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Vigouroux – Siracide 24

Eloge de la sagesse ; son origine, sa puissance, son éternité. Israël est devenu le lieu de sa demeure. Progrès qu’elle a faits dans le monde. Biens dont elle est la source. Sa profondeur. Merveilles qu’elle opère dans le monde.

24 La sagesse se louera elle-même ; elle s’honorera en Dieu, et se glorifiera au milieu de son peuple. [24 Dans ce chapitre, l’écrivain sacré représente la sagesse comme une personne qui fait son propre éloge, de même que dans les Proverbes (voir Proverbes, chapitres 8 et 10) ; et par la sagesse, il entend quelquefois la sagesse incréée et personnelle en Dieu, quelquefois la sagesse créée, qui est communiquée aux hommes.][24.1 Son âme ; c’est-à-dire soi, elle-même.]2 Elle ouvrira sa bouche dans les assemblées du Très-Haut, et elle se glorifiera devant ses armées (en présence de sa puissance). [24.2 Les assemblées du Très-Haut ; les assemblées, les réunions des fidèles. ― De sa puissance (virtutis illius) ; de sa majesté ; ou, selon d’autres, de son armée céleste. Le mot virtus s’emploie souvent, en effet, dans l’Ecriture pour armée.]3 Elle sera exaltée au milieu de son peuple, et admirée dans l’assemblée (entière, note) sainte. [24.3 L’assemblée entière sainte ; l’assemblée de tous les saints ; littéralement la plénitude, l’intégrité sainte.]4 Elle recevra des louanges parmi la multitude des élus, et sera bénie des bénis de Dieu. Elle dira : 5 Je suis sortie de la bouche du Très-Haut ; je suis née avant toute créature. 6 C’est moi qui ai fait lever dans le ciel une lumière inextinguible, et qui ai couvert toute la terre comme une nuée (un nuage). 7 J’ai habité sur les lieux les plus élevés, et mon trône était sur (dans) une colonne de nuée. 8 J’ai fait seule le tour du ciel, j’ai pénétré la profondeur de l’abîme, j’ai marché sur les flots de la mer, 9 et j’ai parcouru toute la terre. Sur (et chez) tous les peuples 10 et sur toutes les nations j’ai exercé l’empire (eu le premier rang). 11 J’ai foulé aux pieds par ma puissance les cœurs de (tous le)s grands et des petits, et parmi tous ces peuples (en toutes ces choses) j’ai cherché un lieu de repos, et une demeure dans l’héritage du Seigneur (que je demeurerai). 12 Alors le Créateur de l’univers m’a parlé et m’a donné ses ordres, et celui qui m’a créée a reposé dans ma tente (mon tabernacle). 13 Et il m’a dit : Habite dans Jacob, qu’Israël soit ton héritage, et prends racine parmi les élus. 14 J’ai été créée dès le commencement et avant les siècles, et je ne cesserai pas d’être dans la suite des âges ; et j’ai exercé devant lui mon ministère dans la maison sainte. [24.14 Voir Proverbes, 8, 22. ― Dans l’habitation sainte, etc. La sagesse éternelle présidait au ministère sacré au milieu d’Israël ; et dans la plénitude des temps, s’étant incarnée, elle a exercé son ministère au milieu de ce même peuple.]15 J’ai été ainsi affermie dans Sion ; j’ai trouvé mon repos dans la cité sainte, et ma puissance est (établie) dans Jérusalem. 