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Bible de Jérusalem

Actes 9.10-

10 Il y avait à Damas un disciple du nom d’Ananie. Le Seigneur l’appela dans une vision : « Ananie » — « Me voici, Seigneur », répondit-il. — 11 « Pars, reprit le Seigneur, va dans la rue Droite et demande, dans la maison de Judas, un nommé Saul de Tarse. Car le voilà qui prie 12 et qui a vuo un homme du nom d’Ananie entrer et lui imposer les mains pour lui rendre la vue. »

o Var. « et qui dans une vision a vu ». Deux révélations parallèles, à Paul et à Ananie ; comp. 10.11, 30s.

13 Ananie répondit : « Seigneur, j’ai entendu beaucoup de monde parler de cet homme et dire tout le mal qu’il a fait à tes saintsp à Jérusalem.

p Dieu étant le Saint par excellence, Isa 6.3, ceux qui se consacrent à son service sont appelés « saints », Lv 17.1. Appliqué d’abord au peuple d’Israël, Ex 19.6, et particulièrement à la communauté des temps messianiques, Dn 7.18, ce terme vaut éminemment pour les chrétiens qui sont le nouveau « peuple saint », 1 P 2.5, 9, appelés, Rm 1.7 ; 1 Co 1.2 ; Ep 1.4 ; 2 Tm 1.9 ; Mt 3.1, par la consécration du baptême, Ep 5.26s, à une vie pure, 1 Co 7.34 ; Ep 1.4 ; 5.3 ; Col 1.22, qui les rend saints comme Dieu, 1 P 1.15s, cf. 1 Jn 3.3, et comme Jésus, « le Saint de Dieu », Mc 1.24, car la sainteté est l’œuvre de Dieu, 1 Th 4.3 ; 5.23. Aussi est-il devenu dans la communauté primitive la désignation ordinaire des chrétiens, d’abord en Palestine, 9.13, 32, 41 ; Rm 15.26, 31 ; 1 Co 16.1, 15 ; 2 Co 8.4 ; 9.1, 12, puis dans toutes les Églises, Rm 8.27 ; 12.13 ; 16.2, 15 ; 1 Co 6.1s ; 14.33 ; 2 Co 13.12 ; Ep 1.15 ; 3.18 ; 4.12 ; 6.18 ; Ph 4.21s ; Col 1.4 ; 1 Tm 5.10 ; Phm 5, 7 ; He 6.10 ; 13.24 ; Jude 3 (et dans les adresses des épîtres, 2 Co 1.1, etc.). En Ap 5.8 ; 8.3, etc., le terme désigne les martyrs. Il se peut qu’il soit parfois restreint aux chefs, « apôtres et prophètes », Ep 3.5 et Col 1.26 ; Ep 3.8 ; 4.12 ; Ap 18.20. Enfin, comme dans l’AT, Jb 5.1, le terme peut s’appliquer aux anges, Mc 8.38 ; Lc 9.26 ; 10.22 ; Jude 14 ; Ap 14.10, et il est malaisé de savoir si certains textes parlent de ceux-ci ou des hommes parvenus à la gloire, Ep 1.18 ; Col 1.12 ; 1 Th 3.13 ; 2 Th 1.10.

14 Et il est ici avec pleins pouvoirs des grands prêtres pour enchaîner tous ceux qui invoquent ton nom. » 15 Mais le Seigneur lui dit : « Va, car cet homme m’est un instrument de choix pour porter mon nom devant les nations païennes, les rois et les Israélites.q

q Cf. Jr 1.10. La mission de Paul concerne « tous les hommes », 22.15, les nations païennes, 26.17, ce qui correspond à ce que Paul écrit lui-même en Ga 1.16, cf. Rm 1.5 ; 11.13 ; 15.16-18 ; Ga 2.2, 8, 9 ; Ep 3.8 ; Col 1.27 ; 1 Tm 2.7. Sur les « rois », cf. 26.2.

16 Moi-même, en effet, je lui montrerai tout ce qu’il lui faudra souffrir pour mon nom. » 17 Alors Ananie partit, entra dans la maison, imposa les mains à Saul et lui dit : « Saoul, mon frère, celui qui m’envoie, c’est le Seigneur, ce Jésus qui t’est apparu sur le chemin par où tu venais ; et c’est afin que tu recouvres la vue et sois rempli de l’Esprit Saint. »r

r Expression typique de saint Luc, Lc 1.15, 41, 67 ; 2.4 ; 4.8, 31 ; 7.55 ; Lc 13.9. Cf. Lc 4.1.

18 Aussitôt il lui tomba des yeux comme des écailles, et il recouvra la vue. Sur-le-champ il fut baptisé ; 19 puis il prit de la nourriture, et les forces lui revinrent.
Il passa quelques jours avec les disciples à Damas, 20 et aussitôt il se mit à prêcher Jésus dans les synagogues, proclamant qu’il est le Fils de Dieu.s

s « Fils de Dieu » correspond à « Christ » du v. 22. Cf. Mt 4.3. Le titre de « Fils de Dieu » ne reparaît dans les Actes qu’en 13.33. Il caractérise la christologie paulinienne, Ga 1.16 ; 2.20 ; 4.4, 6 ; Rm 1.3 — 4.9 ; 1 Th 1.10 ; cf. Rm 9.5.

21 Tous ceux qui l’entendaient étaient stupéfaits et disaient : « N’est-ce pas là celui qui, à Jérusalem, s’acharnait sur ceux qui invoquent ce nom, et n’est-il pas venu ici tout exprès pour les amener enchaînés aux grands prêtres ? » 22 Mais Saul gagnait toujours en force et confondait les Juifs de Damas en démontrant que Jésus est bien le Christ.

Prédication de Saul à Damas.

23 Au bout d’un certain temps,t les Juifs se concertèrent pour le faire périr.

t Ga 1.17-18 précise trois ans ; pendant ce temps, Paul a fait un séjour en Arabie. Luc simplifie les faits.

24 Mais Saul eut vent de leur complot. On gardait même les portes de la ville jour et nuit, afin de le faire périr. 25 Alors les disciplesu le prirent de nuit et le descendirent dans une corbeille le long de la muraille.

u Var. « ses disciples ».

Visite de Saul à Jérusalem.v

26 Arrivé à Jérusalem, il essayait de se joindre aux disciples, mais tous en avaient peur, ne croyant pas qu’il fût vraiment disciple.

v Paul raconte cette visite, Ga 1.18-19. Il remarque qu’à ce moment les Églises de Judée ne le connaissaient pas encore de vue, mais ne dit rien de l’intervention de Barnabé. Il déclare n’avoir vu, en fait d’apôtres, que Pierre, et aussi Jacques, le frère du Seigneur ; schématise en parlant des apôtres en général.

27 Alors Barnabé le prit avec lui, l’amena aux apôtres et leur raconta comment, sur le chemin, Saul avait vu le Seigneur, qui lui avait parlé, et avec quelle assurance il avait prêché à Damas au nom de Jésus. 28 Dès lors il allait et venait avec eux dans Jérusalem, prêchant avec assurance au nom du Seigneur. 29 Il s’adressait aussi aux Hellénistesw et discutait avec eux ; mais ceux-ci machinaient sa perte.

w Var « aux Grecs » (c’est-à-dire aux païens) ; même var. en 11.20. — De même que, dans l’Église, les Hellénistes (cf. 6.1) sont les plus entreprenants, de même, dans le judaïsme, ce sont eux qui réagissent le plus violemment contre la propagande chrétienne, 6.9s ; 7.58 ; 9.1 ; 21.27 ; 24.19.

30 L’ayant su, les frères le ramenèrent à Césarée, d’où ils le firent partir pour Tarse.x

x Où Barnabé ira le chercher, 11.25. Comparer à Ga 1.18-21 et à 22.17-21.

Période de tranquillité.

31 Cependant les Églisesy jouissaient de la paix dans toute la Judée, la Galilée et la Samarie ; elles s’édifiaient et vivaient dans la crainte du Seigneur, et elles étaient comblées de la consolation du Saint Esprit.z

y « les Églises » texte occ. et antiochien ; « l’Église » texte alex.

z C’est la joie de la foi, 2.46. D’autres traduisent « elles croissaient par la consolation (ou par l’assistance ; ou grâce aux encouragements) du Saint-Esprit ».

Pierre guérit un paralytique à Lydda.

32 Pierre, qui passait partout, descendit également chez les saints qui habitaient Lydda. 33 Il y trouva un homme du nom d’Énée, qui gisait sur un grabat depuis huit ans ; c’était un paralytique. 34 Pierre lui dit : « Énée, Jésus Christ te guérit. Lève-toi et fais toi-même ton lit. » Et il se leva aussitôt.a

a Miracles analogues Lc 5.18-26 ; 13.11-13 ; Jn 5.1-14 ; 3.1-10 ; 14.8-10.

35 Tous les habitants de Lydda et de la plaine de Saron le virent, et ils se convertirent au Seigneur.

Pierre ressuscite une femme à Joppé.

36 Il y avait à Joppé parmi les disciples une femme du nom de Tabitha, en grec Dorcas.b Elle était riche des bonnes œuvres et des aumônes qu’elle faisait.

b Littéralement « ce qui se traduit Dorcas » le nom signifie « gazelle ».

37 Or il se fit qu’elle tomba malade en ces jours-là et mourut. Après l’avoir lavée, on la déposa dans la chambre haute. 38 Comme Lydda n’est pas loin de Joppé, les disciples, apprenant que Pierre s’y trouvait, lui dépêchèrent deux hommes pour lui adresser cette prière : « Viens chez nous sans tarder. »

39 Pierre partit tout de suite avec eux. Aussitôt arrivé, on le fit monter à la chambre haute, où toutes les veuves en pleurs s’empressèrent autour de lui, lui montrant les tuniques et les manteaux que faisait Dorcas lorsqu’elle était avec elles. 40 Pierre mit tout le monde dehors, puis, à genoux, pria. Se tournant ensuite vers le corps, il dit : « Tabitha, lève-toi. » Elle ouvrit les yeux et, voyant Pierre, se mit sur son séant. 41 Lui donnant la main, Pierre la fit lever. Appelant alors les saints et les veuves, il la leur présenta vivante. 42 Tout Joppé sut la chose, et beaucoup crurent au Seigneur.

43 Pierre demeura un certain temps à Joppé chez un corroyeur appelé Simon.

Actes 10.3-

3 Il eut une vision. Vers la neuvième heure du jour, l’Ange de Dieu — il le voyait clairement — entrait chez lui et l’appelait : « Corneille ! » 4 Il le regarda et fut pris de frayeur. « Qu’y a-t-il, Seigneur ? » demanda-t-il. — « Tes prières et tes aumônes, lui répondit l’ange, sont montées devant Dieu, et il s’est souvenu de toi.e

e Littéralement « sont montées en mémorial devant Dieu ». L’expression évoque le sacrifice de « mémorial », cf. Lv 2.2, 9, 16, auquel Tb 12.12 assimile la prière.

5 Maintenant donc, envoie des hommes à Joppé et fais venir Simon, surnommé Pierre. 6 Il loge chez un certain Simon, un corroyeur, dont la maison se trouve au bord de la mer. » 7 Quand l’ange qui lui parlait fut parti, Corneille appela deux de ses domestiques ainsi qu’un soldat pieux, de ceux qui lui étaient attachés, 8 et après leur avoir tout expliqué, il les envoya à Joppé.

9 Le lendemain, tandis qu’ils faisaient route et approchaient de la ville, Pierre monta sur la terrasse, vers la sixième heure, pour prier. 10 Il sentit la faim et voulut prendre quelque chose. Or, pendant qu’on lui préparait à manger, il tomba en extase. 11 Il voit le ciel ouvert et un objet, semblable à une grande nappe nouée aux quatre coins, en descendre vers la terre.f

f On a suivi le texte occ.

12 Et dedans il y avait tous les quadrupèdes et les reptiles, et tous les oiseaux du ciel. 13 Une voix lui dit alors : « Allons, Pierre, immole et mange. » 14 Mais Pierre répondit : « Oh non ! Seigneur, car je n’ai jamais rien mangé de souillé ni d’impur ! » 15 De nouveau, une seconde fois, la voix lui parle : « Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé. »g

g Pierre est invité à s’affranchir de ses scrupules touchant la pureté légale, 11.9. Cf. Mt 15.1-20 ; Rm 14.14, 17. L’application est faite en 15.9 par la foi, Dieu a purifié le cœur des païens, bien que leur corps, n’ayant pas été circoncis, reste rituellement impur. Conséquence pratique Pierre ne doit plus craindre de frayer avec des incirconcis, 10.27-28.

16 Cela se répéta par trois fois, et aussitôt l’objet fut remporté au ciel.

17 Tout perplexe, Pierre était à se demander en lui-même ce que pouvait bien signifier la vision qu’il venait d’avoir, quand justement les hommes envoyés par Corneille, s’étant enquis de la maison de Simon, se présentèrent au portail. 18 Ils appelèrent et s’informèrent si c’était bien là que logeait Simon surnommé Pierre. 19 Comme Pierre était toujours à réfléchir sur sa vision, l’Esprith lui dit : « Voilà des hommesi qui te cherchent.

h Le rôle de l’Esprit est parallèle à celui de l’Ange du Seigneur, cf. 8.26, 29.

i Var. « trois hommes », cf. 11.11.

20 Va donc, descends et pars avec eux sans hésiter, car c’est moi qui les ai envoyés. » 21 Pierre descendit auprès de ces hommes et leur dit : « Me voici. Je suis celui que vous cherchez. Quel est le motif qui vous amène ? » 22 Ils répondirent : « Le centurion Corneille, homme juste et craignant Dieu, à qui toute la nation juive rend bon témoignage, a reçu d’un ange saint l’avis de te faire venir chez lui et d’entendre les paroles que tu as à dire. » 23 Pierre les fit alors entrer et leur donna l’hospitalité.
Le lendemain, il se mit en route et partit avec eux ; quelques-uns des frères de Joppé l’accompagnèrent. 24 Il entra dans Césarée le jour suivant. Corneille les attendait et avait réuni ses parents et ses amis intimes. 25 Au moment où Pierre entrait, Corneille vint à sa rencontre et, tombant à ses pieds, se prosterna.

26 Mais Pierre le releva en disant : « Relève-toi. Je ne suis qu’un homme, moi aussi. » 27 Et tout en s’entretenant avec lui, il entra. Il trouve alors les gens qui s’étaient réunis en grand nombre, 28 et il leur dit : « Vous le savez, il est absolument interdit à un Juif de frayer avec un étranger ou d’entrer chez lui. Mais Dieu vient de me montrer, à moi, qu’il ne faut appeler aucun homme souillé ou impur. 29 Aussi n’ai-je fait aucune difficulté pour me rendre à votre appel. Je vous le demande donc, pour quelle raison m’avez-vous fait venir ? » 30 Corneille répondit : « Il y a maintenant trois jours, j’étais en prièrej chez moi à la neuvième heure et voici qu’un homme surgit devant moi, en vêtements resplendissants.

j Var. « je jeûnais et j’étais en prière ».

31 Il me dit : « Corneille, ta prière a été exaucée, et de tes aumônes on s’est souvenu auprès de Dieu.k

k Cette tournure impersonnelle, respectueuse de la majesté divine, évoque en même temps le ministère des anges ; cf. Mt 18.11, 14 ; Ap 5.8 ; 8.3 ; Tb 12.12.

32 Envoie donc quérir à Joppé Simon, surnommé Pierre. Il loge dans la maison du corroyeur Simon, au bord de la mer. » 33 Aussitôt je t’ai donc fait chercher, et toi, tu as bien fait de venir. Nous voici donc tous devant toi pour entendre ce qui t’a été prescrit par Dieu. »

Discours de Pierre chez Corneille.

34 Alors Pierre prit la parole et dit : « Je constate en vérité que Dieu ne fait pas acception des personnes, 35 mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique la justice lui est agréable.l

l Terminologie cultuelle (cf. v. 4). Est agréable à Dieu un sacrifice irréprochable ou celui qui l’offre, Lv 1.3 ; 19.5 ; 22.19-27. Isaïe (Isa 56.7) avait annoncé qu’à la fin des temps les sacrifices des païens seraient agréables à Yahvé ; voir Ml 1.10-11. Cf. Rm 15.16 ; Ph 4.18 ; 1 P 2.5.

36 Telle est la parole qu’il a envoyée aux Israélites, leur annonçant la bonne nouvelle de la paix par Jésus Christ : c’est lui le Seigneur de tous.

37 Vous savez ce qui s’est passé dans toute la Judée :m Jésus de Nazareth, ses débutsn en Galilée, après le baptême proclamé par Jean ;

m Les vv. 37-42 forment un résumé de l’histoire évangélique, cf. 1.21-22 ; 2.22, soulignant les points que Luc lui-même met en relief dans son évangile.

n Var. « le début ».

