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TOB – 2 Maccabées 1

LE DEUXIÈME LIVRE DES MACCABÉES

L'auteur

Le second livre des Maccabées n'est pas la suite de 1 M, car le récit débute avant l'avènement d'Antiochus IV et s'achève avant la mort de Judas Maccabée. Mais les événements qui précèdent l'entrée en scène de Judas sont beaucoup plus développés en 2 M. Il représente le résumé d'une œuvre en cinq livres, composée peu de temps après les événements relatés, donc peu après 160 avant J.C., par Jason de Cyrène, écrivain de la diaspora de Cyrénaïque, très documenté sur Jérusalem et sur l'administration séleucide. Le style en est assez typique de celui des écrivains hellénistiques, mais parfois ampoulé ; c'est plus le style d'un prédicateur que d'un historien, et son but semble être à la fois de plaire et d'édifier. D'une formation hellénistique solide, mais juif très croyant, Jason mentionne Dieu à toute occasion, surtout lors des prières avant et après les combats, et lance les invectives les plus violentes contre les ennemis de sa religion.

L'abréviateur anonyme a réalisé son résumé en pratiquant dans l'histoire présentée par Jason des coupures qu'il raccorde par de brefs récits ajoutés. D'autre part, il écrit dans un style plus ramassé, mais reste fidèle au caractère fondamental de l'œuvre de Jason, au point qu'il n'est généralement pas possible de distinguer ce qui appartient en propre à chacun.

C'est en tout cas à lui que l'on doit, vraisemblablement, la traduction, de l'araméen ou de l'hébreu, des deux premières des sept lettres incorporées au texte. Il se sert de ces deux lettres, placées au début de 2 M, pour préconiser la commémoration de la Dédicace du Temple par Judas Maccabée (décembre 164), qui constitue le centre de son récit (10.1-8). La date de la lettre la plus récente répond à 124 avant J.C. et notre livre est donc de peu postérieur.

Théologie

Deux points caractérisent tout particulièrement la pensée de l'auteur: sa conception de l'histoire et son eschatologie.

Pour lui, tous les événements sont des effets de la volonté de Dieu, non seulement le châtiment des persécuteurs et des traîtres ou la défaite des ennemis, mais aussi les événements qui remettent les Juifs dans le droit chemin. Les victoires de Judas Maccabée sont pour lui le signe du retour de la bienveillance divine, méritée par les souffrances des martyrs.

L'eschatologie de l'auteur de 2M développe celle du livre de Daniel. Elle est proche de celle des Pharisiens qui enseignent la résurrection, corps et âme, des justes. Dans la même ligne, 2M marque un développement théologique en enseignant l'efficacité de la prière et du sacrifice pour expier les péchés des morts et réciproquement l'intercession des justes trépassés, tels Onias et Jérémie, en faveur des vivants. Pour les auteurs du Nouveau Testament, Jésus est le seul médiateur, et les Eglises de la Réforme refuseront d'aller au-delà, remettant à Dieu le sort des défunts. Dans l'histoire du christianisme oriental et occidental le recours aux saints a joué un grand rôle. Il est approuvé par le Concile de Trente, qui souligne en même temps que toute grâce passe par le Christ.

DEUXIÈME LIVRE DES MACCABÉES

LETTRES AUX JUIFS D'ÉGYPTE

La lettre festivale de 124 av. J. C.