16 J’ai pris racine au milieu du peuple glorifié (honoré), dont l’héritage est le partage de mon Dieu, et j’ai établi ma demeure dans l’assemblée (entière) des saints. [24.16 Dans le peuple, etc. Voir Ecclésiastique, 17, 14-15.]17 Je me suis élevée comme le (un) cèdre du Liban, et comme le (un) cyprès de la montagne de Sion. 18 Je me suis élevée comme le (un) palmier de Cadès, et comme les plants de rosiers de Jéricho. [24.18 A Cadès. Voir Nombres, note 20.1. Plusieurs textes grecs portent Engaddi, ville située à l’ouest de la mer Morte, dans le désert de Juda, et c’est probablement le nom que portait le texte original. ― Des rosiers à Jéricho. Il n’est pas question de la plante connue sous le nom de rose de Jéricho et qui se rouvre, quand on la plonge dans l’eau. Il s’agit d’une plante dont on ne saurait déterminer la nature, car le rosier proprement dit n’est pas nommé dans l’Ancien Testament.]19 Je me suis élevée comme un bel olivier dans la campagne, et comme le (un) platane au bord des eaux sur le chemin (, dans les places publiques). [24.19 Le platane atteint en Orient des proportions colossales.]20 J’ai répandu mon parfum comme la cannelle (cinnamome) et le baume le plus précieux, et une odeur exquise comme la myrrhe de choix. [24.20 Le cinnamome ; la cannelle. ― Le baume jouissait d’une réputation extraordinaire. Celui de Judée était le plus célèbre. L’arbre qui le produisait en a complètement disparu.]21 J’ai parfumé ma demeure comme le storax, le galbanum, l’onyx, la myrrhe (le stacté), comme la goutte d’encens tombée d’elle-même (et comme le Liban qui sort sans incision, note), et mon odeur est comme celle d’un baume sans mélange. [24.21 Le stacté ; ainsi porte le texte grec ; littéralement goutte (gutta) c’est-à-dire larme ; se dit du suc qui coule de plusieurs plantes, soit naturellement, soit quand on y fait une incision. ― Le Liban ; c’est-à-dire l’oliban.]22 J’ai étendu mes branches (rameaux) comme le térébinthe, et mes rameaux sont des rameaux d’honneur et de grâce. [24.22 Comme un térébinthe. Le térébinthe est un des arbres les plus grands et les plus beaux de Palestine.]23 Comme la vigne j’ai poussé des fleurs d’une agréable odeur (suave), et mes fleurs donnent des fruits de gloire (honneur) et d’abondance. [24.23 De richesse ; ou d’abondance.]24 Je suis la mère du bel (pur) amour, de la crainte, de la science et de la sainte espérance. 25 En moi est toute la grâce de la voie et de la vérité ; en moi est toute l’espérance de la vie et de la vertu. 26 Venez à moi, vous tous qui me désirez (avec ardeur), et rassasiez-vous de mes fruits ; 27 car mon esprit est plus doux que le miel, et mon héritage plus suave que (l’emporte sur) le rayon de miel (le miel et le rayon, note). [24.27 Le miel et le rayon ; pour le rayon de miel ; figure grammaticale dont la Bible fournit un certain nombre d’exemples.]28 Ma mémoire passera (vivra) dans la suite des siècles. 29 Ceux qui me mangent auront encore faim, et ceux qui me boivent auront encore soif. [24.29 Voir Jean, 6, 35. ― Ceux qui me mangent, etc. La sagesse, considérée comme nourriture, quelque succulente, quelque solide qu’elle soit, loin de fatiguer l’estomac, laisse toujours un goût et un appétit nouveaux.]30 Celui qui m’écoute ne sera pas confondu, et ceux qui agissent par moi ne pécheront pas. 31 Ceux qui me mettent en lumière (m’éclaircissent, note) auront la vie éternelle. [24.31 Qui m’éclaircissent ; qui me font connaître, qui m’enseignent aux autres. Comparer à Daniel, 12, 3.]32 Tout cela est le livre de vie, l’alliance du Très-Haut, et la connaissance de la vérité. 33 Moïse (nous) a donné la loi avec les préceptes de la justice, l’héritage de la maison de Jacob et les promesses faites à Israël. 