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Nouvelle Bible Segond – Jonas 4

Jonas et la compassion divine

4 Cela fut très mal pris par Jonas, qui se fâcha. [Cela... : litt. ce fut mauvais pour Jonas, d'un grand mal, cf. v. 6 ; voir aussi Lc 15.28. – qui se fâcha : autre traduction possible qui fut abattu, de même dans la suite.]2 Il pria le SEIGNEUR en disant : S'il te plaît, SEIGNEUR, n'est-ce pas ce que je disais quand j'étais encore dans mon pays ? C'est pourquoi j'ai préféré fuir à Tarsis. Car je savais que tu es un Dieu clément et compatissant, patient et grand par la fidélité, qui renonces au mal. [C'est pourquoi j'ai préféré fuir : le sens précis du verbe hébreu traduit par j'ai préféré est incertain ; il dérive d'une racine qui désigne ce qui est devant, dans l'espace (p. ex., l'est dans la mesure où on s'oriente face au soleil levant, cf. v. 5,7) ou ce qui est avant, dans le temps (voir Gn 2.8n). Autres traductions c'est pour cela que je me suis empressé de fuir ; c'est pour cela que j'avais prévu de fuir (cf. 1.3). – je savais... : cf. Ex 34.6+. – Dieu : hébreu 'El, cf. Gn 21.33n. – qui renonces... ou qui regrettes le mal 3.9s.]3 Maintenant, SEIGNEUR, prends-moi la vie, je t'en prie, car mieux vaut pour moi mourir que vivre. [prends-moi la vie : cf. v. 8 ; 1R 19.4 ; voir aussi Jb 7.15.]

Le prophète de malheur peut-il être un faux prophète ?

Jonas a-t-il craint (4.2) de passer pour un faux prophète, selon les critères énoncés dans le Deutéronome (18.21s : le vrai prophète est celui dont la prophétie s’accomplit), si son annonce de malheur (Encore quarante jours, et Ninive est détruite ! 3.4) ne se réalisait pas ? Ce n’est pas forcément aussi simple.

La dispute des prophètes Hanania et Jérémie au sujet de la durée de l’exil (Jr 28) met au jour une possibilité de distinguer, sur ce point, entre prophète de bonheur et prophète de malheur. Lorsque Hanania conteste l’annonce de malheur faite par Jérémie, celui-ci mêle tout d’abord ironie et tristesse en lui répondant qu’il préférerait se tromper. En quelque sorte : « Dieu t’entende ! » Puis Jérémie ajoute : Les prophètes qui ont paru avant moi et avant toi, depuis toujours, ont annoncé contre de nombreux pays et de grands royaumes la guerre, le malheur et la peste ; mais si un prophète annonce que tout ira bien, c’est quand viendra ce qu’il a annoncé qu’il sera reconnu comme un prophète vraiment envoyé par le SEIGNEUR (Jr 28.8s).

Jérémie nuance ici le jugement à première vue massif du Deutéronome. Il y a une présomption de validité pour le prophète de malheur. C’est surtout le prophète de bonheur qui sera jugé en fonction de l’accomplissement de ses dires. Comme l’illustre le précédent de Michée, auquel Jérémie a été comparé (Jr 26.16ss), l’annonce de malheur est, en un sens, faite pour ne pas s’accomplir. Si elle conduit ses auditeurs à changer, elle a atteint le but que Dieu lui avait fixé ; et celui qui l’a transmise est un vrai prophète, quoique son annonce ne se soit pas réalisée. La clef de cette distinction est à chercher en Dieu lui-même : Si cette nation... revient du mal qu’elle a fait, je renonce au mal que je pensais lui faire (Jr 18.8).

4 Le SEIGNEUR répondit : Fais-tu bien de te fâcher ? [Fais-tu bien de te fâcher ? Autre traduction possible es-tu vraiment fâché ou abattu ? (v. 1n) ; même possibilité au v. 9.]

5 Jonas sortit de la ville et s'assit à l'est de la ville. Là il se fit une hutte et s'assit dessous, à l'ombre, afin de voir ce qui arriverait dans la ville. [Certains traduisent : Jonas était sorti... s'était assis...à l'est : autre traduction en face, cf. v. 2n.]6 Le SEIGNEUR Dieu fit intervenir un ricin, qui s'éleva au-dessus de Jonas, pour donner de l'ombre sur sa tête et le délivrer de son mal. Jonas éprouva une grande joie à cause de ce ricin. [Le SEIGNEUR Dieu : cf. Gn 2.4nss. – fit intervenir 2.1n. – un ricin : hébreu qiqayôn (ce nom pourrait rappeler celui de Jonas, en hébreu Yona), traduction incertaine ; une identification botanique exacte est impossible.]7 Mais le lendemain, quand parut l'aurore, Dieu fit intervenir un ver qui s'attaqua au ricin, et le ricin se dessécha. [qui s'attaqua : litt. qui frappa, comme au v. 8.]8 Au lever du soleil, Dieu fit intervenir un vent d'est étouffant, et le soleil frappa la tête de Jonas : il tomba en défaillance. Il demanda à mourir, en disant : Mieux vaut pour moi mourir que vivre. [un vent d'est : cf. Gn 41.6n ; Os 13.15 ; Jb 1.19. – étouffant : le mot hébreu n'apparaît qu'ici et son sens précis est incertain ; on le rapproche parfois d'un verbe qui signifie labourer. – frappa v. 7n. – Il demanda à mourir : litt. il demanda sa vie pour mourir, cf. v. 3 ; même formule en 1R 19.4.]9 Dieu dit à Jonas : Fais-tu bien de te fâcher à cause du ricin ? Il répondit : Je fais bien de me fâcher au point de demander la mort. [Cf. v. 4,7. – au point de demander la mort : autre traduction à mort, litt. jusqu'à la mort (cf. Mc 14.34n//).]10 Le SEIGNEUR dit : Toi, tu as pitié du ricin qui ne t'a coûté aucune peine et que tu n'as pas fait grandir, qui est né en une nuit et qui a disparu en une nuit. [en une nuit : litt. fils d'une nuit (les deux fois).]11 Et moi, je n'aurais pas pitié de Ninive, la grande ville, où il y a plus de cent vingt mille humains qui ne savent pas distinguer leur droite de leur gauche, et des bêtes en grand nombre ! [cent vingt mille : litt. douze myriades ; cf. Ap 7.4ss. – qui ne savent pas distinguer... : l'expression signifie peut-être qui ne reconnaissent pas le bon chemin du mauvais ; cf. Gn 2.17+ ; Ec 10.2n ; elle peut s'appliquer à tous les Ninivites dans leur ignorance du vrai Dieu ; selon certains, elle viserait plus particulièrement les enfants n'ayant pas atteint l'âge de raison. – bêtes 3.7s.]

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