1 A leurs frères les Juifs d'Egypte, salut ! Leurs frères les Juifs de Jérusalem et ceux du pays de Judée (leur souhaitent) paix et prospérité ! [Des communautés juives s'étaient installées en Egypte au moins depuis l'époque de Jérémie (voir Jr 43.3-7).]2 Que Dieu vous comble de bienfaits et se souvienne de son alliance avec Abraham, Isaac et Jacob, ses fidèles serviteurs. 3 Qu'il vous donne à tous un cœur pour l'adorer et faire ses volontés généreusement et de plein gré. 4 Qu'il ouvre votre cœur à sa Loi et à ses préceptes et qu'il fasse régner la paix. [Dt 29.3 ; voir Ez 18.31 ; 36.26-27.]5 Qu'il exauce vos prières, se réconcilie avec vous et ne vous abandonne pas au temps du malheur. 6 C'est la prière qu'ici même nous lui adressons en ce moment pour vous. 7 Sous le règne de Démétrius, l'an cent soixante-neuf, nous, les Juifs, nous vous avons écrit : « Dans la détresse et la crise qui fondirent sur nous en ces années, depuis que Jason et ses partisans firent défection de la terre sainte et du royaume, [Démétrius : il s'agit de Démétrius II, roi séleucide (voir la note sur 1 M 1.8) qui régna de 145 à 138 puis de 129 à 125 av. J.C.
— l'an cent soixante-neuf de l'ère séleucide correspond à l'année 143-142 av. J.C. (voir la note sur 1 M 1.10).
— Jason : voir 2 M 4.7-20.]
8 ils allèrent jusqu'à mettre le feu à la grande porte du Temple et à verser le sang innocent ; alors nous avons prié le Seigneur, nous avons été exaucés, nous avons offert un sacrifice et de la fleur de farine, nous avons allumé les lampes et exposé les pains. » [Incendie des portes 2 M 8.33 ; 1 M 4.38.
— sacrifice pour la purification du temple v. 18 ; 2 M 10.1-7 ; 1 M 4.36-61.]
9 Et maintenant, nous vous écrivons pour vous inviter à célébrer la fête des Tentes du mois de Kislew, [la fête des Tentes était célébrée au mois de Tishri (septembre-octobre) ; la mention du mois de Kislew (novembre-décembre) montre qu'il s'agit ici en réalité de la fête de la Dédicace (voir 2 M 10.5-6). Voir au glossaire CALENDRIER.]

La seconde lettre de 164 av. J. C.

10 l'an cent quatre-vingt-huit.

Ceux de Jérusalem et ceux de Judée, le conseil des anciens et Judas, à Aristobule, conseiller du roi Ptolémée et issu de la race des prêtres consacrés par l'onction, ainsi qu'aux Juifs d'Egypte, joie et santé ! [Judas : Judas Maccabée, fils du prêtre Mattathias (voir 1 M 2.4 et la note), chef des révoltés juifs (voir 2 M 5.27 ; 8, etc.).
— Aristobule : Juif d'Alexandrie.
— Ptolémée : Ptolémée VI Philométor, roi lagide d'Egypte (voir la note sur 1 M 1.8).
— Juifs d'Egypte : voir la note sur le v. 1.]
11 Sauvés par Dieu de grands périls, nous le remercions grandement de nous assister contre le roi ; [Antiochus, voir v. 13 (leur chef) ; v. 14 et la note.]12 car il a lui-même expulsé ceux qui ont marché en armes contre la ville sainte. 13 S'étant en effet rendu en Perse, leur chef ainsi que son armée qui paraissait invincible furent massacrés dans le temple de Nanéa grâce à un stratagème dont usèrent les prêtres de Nanéa. [Nanéa : déesse mésopotamienne, identifiée avec Artémis.
— Mort d'Antiochus 2 M 9.1-29 ; 1 M 6.1-13.]
14 En effet, sous prétexte d'épouser la déesse, Antiochus, accompagné de ses amis, se rendit en ce lieu dans l'intention d'en recevoir les richesses considérables à titre de dot. [Antiochus IV Epiphane (voir 1 M 1.10). Sa mort est racontée de façon différente en 2 M 9.28 et en 1 M 6.1-13.]15 Les prêtres du Nanéon les exposèrent, et le roi avança avec quelques personnes de sa suite dans l'enceinte du temple. Mais ils fermèrent le sanctuaire dès qu'Antiochus y fut entré, [Nanéon : le temple de la déesse Nanéa, désigné aussi comme le sanctuaire.]16 ouvrirent la porte dissimulée dans les lambris du plafond et foudroyèrent le chef en lançant des pierres. Ils coupèrent aux intrus les membres et la tête qu'ils jetèrent à ceux qui étaient dehors. 17 Loué soit en toutes choses notre Dieu qui a livré à la mort ceux qui ont commis un sacrilège !