38 comment Dieu l’a oint de l’Esprit Saint et de puissance, lui qui a passé en faisant le bien et en guérissant tous ceux qui étaient tombés au pouvoir du diable ; car Dieu était avec lui. 39 Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a fait dans le pays des Juifs et à Jérusalem. Lui qu’ils sont allés jusqu’à faire mourir en le suspendant au gibet, 40 Dieu l’a ressuscité le troisième jouro et lui a donné de se manifester,

o « Ressuscité le troisième jour » la formule classique de la prédication et de la foi chrétiennes. Elle apparaît déjà dans le Credo embryonnaire de 1 Co 15.4, avec la précision « selon les Écritures ». La formule fait écho à Jon 2.1 (cf. Mt 12.40) ; voir aussi Os 6.2. On la retrouve dans Mt 16.21 ; 17.23 ; 20.19 ; 27.64 ; Lc 9.22 ; 18.33 ; 24.7, 46.

41 non à tout le peuple, mais aux témoins que Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et bu avec luip après sa résurrection d’entre les morts ;

p Add. occ. « et avons vécu familièrement en sa compagnie pendant quarante jours après sa résurrection d’entre les morts ».

42 et il nous a enjoint de proclamer au Peupleq et d’attester qu’il est, lui, le juge établi par Dieu pour les vivants et les morts.r

q Le « Peuple » par excellence, c’est le peuple d’Israël, 10.2 ; 21.28.

r Les vivants ceux qui seront en vie au moment de la parousie ; les morts ceux qui, déjà morts, ressusciteront alors pour le jugement. Voir 1 Th 4.13—5.10. — En ressuscitant Jésus, Dieu l’a établi dans sa dignité de souverain Juge, 17.31 ; Jn 5.22, 27 ; 2 Tm 4.1 ; 1 P 4.5 ; l’annonce de la Résurrection est donc en même temps pour les hommes une invitation au repentir, cf. 17.30-31.

43 C’est de lui que tous les prophètes rendent ce témoignage que quiconque croit en lui recevra, par son nom, la rémission de ses péchés. »

Le baptême des premiers païens.

44 Pierre parlait encore quand l’Esprit Saint tombas sur tous ceux qui écoutaient la parole.

s C’est « la Pentecôte des païens », analogue à la première Pentecôte, ainsi que Pierre le constate, v. 47 ; 11.15 ; 15.8.

45 Et tous les croyants circoncis qui étaient venus avec Pierre furent stupéfaits de voir que le don du Saint Esprit avait été répandu aussi sur les païens. 46 Ils les entendaient en effet parler en langues et magnifier Dieu. Alors Pierre déclara : 47 « Peut-on refuser l’eau du baptême à ceux qui ont reçu l’Esprit Saint aussi bien que nous ? » 48 Et il ordonnat de les baptiser au nom de Jésus Christ. Alors ils le prièrent de rester quelques jours avec eux.u

t Les apôtres n’administraient généralement pas le baptême eux-mêmes, cf. 19.5 ; 1 Co 1.14, 17.

u D’après 11.2-3 (cf. 10.28), c’est ce séjour de Pierre chez des incirconcis, plus encore que l’autorisation de les baptiser, qui a semblé illégitime aux « Hébreux » de Jérusalem. Le même problème donna occasion à l’affaire d’Antioche, Ga 2.11s.

Actes 11-

À Jérusalem, Pierre justifie sa conduite.

11 Cependant les apôtres et les frères de Judée apprirent que les païens, eux aussi, avaient accueilli la parole de Dieu. 2 Quand donc Pierre monta à Jérusalem, les circoncis le prirent à partie :v

v Texte occ. « Pierre donc, au bout d’un temps assez long, voulut se mettre en route pour Jérusalem. Après avoir parlé aux frères et les avoir affermis, il s’en alla, faisant par les campagnes d’abondants discours et instruisant les gens. Lorsqu’il arriva chez eux et leur annonça la grâce accordée par Dieu, les frères circoncis le prirent à partie. »

3 « Pourquoi, lui demandèrent-ils, es-tu entré chez des incirconcis et as-tu mangé avec eux ? » 4 Pierre alors se mit à leur exposer toute l’affaire point par point : 5 « J’étais, dit-il, en prière dans la ville de Joppé quand, en extase, j’eus une vision : du ciel un objet descendait, semblable à une grande nappe qui s’abaissait, tenue aux quatre coins, et elle vint jusqu’à moi. 6 Je regardais, ne la quittant pas des yeux, et j’y vis les quadrupèdes de la terre, les bêtes sauvages, les reptiles ainsi que les oiseaux du ciel. 7 J’entendis alors une voix me dire : « Allons, Pierre, immole et mange.’’ 8 Je répondis : « Oh non ! Seigneur, car rien de souillé ni d’impur n’entra jamais dans ma bouche !’’ 9 Une seconde fois, la voix reprit du ciel : « Ce que Dieu a purifié, toi, ne le dis pas souillé.’’ 10 Cela se répéta par trois fois, puis tout fut de nouveau retiré dans le ciel.

11 « Juste au même moment, trois hommes se présentèrent devant la maison où nous étions ; ils m’étaient envoyés de Césarée. 12 L’Esprit me dit de les accompagner sans scrupule. Les six frères que voici vinrent également avec moi et nous entrâmes chez l’homme en question. 13 Il nous raconta comment il avait vu un ange se présenter chez lui et lui dire : « Envoie quérir à Joppé Simon, surnommé Pierre. 14 Il te dira des paroles qui t’apporteront le salut, à toi et à toute ta famille.’’

15 « Or, à peine avais-je commencé à parler que l’Esprit Saint tomba sur eux, tout comme sur nous au début. 16 Je me suis alors rappelé cette parole du Seigneur : Jean, disait-il, a baptisé avec de l’eau, mais vous, vous serez baptisés dans l’Esprit Saint. 17 Si donc Dieuw leur a accordé le même don qu’à nous, pour avoir cru au Seigneur Jésus Christ, qui étais-je, moi, pour faire obstacle à Dieu. »x

w « Dieu » omis par occ. (c’est le Christ qui donne l’Esprit).

x Pierre s’explique sur le baptême accordé à un païen ; il ne répond pas au grief d’avoir accepté l’hospitalité d’un incirconcis, cf. v. 3, voir 10.1. D’après Luc, c’est Pierre, qui, au moins idéalement, a le premier agrégé des païens à l’Église, cela quelle que soit la portée du baptême de l’eunuque éthiopien, 8.26-39, et quelle que soit la chronologie de l’évangélisation d’Antioche, dont le récit est réservé pour la suite vv. 19s. Dans cette perspective, le Concile de Jérusalem, 15.5-29, apparaîtra un peu comme la suite ou la reprise des délibérations de 11.1-18.

18 Ces paroles les apaisèrent, et ils glorifièrent Dieu en disant : « Ainsi donc aux païens aussi Dieu a donné la repentance qui conduit à la vie ! »

Fondation de l’Église d’Antioche.

19 Ceux-là doncy qui avaient été dispersés lors de la tribulation survenue à l’occasion d’Étienne poussèrent jusqu’en Phénicie, à Chypre et à Antioche,z mais sans prêcher la parole à d’autres qu’aux Juifs.

y Le v. 19, reprenant 8.1, 4, introduit l’épisode de la fondation de l’Église d’Antioche comme la suite directe du martyre d’Étienne, dont il a été séparé par l’insertion des Actes de Philippe, 8.5-40, et de Pierre, 9.31—11.18. Le récit suppose toutefois l’histoire de la vocation de Saul, 9.1-30, elle-même liée au martyre d’Étienne.

z Antioche sur l’Oronte, capitale de la province romaine de Syrie, troisième ville de l’empire après Rome et Alexandrie.

20 Il y avait toutefois parmi eux quelques Chypriotes et Cyrénéens qui, venus à Antioche, s’adressaient aussi aux Grecs,a leur annonçant la Bonne Nouvelle du Seigneur Jésus.b

a Var. « Hellénistes », cf. 9.29. — « Grecs », par opposition à « Juifs », v. 19, désigne les incirconcis en général.

b Plutôt que le titre de « Christ », qui répondait à l’attente particulière des Juifs, la prédication aux païens donne à Jésus le titre de « Seigneur », cf. 25.26. Jésus est « Seigneur » devenu, par son exaltation à la droite de Dieu, le Souverain du Royaume de la fin des temps, cf. 2.21, 36 ; 7.59-60 ; 10.36 ; 1 Th 4.15-17 ; 2 Th 1.7-12 ; Rm 10.9-13.

21 La main du Seigneur les secondait, et grand fut le nombre de ceux qui devinrent croyants et se convertirent au Seigneur.

22 La nouvelle en vint aux oreilles de l’Église de Jérusalem,c et l’on envoya Barnabé à Antioche.

c Cette Église use d’un droit de regard sur les autres Églises, cf. 8.14 ; 11.1, et voir Ga 2.2.

23 Lorsqu’il arriva et qu’il vit la grâce accordée par Dieu, il s’en réjouit et les encouragead tous à demeurer, d’un cœur ferme, fidèles au Seigneur ;e

d Jeu de mots, semble-t-il, sur le nom de Barnabé, « fils de l’encouragement », 4.36.

e Var. « dans le Seigneur ».

24 car c’était un homme de bien, rempli de l’Esprit Saint et de foi. Une foule considérable s’adjoignit ainsi au Seigneur.

25 Barnabé partit alors chercher Saul à Tarse. 26 L’ayant trouvé, il l’amena à Antioche. Toute une année durant ils vécurent ensemble dans l’Églisef et y instruisirent une foule considérable. C’est à Antioche que, pour la première fois, les disciples reçurent le nom de « chrétiens ».g

f Sens incertain. On pourrait entendre « ils agirent de concert », ou « ils furent reçus (par l’Église) », c’est-à-dire furent les hôtes de l’Église.

g C’est-à-dire partisans ou sectateurs de Christus (ou Chrestus). En créant ce sobriquet, les païens d’Antioche ont pris le titre de « Christ » (oint) pour un nom propre.

Barnabé et Saul délégués à Jérusalem.

27 En ces jours-là, des prophètesh descendirent de Jérusalem à Antioche.i

h Comme les prophètes de l’AT, Dt 18.18 ; 2 P 1.21 ; Mt 5.12, ceux du NT sont des charismatiques, 1 Co 12.1, qui parlent au nom de Dieu sous l’inspiration de son Esprit. Il y a même dans la nouvelle Alliance une effusion plus large de ce charisme, 2.17-18, et tous les fidèles en bénéficient à l’occasion, 19.6 ; 1 Co 11.4-5 ; 14.26, 29-33, 37. Cependant certains personnages en sont spécialement doués au point de mériter le titre habituel de « prophètes », 11.27 ; 13.1 ; 15.32 ; 21.9, 10. Dans la hiérarchie des charismes ils viennent normalement en deuxième lieu, après les « apôtres », 1 Co 12.28-29 ; Ep 4.11 ; mais cf. 1 Co 12.10 ; Rm 12.6 ; Lc 11.49 ; c’est qu’ils sont les témoins attitrés de l’Esprit, Ap 1.3 et 2.7, etc. ; 1 Th 5.19-20, et transmettent ses « révélations », 1 Co 14.6, 26, 30 ; Ep 3.5 ; Ap 1.1, comme les « apôtres » sont les témoins du Christ ressuscité, Rm 1.1 ; 1.8, et proclament le « kérygme », 2.22. Leur rôle ne se borne pas à prédire l’avenir, 11.28 ; 21.11, ou à lire dans les cœurs, 1 Co 14.24-25 ; cf. 1 Tm 1.18 ; 4.14, et s’ils « édifient, exhortent, consolent », 1 Co 14.3 ; cf. 4.36 ; 11.23-24, c’est par des révélations pneumatiques qui les rapprochent des glossolalies, 2.4 ; 19.6, tout en les plaçant au-dessus de ceux-ci parce que leur parole est intelligible, 1 Co 14. Leur fonction principale a dû être d’expliquer, sous la lumière de l’Esprit, les oracles des Écritures, en particulier des anciens prophètes, 1 P 1.10-12, et ainsi de découvrir le « mystère » du plan divin, 1 Co 13.2 ; Ep 3.5 ; Rm 16.25. C’est pourquoi ils sont associés aux apôtres comme fondement de l’Église, Ep 2.20. L’Apocalypse de saint Jean est un cas typique de cette prophétie du NT, Ap 1.3 ; 10.11 ; 19.10 ; 22.7-10, 18-19. Si élevé qu’il soit, le charisme de prophétie ne donne qu’une connaissance imparfaite et provisoire, en relation avec la foi, Rm 12.6, qui devra disparaître devant la vision béatifique, 1 Co 13.8-12.

i Le texte occ. ajoute « et il y avait une grande allégresse. Tandis que nous étions réunis, l’un d’eux... ». On aurait alors ici le premier passage où Luc emploie le « nous », cf. 16.10.

28 L’un d’eux nommé Agabus, se leva et, sous l’action de l’Esprit, se mit à annoncer qu’il y aurait une grande famine dans tout l’univers. C’est celle qui se produisit sous Claude.j

j Sous le règne de Claude (41-54), l’empire eut à souffrir d’une grande famine vers 49-50, plus tôt en Grèce, plus tard à Rome. Josèphe situe l’événement au temps du procurateur Tibère Alexandre (46-48). Parler d’une famille universelle montre la même tendance hyperbolique qu’en Lc 2.1.

29 Les disciples décidèrent alors d’envoyer, chacun selon ses moyens, des secours aux frères de Judée ; 30 ce qu’ils firent, en les envoyant aux anciensk par l’entremise de Barnabé et de Saul.l

k Mentionnés ici pour la première fois ; cf. 15.4 ; 21.18.

l D’après les Actes, 9.26 ; 11.29s ; 15.2, Paul aurait fait trois voyages à Jérusalem avant de visiter par deux fois la Galatie, 16.6 ; 18.23 ; mais Paul lui-même, en Ga 1.18 ; 2.1s ; cf. 4.13, n’en mentionne que deux. La présentation différente des Actes résulte peut-être de la façon dont Luc a combiné ses sources. Il se pourrait que ce voyage de 11.29 soit identique à celui de 15.2. Les « secours » qui en sont l’objet restent sans doute à distinguer de ceux que Paul apporte plus tard, 24.17, au terme de la grande collecte faite sur la demande de l’Église de Jérusalem, Ga 2.10 ; cf. 1 Co 16.1 ; 2 Co 8.4 ; 9.1, 12, 13 ; Rm 15.31.

L’arrestation de Pierre et sa délivrance miraculeuse.m

12 Vers ce temps-là, le roi Hérode mit la main sur quelques membres de l’Église pour les maltraiter.

m Agrippa Ier, petit-fils du roi Hérode le Grand, fut décoré du titre royal par Caligula, en 37, mais ne fut réellement roi de Judée qu’en 41 ; il mourut, probablement en septembre ou octobre 43, et en tout cas avant la fin de février 44. Littérairement, le récit tranche sur son contexte actuel et rappelle la manière de Marc.

2 Il fit périr par le glaive Jacques, frère de Jean. 3 Voyant que c’était agréable aux Juifs, il fit encore arrêter Pierre. C’étaient les jours des Azymes. 4 Il le fit saisir et jeter en prison, le donnant à garder à quatre escouades de quatre soldats ; il voulait le faire comparaître devant le peuple après la Pâque. 5 Tandis que Pierre était ainsi gardé en prison, la prière de l’Église s’élevait pour lui vers Dieu ardemment.

6 Or, la nuit même avant le jour où Hérode devait le faire comparaître, Pierre était endormi entre deux soldats ; deux chaînes le liaientn et, devant la porte, des sentinelles gardaient la prison.

n Aux deux soldats qui étaient à ses côtés.

7 Soudain, l’ange du Seigneur survint, et le cachot fut inondé de lumière. L’ange frappa Pierre au côté et le fit lever : « Debout ! Vite ! » dit-il. Et les chaînes lui tombèrent des mains. 8 L’ange lui dit alors : « Mets ta ceinture et chausse tes sandales »; ce qu’il fit. Il lui dit encore : « Jette ton manteau sur tes épaules et suis-moi. » 9 Pierre sortit, et il le suivait ; il ne se rendait pas compte que ce fût vrai, ce qui se faisait par l’ange, mais il se figurait avoir une vision. 10 Ils franchirent ainsi un premier poste de garde, puis un second, et parvinrent à la porte de fer qui donne sur la ville. D’elle-même, elle s’ouvrit devant eux. Ils sortirent,o allèrent jusqu’au bout d’une rue, puis brusquement l’ange le quitta.

o Add. « descendirent les sept degrés ».