34 Le Seigneur (Dieu) a promis à David son serviteur de faire sortir de lui le (un) roi très puissant, qui doit être éternellement assis sur un trône de gloire (d’honneur). [24.34 Un roi très puissant ; Salomon ; mais, dans un sens plus relevé, Jésus-Christ, dont Salomon était la figure. Jésus-Christ, né de David selon la chair, dont le règne est éternel et la sagesse infinie.]35 C’est lui qui répand la sagesse comme le Phison répand ses eaux, et comme le Tigre au temps des fruits nouveaux. [24.35-36 Le Phison, le Tigre, l’Euphrate, fleuves du paradis terrestre. Le Tigre arrosait Ninive, l’Euphrate, Babylone. Ces deux derniers fleuves grossissent considérablement aux jours des nouveaux fruits, c’est-à-dire au mois de mars.][24.35 Voir Genèse, 2, 11.]36 C’est lui qui fait déborder (répand) l’intelligence comme l’Euphrate, et qui la multiplie comme le Jourdain au temps de la moisson. [24.36 Le Jourdain grossit aussi au temps de la moisson, voir Josué, 3, 15, parce que c’est alors que les neiges de l’Hermon fondent en plus grande abondance.]37 C’est (lui) qui fait jaillir la science comme la lumière, et qui est là (fournit ses eaux) comme le Géhon au jour de la vendange. [24.37 Comme la lumière. Le texte original devait porter Yehor, mot par lequel la langue hébraïque désignait le Nil. Le contexte réclame ici un nom de fleuve. L’inondation du Nil se produit au jour de la vendange, en septembre et octobre. ― Le Géhon est le quatrième fleuve du paradis terrestre.]38 C’est lui qui le premier a connu parfaitement la sagesse, et elle est impénétrable aux âmes faibles. [24.38 L’a parfaitement connue (c’est-à-dire la sagesse), littéralement a perfectionné de la connaître. Voir sur cet hébraïsme le 2° à la fin des Observations préliminaires des Psaumes.]39 Car ses pensées sont plus vastes (abondantes) que la mer, et ses conseils plus profonds que le grand abîme. [24.39 Plus que. C’est par un hébraïsme encore que l’a ab de la Vulgate, et l’apo des Septante signifie plus que, ici, comme en bien d’autres passages.]40 Je suis la sagesse qui ai fait couler les fleuves. 41 Je suis comme le chemin par où s’écoule l’eau immense d’un fleuve, comme le canal d’une rivière (d’un fleuve), et comme un aqueduc qui sort du paradis. [24.41 Allusion aux quatre fleuves du paradis terrestre. ― Un aqueduc amenait à Jérusalem les eaux provenant de la Fontaine Scellée. Voir Cantique, 4, 12.]42 J’ai dit : J’arroserai les plantes de mon jardin, et je rassasierai d’eau (j’enivrerai) les fruits de mon parterre. 43 Et voici que mon canal (courant) est devenu un grand fleuve (abondant), et mon fleuve est devenu comme (a approché d’) une mer ; 44 car je ferai briller ma doctrine sur tous comme la lumière du matin, et je la raconterai (jusqu’) au loin. [24.44 Jusqu’au loin (usque ad longinquum) ; expression qui, comme dans le texte grec, peut s’entendre des temps et des lieux.]45 Je pénétrerai toutes les profondeurs de la terre, je visiterai tous ceux qui dorment, et j’éclairerai tous ceux qui espèrent au Seigneur. 46 Je répandrai désormais (encore) ma doctrine comme une prophétie ; je la laisserai à ceux qui cherchent la sagesse, et je ne cesserai pas de leur être présente de race en race (dans leurs générations) jusqu’au siècle saint. 47 Considérez que je n’ai pas travaillé pour moi seul(e, note), mais pour tous ceux qui cherchent la vérité. [24.47 Pour moi seul. C’est l’auteur qui parle ici, comme plus bas, voir Ecclésiastique, 33, 18 ; dans les deux endroits, le texte grec porte seul au masculin.]

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