18 Comme nous allons célébrer le vingt-cinq Kislew la purification du Temple, nous avons jugé de notre devoir de vous en informer, pour que vous aussi la célébriez à la manière de la fête des Tentes et du feu qui apparut quand Néhémie, qui avait construit le Temple et l'autel, offrit des sacrifices. [purification au mois de Kislew v. 9 ; 1 M 4.36 ; voir au glossaire CALENDRIER.
— fête des Tentes : voir la note sur le v. 9.]
19 Car lorsque nos pères furent emmenés en Perse, les pieux prêtres d'alors, ayant pris du feu de l'autel, le cachèrent secrètement dans une cavité ressemblant à un puits desséché et l'y abritèrent de manière que l'endroit fût ignoré de tous. [Il s'agit de l'exil à Babylone ; la Perse désigne ici tout le pays situé à l'est de l'Euphrate.]20 Un assez grand nombre d'années s'étant écoulées, quand Dieu le jugea à propos, Néhémie, envoyé par le roi de Perse, manda à la recherche du feu les descendants des prêtres qui l'avaient caché. Mais comme ils expliquèrent qu'ils avaient trouvé non pas du feu, mais un liquide épais, il leur ordonna d'en puiser pour en rapporter. 21 Quand on eut tout préparé pour les sacrifices, Néhémie ordonna aux prêtres de répandre ce liquide sur le bois et sur les offrandes placées dessus. 22 Ceci fait, lorsque après quelque temps le soleil, d'abord voilé par des nuages, se mit à briller, un grand brasier s'alluma au grand étonnement de tous. [Voir 1 R 18.34-38.]23 Pendant que le sacrifice se consumait, les prêtres prononçaient une prière, et avec les prêtres tous les présents, Jonathan conduisant le chœur et les autres répondant avec Néhémie. [Ce Jonathan est peut-être le même personnage que le grand prêtre Yonatân de Ne 12.11.
— chœur alterné Jdt 15.13.]
24 Or cette prière était ainsi conçue :
« Seigneur, Seigneur Dieu, créateur de toutes choses, redoutable, fort, juste, miséricordieux, seul roi, seul bon, 25 seul libéral, seul juste, tout-puissant et éternel, qui sauves Israël de tout mal, qui as fait de nos pères tes élus et les as sanctifiés, 26 agrée ce sacrifice pour tout ton peuple d'Israël, conserve ton patrimoine et sanctifie-le. [Le patrimoine de Dieu : c'est-à-dire le peuple (Dt 4.20 ; 9.29) ou le pays d'Israël (2 M 2.4 ; Jr 2.7 ; 16.18).]27 Rassemble ceux d'entre nous qui sont dispersés ; délivre ceux qui sont en esclavage parmi les nations, regarde favorablement ceux qui sont méprisés et objets d'abomination, afin que les nations reconnaissent que tu es notre Dieu. [Dt 30.3-5.]28 Châtie ceux qui nous tyrannisent et nous outragent insolemment. 29 Implante ton peuple dans ton saint lieu, comme l'a dit Moïse. » [implante ton peuple Ex 15.17.
— saint lieu : désignation du temple de Jérusalem et, par extension, de Jérusalem et même de toute la Judée.]

30 Les prêtres exécutaient des hymnes. 31 Quand les matières du sacrifice furent consumées, Néhémie ordonna aussi de verser le reste du liquide sur de grandes pierres. 32 Cela fait, une flamme s'alluma qui fut absorbée par la lumière rayonnée par l'autel en face. 33 Lorsque l'événement eut été divulgué et qu'on eut raconté au roi des Perses qu'à l'endroit où les prêtres déportés avaient caché le feu, un liquide avait paru avec lequel Néhémie et ses compagnons avaient sanctifié les matières du sacrifice, 34 le roi fit enclore cet endroit et le rendit sacré après avoir vérifié l'événement. 35 A ceux auxquels le roi le concédait, il donnait une part des grands revenus qu'il en retirait. 36 Néhémie et son entourage appelèrent ce liquide nephtar, ce qu'on traduit par purification, mais le commun le nomme naphte. [Les propriétés du naphte, ou pétrole brut, étaient connues depuis longtemps ; l'auteur de ce récit sait également qu'il y avait un culte du feu chez les Perses (voir v. 34).]

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