11 Alors Pierre, revenant à lui, dit : « Maintenant je sais réellement que le Seigneur a envoyé son Ange et m’a arraché aux mains d’Hérode et à tout ce qu’attendait le peuple des Juifs. »

12 Et s’étant reconnu, il se rendit à la maison de Marie, mère de Jean, surnommé Marc,p où une assemblée assez nombreuse s’était réunie et priait.

p On retrouve Jean-Marc en 12.25 ; 13.5, 13 ; 15.37-39 ; il était le cousin de Barnabé, Col 4.10. Il sera auprès de Paul durant sa première captivité romaine, Col 4.10 ; Phm 24, et Paul réclamera encore ses services peu avant de mourir, 2 Tm 4.11. Il fut également le disciple de Pierre, 1 P 5.13, et la tradition reconnaît en lui l’auteur du deuxième évangile.

13 Il heurta le battant du portail, et une servante, nommée Rhodé, vint aux écoutes. 14 Elle reconnut la voix de Pierre et, dans sa joie, au lieu d’ouvrir la porte, elle courut à l’intérieur annoncer que Pierre était là, devant le portail. 15 On lui dit : « Tu es folle ! » mais elle soutenait qu’il en était bien ainsi. « C’est son ange ! »q dirent-ils alors.

q Ils supposent que Rhodé voyait une apparition de Pierre revenant des morts ; cf. 23.9.

16 Pierre cependant continuait à frapper. Quand ils eurent ouvert, ils virent que c’était bien lui et furent saisis de stupeur. 17 Mais il leur fit de la main signe de se taire et leur raconta comment le Seigneur l’avait tiré de la prison. Il ajouta : « Annoncez-le à Jacquesr et aux frères. » Puis il sortit et s’en alla dans un autre endroit.

r « Jacques », sans autre spécification, désigne le « frère du Seigneur ». Dès l’époque de la première visite de Paul à Jérusalem, Ga 1.19 (ce serait en 36, cf. 9.1), Jacques est le chef du groupe « hébreu » des chrétiens de Jérusalem. Il gouvernera l’Église mère après le départ de Pierre. Voir 15.13 ; 21.18 ; 1 Co 15.7. L’Épître de Jacques se présente comme son œuvre.

18 Au lever du jour, ce fut grand émoi chez les soldats : qu’était donc devenu Pierre ? 19 Hérode l’ayant envoyé chercher sans qu’on le trouvât, ordonna, après interrogatoire des gardes, de les exécuter.s Puis de Judée il descendit à Césarée, où il demeura.

s Responsables de leurs prisonniers, les soldats devaient subir la peine de ceux qu’ils avaient laissé échapper, cf. 16.27 ; 27.42.

La mort du persécuteur.t

20 Hérode était en conflit aigu avec les gens de Tyr et de Sidon. D’un commun accord ceux-ci se présentèrent devant lui et, après avoir gagné Blastus, le chambellan du roi, ils sollicitaient la paix. Leur pays, en effet, tirait sa subsistance de celui du roi.

t Josèphe offre aussi une notice sur l’apothéose et la mort d’Agrippa qui complète celle du livre des Actes.

21 Au jour fixé, Hérode, vêtu de ses habits royaux, prit place sur la tribune et, tandis qu’il les haranguait, 22 le peuple se mit à crier : « C’est un dieu qui parle, ce n’est pas un homme ! » 23 Mais à l’instant même, l’Ange du Seigneur le frappa, parce qu’il n’avait pas rendu gloire à Dieu ; et rongé de vers,u il rendit l’âme.

u Var. « étant descendu de la tribune, il devint, encore vivant, la pâture des vers, et ainsi rendit l’âme ».

Barnabé et Saul rentrent à Antioche.

24 Cependant la parole de Dieu croissait et se multipliait.

25 Quant à Barnabé et Saul, après avoir accompli leur ministère à Jérusalem,v ils revinrent, ramenant avec eux Jean, surnommé Marc.

v Var. « à Jérusalem ». Cette leçon mieux attestée peut s’entendre si l’on rapporte ces mots au verbe « accomplir »; la var. « de Jérusalem » suppose qu’on rattache l’expression au verbe « revinrent », mais elle semble être une correction facilitante.

III. La mission de Barnabé et de Paul.
Le Concile de Jérusalem

L’envoi en mission.

13 Il y avait dans l’Église établie à Antioche des prophètes et des docteurs :w Barnabé, Syméon appelé Niger, Lucius de Cyrène, Manaën, ami d’enfance d’Hérode le tétrarque, et Saul.

w Sur les prophètes, voir 11.27. Le charisme propre du docteur, ou didascale, le rend apte à donner à ses frères un enseignement moral et doctrinal, normalement fondé sur l’Écriture. Cf. 1 Co 12-14 :. — Les cinq prophètes et docteurs énumérés représentent le gouvernement de l’Église d’Antioche ; comp. la liste des Douze, 1.13, et celle des Sept, 6.5. Comme ces derniers, il semble que les Cinq d’Antioche soient des Juifs hellénistes.

2 Or un jour, tandis qu’ils célébraient le cultex du Seigneur et jeûnaient, l’Esprit Saint dit : « Mettez-moi donc à part Barnabé et Saul en vue de l’œuvre à laquelle je les ai appelés. »

x L’usage de ce terme assimile les prières communes des chrétiens au culte sacrificiel de l’ancienne Loi, cf. Rm 1.9.

3 Alors, après avoir jeûné et prié, ils leur imposèrent les mainsy et les laissèrent à leur mission.

y D’après 14.26 (cf. 15.40), ce geste de la communauté paraît recommander à la grâce de Dieu les nouveaux missionnaires, choisis, v. 2, et envoyés, v. 4, par l’Esprit Saint. Le rite n’a donc pas tout à fait la même portée que dans 6.6, où les Sept reçoivent des apôtres leur mandat. Cf. 1 Tm 4.14.

À Chypre. Le magicien Élymas.

4 Eux donc, envoyés en mission par le Saint Esprit, descendirent à Séleucie, d’où ils firent voile pour Chypre.z

z Patrie de Barnabé, 4.36.

5 Arrivés à Salamine, ils se mirent à annoncer la parole de Dieu dans les synagogues des Juifs.a Ils avaient avec eux Jean comme auxiliaire.

a La tactique constante de Paul, 17.2, est de s’adresser d’abord aux Juifs, cf. 13.14 ; 14.1 ; 16.13 ; 17.10, 17 ; 18.4, 19 ; 19.8 ; 28.17, 23. Elle correspond à un principe la priorité revient aux Juifs, voir 3.26 ; 13.46 ; Rm 1.16 ; 2.9-10 ; Mc 7.27. Ce n’est qu’après leur refus qu’on se tourne vers les païens, cf. 13.46 ; 18.6 ; 28.28.

6 Ayant traversé toute l’île jusqu’à Paphos, ils trouvèrent là un magicien, faux prophète juif, nommé Bar-Jésus, 7 qui était de l’entourage du proconsul Sergius Paulus, homme avisé. Ce dernier fit appeler Barnabé et Saul, désireux d’entendre la parole de Dieu. 8 Mais Élymas le magicien — ainsi se traduit son nom — leur faisait opposition, cherchant à détourner le proconsul de la foi. 9 Alors Saul — appelé aussi Paulb —, rempli de l’Esprit Saint, le fixa du regard

b Les Juifs, et les Orientaux en général, prenaient ainsi un nom à l’usage du monde gréco-romain Jean portait le nom de Marc, 12.12, Joseph-Barsabbas celui de Justus, 1.23, Siméon celui de Niger, 13.1, Tabitha celui de Dorcas, 9.36, etc. Pour la première fois, Luc donne ici à Paul son nom romain, qui lui restera seul dans toute la suite. Il fait aussi passer Paul au premier plan non plus un second de Barnabé, mais le véritable chef de la mission, v. 13.

10 et lui dit : « Être rempli de toutes les astuces et de toutes les scélératesses, fils du diable, ennemi de toute justice, ne cesseras-tu donc pas de rendre tortueuses les voies du Seigneur qui sont droites ? 11 Voici à présent que la main du Seigneur est sur toi. Tu vas devenir aveugle, et pour un temps tu ne verras plus le soleil. » À l’instant même, obscurité et ténèbres s’abattirent sur lui, et il tournait de tous côtés, cherchant quelqu’un pour le conduire. 12 Alors, voyant ce qui s’était passé, le proconsul embrassa la foi, vivement frappé par la doctrine du Seigneur.

Arrivée à Antioche de Pisidie.

13 De Paphos, où ils s’embarquèrent, Paul et ses compagnons gagnèrent Pergé, en Pamphylie. Mais Jean les quitta pour retourner à Jérusalem. 14 Quant à eux, poussant au-delà de Pergé, ils arrivèrent à Antioche de Pisidie. Le jour du sabbat, ils entrèrent à la synagogue et s’assirent. 15 Après la lecture de la Loi et des Prophètes, les chefs de la synagogue leur envoyèrent dire : « Frères, si vous avez quelque parole d’encouragementc à dire au peuple, parlez. »

c Il s’agit d’exhortations prenant leur point de départ dans l’Écriture, cf. Rm 15.4. L’usage des synagogues tel qu’il apparaît ici se retrouve dans les réunions liturgiques chrétiennes, où ces discours d’encouragement sont tenus par les « prophètes » ou docteurs cf. 1 Co 14.3, 31 ; 1 Tm 4.13 ; He 13.22 ; 11.23 ; 14.22 ; 15.32 ; 16.40 ; 20.1, 2.

16 Paul alors se leva, fit signe de la maind et dit :
« Hommes d’Israël, et vous qui craignez Dieu,e écoutez.

d Geste habituel de l’orateur antique, pour appeler l’attention des auditeurs il étendait la main droite, dont les deux petits doigts étaient repliés, les trois autres demeurant droits. Cf. 19.33 ; 21.40 ; 26.1.

e Le grand discours inaugural de saint Paul, où Luc veut donner le reflet de la prédication de l’Apôtre aux Juifs. Deux parties d’abord, vv. 16-25, un résumé d’histoire sainte (comp. le discours d’Étienne, 7), augmenté d’un rappel du témoignage de Jean-Baptiste ; ensuite, vv. 26-39 Jésus, mort et ressuscité, est bien le Messie attendu (prédication étroitement apparentée aux discours de Pierre, sauf la finale qui évoque la doctrine paulinienne de la justification par la foi). Le discours se termine, vv. 40-41, sur un grave avertissement tiré de l’Écriture, cf. 28.26-27.

17 Le Dieu de ce peuple, le Dieu d’Israëlf élut nos pères et fit grandir ce peuple durant son exil en terre d’Égypte. Puis, en déployant la force de son bras, il les en fit sortir

f Cf. 10.2.

18 et, durant quarante ans environ, il les entoura de soinsg au désert.

g Littéralement « le Dieu de ce peuple Israël ».

19 Ensuite, après avoir exterminé sept nations dans la terre de Canaan, il les mit en possession de leur pays : 20 quatre cent cinquante ans environ.h Après quoi, il leur donna des juges, jusqu’au prophète Samuel.

h Var. « soutint » (ou « supporta »).

21 Par la suite, ils demandèrent un roi, et Dieu leur donna Saül, fils de Cis, de la tribu de Benjamin :i quarante ans.

i Texte occ. (et antiochien) « Pendant quatre cent cinquante ans environ, il leur donna des juges. » Le texte reste obscur.

22 Après l’avoir écarté, Dieu suscita pour eux David comme roi. C’est à lui qu’il a rendu ce témoignage : J’ai trouvé David, fils de Jessé, un homme selon mon cœur, qui accomplira toutes mes volontés. 23 C’est de sa descendance que, suivant sa promesse, Dieu a suscitéj pour Israël Jésus comme Sauveur.

j Dont Paul, lui aussi de la tribu de Benjamin, Rm 11.1 ; Ph 3.5, portait le nom.

24 Jean, le précurseur, avait préparé son arrivée en proclamant à l’adresse de tout le peuple d’Israël un baptême de repentance.

La prédication de Paul devant les Juifs.k

25 Au moment de terminer sa course, Jean disait : « Celui quel vous croyez que je suis, je ne le suis pas ; mais voici venir après moi celui dont je ne suis pas digne de délier la sandale. »

k Ou « ressuscité ». Le verbe grec est amphibologique, et l’argumentation exploite cette amphibologie comme en 3.20-26 la « promesse » s’est réalisée par la résurrection de Jésus, vv. 32-33 ; voir aussi 26.6-8 ; c’est aussi par sa résurrection que Jésus a été constitué Sauveur, cf. 5.31 ; voir aussi 2.21 ; 4.12 ; Rm 5.9-10 ; Ph 3.20, etc. Ainsi le verbe, qui au v. 22 signifie « susciter », signifie indubitablement « ressusciter » à partir du v. 30. Au v. 23, il fait transition et est équivoque.

l Var. « Ce que ».

26 « Frères, vous les enfants de la race d’Abraham et vous ici présents qui craignez Dieu, c’est à vousm que ce message de salut a été envoyé.

m Var. « à nous ».

27 En effet, les habitants de Jérusalem et leurs chefs ont accompli sans le savoir les paroles des prophètes qu’on lit chaque sabbat.n

n Avec texte occ. Texte courant « En effet, les habitants de Jérusalem l’ont méconnu, lui, ainsi que les paroles des prophètes qu’on lit chaque sabbat ils les ont accomplies en le condamnant. »

28 Sans trouver en lui aucun motif de mort,o ils l’ont condamné et ont demandé à Pilate de le faire périr.p

o Un des thèmes de l’apologétique chrétienne Jésus innocent et condamné injustement, cf. 3.13-14 ; Lc 23.14, 22, 47 ; Mt 27.3-10, 19, 23-24.

p « ont demandé à Pilate de le faire périr », soit « que (lui) le fasse périr », soit que (eux puissent) le faire périr », selon les témoins. Var. « l’eut livré à Pilate pour qu’il périsse ».

29 Et lorsqu’ils eurent accompli tout ce qui était écrit de lui, ils le descendirent du gibet et le mirent au tombeau.q

q Texte occ. « ... écrit de lui, ils demandèrent à Pilate de pouvoir, après l’avoir crucifié, le descendre du gibet, et ayant obtenu l’autorisation, ils le descendirent et le mirent au tombeau. »

30 Mais Dieu l’a ressuscité ; 31 pendant de nombreux jours, il est apparu à ceux qui étaient montés avec lui de Galilée à Jérusalem, ceux-là mêmes qui sont maintenant ses témoins auprès du peuple.r

r Cet appel au témoignage des apôtres galiléens surprend un peu dans la bouche de Paul qui ne séparait pas son propre témoignage du leur, 1 Co 15.3-11.

32 « Et nous, nous vous annonçons la Bonne Nouvelle : la promesse faite à nos pères, 33 Dieu l’a accomplie en notre faveur à nous, leurs enfants :s il a ressuscité Jésus. Ainsi est-il écrit dans les psaumes :t Tu es mon fils, moi-même aujourd’hui je t’ai engendré.u

s Var. « en faveur de nos enfants ».

t « dans les psaumes »; var. « au psaume premier » leçon occ. (selon l’ancien usage d’unir les Ps 1 et 2) ; autre var. « au psaume deuxième » (suivant l’usage qui a fini par prévaloir).

u La résurrection du Christ a été son intronisation messianique ; son humanité est entrée alors dans la jouissance des privilèges du Fils de Dieu. Cf. Rm 1.4.

34 Que Dieu l’ait ressuscité des morts et qu’il ne doive plus retourner à la corruption, c’est bien ce qu’il avait déclaré : Je vous donnerai les choses saintes de David, celles qui sont dignes de foi.v

v Promesse de la sainteté comme d’un don réservé aux temps messianiques, qui découlera du nouveau David, le Christ ressuscité.

35 C’est pourquoi il dit ailleurs encore : Tu ne laisseras pas ton Saint voir la corruption.

36 Or David, après avoir en son temps servi les desseins de Dieu, est mort, a été réuni à ses pères et a vu la corruption. 37 Celui que Dieu a ressuscité, lui, n’a pas vu la corruption.

38 « Sachez-le donc, frères, c’est par lui que la rémission des péchés vous est annoncée. L’entière justification que vous n’avez pu obtenir par la Loi de Moïse,

39 c’est par lui que quiconque croit l’obtient.

40 « Prenez donc garde que n’arrive ce qui est dit dans les Prophètes :

41 Regardez, contempteurs,
soyez dans la stupeur et disparaissez !
Parce que de vos jours je vais accomplir une œuvre
que vous ne croiriez pas si on vous la racontait. »
w

w L’incrédulité et le rejet des Juifs (cf. Mt 21.33 ; 22.1) sont un thème cher à Luc, cf. 13.5 ; il reviendra en conclusion du livre des Actes, 28.26-27.

42 Et, à leur sortie, on les invitait àx parler encore du même sujet le sabbat suivant.

x Var. « À leur sortie, ils jugeaient convenable de ».

