morts, [1. Dès le début de l'Épitre, saint Paul affirme son autorité. Sa mission apostolique n'est pas d'origine humaine et ne lui a pas non plus été transmise par un homme.] 2 ainsi que tous les frères qui sont avec moi, aux églises de Galatie. 3 Grâce et paix à vous de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ, 4 qui s'est livré lui-même pour nos péchés, afin de nous arracher à la perversité du siècle présent, selon la volonté de notre Dieu et Père, [4. Insistance sur la rédemption par le Christ et implicitement affirmation de la caducité de la Loi mosaïque.] 5 à qui soit la gloire dans les siècles des siècles ! Amen !

6 Je m'étonne que vous vous laissiez détourner si vite de Celui qui vous a appelés à la grâce du Christ, pour passer à un autre Évangile. [6. La grâce du Christ est l'ordre nouveau, caractérisé par l'intimité divine où est introduit le chrétien.] 7 Non que c'en soit un autre ; il y a simplement des gens qui vous troublent et qui veulent bouleverser l'Évangile du Christ. 8 Eh bien ! quand nous-mêmes, quand un ange venu du ciel vous annoncerait un Évangile différent de celui que nous vous avons annoncé, qu'il soit maudit ! [8-9. Hypothèse irréalisable. La manière dont s'exprime saint Paul montre qu'il a conscience de posséder l'infaillibilité personnelle. L'Église admet que ce privilège a été donné à tous les Apôtres ; mais seuls les successeurs de saint Pierre l'ont possédé ensuite.] 9 Ainsi que nous l'avons déjà dit, je le répète aujourd'hui : si quelqu'un vous annonce un Évangile différent de celui que vous avez reçu, qu'il soit maudit ! 10 Est-ce donc la faveur des hommes ou celle de Dieu que je cherche à gagner maintenant ? Ou est-ce aux hommes que je cherche à plaire ? Si je cherchais encore à plaire aux hommes, je ne serais pas le serviteur du Christ.

11 Je vous le déclare, frères, l'Évangile que je vous ai prêché n'a rien de l'homme. 12 Ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais c'est par une révélation de Jésus-Christ. [12-16. La révélation dont fut favorisé saint Paul est avant tout celle du chemin de Damas, mais elle à été suivie de plusieurs autres.] 13 Vous avez, certes, entendu parler de ma conduite d'autrefois dans le judaïsme, comment je persécutais à l'excès l'Église de Dieu et la ravageais, [13. Voir Actes VIII, 3 ; IX, 1-2 ; XXII, 4-5 ; XXVI, 9-11 ; I Corinthiens XV, 9 ; I Timothée I, 13.] 14 et comment dans le judaïsme, je surpassais beaucoup de compatriotes de mon âge dans un zèle extrême pour les traditions de mes pères.

15 Mais quand il plut à Celui qui m'avait mis à part dès le sein de ma mère et appelé par sa grâce 16 de révéler son Fils en moi, afin que je l'annonce parmi les païens, aussitôt, sans consulter personne, [16. Sans consulter personne : Littéralement, sans consulter la chair et le sang.] 17 sans monter à Jérusalem auprès de ceux qui avaient été apôtres avant moi, j'allai en Arabie, puis je revins de nouveau à Damas. [17. Voir Actes IX, 19-25 ; II Corinthiens XI, 32-33.] 18 Ensuite, trois ans plus tard, je montai à Jérusalem pour faire la connaissance de Céphas et demeurai quinze jours près de lui : [18. Trois ans plus tard, probablement vers 35. Sur le voyage à Jérusalem, voir Actes IX, 26-30. Céphas est évidemment l'apôtre Pierre : comparer I Corinthiens I, 12 et Jean I, 42.] 19 mais je ne vis aucun autre apôtre, si ce n'est Jacques, le frère du Seigneur. [19. Il s'agit de Jacques, fils d'Alphée, ou Jacques le Mineur, frère, c'est-à-dire cousin du Sauveur (voir note sur Matthieu XIII, 55-56), premier évêque de Jérusalem. La manière dont s'exprime saint Paul semble supposer que Jacques était l'un des douze Apôtres.] 20 Ce que je vous écris là, j'atteste devant Dieu que ce n'est pas un mensonge. 21 Je me rendis ensuite dans les régions de Syrie et de Cilicie. 22 J'étais d'ailleurs personnellement inconnu des églises de Judée qui sont dans le Christ. 23 Elles avaient seulement entendu dire que celui qui jadis les persécutait, prêchait maintenant la foi qu'il voulait alors détruire. 24 Et elles glorifiaient Dieu à mon sujet.

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