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Bible de Jérusalem

2 Maccabées 12.17-

La bataille du Karnion.

17 Comme ils s’étaient éloignés à sept cent cinquante stades de là, ils atteignirent le Charax, chez les Juifs appelés Toubiens.f

f Le « pays de Tobie » de 1 M 5.13, c’est-à-dire l’Ammanitide gouvernée par la famille des Tobiades. On y élevait des chevaux, et un corps de cavaliers toubiens s’illustra en Idumée, v. 35. — Le Charax doit être la forteresse ou Birta de l’Ammanitide (l’actuel Araq el Emir), résidence du gouverneur.

18 Quant à Timothée, ils ne le trouvèrent point dans ces parages, car il avait quitté les lieux sans avoir rien fait, mais non sans avoir laissé sur un certain point une très forte garnison.

19 Dosithée et Sosipater, généraux du Maccabée, s’y rendirent et tuèrent les hommes laissés par Timothée dans la forteresse au nombre de plus de dix mille.

20 Maccabée, de son côté, ayant distribué ses troupes en cohortes, nomma ceux qui seraient à leur tête et s’élança contre Timothée, qui avait autour de lui cent vingt mille fantassins et deux mille cinq cents cavaliers. 21 Informé de l’approche de Judas, Timothée envoya tout d’abord les femmes, les enfants et le reste des bagages au lieu dit le Karnion,g car la place était inexpugnable et difficile d’accès à cause des passes étroites de toute la contrée.

g Site du sanctuaire de l’Astarté aux cornes, cf. 1 M 5.43. — Les « passes étroites » doivent être simplement le lit du torrent mentionné en 1 M 5.37 (le Nahr el-Ehreir, affluent du Yarmuk) ; ce n’est que plus au sud que le terrain devient accidenté, mais l’auteur veut souligner les qualités militaires de la cohorte de Judas et l’effet de terreur qu’elle produit.

22 La cohorte de Judas parut la première : l’épouvante s’étant emparée de l’ennemi, ainsi que la crainte que leur inspirait la manifestation de Celui qui voit tout, ils prirent la fuite en tous sens, de telle sorte que souvent ils se blessaient entre eux et se transperçaient de leurs propres épées. 23 Judas les poursuivit avec une vigueur extrême, embrochant ces criminels dont il fit périr jusqu’à trente mille hommes. 24 Timothée, étant tombé lui-même aux mains des gens de Dosithée et de Sosipater, les conjura avec beaucoup d’artifice de le laisser aller sain et sauf, affirmant qu’il avait en son pouvoir des parents et même des frères de beaucoup d’entre eux, à qui il pourrait arriver d’être supprimés. 25 Quand il les eut persuadés par de longs discours qu’il leur restituerait ces hommes sains et saufs en vertu de l’engagement qu’il prenait, ils le relâchèrent pour sauver leurs frères.

26 S’étant rendu au Karnion et à l’Atargatéion,h Judas égorgea vingt-cinq mille hommes.

h Sanctuaire d’Atargatis, la grande déesse syrienne identifiée à l’Astarté locale.

Retour par Éphrôn et Scythopolis.

27 Après leur désastre (et leur perte), il conduisit son armée contre Éphrôn, ville forte où habitait Lysanias.i De robustes jeunes gens, rangés devant les murailles, combattaient avec vigueur, et, à l’intérieur, il y avait des quantités de machines et de projectiles en réserve.

i « où habitait Lysanias » mss lat. (d’autres mss ont « Lysias ») ; « où habitaient des troupes de toutes races » grec, Vulg. ; « où habitaient Lysias et des troupes de toutes races » grec luc., mss lat. et syr. — Même s’il faut préférer la leçon « Lysias », il ne peut s’agir du stratège de Cœlé-Syrie, qui devait résider à Tyr, mais simplement d’un dynaste local. Le nom était courant.

28 Mais, ayant invoqué le Souverain qui brise par sa puissance les forces des ennemis, les Juifs se rendirent maîtres de la ville et couchèrent sur le sol, parmi ceux qui s’y trouvaient, environ vingt-cinq mille hommes.

29 Partis de là, ils foncèrent sur Scythopolis,j à six cents stades de Jérusalem.

j Nom grec de la ville de Bethsân, 1 M 5.52 (Bet-Sheân en hébreu).

30 Mais les Juifs qui s’y étaient fixés, ayant attesté que les Scythopolites avaient eu pour eux de la bienveillance et leur avaient réservé un accueil humain au temps du malheur, 31 Judas et les siens remercièrent ces derniers et les engagèrent à se montrer encore à l’avenir bien disposés pour leur race.
Ils arrivèrent à Jérusalem très peu avant la fête des Semaines.