43 Après que l’assemblée se fut séparée, nombre de Juifs et de prosélytes adorant Dieu suivirent Paul et Barnabé,y et ceux-ci, dans leurs entretiens, les engageaient à rester fidèles à la grâce de Dieu.z

y Add. « jugeant convenable de se faire baptiser ».

z Add. occ. « Et de la sorte la parole de Dieu se répandait dans toute la ville. »

Paul et Barnabé s’adressent aux païens.

44 Le sabbat suivant, presque toute la ville s’assembla pour entendre la parole de Dieu.a

a Var. « la parole du Seigneur », ou « Paul, qui discourut longuement au sujet du Seigneur ».

45 À la vue de cette foule, les Juifs furent remplis de jalousie, et ils répliquaient par des blasphèmes aux paroles de Paul. 46 S’enhardissantb alors, Paul et Barnabé déclarèrent : « C’était à vous d’abord qu’il fallait annoncer la parole de Dieu. Puisque vous la repoussez et ne vous jugez pas dignes de la vie éternelle, eh bien ! nous nous tournons vers les païens.

b Cette idée de « hardiesse », ou d’« assurance », déjà soulignée à propos des apôtres, 4.13, 29, 31, revient de façon insistante quand il s’agit de Paul, 9.27-28 ; 14.3 ; 19.8 ; 26.26 ; 28.31 ; même insistance chez Paul lui-même, 1 Th 2.2 ; 2 Co 3.12 ; 7.4 ; Ph 1.20 ; Ep 3.12 ; 6.19-20.

47 Car ainsi nous l’a ordonné le Seigneur :

Je t’ai établi lumière des nations,
pour faire de toi le salut jusqu’aux extrémités de la terre. »
c

c Citation libre d’après les LXX. Le texte peut s’entendre, soit de Paul lui-même (cf. 26.17-18), apôtre et docteur des païens (cf. Rm 11.13 ; 1 Tm 2.7 ; Ep 3.8, etc.), soit du Christ ressuscité (voir 26.23, qui paraît également dépendre d’Isa 49.6, et Lc 2.32, tributaire d’Isa 49.6, 9) il est la lumière des nations, mais ne les éclairera effectivement que grâce au témoignage des apôtres, cf. 1.8 ; aussi la prophétie est-elle un ordre pour l’Apôtre qui doit en assurer l’accomplissement.

48 Tout joyeux à ces mots, les païens se mirent à glorifier la parole du Seigneur,d et tous ceux-là embrassèrent la foi, qui étaient destinés à la vie éternelle.e

d Var. « la parole de Dieu ».

e « La vie éternelle », cf. v. 46, c’est-à-dire la vie du siècle futur, cf. 3.15 ; n’y parviendront que ceux dont les noms « sont écrits dans le ciel », Lc 10.20, dans « le livre de la vie », Ph 4.3 ; Ap 20.12. « Destinés à la vie du monde futur », expression courante chez les rabbins.

49 Ainsi la parole du Seigneur se répandait dans toute la région.

50 Mais les Juifs montèrent la tête aux dames de condition qui adoraient Dieu ainsi qu’aux notables de la ville ; ils suscitèrent de la sorte une persécution contre Paul et Barnabé et les chassèrent de leur territoire. 51 Ceux-ci, secouant contre eux la poussière de leurs pieds, se rendirent à Iconium. 52 Quant aux disciples, ils étaient remplis de joie et de l’Esprit Saint.

Évangélisation d’Iconium.

14 À Iconium, ils entrèrent de mêmef dans la synagogue des Juifs et parlèrent de telle façon qu’une grande foule de Juifs et de Grecs embrassèrent la foi.g

f Ou « entrèrent ensemble ».

g Le v. 1 se continue par le v. 3.

2 Mais les Juifs restés incrédules excitèrent les païens et les indisposèrent contre les frères.h

h Le refus de croire dégénère aussitôt en opposition violente, cf. 19.9 ; 28.24, et 9.23 ; 13.45, 50 ; 14.19 ; 17.5-8, 13 ; 18.6, 13.

3 Paul et Barnabé prolongèrent donc leur séjour assez longtemps, pleins d’assurance dans le Seigneur, qui rendait témoignage à la prédication de sa grâce en opérant signes et prodiges par leurs mains.

4 La population de la ville se partagea.i Les uns étaient pour les Juifs, les autres pour les apôtres.

i Suite du v. 2.

5 Chez les païens et les Juifs, leurs chefs en tête, on se préparait à les maltraiter et à les lapider. 6 Mais s’en étant rendu compte, ils allèrent chercher refuge dans les villes de la Lycaonie, Lystres, Derbé et la région d’alentour.j

j Lystres, colonie romaine, patrie de Timothée, cf. 16.1-2. Les événements des vv. 8-19 se passent à Lystres ; Paul n’arrivera à Derbé qu’au v. 20.

7 Là aussi, ils annonçaient la Bonne Nouvelle.

Guérison d’un impotent.

8 À Lystres se tenait assis un homme perclus des pieds ; impotent de naissance, il n’avait jamais marché. 9 Il écouta Paul discourir. Celui-ci, arrêtant sur lui son regard et voyant qu’il avait la foi pour être guéri,k

k Autre traduction « pour être sauvé ». La foi est la condition du miracle, cf. Mt 8.10.

10 dit d’une voix forte : « Lève-toi, tiens-toi droit sur tes pieds ! » Il se dressa d’un bond : il marchait.

11 À la vue de ce que Paul venait de faire, la foule s’écria, en lycaonien : « Les dieux, sous forme humaine, sont descendus parmi nous ! » 12 Ils appelaient Barnabé Zeus et Paul Hermès, puisque c’était lui qui avait la parole.l

l Littéralement « qui était chef de la parole. » — Hermès (Mercure chez les Latins) était le dieu patron des orateurs. Plutôt que du Zeus et du Hermès des Grecs, il s’agit sans doute des dieux de la Lycaonie assimilés aux dieux olympiens.

13 Les prêtres du Zeus-de-devant-la-villem amenèrent au portail des taureaux ornés de guirlandes, et ils se disposaient, de concert avec la foule, à offrir un sacrifice.

m Suivant le texte occ. — Ce Zeus était le dieu protecteur de la ville.

14 Informés de la chose, les apôtres Barnabé et Paul déchirèrent leurs vêtementsn et se précipitèrent vers la foule en criant :

n En signe d’indignation, cf. Mt 26.65.

15 « Amis, que faites-vous là ? Nous aussi, nous sommes des hommes, soumis au même sort que vous, des hommes qui vous annoncent d’abandonner toutes ces vaines idoles pour vous tourner vers le Dieu vivanto qui a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qui s’y trouve.p

o Prédication monothéiste, où l’on oppose traditionnellement le Dieu véritable aux faux dieux, le Dieu vivant aux idoles inertes, avec appel à la conversion. Voir un résumé de la prédication de Paul aux païens dans 1 Th 1.9-10 et Ga 4.9 ; cf. 15.19 ; 26.18, 20.

p Le vrai Dieu s’est montré vivant en produisant l’univers formulation qu’on retrouve dans les confessions de foi du judaïsme. Cf. Ex 20.11 ; Ne 9.6 ; Ps 146.6 ; 4.24 ; 17.24 ; Ap 10.6 ; 14.7.

16 Dans les générations passées, il a laissé toutes les nations suivre leurs voies ; 17 il n’a pas manqué pour autant de se rendre témoignage par ses bienfaits, vous dispensant du ciel pluies et saisons fertiles, rassasiant vos cœurs de nourriture et de félicité... » 18 C’est à peine s’ils réussirent par ces paroles à empêcher la foule de leur offrir un sacrifice.

Fin de la mission.

19 Survinrent alors d’Antioche et d’Iconium des Juifs qui gagnèrent les foules. On lapida Paul et on le traîna hors de la ville, le croyant mort. 20 Mais, comme les disciples faisaient cercle autour de lui, il se releva et rentra dans la ville. Et le lendemain, avec Barnabé, il partit pour Derbé.

21 Après avoir évangélisé cette ville et y avoir fait bon nombre de disciples, ils retournèrent à Lystres, Iconium et Antioche. 22 Ils affermissaient le cœur des disciples,q les encourageant à persévérer dans la foi, « car, disaient-ils, il nous faut passer par bien des tribulations pour entrer dans le Royaume de Dieu. »

q Cf. Rm 1.11 ; 1 Th 3.2, 13 ; Lc 22.32.

23 Ils leur désignèrent des anciensr dans chaque Église, et, après avoir fait des prières accompagnées de jeûne, ils les confièrent au Seigneur en qui ils avaient mis leur foi.

r Selon le modèle des communautés juives de la Diaspora.

24 Traversant alors la Pisidie, ils gagnèrent la Pamphylie. 25 Puis, après avoir annoncé la paroles à Pergé, ils descendirent à Attalie ;

s Add. « du Seigneur » ou « de Dieu ».

26 de là ils firent voile vers Antioche, d’où ils étaient partis, recommandés à la grâce de Dieu pour l’œuvre qu’ils venaient d’accomplir.

27 À leur arrivée, ils réunirent l’Église et se mirent à rapporter tout ce que Dieu avait fait avec eux, et comment il avait ouvert aux païens la porte de la foi.t

t Métaphore analogue chez saint Paul, 1 Co 16.9 ; 2 Co 2.12 ; Col 4.3.

28 Ils demeurèrent ensuite assez longtemps avec les disciples.

Controverse à Antioche.

15 u Cependant certaines gens descendus de Judéev enseignaient aux frères : « Si vous ne vous faites pas circoncire suivant l’usage qui vient de Moïse, vous ne pouvez être sauvés. »

u Les événements de ce ch. soulèvent plusieurs difficultés : 1° les vv. 5-7 reprennent les vv. 1-2 comme si l’auteur rapportait deux origines différentes de la controverse, sans mettre de lien entre elles ; 2° au v. 6, on a l’impression d’une réunion séparée des dirigeants de la communauté, mais, aux vv. 12, 22, les débats se font devant l’assemblée chrétienne tout entière ; 3° l’assemblée porte et remet à Paul un décret sur les observances de pureté rituelle imposées aux chrétiens issus du paganisme, vv. 22s ; mais plus tard, Jacques semble notifier ce même décret à l’Apôtre, sans supposer qu’il le connaisse, 21.25. Paul lui-même ne parle de ce décret ni en Ga 2.6 (où il parle de l’assemblée de Jérusalem) ni en 1 Co 8-10 ; Rm 14 (où il traite de problèmes analogues) ; 4° le décret de 15.29 fut porté pour les Églises de Syrie et de Cilicie, 15.23 ; pourtant, Luc ne dit pas que Paul l’ait publié en traversant ces régions, 15.41, mais il en parle à propos des villes de Lycaonie, 16.4, et les termes de 15.19-21 ; 21.25 semblent en fait donner au décret une portée universelle. On expliquerait ces difficultés en admettant que Luc a bloqué deux controverses distinctes et les solutions différentes qui leur furent données (Paul a mieux distingué en Ga 2) une controverse à laquelle prirent part Pierre et Paul, sur l’obligation de la Loi juive pour les païens convertis, cf. Ga 2.1-10 ; une autre, postérieure, suscitée par l’incident d’Antioche, Ga 2.11-14, et où Jacques joua un rôle prépondérant en l’absence de Pierre et de Paul, sur les rapports entre chrétiens issus du judaïsme et du paganisme dans leurs relations sociales ; tout contact avec un païen entraînait pour le juif une impureté légale cf. 15.20.

v Ga 2.12 les désigne comme « certaines gens de l’entourage de Jacques ».

2 w Après bien de l’agitation et une discussion assez vive engagée avec eux par Paul et Barnabé, il fut décidé que Paul, Barnabé et quelques autres des leursx monteraient à Jérusalem auprès des apôtresy et des anciens pour traiter de ce litige.

w Var. « Après beaucoup d’agitation et une discussion assez vive engagée avec eux par Paul et Barnabée — car Paul disait, en insistant, qu’ils devaient demeurer comme lorsqu’ils avaient cru — ceux qui étaient venus de Jérusalem leur commandèrent ainsi qu’à quelques autres de monter à Jérusalem auprès des apôtres et des anciens pour être jugés devant eux au sujet de ce litige. »

x Ga 2.1-3 nomme Tite, qui était originaire de la gentilité.

y Les apôtres, dont il n’est question ni en 11.30 ni en 21.18, sont mentionnés ici conjointement au collège des anciens ; cela s’accorde avec Ga 2.2-9, où Pierre et Jean sont cités comme autorités de l’Église de Jérusalem, à côté de Jacques, frère du Seigneur.

3 Eux donc, après avoir été escortész par l’Église, traversèrent la Phénicie et la Samarie, racontant la conversion des païens, et ils causaient une grande joie à tous les frères.

z Autre traduction « après avoir été pourvus du nécessaire pour le voyage », cf. 1 Co 16.11 ; Tt 3.13.

4 Arrivés à Jérusalem, ils furent accueillis par l’Église, les apôtres et les anciens, et ils rapportèrent tout ce que Dieu avait fait avec eux.

Controverse à Jérusalem.

5 Mais certaines gens du parti des Pharisiens qui étaient devenus croyants intervinrenta pour déclarer qu’il fallait circoncire les païens et leur enjoindre d’observer la Loi de Moïse.b

a Dans le texte ordinaire, les Pharisiens ont l’air d’intervenir à Jérusalem indépendamment de ce qui s’est passé à Antioche. Le texte occ. s’applique à faire le raccord « Mais ceux qui leur avaient enjoint de monter vers les anciens se levèrent alors... »

b D’après Ga 2.3-5 ces exigences auraient visé plus directement Tite, qui avait accompagné Paul à Jérusalem.

6 Alors les apôtres et les anciensc se réunirent pour examiner cette question.

c Add. occ. « et l’assemblée », cf. v. 12.

7 Après une longue discussion, Pierre se levad et dit :
« Frères, vous le savez : dès les premiers jours, Dieu m’a choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi.

d Add. occ. « sous l’inspiration de l’Esprit ».

8 Et Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en leur donnant l’Esprit Saint tout comme à nous. 9 Et il n’a fait aucune distinction entre eux et nous, puisqu’il a purifié leur cœur par la foi.e

e Interprétation de la parole céleste entendue par Pierre, 10.15 ; 11.9, cf. 10.28 ; Si 38.10. L’intervention de Pierre reprend la justification qu’il a donnée de sa conduite à Césarée, 11.4-17.

10 Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieuf en voulant imposer aux disciples un joug que ni nos pères ni nous-mêmes n’avons eu la force de porter ?

f Tenter (cf. 1 Co 10.13) Dieu, c’est le mettre en demeure de faire ses preuves, en exigeant une intervention ou un signe, 5.9 ; Ex 17.2, 7 ; Nb 14.22 ; Dt 6.16 ; Jdt 8.12-17 ; Ps 95.9 ; Isa 7.11-12 ; Mt 4.7 ; 5.8-10 ; 1 Co 10.9.

11 D’ailleurs, c’est par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être sauvés, exactement comme eux. »g

g Réponse directe à l’affirmation du v. 1. La doctrine est celle de Ga 2.15-21 ; 3.22-26 ; Rm 11.32 ; Ep 2.1-10 ; etc. À ce point de vue, aucun avantage pour le Juif cf. 13.38 ; Ga 5.6 ; 6.15.

Le discours de Pierre.

12 Alors toute l’assemblée fit silence.h On écoutait Barnabé et Paul exposer tout ce que Dieu avait accompli par eux de signes et prodiges parmi les païens.

h Texte occ. « Comme les anciens donnaient leur assentiment à ce que Pierre avait dit, toute l’assemblée... »

Le discours de Jacques.

13 Quand ils eurent cessé de parler, Jacquesi prit la parole et dit : « Frères, écoutez-moi.

i Ga 2.9 atteste l’importance de son rôle en cette affaire, spécialement dans le débat concernant les problèmes locaux de relations sociales, cf. 15.1.

14 Syméonj a exposé comment, dès le début, Dieu a pris soin de tirer d’entre les païens un peuple réservé à son Nom.

j Nom sémitique de Simon-Pierre, cf. 2 P 1.1.

15 Ce qui concorde avec les paroles des Prophètes, puisqu’il est écrit :k

k Le texte est cité d’après la LXX et l’argumentation repose sur des variantes propres à la version grecque. Elle provient sans doute des milieux « hellénistes », bien qu’elle soit mise ici sur les lèvres du chef du parti « hébreu ».

16 Après cela je reviendrai
et je relèverai la tente de David qui était tombée ;
je relèverai ses ruines
et je la redresserai
,
17 afin que le reste des hommes cherchent le Seigneur,
ainsi que toutes les nations
qui ont été consacrées à mon Nom,l
dit le Seigneur qui fait

l Littéralement « sur lesquelles mon Nom a été invoqué (ou prononcé) ». Invoquer le nom de Yahvé sur un peuple, cf. 2 Ch 7.14, ou sur un lieu, cf. 2 Ch 6.34, c’est le consacrer à Yahvé.

18 connaître ces choses depuis des siècles.m

m Var. « dit le Seigneur qui fait ces choses. Depuis des siècles le Seigneur connaît son œuvre. »

19 « C’est pourquoi je juge, moi,n qu’il ne faut pas tracasser ceux des païens qui se convertissent à Dieu.

n Jacques dirime le débat, et la lettre apostolique ne fera que reprendre les termes de sa déclaration. Ga 2.9 donne la même impression dans l’Église de Jérusalem, à cette date, c’est Jacques qui occupe la première place, cf. 12.17. — Une var. diminue son importance « C’est pourquoi, pour ce qui est de moi... »

20 Qu’on leur mande seulement de s’abstenir de ce qui a été souillé par les idoles,o des unions illégitimes,p des chairs étouffées et du sang.q

o La viande des animaux immolés dans les sacrifices païens, cf. v. 29 et 21.25. Voir 1 Co 8-10.

p Le mot paraît désigner toutes les unions irrégulières énumérées en Lv 18.

q Le texte occ. supprime « chairs étouffées » et ajoute à la fin « et ne pas faire aux autres ce qu’on ne voudrait pas être fait à soi-même » (de même au v. 29). Autre om. « l’impudicité ». — Les réserves de Jacques montrent la nature exacte du litige. Elles ont un caractère strictement rituel et répondent à la question posée en 11.3 et Ga 2.12-14 que faut-il exiger de la part des helléno-chrétiens pour que les judéo-chrétiens puissent les fréquenter sans souillure légale ? De toutes les lois de pureté, Jacques n’a voulu retenir que celles dont la signification religieuse paraît universelle la manducation des viandes offertes aux idoles comportait une certaine participation à un culte sacrilège, cf. 1 Co 8-10. Le sang concrétise la vie, qui appartient à Dieu seul, et l’interdit de la Loi qui le concernait, Lv 1.5, avait un tel caractère qu’on s’explique la répugnance du Juif à en dispenser les païens. Le cas des chairs étouffées est analogue à celui du sang. Les unions irrégulières figurent dans ce contexte non pas pour leur qualification morale, mais en tant que principe de souillure légale.

21 Car depuis les temps anciens Moïse a dans chaque ville ses prédicateurs, qui le lisent dans les synagogues tous les jours de sabbat. »

La lettre apostolique.

22 Alors les apôtres et les anciens, d’accord avec l’Église tout entière, décidèrent de choisir quelques-uns d’entre eux et de les envoyer à Antioche avec Paul et Barnabé. Ce furent Jude, surnommé Barsabbas,r et Silas,s hommes considérés parmi les frères.

r Inconnu par ailleurs ; cf. 1.23.

s Silas, compagnon de mission de Paul, 15.40—18.5, est identique au Silvain que mentionnent 1 Th 1.1 ; 2 Th 1.1 ; 2 Co 1.19 ; 1 P 5.12.

23 Ils leur remirent la lettre suivante :

« Les apôtres et les anciens, vos frères, aux frères de la gentilité qui sont à Antioche, en Syrie et en Cilicie, salut ! 24 Ayant appris que, sans mandat de notre part, certaines gens venus de chez nous ont, par leurs propos, jeté le trouble parmi vous et bouleversé vos esprits, 25 nous avons décidé d’un commun accord de choisir des délégués et de vous les envoyer avec nos bien-aimés Barnabé et Paul, 26 ces hommes qui ont voué leur vie au nom de notre Seigneur Jésus Christ. 27 Nous vous avons donc envoyé Jude et Silas, qui vous transmettront de vive voix le même message. 28 L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé de ne pas vous imposer d’autres charges que celles-ci, qui sont indispensables : 29 vous abstenir des viandes immolées aux idoles, du sang, des chairs étouffées et des unions illégitimes. Vous ferez bien de vous en garder.t Adieu. »

t Add. occ. « sous la conduite du Saint Esprit ».

Les délégués à Antioche.

30 Prenant congé donc, les délégués descendirent à Antioche, où ils réunirent l’assemblée et remirent la lettre. 31 Lecture en fut faite, et l’on se réjouit de l’encouragement qu’elle apportait. 32 Jude et Silas, qui étaient eux-mêmes prophètes, exhortèrent les frères et les affermirent par un long discours. 33 Au bout de quelque temps, les frères les renvoyèrent avec des souhaits de paix vers ceux qui les avaient envoyés. 34 ...u

u Le texte occ. ajoute le v. 34 « Mais Silas décida de rester là. » Plusieurs mss ajoutent en outre « Jude partit seul. »

35 Paul et Barnabé toutefois demeurèrent à Antioche où, avec beaucoup d’autres, ils enseignaient et annonçaient la Bonne Nouvelle, la parole du Seigneur.

IV. Les missions de Paul

Paul se sépare de Barnabé et s’adjoint Silas.

36 Quelque temps après, Paul dit à Barnabé : « Retournons donc visiter les frères dans toutes les villes où nous avons annoncé la parole du Seigneur, pour voir où ils en sont. » 37 Mais Barnabé voulait emmener aussi Jean, surnommé Marc ; 38 Paul, lui, n’était pas d’avis d’emmener celui qui les avait abandonnés en Pamphylie et n’avait pas été à l’œuvre avec eux. 39 v L’irritation devint telle qu’ils se séparèrent l’un de l’autre. Barnabé prit Marc avec lui et s’embarqua pour Chypre.

v Il est possible que la cause profonde de la séparation de Paul avec Barnabé soit le différend qui se produisit entre eux à Antioche sur les repas communs, et donc la communion, entre chrétiens issus du judaïsme et du paganisme ; cf. Ga 2.11-13.

40 De son côté, Paul fit choix de Silas et partit, après avoir été confié par les frères à la grâce de Dieu.w

w Var. « la grâce du Seigneur ».

En Lycaonie. Paul s’adjoint Timothée.

41 Il traversa la Syrie et la Cilicie, où il affermit les Églises.x

x Le texte occ. ajoute « transmettant les prescriptions des anciens », cf. 16.4.

16 Il gagna ensuite Derbé, puis Lystres. Il y avait là un disciple nommé Timothée,y fils d’une juive devenue croyante, mais d’un père grec.

y Timothée restera désormais attaché à Paul, cf. 17.14s ; 18.5 ; 19.22 ; 20.4 ; 1 Th 3.2, 6 ; 1 Co 4.17 ; 16.10 ; 2 Co 1.19 ; Rm 16.21, et demeurera jusqu’à la fin l’un de ses plus fidèles disciples (voir 1 Tm et 2 Tm qui lui sont adressées).

2 Les frères de Lystres et d’Iconium lui rendaient un bon témoignage. 3 Paul décida de l’emmener avec lui. Il le prit donc et le circoncit, à cause des Juifs qui se trouvaient dans ces parages,z car tout le monde savait que son père était grec.

z Paul s’opposait à ce que des chrétiens issus de la gentilité se fissent circoncire, Ga 2.3 ; 5.1-12. Mais Timothée était fils d’une Juive, et donc, pour le droit juif, israélite.

4 Dans les villes où ils passaient, ils transmettaient, en recommandant de les observer, les décrets portés par les apôtres et les anciens de Jérusalem.a

a Cette notation rédactionnelle résulte logiquement de la présentation du concile de Jérusalem telle qu’elle est donnée au chap. 15, où le décret est supposé avoir été promulgué en présence de Pierre et de Paul ; mais cf. 15.1.

5 Ainsi les Églises s’affermissaient dans la foi et croissaient en nombre de jour en jour.

Traversée de l’Asie Mineure.

6 Ils parcoururent la Phrygie et la région galate,b le Saint Esprit les ayant empêchés d’annoncer la parole en Asie.

b La Galatie proprement dite, cf. l’Introd. aux épîtres de saint Paul. Ainsi, parti d’Iconium, Paul avait l’intention de se diriger à l’ouest, vers Éphèse. Empêché par l’Esprit, il monte vers le nord et arrive en Phrygie ; obliquant vers le nord-est, il atteint ensuite le « territoire galate », où il fut retenu par la maladie, Ga 4.13-15. Paul évangélisa ces contrées, où il revint plus tard visiter les disciples, 18.23.

7 Parvenus aux confins de la Mysie, ils tentèrent d’entrer en Bithynie, mais l’Esprit de Jésusc ne le leur permit pas.

c Om. « de Jésus ».

8 Ils traversèrentd donc la Mysie et descendirent à Troas.

d Plutôt que « Ils longèrent ».

9 Or, pendant la nuit, Paul eut une vision : un Macédonien était là, debout, qui lui adressait cette prière : « Passe en Macédoine, viens à notre secours ! » 10 Aussitôt après cette vision, nous cherchâmese à partir pour la Macédoine, persuadés que Dieu nous appelait à y porter la Bonne Nouvelle.

e La rédaction passe brusquement à la première personne du pluriel première « section-nous » des Actes, mais voir 11.27. Cf. l’Introduction.

L’arrivée à Philippes.

11 De Troas, gagnant le large nous cinglâmes droit sur Samothrace, et le lendemain sur Néapolis, 12 d’où nous gagnâmes Philippes, cité de premier rang de ce district de Macédoine et colonie.f Nous passâmes quelques jours dans cette ville,

f Var. « cité du premier district de Macédoine », description exacte, car la Macédoine se divisait en quatre districts, dont le premier comprenait la ville de Philippes ; colonie romaine, comme bien d’autres villes que Paul visita, son administration était calquée sur celle de Rome.

13 puis, le jour du sabbat, nous nous rendîmes en dehors de la porte, sur les bords de la rivière, où nous pensions qu’il y avait un lieu de prière.g Nous étant assis, nous adressâmes la parole aux femmes qui s’étaient réunies.

g Le même mot grec peut signifier « prière » ou « lieu de prière », et dans un contexte juif ce dernier sens équivaut à « synagogue »; cf. aussi 16.16.

14 L’une d’elles, nommée Lydie, nous écoutait ; c’était une négociante en pourpre, de la ville de Thyatire ; elle adorait Dieu. Le Seigneur lui ouvrit le cœur, de sorte qu’elle s’attacha aux paroles de Paul. 15 Après avoir été baptisée ainsi que les siens,h elle nous fit cette prière : « Si vous me tenez pour une fidèle du Seigneur, venez demeurer dans ma maison. » Et elle nous y contraignit.i

h La conversion de Lydie entraîne celle de toute sa famille ; cf. 10.44 ; 16.31, 34 ; 18.8 ; 1 Co 1.16.

i Contre la ligne de conduite ordinaire de Paul cf. 20.33-35 ; 1 Th 2.9 ; 2 Th 3.8 ; 1 Co 9. Dans la suite encore, les Philippiens pourront lui faire accepter des secours qu’il n’aurait acceptés d’aucun autre, cf. Ph 4.10-18. Il n’y a pas de plus bel hommage à la charité de Lydie et des autres chrétiens de Philippes.

Emprisonnement de Paul et de Silas.

16 Un jour que nous nous rendions au lieu de prière, nous rencontrâmes une servante qui avait un esprit divinateur ;j elle faisait gagner beaucoup d’argent à ses maîtres en rendant des oracles.

j Littéralement « un esprit python », ainsi nommé en souvenir du serpent Python de l’oracle de Delphes.

17 Elle se mit à nous suivre, Paul et nous, en criant : « Ces gens-là sont des serviteurs du Dieu Très-Haut ; ils vous annoncent la voie du salut. » 18 Elle fit ainsi pendant bien des jours. À la fin Paul, excédé, se retourna et dit à l’esprit : « Je t’ordonne au nom de Jésus Christ de sortir de cette femme. » Et l’esprit sortit à l’instant même.

19 Mais ses maîtres, voyant disparaître leurs espoirs de gain, se saisirent de Paul et de Silas, les traînèrent sur l’agora devant les magistrats 20 et dirent, en les présentant aux stratèges : « Ces gens-là jettent le trouble dans notre ville. Ce sont des Juifs, 21 et ils prêchent des usages qu’il ne nous est permis, à nous Romains, ni d’accepter ni de suivre. »k

k Les « usages » en question sont les usages juifs, cf. 6.14 ; 15.1 ; 21.21 ; 26.3 ; 28.17 ; Jn 19.40 les accusateurs ne font pas de distinction entre chrétiens et Juifs. Le grief précis est celui de prosélytisme s’il était permis aux Juifs de pratiquer leur religion, ils n’avaient pas le droit d’y attirer les Romains. La propagande chrétienne serait donc illégale.

22 La foule s’ameuta contre eux, et les stratèges, après avoir fait arracher leurs vêtements, ordonnèrent de les battre de verges. 23 Quand ils les eurent bien roués de coups, ils les jetèrent en prison, en recommandant au geôlier de les garder avec soin. 24 Ayant reçu pareille consigne, celui-ci les jeta dans le cachot intérieur et leur fixa les pieds dans des ceps.

Délivrance merveilleuse des missionnaires.

25 Vers minuit, Paul et Silas, en prière, chantaient les louanges de Dieu ; les prisonniers les écoutaient. 26 Tout à coup, il se produisit un si violent tremblement de terre que les fondements de la prison en furent ébranlés. À l’instant, toutes les portes s’ouvrirent, et les liens de tous les prisonniers se détachèrent. 27 Tiré de son sommeil et voyant ouvertes les portes de la prison, le geôlier sortit son glaive ; il allait se tuer, à l’idée que les prisonniers s’étaient évadés. 28 Mais Paul cria d’une voix forte : « Ne te fais aucun mal, car nous sommes tous ici. »

29 Le geôlier demanda de la lumière, accourut et, tout tremblant,l se jeta aux pieds de Paul et de Silas.

l Effrayé cette fois parce qu’il se rend compte qu’il a traité en malfaiteurs des envoyés du ciel.

30 Puis il les fit sortir et dit : « Seigneurs, que me faut-il faire pour être sauvé ? » 31 Ils répondirent : « Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé, toi et les tiens. » 32 Et ils lui annoncèrent la parole du Seigneur,m ainsi qu’à tous ceux qui étaient dans sa maison.

m Var. « la parole de Dieu ».

33 Le geôlier les prit avec lui à l’heure même, en pleine nuit, lava leurs plaies et sur-le-champ reçut le baptême, lui et tous les siens. 34 Il les fit alors monter dans sa maison, dressa la table, et il se réjouit avec tous les siens d’avoir cru en Dieu.

35 Lorsqu’il fit jour, les stratèges envoyèrent les licteurs dire au geôlier : « Relâche ces gens-là. »n

n Var. « Lorsqu’il fit jour, les stratèges se réunirent ensemble sur l’agora ; ils se souvenaient avec effroi du tremblement de terre qui s’était produit, et ils envoyèrent les licteurs dire "Relâche ces gens-là que tu as reçus hier." »

36 Celui-ci rapporta ces paroles à Paul : « Les stratèges ont envoyé dire de vous relâcher. Sortez donc et allez-vous-en. »o

o Add. « en paix ».

37 Mais Paul dit aux licteurs : « Ils nous ont fait battre en public et sans jugement, nous, des citoyens romains,p et ils nous ont jetés en prison. Et maintenant, c’est à la dérobée qu’ils nous font sortir ! Eh bien, non ! Qu’ils viennent eux-mêmes nous libérer. »

p La lex Porcia interdisait sous des peines sévères de soumettre un citoyen romain à la flagellation.

38 Les licteurs rapportèrent ces paroles aux stratèges. Effrayés en apprenant qu’ils étaient citoyens romains, 39 ceux-ci vinrent les presser de quitter la ville.q

q Texte alex. (et antiochien) « ceux-ci vinrent leur faire des excuses et, après les avoir menés dehors, ils leur demandèrent de quitter la ville. » Texte occ. « Et s’étant rendus à la prison avec de nombreux amis, ils les prièrent de sortir, disant « Nous ignorions vos affaires et que vous êtes des hommes justes. » Et après les avoir menés dehors, ils les pressèrent par ces paroles « Sortez de cette ville, de peur que ceux qui ont crié après vous ne se rassemblent de nouveau contre vous ». »

40 Au sortir de la prison, Paul et Silas se rendirent chez Lydie, revirent les frères et les exhortèrent, puis ils partirent.

À Thessalonique. Difficultés avec les Juifs.

17 Après avoir traversé Amphipolis et Apollonie, ils arrivèrent à Thessalonique, où les Juifs avaient une synagogue. 2 Suivant son habitude, Paul alla les y trouver. Trois sabbats de suite, il discuta avec eux d’après les Écritures. 3 Il les leur expliquait, établissant que le Christ devait souffrir et ressusciter des morts, « et le Christ, disait-il, c’est ce Jésus que je vous annonce ». 4 Quelques-uns d’entre euxr se laissèrent convaincre et furent gagnés à Paul et à Silas, ainsi qu’une multitude d’adorateurs de Dieu et de Grecss et bon nombre de dames de qualité.

r Dont sans doute Aristarque, un des plus fidèles compagnons de Paul, cf. 20.4 ; Col 4.10.

s Var. « de Grecs adorateurs de Dieu ». — La leçon adoptée suppose une distinction entre les « adorant Dieu », cf. 10.2, et les « Grecs » jusque-là non touchés par la propagande juive. La chrétienté de Thessalonique se composera principalement de païens convertis, cf. 1 Th 1.9-10, etc.