Campagne contre Gorgias.

32 Après la fête appelée Pentecôte, ils foncèrent contre Gorgias, stratège de l’Idumée. 33 Celui-ci sortit à la tête de trois mille fantassins et quatre cents cavaliers, 34 qui engagèrent une bataille rangée où il arriva qu’un certain nombre de Juifs succombèrent.

35 Le dénommé Dosithée, cavalier du corps des Toubiens, homme vaillant, se rendit maître de la personne de Gorgias et, l’ayant saisi par la chlamyde,k il l’entraînait de force en vue de capturer vivant ce maudit, mais un cavalier thrace, se jetant sur Dosithée, lui trancha l’épaule, et Gorgias s’enfuit à Marisa.

k La pèlerine courte des cavaliers. — « du corps des Toubiens » mss lat., syr. ; « de ceux de Bakénor » grec, Vulg., mais un tel nom propre n’existe pas.

36 Cependant ceux qui se trouvaient avec Esdrias combattaient depuis longtemps et tombaient d’épuisement. Judas supplia le Seigneur de se montrer leur allié et leur guide dans le combat. 37 Entonnant ensuite à pleine voix dans la langue des pères le cri de guerre avec des hymnes,l il mit en déroute les gens de Gorgias.

l Les hymnes, même guerriers, avaient un caractère liturgique et devaient être en hébreu.

Le sacrifice pour les morts.m

38 Judas, ayant ensuite rallié son armée, se rendit à la ville d’Odollamn et, le septième jour de la semaine survenant, ils se purifièrent selon la coutume et célébrèrent le sabbat en ce lieu.

m Même allégé de ses gloses, cf. v. 45, ce texte exprime la conviction que la prière et le sacrifice expiatoire sont efficaces pour la rémission des péchés des défunts. C’est la première attestation de cette croyance. Cependant, un sacrifice comme celui que faisait faire Judas pouvait n’avoir d’autre but que la purification de la communauté, tout entière souillée par le crime de quelques-uns, cf. Jos 7, et il se peut que ce soit l’auteur qui, quarante ans plus tard, ait prêté à son héros sa propre conviction. Quoi qu’il en soit, elle marque une nouvelle et importante étape dans la théologie juive.

n C’est Adullam, ville célèbre du Bas-Pays, Jos 12.15, cf. 1 S 22.1 ; 2 Ch 11.17, etc.

39 Le jour suivant, on vint trouver Judaso (au temps où la nécessité s’en imposait) pour relever les corps de ceux qui avaient succombé et les inhumer avec leurs proches dans le tombeau de leurs pères.

o « on vint trouver Judas » grec luc., Vet. Lat., syr. ; « ceux qui étaient avec Judas vinrent » grec, Vulg.

40 Or ils trouvèrent sous la tunique de chacun des morts des objets consacrés aux idoles de Iamniap et que la Loi interdit aux Juifs. Il fut donc évident pour tous que cela avait été la cause de leur mort.

p C’est-à-dire des amulettes ou des objets offerts aux divinités païennes, et qui auraient dû être brûlés, cf. Dt 7.25s.

41 Tous donc, ayant béni la conduite du Seigneur, juge équitable qui rend manifestes les choses cachées, 42 se mirent en prière pour demander que le péché commis fût entièrement pardonné, puis le valeureux Judas exhorta la troupe à se garder pure de tout péché, ayant sous les yeux ce qui était arrivé à cause de la faute de ceux qui étaient tombés.

43 Puis, ayant fait une collecte d’environ deux mille drachmes, il l’envoya à Jérusalem afin qu’on offrît un sacrifice pour le péché, agissant fort bien et noblement d’après le concept de la résurrection. 44 Car, s’il n’avait pas espéré que les soldats tombés dussent ressusciter, il était superflu et sot de prier pour les morts, 45 et s’il envisageait qu’une très belle récompense est réservée à ceux qui s’endorment dans la piété, c’était là une pensée sainte et pieuse.q Voilà pourquoi il fit faire ce sacrifice expiatoire pour les morts, afin qu’ils fussent délivrés de leur péché.

q Le texte actuel, tel qu’il nous est transmis par le grec et la plupart des versions, représente une harmonisation du texte primitif avec les deux gloses qui l’ont surchargé (l’une sadducéenne, cf. Mt 22.23, l’autre pharisienne). Ce texte nous est conservé dans le principal ms de la Vet. Lat. « parce qu’il espérait que ceux qui étaient tombés ressusciteraient (il est superflu et vain de prier pour les morts), considérant que pour ceux qui se sont endormis avec piété est réservée une très belle récompense (sainte et salutaire pensée). »