5 Mais les Juifs, pris de jalousie, ramassèrent sur la place quelques mauvais sujets, provoquèrent des attroupements et répandirent le tumulte dans la ville. Ils se présentèrent alors à la maison de Jason,t cherchant Paul et Silas pour les produire devant l’assemblée du peuple.

t Peut-être celui de Rm 16.21.

6 Ne les ayant pas trouvés, ils traînèrent Jason et quelques frères devant les politarques en criant : « Ces gens qui ont révolutionné le monde entier, les voilà maintenant ici, 7 et Jason les reçoit chez lui. Tous ces gens-là contreviennent aux édits de César en affirmant qu’il y a un autre roi,u Jésus. »

u En réalité, les chrétiens évitaient de donner au Christ le titre de basileus (« roi »), qui appartenait à l’empereur, et lui préféraient ceux de « Christ » (Messie) et de « Seigneur ».

8 Par ces clameurs, ils mirent en émoi la foule et les politarques, 9 qui exigèrent une caution de la part de Jason et des autres avant de les relâcher.

Nouvelles difficultés à Bérée.

10 Les frères firent aussitôt partir de nuit Paul et Silas pour Bérée.v Arrivés là, ils se rendirent à la synagogue des Juifs.

v Ce départ ne fit pas cesser la persécution à Thessalonique, cf. 1 Th 2.14.

11 Or ceux-ci avaient l’âme plus noble que ceux de Thessalonique. Ils accueillirent la parole avec le plus grand empressement. Chaque jour, ils examinaient les Écritures pour voir si tout était exact. 12 Beaucoup d’entre eux devinrent ainsi croyants de même que, parmi les Grecs, des dames de qualité et bon nombre d’hommes.

13 Mais quand les Juifs de Thessalonique surent que Paul avait annoncé aussi à Bérée la parole de Dieu, ils vinrent là encore semer dans la foule l’agitation et le trouble. 14 Alors les frères firent tout de suite partir Paul en direction de la mer ; quant à Silas et Timothée, ils restèrent là. 15 Ceux qui escortaient Paul le conduisirent jusqu’à Athènes et s’en retournèrent ensuite avec l’ordre pour Silas et Timothée de le rejoindre au plus vite.w

w Luc abrège et simplifie. Timothée a dû accompagner Paul, puisque Paul le renverra d’Athènes à Thessalonique, 1 Th 3.1s.

Paul à Athènes.

16 Tandis que Paul les attendait à Athènes, son esprit s’échauffait en lui au spectacle de cette ville remplie d’idoles.x

x Centre spirituel de l’hellénisme païen, Athènes est aux yeux de Luc un symbole, comme le manifeste le discours de Paul, seul spécimen que les Actes nous aient conservé de sa prédication aux païens, et seul cas où nous le voyons user, pour combattre le paganisme, de la sagesse profane.

17 Il s’entretenait donc à la synagogue avec des Juifs et ceux qui adoraient Dieu, et sur l’agora, tous les jours, avec les passants.y

y Seule mention expresse dans les Actes d’une prédication de ce genre (cf. pourtant 14.7s).

18 Il y avait même des philosophes épicuriens et stoïciensz qui l’abordaient. Les uns disaient : « Que peut bien vouloir dire ce perroquet ? »a D’autres : « On dirait un prêcheur de divinités étrangères »,b parce qu’il annonçait Jésus et la résurrection.c

z Les deux principales écoles philosophiques d’alors.

a Le terme (de l’argot athénien) signifie proprement « ramasseur de graines ». Il désignait un oiseau picoreur, le freux. On l’appliquait au gueux qui trouve sa nourriture où il peut, et au discoureur qui répète « comme un perroquet » des lieux communs.

b Les termes mêmes de l’accusation portée contre Socrate.

c Cf. v. 32. On prend le mot de « Résurrection » pour le nom d’une déesse (Anastasis) parèdre de Jésus.

19 Ils le prirent alors avec eux et le menèrent devant l’Aréopaged en disant : « Pourrions-nous savoir quelle est cette nouvelle doctrine que tu enseignes ?

d Le nom désigne une colline située au sud de l’agora. Il désigne aussi le haut conseil d’Athènes, qui tenait là autrefois ses séances. Le texte peut s’entendre de deux manières ou bien les philosophes ont conduit Paul « sur (la colline de) l’Aréopage », un peu à l’écart, pour l’entendre plus à l’aise ; ou bien, plutôt, ils l’ont conduit « devant (le conseil de) l’Aréopage ».

20 Car ce sont d’étranges propos que tu nous fais entendre. Nous voudrions donc savoir ce que cela veut dire. » 21 Tous les Athéniens en effet et les étrangers qui résidaient parmi eux n’avaient d’autre passe-temps que de dire ou écouter les dernières nouveautés.

22 Debout au milieu de l’Aréopage, Paul dit alors :
« Athéniens, à tous égards vous êtes, je le vois, les plus religieux des hommes.

Discours de Paul devant l’Aréopage.e

23 Parcourant en effet votre ville et considérant vos monuments sacrés, j’ai trouvé jusqu’à un autel avec l’inscription : « Au dieu inconnu ».f Eh bien ! ce que vous adorez sans le connaître, je viens, moi, vous l’annoncer.

e Après un exorde de circonstance, 22-23, Paul développe l’annonce du vrai Dieu en l’opposant aux conceptions païennes : 1° Dieu a créé l’univers ; on ne peut donc supposer qu’il habite dans un temple ou qu’il ait besoin du culte qu’on lui rend, 24-25 ; 2° Dieu a créé l’homme et l’a entouré de ses bienfaits ; il est absurde de l’assimiler à des objets matériels (les statues), 26-29. Le discours se termine par un appel à la repentance, dans la perspective du jugement, 30-31. Les deux parties du discours ont une pointe anti-idolâtrique. Paul s’inspire des schèmes habituels de la propagande monothéiste du judaïsme hellénistique. Cf. 14.15-17 ; Sg 13-14 ; Rm 1.19-25 ; Ep 4.17-19.

f Jusqu’ici on n’a pas d’autres exemples d’autels dédiés « Au dieu inconnu »; il est possible que Paul transforme pour son propre compte une dédicace — bien attestée à Athènes et ailleurs — « Aux dieux inconnus ». En tout cas Paul donne un autre sens à la dédicace le sens biblique de l’ignorance des païens qui ne connaissent pas Dieu, 1 Th 4.5 ; 2 Th 1.8 ; Ga 4.8 ; 1 Co 15.34 ; Ep 4.17-19 ; 1 P 1.14 ; Jr 10.25 ; Jb 18.21 ; Sg 13.1 ; 14.22. Il se disculpe ainsi du grief de prêcher une divinité étrangère.

24 « Le Dieu qui a fait le monde et tout ce qui s’y trouve, lui, le Seigneur du ciel et de la terre, n’habite pas dans des temples faits de main d’homme. 25 Il n’est pas non plus servi par des mains humaines, comme s’il avait besoin de quoi que ce soit,g lui qui donne à tous vie, souffle et toutes choses.

g Idée familière à la pensée grecque et au judaïsme hellénistique, correspondant d’ailleurs à un vieux thème biblique, cf. 1 Ch 29.10s ; 2 M 14.35 ; Ps 50.9-13 ; Am 5.21s, etc.

26 Si d’un principe uniqueh il a fait tout le genre humain pour qu’il habite sur toute la face de la terre ; s’il a fixé des temps déterminés et les limites de l’habitat des hommes,i

h Var. « d’un seul sang », « d’une seule nation », « d’une seule race ».

i Les « temps déterminés » évoquent surtout les saisons, dont le retour régulier assure aux hommes leur subsistance, 14.17 ; cf. Gn 1.14 ; Sg 7.18 ; Si 33.8 ; les « limites » de l’habitat des hommes sont probablement celles qui séparent la terre habitable des eaux de l’abîme, Gn 1.9-10 ; Ps 104.9 ; Jb 38.8-11 ; Pr 8.28-29 ; cf. Jr 5.22-24 ; Ps 74.17. Selon une autre explication, il s’agirait des temps et des frontières que Dieu a départis aux différents peuples, Gn 10 ; Dt 38.8s. De toute façon, il est question de l’ordre de l’univers, apte à conduire à la connaissance de Dieu.

27 c’était afin qu’ils cherchent la divinitéj pour l’atteindre, si possible, comme à tâtons et la trouver ; aussi bien n’est-elle pas loin de chacun de nous.

j Var. « Dieu » ou « le Seigneur ».

28 C’est en elle en effet que nous avons la vie, le mouvement et l’être. Ainsi d’ailleurs l’ont dit certains des vôtres :k
« Car nous sommes aussi de sa race. »l

k Var. « de vos poètes » ou « de vos sages ».

l Citation tirée des Phénomènes d’Aratus, poète originaire de Cilicie (IIIe siècle av. J.-C.). Cléanthe le Stoïcien (IIIe siècle) s’exprime à peu près dans les mêmes termes. La prédication monothéiste juive invoquait ici le fait que l’homme a été créé à l’image et à la ressemblance de Dieu, Gn 1.26-27 ; Sg 2.23 ; Si 17.1-8, pour rendre manifeste l’absurdité du culte des idoles.

29 « Que si nous sommes de la race de Dieu, nous ne devons pas penser que la divinité soit semblable à de l’or, de l’argent ou de la pierre, travaillés par l’art et le génie de l’homme.m

m Paul s’inspire d’un vieux thème de propagande anti-idolâtrique, cf. Isa 40.20.

30 « Or voici que, fermant les yeux sur les temps de l’ignorance, Dieu fait maintenant savoir aux hommes d’avoir tous et partout à se repentir, 31 parce qu’il a fixé un jour pour juger l’univers avec justice,n par un homme qu’il y a destiné, offrant à tous une garantie en le ressuscitant des morts. »o

n Cf. Ps 9.9 ; 96.13 ; 98.9. C’est dans la perspective du jugement que les apôtres invitent au repentir, cf. surtout 10.42-43 ; 1 Th 1.10.

o La résurrection du Christ garantit la foi en sa mission de Juge et de Sauveur à la fin des temps, cf. Rm 14.9 ; 2 Tm 4.1 ; 1 P 4.5.

32 À ces mots de résurrection des morts, les uns se moquaient, les autres disaient : « Nous t’entendrons là-dessus une autre fois. »p

p Dans le monde grec, même chez les chrétiens, la doctrine de la résurrection a eu beaucoup de peine à vaincre les préventions cf. 1 Co 15.12s. Les Sanhédrites de Jérusalem condamnaient et persécutaient le message chrétien ; les Aréopagites d’Athènes se contentent d’en rire. L’échec de Paul à Athènes fut à peu près complet. Désormais, sa prédication rejettera les ornements de la sagesse grecque, 1 Co 2.1-5.

33 C’est ainsi que Paul se retira du milieu d’eux. 34 Quelques hommes cependant s’attachèrent à lui et devinrent croyants. Denys l’Aréopagite fut du nombre.q Il y eut aussi une femme nommée Damaris, et d’autres avec eux.

q Les lecteurs de Luc devaient le connaître. La légende s’est emparée de lui, surtout depuis qu’un auteur du Ve siècle (le « Pseudo-Denys ») a mis sous son nom ses écrits mystiques. On l’a aussi identifié avec saint Denys, premier évêque de Paris (IIIe siècle).

Fondation de l’Église de Corinthe.

18 Après cela, Paul s’éloigna d’Athènes et gagna Corinthe.r

r Corinthe reconstruite par César était devenue la capitale de la province romaine d’Achaïe. L’élément romain et latin y était prédominant ; mais le commerce y attirait une population cosmopolite. La colonie juive y était importante. Corinthe était fâcheusement réputée pour la liberté de ses mœurs.

2 Il y trouva un Juif nommé Aquilas, originaire du Pont, qui venait d’arriver d’Italie avec Priscille,s sa femme, à la suite d’un édit de Claude qui ordonnait à tous les Juifs de s’éloigner de Rome.t Il se lia avec eux,

s Appelée aussi Prisca, Rm 16.3 ; 1 Co 16.19 ; 2 Tm 4.19.

t Cette mesure, connue de Suétone, date de 41. Elle ne visait pas littéralement « tous les juifs » de Rome, mais ceux qui s’agitaient « sous l’impulsion de Chrestus », c’est-à-dire du Messie (Christus). Ses effets furent très passagers, cf. Rm 16.3 ; 1 Co 16.19 ; 2 Tm 4.19.

3 et, comme ils étaient du même métier, il demeura chez eux et y travailla.u Ils étaient de leur état fabricants de tentes.

u Bien qu’il reconnaisse le droit des missionnaires à leur subsistance, 1 Co 9.6-14 ; Ga 6.6 ; 2 Th 3.9 ; cf. Lc 10.7, Paul a toujours tenu à travailler de ses mains, 1 Co 4.12, pour n’être à charge à personne. 1 Th 2.9 ; 2 Th 3.8 ; 2 Co 12.13s, et prouver son désintéressement 20.33s ; 1 Co 9.15-18 ; 2 Co 11.7-12. Il n’a accepté de secours que des Philippiens, Ph 4.10-19 ; 2 Co 11.8s, cf. 16.15. À ses fidèles il recommande de même de travailler pour subvenir à leurs besoins, 1 Th 4.11s ; 2 Th 3.10-12, et à ceux des indigents, 20.35 ; Ep 4.28.

4 Chaque sabbat, il discourait à la synagogue et s’efforçait de persuader Juifs et Grecs.

5 Quand Silas et Timothée furent arrivés de Macédoine,v Paul se consacra tout entier à la parole, attestant aux Juifs que Jésus est le Christ.w

v C’est après leur retour que Paul écrivit ses deux lettres aux fidèles de Thessalonique. Cf. 1 Th 1.1 ; 3.6 ; 2 Th 1.1. Arrivant de Macédoine avec des secours, 2 Co 11.8-9 ; Ph 4.15, ils ont assisté Paul dans l’évangélisation de Corinthe, 2 Co 1.19.

w La messianité de Jésus est l’objet spécifique de la prédication aux Juifs, cf. 2.36 ; 3.18, 20 ; 5.42 ; 8.5, 12 ; 9.22 ; 17.3 ; 18.28 ; 24.24 ; 26.23.

6 Mais devant leur opposition et leurs paroles blasphématoires, il secoua ses vêtementsx et leur dit : « Que votre sang retombe sur votre tête ! Pour moi, je suis pur, et désormais c’est aux païens que j’irai. »

x Le geste marque une rupture. La parole qui suit est biblique, cf. Lv 20.9-16 ; 2 S 1.16, et signifie aux Juifs que toute la responsabilité de leur attitude et de ses suites pèse sur eux. Paul en est dégagé, « pur » du sang de leur châtiment ; cf. Ez 3.17-21.

7 Alors, se retirant de là, Paul se rendit chez un certain Justus,y homme adorant Dieu, dont la maison était contiguë à la synagogue.

y Var. « Titus Justus » ou « Titius Justus ».

8 Crispus, le chef de synagogue, crut au Seigneur avec tous les siens. Beaucoup de Corinthiens, en entendant Paul devenaient croyants et se faisaient baptiser.z

z Add. occ. « croyant en Dieu par le nom de notre Seigneur Jésus Christ », cf. 8.37. Les convertis étaient donc des païens.

9 Une nuit, dans une vision, le Seigneur dit à Paul : « Sois sans crainte. Continue de parler, ne te tais pas. 10 Car je suis avec toi, et personne ne mettra sur toi la main pour te faire du mal, parce que j’ai à moi un peuple nombreux dans cette ville. » 11 Il résida là un an et six mois, enseignant aux gens la parole de Dieu.

Paul traduit en justice par les Juifs.

12 Alors que Gallion était proconsul d’Achaïe,a les Juifs se soulevèrent d’un commun accord contre Paul et l’amenèrent devant le tribunal

a Une inscription de Delphes situe le proconsulat de Gallion en 51-52. La comparution de Paul devant Gallion doit avoir eu lieu vers la fin (v. 18) de son séjour de dix-huit mois (v. 11) à Corinthe vraisemblablement en fin d’été 51.

13 en disant : « Cet individu cherche à persuader les gens d’adorer Dieu d’une manière contraire à la Loi. »b

b Terme équivoque qui désigne aussi bien la loi romaine, cf. 16.21 ; 17.7, que la Loi juive, elle-même protégée par la loi romaine. Gallion ne veut voir là, v. 15, qu’une question d’interprétation de la Loi juive, et il décline toute compétence.

14 Paul allait ouvrir la bouche, quand Gallion dit aux Juifs : « S’il était question de quelque délit ou méfait, j’accueillerais, Juifs, votre plainte, comme de raison. 15 Mais puisqu’il s’agit de contestations sur des mots et des noms et sur votre propre Loi, à vous de voir ! Être juge, moi, en ces matières, je m’y refuse. » 16 Et il les renvoya du tribunal. 17 Tous alors se saisirent de Sosthène,c le chef de synagogue, et, devant le tribunal, se mirent à le battre. Et de tout cela Gallion n’avait cure.

c Peut-être celui de 1 Co 1.1.

Retour à Antioche et départ pour le troisième voyage.

18 Paul resta encore un certain temps à Corinthe, puis il prit congé des frères et s’embarqua pour la Syrie.d Priscille et Aquila l’accompagnaient. Il s’était fait tondre la tête à Cenchrées, à cause d’un vœu qu’il avait fait.e

d Vers Antioche, qui reste son point d’attache.

e Texte obscur. C’est Paul, semble-t-il, qui a fait le vœu, plutôt qu’Aquilas. Celui qui émettait un vœu devenait nazîr, cf. Nb 6.1, pendant tout le temps de son vœu (généralement 30 jours) il devait, entre autres observances, ne pas se faire couper les cheveux durant ce temps. On ne sait si Paul a émis son vœu à Cenchrées ou s’il l’y a achevé. Cf. 21.23-27 où Paul accomplit avec quatre autres Juifs les rites d’achèvement d’un vœu.

19 Ils arrivèrent à Éphèse, où il se sépara de ses compagnons. Il se rendit à la synagogue et s’y entretint avec les Juifs. 20 Ceux-ci lui demandèrent de prolonger son séjour. Il n’y consentit pas, 21 mais, en prenant congé d’eux, il leur dit : « Je reviendrai chez vous une autre fois, s’il plaît à Dieu. » Et d’Éphèse il gagna le large.

22 Débarqué à Césarée, il monta saluer l’Église,f puis descendit à Antioche ;

f C’est-à-dire l’Église de Jérusalem ; on peut situer à ce point l’assemblée de Jérusalem dont il s’agit en 15.5s (voir Ga 2.5).

23 après y avoir passé quelque temps, il repartit et parcourut successivement la région galate et la Phrygie en affermissant tous les disciples.

Apollos.

24 Un Juif nommé Apollos,g originaire d’Alexandrie, était arrivé à Éphèse. C’était un homme éloquent, versé dans les Écritures.

g Il est question de lui en 1 Co son passage à Corinthe avait suscité des enthousiasmes, bientôt dégénérés en coteries, cf. 1 Co 1.12 ; 3.4-11, 22 ; voir aussi Tt 3.13. — La notice sur Apollos a des traits communs avec celle qui suit, sur les disciples que Paul trouve à Éphèse le christianisme incomplet de l’un et des autres reflète peut-être celui de l’Église d’Alexandrie à cette époque.

25 Il avait été instruit de la Voie du Seigneur, et, dans la ferveur de son âme, il prêchait et enseignait avec exactitude ce qui concerne Jésus, bien qu’il connût seulement le baptême de Jean. 26 Il se mit donc à parler avec assurance dans la synagogue. Priscille et Aquila, qui l’avaient entendu, le prirent avec eux et lui exposèrent plus exactement la Voie.h

h Add. « de Dieu ».

27 Comme il voulait partir pour l’Achaïe, les frères l’y encouragèrent et écrivirent aux disciples de lui faire bon accueil.i Arrivé là, il fut, par l’effet de la grâce, d’un grand secours aux croyants :

i Sur l’usage des lettres de recommandation dans les premières chrétientés, cf. Rm 16.1 ; 2 Co 3.1s ; Col 4.10 ; 3 Jn 9-10, 12.

28 car il réfutait vigoureusement les Juifs en public, démontrant par les Écritures que Jésus est le Christ.

Des disciples de Jésus à Éphèse.j

19 Tandis qu’Apollos était à Corinthe,k Paul, après avoir traversé le haut-pays, arriva à Éphèse.l Il y trouva quelques disciples

j Il s’agit de « disciples » de Jésus qui n’avaient reçu que le baptême de Jean — sans doute des mains de Jésus cf. Jn 3.22 ; 4.1-2.

k Soudure rédactionnelle entre les deux notices intercalées dans le récit de voyage. — Le texte occ. porte « Alors qu’en exécution de ses projets, Paul voulait partir pour Jérusalem, l’Esprit lui dit de revenir en Asie. Après avoir donc traversé... »

l Éphèse passait pour être alors, avec Alexandrie, une des plus belles villes de l’empire centre religieux, politique et commercial, de population mélangée.

2 et leur dit : « Avez-vous reçu l’Esprit Saint quand vous êtes devenus croyants ? » Ils lui répondirent : « Mais nous n’avons même pas entendu dire qu’il y a un Esprit Saint. »m

m Ils ignorent non pas son existence — s’ils ont la moindre connaissance de l’Ancien Testament —, mais son effusion, réalisation des promesses messianiques, cf. 2.17-18, 33.

3 Et lui : « Quel baptême avez-vous donc reçu ? » — « Le baptême de Jean », répondirent-ils. 4 Paul dit alors : « Jean a baptisé d’un baptême de repentance, en disant au peuple de croire en celui qui viendrait après lui, c’est-à-dire en Jésus. » 5 À ces mots, ils se firent baptiser au nom du Seigneur Jésus ;

6 et quand Paul leur eut imposé les mains, l’Esprit Saint vint sur eux, et ils se mirent à parler en langues et à prophétiser. 7 Ces hommes étaient en tout une douzaine.

Fondation de l’Église d’Éphèse.n

8 Paul se rendit à la synagogue et, pendant trois mois, y parla avec assurance. Il discourait et cherchait à persuader ses auditeurs au sujet du Royaume de Dieu.

n Le récit, interrompu par les notices sur Apollos et sur les disciples que Paul trouve à Éphèse reprend 19.8 fait suite à 18.23.19.1.

9 Certains cependant, endurcis et incrédules, décriaient la Voie devant l’assistance. Il rompit alors avec eux et prit à part les disciples. Chaque jour, il les entretenait dans l’école de Tyrannos.o

o Le texte occ. précise qu’il y enseignait entre 11 heures et 16 heures.

10 Il en fut ainsi deux années durant,p en sorte que tous les habitants de l’Asie,q Juifs et Grecs, purent entendre la parole du Seigneur.

p 20.31 dit trois ans. C’est durant ce séjour que Paul écrivit la première lettre aux Corintiens, la lettre aux Galates et, avec quelque probabilité, la lettre aux Philippiens.

q Non pas toute l’Asie proconsulaire (partie occidentale de l’Asie Mineure), mais la région dont Éphèse est le centre avec les sept villes de Ap 1.11. Paul avait confié à Epaphras, un Colossien, le soin d’évangéliser Colosses ; Épaphras avait étendu son apostolat à Laodicée et à Hiérapolis, Col 1.7 ; 4.12-13. Paul était encore secondé par Timothée et Éraste. 19.22, Gaius et Aristarque, 19.29, Tite, dont les Actes ne parlent jamais, et d’autres, cf. 2 Co 12.18. Luc attribue à Paul le travail de toute l’équipe qu’il dirigeait ; cf. Col 4.10.

Les exorcistes juifs.

11 Dieu opérait par les mains de Paul des miracles peu banals, 12 à tel point qu’il suffisait d’appliquer sur les malades des mouchoirs ou des linges qui avaient touché son corps : alors les maladies les quittaient et les esprits mauvais s’en allaient.

13 Or quelques exorcistes juifsr ambulants s’essayèrent à prononcer, eux aussi, le nom du Seigneur Jésus sur ceux qui avaient des esprits mauvais. Ils disaient : « Je vous adjure par ce Jésus que Paul proclame. »

r Sur la pratique des exorcismes chez les Juifs, cf. Mt 12.27. Jésus lui-même, et les apôtres après lui, cf. 5.16 ; 16.18, ont fréquemment délivré des démoniaques, cf. Mt 8.29.

14 Il y avait sept fils de Scéva, un grand prêtre juif, qui agissaient de la sorte. 15 Mais l’esprit mauvais leur répliqua : « Jésus, je le connais, et Paul, je sais qui c’est. Mais vous autres, qui êtes-vous ? » 16 Et se jetant sur eux, l’homme possédé de l’esprit mauvais les maîtrisa les uns et les autress et les malmena si bien que c’est nus et couverts de blessures qu’ils s’échappèrent de cette maison.

s Ou « tous ».

17 Tous les habitants d’Éphèse, Juifs et Grecs, surent la chose. La crainte alors s’empara de tous et le nom du Seigneur Jésus fut magnifié.

18 Beaucoup de ceux qui étaient devenus croyants venaient faire leurs aveux et dévoiler leurs pratiques.t

t Pratiques magiques, pour lesquelles Éphèse était réputée.

19 Bon nombre de ceux qui s’étaient adonnés à la magie apportaient leurs livres et les brûlaient en présence de tous. On en estima la valeur : cela faisait cinquante mille pièces d’argent.

20 Ainsi la parole du Seigneur croissait et s’affermissait puissamment.u

u Texte alex. « Ainsi, par la puissance du Seigneur, la parole croissait et s’affermissait. »

V. La fin des missions.
Le prisonnier du Christ

Les projets de Paul.

21 Après ces événements, Paul forma le projet de traverser la Macédoine et l’Achaïe pour gagner Jérusalem. « Après avoir été là, disait-il, il me faut voir également Rome. » 22 Il envoya alors en Macédoine deux de ses auxiliaires, Timothée et Éraste ; pour lui, il resta quelque temps encore en Asie.

À Éphèse. L’émeute des orfèvres.v

23 Vers ce temps-là, un tumulte assez grave se produisit à propos de la Voie.

v Cet épisode, qui provient d’une source particulière et qui tranche sur le style habituel de Luc, a été rattaché artificiellement par lui à son récit de l’évangélisation d’Éphèse.

24 Un certain Démétrius, qui était orfèvre et fabriquait des temples d’Artémis en argent, procurait ainsi aux artisans beaucoup de travail. 25 Il les réunit, ainsi que les ouvriers des métiers similaires, et leur dit : « Mes amis, c’est à cette industrie, vous le savez, que nous devons notre bien-être. 26 Or, vous le voyez et l’entendez dire, non seulement à Éphèse, mais dans presque toute l’Asie, ce Paul, par ses raisons, a entraîné à sa suite une foule considérable, en affirmant qu’ils ne sont pas dieux, ceux qui sont sortis de la main des hommes.

27 Cela risque non seulement de jeter le discrédit sur notre profession, mais encore de faire compter pour rien le sanctuaire même de la grande déesse Artémis, pour finir par dépouiller de son prestige celle que révèrent toute l’Asie et le monde entier. » 28 À ces mots, remplis de colère, ils se mirent à crier :w « Grande est l’Artémis des Éphésiens ! »

w Add. occ. « en se précipitant dans la rue ».

29 Le désordre gagna la ville entière. On se précipita en masse au théâtre, y entraînant les Macédoniens Gaïus et Aristarque,x compagnons de voyage de Paul.

x Aristarque, originaire de Thessalonique, 20.4, a été le compagnon de Paul durant sa captivité, 27.2 ; Col 4.10 ; Phm 24. Gaius est probablement celui de 20.4.

30 Paul, lui, voulait se présenter devant l’assemblée du peuple, mais les disciples l’en empêchèrent. 31 Quelques asiarques même, qui l’avaient en amitié, le firent instamment prier de ne pas s’exposer en allant au théâtre.

32 Les uns criaient une chose, les autres une autre. L’assemblée était en pleine confusion, et la plupart ne savaient même pas pourquoi on s’était réuni. 33 Des gens de la foule persuadèrenty Alexandre, que les Juifs poussaient en avant. Alexandre, ayant fait signe de la main, voulait s’expliquer devant le peuple.

y Autre traduction « Alors on fit sortir de la foule ».

34 Mais quand on eut reconnu que c’était un Juif, tous se mirent à crier d’une seule voix, pendant près de deux heures : « Grande est l’Artémis des Éphésiens ! » 35 Enfin le chancelier calma la foule et dit : « Éphésiens, quel homme au monde ignore que la ville d’Éphèse est la gardienne du temple de la grande Artémis et de sa statue tombée du ciel ? 36 Cela étant donc sans conteste, il faut vous tenir tranquilles et ne rien faire d’inconsidéré. 37 Vous avez amené ces hommes : ils ne sont coupables ni de sacrilège ni de blasphème envers notre déesse. 38 Que si Démétrius et les artisans qui sont avec lui ont des griefs contre quelqu’un, il y a des audiences, il y a des proconsuls : qu’ils portent plainte. 39 Et si vous avez quelque autre affaire à débattre, on la résoudra dans l’assemblée régulière. 40 Aussi bien risquons-nous d’être accusés de sédition pour ce qui s’est passé aujourd’hui, vu qu’il n’existe aucun motif qui nous permette de justifier cet attroupement. » Et sur ces mots, il congédia l’assemblée.

Paul quitte Éphèse.

20 Après que le tumulte eut pris fin,z Paul convoqua les disciples, leur adressa une exhortation et, après avoir fait ses adieux, partit pour la Macédoine.

z Le récit reprend où il en était à 19.22.

2 Il traversa cette contrée,a y exhorta longuement les fidèles et parvint en Grèce,

a D’où il envoya sa deuxième lettre aux fidèles de Corinthe.

3 où il resta trois mois.b Un complot fomenté par les Juifs contre lui au moment où il allait s’embarquer pour la Syriec le décida à s’en retourner par la Macédoine.

b Paul a donc pu réaliser enfin les projets de 1 Co 16.5-6. C’est durant ce séjour à Corinthe qu’il écrivit son épître aux Romains. — Texte occ. « Après qu’il y eut passé trois mois et à la suite d’un complot des Juifs contre lui, il voulut partir pour la Syrie, mais l’Esprit lui dit de s’en retourner par la Macédoine. »

c Pour porter à Jérusalem le produit de la collecte, cf. 19.21 et Rm 15.25.

4 Il avait pour compagnonsd Sopatros, fils de Pyrrhus, de Bérée ; Aristarque et Secundus, de Thessalonique ; Gaïus, de Dobérès, et Timothée, ainsi que les Asiates Tychique et Trophime.e

d Add. « jusqu’en Asie ». — Sopatros est peut-être le Sosipatros de Rm 16.21, qui était juif. — « de Dobérès »; var. « de Derbé ».

e Trophime, un Éphésien, 21.29, cf. 2 Tm 4.20. Tychique est nommé plusieurs fois dans les épîtres, Ep 6.21 ; Col 4.7 ; 2 Tm 4.12 ; Tt 3.12.

5 Ceux-ci prirent les devants et nousf attendirent à Troas.

f Récit à la première personne à Philippes, Paul a retrouvé l’auteur du Journal de voyage qui l’accompagnera désormais, cf. 16.10.

6 Nous-mêmes, nous quittâmes Philippes par merg après les jours des Azymesh et, au bout de cinq jours, les rejoignîmes à Troas, où nous passâmes sept jours.i

g Par le port de Néapolis, cf. 16.11 ;

h Les fêtes de la Pâque, cf. Ex 12.1.

i Sur le ministère antérieur de Paul dans cette ville (durant son voyage d’Éphèse à Corinthe vv. 1-2), cf. 2 Co 2.12.

À Troas. Paul ressuscite un mort.

7 Le premier jour de la semaine,j nous étions réunis pour rompre le pain ; Paul, qui devait partir le lendemain, s’entretenait avec eux. Il prolongea son discours jusqu’au milieu de la nuit.

j Le premier jour de la semaine juive, devenu le jour de réunion des chrétiens, cf. Mt 28.1 ; 1 Co 16.2, le « jour du Seigneur » (« dimanche »), Ap 1.10. La réunion dominicale avait lieu au début de ce jour, mais compté à la manière juive, donc le samedi soir.

8 Il y avait bon nombre de lampes dans la chambre haute où nous étions réunis. 9 Un adolescent, du nom d’Eutyque, qui était assis sur le bord de la fenêtre, se laissa gagner par un profond sommeil, pendant que Paul discourait toujours. Entraîné par le sommeil, il tomba du troisième étage en bas. On le releva mort. 10 Paul descendit, se pencha sur lui, le prit dans ses bras et dit : « Ne vous agitez donc pas : son âme est en lui. » 11 Puis il remonta, rompit le pain et mangea ; longtemps encore il parla, jusqu’au point du jour. C’est alors qu’il partit. 12 Quant au jeune garçon, on le ramena vivant, et ce ne fut pas une petite consolation.

De Troas à Milet.

13 Pour nous, prenant les devants par mer, nous gagnâmes le large vers Assos, où nous devions prendre Paul : ainsi en avait-il disposé. Lui-même viendrait par la route. 14 Lorsqu’il nous eut rejoints à Assos, nous le prîmes à bord et gagnâmes Mitylène. 15 De là, nous repartîmes le lendemain et parvînmes devant Chio. Le jour suivant, nous touchions à Samos, et, après nous être arrêtés à Trogyllion, nous arrivions le jour d’après à Milet. 16 Paul avait en effet décidé de passer au large d’Éphèse, pour ne pas avoir à s’attarder en Asie. Il se hâtait afin d’être, si possible, le jour de la Pentecôte à Jérusalem.

Adieux aux anciens d’Éphèse.

17 De Milet, il envoya chercher à Éphèse les anciens de cette Église. 18 Quand ils furent arrivés auprès de lui, il leur dit :k
« Vous savez vous-mêmes de quelle façon, depuis le premier jour où j’ai mis le pied en Asie, je n’ai cessé de me comporter avec vous,

k Le troisième grand discours de Paul dans les Actes. Le premier représentait sa prédication devant les Juifs, 13, le deuxième sa prédication devant les païens, 17 ; celui-ci constitue son testament pastoral. Paul l’adresse aux chefs de la principale des Églises fondées par lui. Les points de contact avec ses épîtres sont nombreux ; l’esprit est celui des épîtres pastorales. Après avoir rappelé son ministère en Asie, vv. 18-21, et fait prévoir une séparation définitive, peut-être celle de la mort, vv. 22-27, Paul fait ses suprêmes recommandations aux anciens d’Éphèse (et par leur intermédiaire à tous les pasteurs d’Églises) vigilance, vv. 28-32, désintéressement et charité, vv. 33-35. Ces paroles s’autorisent des propres exemples de Paul, dont ce discours nous donne ainsi un admirable portrait.

19 servant le Seigneur en toute humilité, dans les larmes et au milieu des épreuves que m’ont occasionnées les machinations des Juifs. 20 Vous savez comment, en rien de ce qui vous était avantageux, je ne me suis dérobé quand il fallait vous prêcher et vous instruire, en public et en privé, 21 adjurant Juifs et Grecs de se repentir envers Dieu et de croire en Jésus, notre Seigneur.l

l Résumé de la prédication paulinienne, à comparer avec 17.30-31 ; 26.20 ; 1 Th 1.9-10 ; 1 Co 8.4-6. Foi et conversion doivent aller de pair, cf. Mc 1.15.

22 « Et maintenant voici qu’enchaîné par l’Espritm je me rends à Jérusalem, sans savoir ce qui m’y adviendra,

m En se laissant conduire par l’Esprit dans un voyage qui doit aboutir à sa captivité, Paul se considère comme un prisonnier de l’Esprit Saint. — Autre traduction « enchaîné en esprit », moralement prisonnier.

23 sinon que, de ville en ville, l’Esprit Saint m’avertit que chaînes et tribulations m’attendent. 24 Mais je n’attache aucun prix à ma propre vie,n pourvu que je mène à bonne fin ma course et le ministère que j’ai reçu du Seigneur Jésus : rendre témoignage à l’Évangile de la grâce de Dieu.

n Cf. 15.26 ; 21.13 ; 1 Th 2.8 ; Ph 1.21-23. — Autre traduction « Mais la vie à mes yeux ne vaut pas la peine qu’on en parle. »

25 « Et maintenant voici que, je le sais, vous ne reverrez plus mon visage,o vous tous au milieu de qui j’ai passé en proclamant le Royaume.

o Cf. v. 38. De Jérusalem, Paul comptait partir pour l’Espagne, Rm 15.24-28.

26 C’est pourquoi je l’atteste aujourd’hui devant vous : je suis pur du sang de tous. 27 Car je ne me suis pas dérobé quand il fallait vous annoncer en son entier le dessein de Dieu.

28 « Soyez attentifs à vous-mêmes, et à tout le troupeau dont l’Esprit Saint vous a établis gardiens pour paître l’Église de Dieu,p qu’il s’est acquise par le sang de son propre fils.q

p Var. « l’Église du Seigneur ». — 1 P 2.9-10 parle du Peuple que Dieu s’est acquis (d’après Isa 43.21 ; cf. 15.14) ; il est constitué en « Assemblée (=Église) de Dieu », 5.11, expression chère à Paul, cf. 1 Co 1.2 ; 10.32 ; 11.22, etc.

q Littéralement « qu’il s’est acquise par son propre sang ». Ceci ne pouvant être dit de Dieu, il faut admettre que « propre » est employé substantivement : « le sang de son propre (Fils) », ou bien que la pensée glisse de l’action du Père à celle du Fils, cf. Rm 8.31-39. Pour l’idée, cf. Ep 5.25-27 ; He 9.12-14 ; 13.12.

29 « Je sais, moi, qu’après mon départ il s’introduira parmi vous des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau, 30 et que du milieu même de vous se lèveront des hommes tenant des discours pervers dans le but d’entraîner les disciples à leur suite. 31 C’est pourquoi soyez vigilants, vous souvenant que, trois années durant, nuit et jour, je n’ai cessé d’admonester avec larmes chacun d’entre vous.

32 « Et à présent je vous confie à Dieu et à la parole de sa grâce, qui a le pouvoirr de bâtir l’édifice et de procurer l’héritage parmi tous les sanctifiés.

r « à Dieu »; var. « au Seigneur ». — « qui a le pouvoir » pourrait aussi se rapporter à Dieu, cf. Rm 16.25.

33 « Argent, or, vêtements, je n’en ai convoité de personne : 34 vous savez vous-mêmes qu’à mes besoins et à ceux de mes compagnons ont pourvu les mains que voilà. 35 De toutes manières je vous l’ai montré : c’est en peinant ainsi qu’il faut venir en aide aux faibles et se souvenir des paroles du Seigneur Jésus, qui a dit lui-même : Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. »s

s Sentence que les évangiles n’ont pas conservée.

36 À ces mots, se mettant à genoux, avec eux tous il pria. 37 Tous alors éclatèrent en sanglots, et, se jetant au cou de Paul, ils l’embrassaient, 38 affligés surtout de la parole qu’il avait dite : qu’ils ne devaient plus revoir son visage. Puis ils l’accompagnèrent jusqu’au bateau.

La montée à Jérusalem.

21 Lorsque, nous étant arrachés à eux, nous eûmes gagné le large, nous cinglâmes droit sur Cos ; le lendemain nous atteignîmes Rhodes, et de là Patara.t

t Add. « et Myre ».

2 Ayant trouvé un navire en partance pour la Phénicie, nous y montâmes et partîmes. 3 Arrivés en vue de Chypre, nous la laissâmes à gauche pour voguer vers la Syrie, et nous abordâmes à Tyr, car c’est là que le bateau devait décharger sa cargaison. 4 Ayant découvert les disciples, nous restâmes là sept jours. Poussés par l’Esprit,u ils disaient à Paul de ne pas monter à Jérusalem.

u Ces prophètes ne transmettent pas à Paul un ordre de l’Esprit, mais, éclairés par l’Esprit sur le sort qui l’attend, ils voudraient, dans leur affection, lui faire éviter ce sort.

5 Mais, notre séjour achevé, nous partîmes. Nous marchions, escortés de tous, y compris femmes et enfants. Hors de la ville, nous nous mîmes à genoux sur la grève pour prier. 6 Puis, ayant fait nos adieux, nous montâmes sur le navire. Ces gens s’en retournèrent alors chez eux.

7 Et nous, achevant la traversée, nous nous rendîmes de Tyr à Ptolémaïs. Après avoir salué les frères et être restés un jour avec eux, 8 nous repartîmes le lendemain pour gagner Césarée. Descendus chez Philippe l’évangéliste, qui était un des Sept, nous demeurâmes chez lui. 9 Il avait quatre filles vierges qui prophétisaient. 10 Comme nous passions là plusieurs jours, un prophète du nom d’Agabus descendit de Judée. 11 Il vint nous trouver et, prenant la ceinture de Paul, il s’en lia les pieds et les mainsv en disant : « Voici ce que dit l’Esprit Saint : L’homme auquel appartient cette ceinture, les Juifs le lieront comme ceci à Jérusalem, et ils le livreront aux mains des païens. »w

v Prophétie mimée, à la manière des anciens prophètes, cf. Jr 18.1.

w Cette annonce (cf. 28.17) ne correspond que d’une manière assez large au récit de l’arrestation (cf. 21.31-33), mais se rapproche de l’annonce de la passion de Jésus, Lc 18.31-34 ; cf. Col 1.24 ; Ph 3.10, etc.

12 À ces paroles, nous nous mîmes, avec ceux de l’endroit, à supplier Paul de ne pas monter à Jérusalem. 13 Alors il répondit : « Qu’avez-vous à pleurer et à me briser le cœur ? Je suis prêt, moi, non seulement à me laisser lier, mais encore à mourir à Jérusalem pour le nom du Seigneur Jésus. » 14 Comme il n’y avait pas moyen de le persuader, nous cessâmes nos instances, disant : « Que la volonté du Seigneur se fasse ! »

Arrivée de Paul à Jérusalem.

15 Après ces quelques jours, ayant achevé nos préparatifs, nous montâmes à Jérusalem. 16 Des disciples de Césarée nous accompagnèrent et nous menèrent logerx chez un certain Mnason, de Chypre, disciple des premiers jours.

x Peut-être à mi-chemin de Jérusalem, comme l’indique le texte occ.

17 À notre arrivée à Jérusalem, les frères nous reçurent avec joie. 18 Le jour suivant, Paul se rendit avec nousy chez Jacques, où tous les anciens se réunirent.

y Dernier « nous » avant 27.1 (départ pour Rome).

19 Après les avoir salués, il se mit à exposer par le détail ce que Dieu avait fait chez les païens par son ministère. 20 Et ils glorifiaient Dieu de ce qu’ils entendaient. Ils lui dirent alors : « Tu vois, frère, combien de milliers de Juifs sont devenus croyants et tous se trouvent être de zélés partisans de la Loi.z

z Pour eux-mêmes et pour les autres, cf. 11.2 ; 15.1, 5 ; Ga 2.12 ; 5.1s.

21 Or à ton sujet ils ont entendu dire que, dans ton enseignement, tu pousses les Juifs qui vivent au milieu des païens à la défection vis-à-vis de Moïse,a leur disant de ne plus circoncire leurs enfantsb et de ne plus suivre les coutumes.

a Les principes de Paul menaient à cette conclusion puisque la Loi mosaïque ne conférait plus au Juif aucun avantage sur le païen, la foi étant la source unique de la justification, cf. Rm 1.6 ; 3.22. Mais en développant cette doctrine, Paul songeait à assurer la liberté des convertis de la gentilité à l’égard des observances du judaïsme, cf. Ga 2.11s, plutôt qu’à en détourner les Juifs pieux.

b Cf. Rm 2.25-29 ; 4.9-12 ; 1 Co 7.17-20.

22 Que faire donc ? Assurément la multitude ne manquera pas de se rassembler, car on apprendra ton arrivée.c

c Var. « Que faire donc ? De toute façon, on apprendra ton arrivée. »

23 Fais donc ce que nous allons te dire. Nous avons ici quatre hommes qui sont tenus par un vœu. 24 Emmène-les, joins-toi à eux pour la purification et charge-toi des frais pour qu’ils puissent se faire raser la tête.d Ainsi tout le monde saura qu’il n’y a rien de vrai dans ce qu’ils ont entendu dire à ton sujet, mais que tu te conduis, toi aussi, en observateur de la Loi.

d Les sacrifices imposés pour la clôture du naziréat, Nb 6.14-15, étaient très coûteux.

25 Quant aux païens qui ont embrassé la foi, nous leur avons mandé nos décisions : se garder des viandes immolées aux idoles, du sang, des chairs étouffées et des unions illégitimes. »e

e Texte occ. « Au sujet des païens qui ont embrassé la foi, on n’a rien à te dire. Nous-mêmes, en effet, avons mandé nos décisions ils n’ont rien d’autre à observer que se garder des viandes immolées aux idoles, du sang et des unions illégitimes. »

26 Le jour suivant, Paul emmena donc ces hommes et, après s’être joint à eux pour la purification, il entra dans le Temple, où il annonça le délai dans lequel, les jours de purification terminés, on devrait présenter l’oblation pour chacun d’entre eux.f

f Texte obscur. Il semble supposer avant le sacrifice de relèvement du vœu un délai de sept jours consacrés à certains rites de purification ; pratique inconnue par ailleurs.

L’arrestation de Paul.

27 Les sept jours touchaient à leur fin, quand les Juifs d’Asie, l’ayant aperçu dans le Temple, ameutèrent la foule et mirent la main sur lui, 28 en criant : « Hommes d’Israël, au secours ! Le voici, l’individu qui prêche à tous et partout contre notre peuple, contre la Loi et contre ce Lieu !g Et voilà encore qu’il a introduit des Grecs dans le Temple et profané ce saint Lieu. »

g Cf. les accusations contre Étienne, 6.11-14, et contre Jésus, Mt 26.61 ; 27.40.

29 Précédemment en effet ils avaient vu l’Éphésien Trophime avec lui dans la ville, et ils pensaient que Paul l’avait introduit dans le Temple.

30 La ville entière fut en effervescence, et le peuple accourut de toutes parts. On s’empara de Paul, on se mit à le traîner hors du Temple, dont les portes furent aussitôt fermées. 31 On cherchait à le mettre à mort, quand cet avis parvint au tribun de la cohorte :h « Tout Jérusalem est sens dessus dessous ! »

h Dans la forteresse Antonia, qui dominait, à l’angle nord-ouest, les parvis du Temple, était casernée une garnison romaine, formée d’une cohorte auxiliaire.

32 Aussitôt, prenant avec lui des soldats et des centurions, il se précipita sur les manifestants. Ceux-ci, à la vue du tribun et des soldats, cessèrent de frapper Paul. 33 Alors le tribun s’approcha, se saisit de lui et ordonna de le lier de deux chaînes ; puis il demanda qui il était et ce qu’il avait fait. 34 Mais dans la foule les uns criaient ceci, les autres cela. Ne pouvant, dans ce tapage, obtenir aucun renseignement précis, il donna l’ordre de conduire Paul dans la forteresse.

35 Quand il eut atteint les degrés, il dut être porté par les soldats, en raison de la violence de la foule. 36 Car le peuple suivait en masse, aux cris de : « À mort ! »

37 Sur le point d’être introduit dans la forteresse, Paul dit au tribun : « Me serait-il permis de te dire un mot ? » — « Tu sais le grec ? demanda celui-ci. 38 Tu n’es donc pas l’Égyptien qui, ces temps derniers, a soulevé quatre banditsi et les a entraînés au désert ? » —

i Ou « quatre mille sicaires », nom qui désigne proprement les nationalistes extrémistes. Ce soulèvement est mentionné par Josèphe.

39 « Moi, reprit Paul, je suis Juif, de Tarse en Cilicie, citoyen d’une ville qui n’est pas sans renom. Je t’en prie, permets-moi de parler au peuple. » 40 La permission accordée, Paul, debout sur les degrés, fit de la main signe au peuple. Il se fit un grand silence. Alors il leur adressa la parole en langue hébraïque.j

j Probablement en araméen ; cf. 26.14.

Harangue de Paul aux Juifs de Jérusalem.k

22 « Frères et pères, écoutez ce que j’ai maintenant à vous dire pour ma défense. »

k Après les trois discours représentatifs de la prédication de Paul, 13, 17 et 20, les Actes donnent trois plaidoyers personnels devant la foule juive de Jérusalem, 22, devant le procurateur Félix, 24, et devant le roi Agrippa, 26, chacun d’eux habilement adapté à l’auditoire, cf. 9.1. Devant la foule, Paul présente sa conduite comme celle d’un Juif très pieux.

2 Quand ils entendirent qu’il s’adressait à eux en langue hébraïque, leur silence se fit plus profond. Il poursuivit : 3 « Je suis Juif. Né à Tarse en Cilicie, j’ai cependant été élevé ici dans cette ville, et c’est aux pieds de Gamaliel que j’ai été formé à l’exacte observance de la Loi de nos pères, et j’étais rempli du zèle de Dieu, comme vous l’êtes tous aujourd’hui. 4 J’ai persécuté à mort cette Voie,l chargeant de chaînes et jetant en prison hommes et femmes,

l L’Église, cf. 9.2. Sur Paul persécuteur, voir 7.58 ; 8.1, 3 ; 9.1-2, 21 ; 22.19-20 ; 26.10-11 ; 1 Co 15.9 ; Ga 1.13, 23 ; Ph 3.6 ; 1 Tm 1.13.

5 comme le grand prêtre m’en est témoin, ainsi que tout le collège des anciens. J’avais même reçu d’eux des lettres pour les frères de Damas, et je m’y rendais en vue d’amener ceux de là-bas enchaînés à Jérusalem pour y être châtiés.

6 « Je faisais route et j’approchais de Damas, quand tout à coup, vers midi, une grande lumière venue du ciel m’enveloppa de son éclat. 7 Je tombai sur le sol et j’entendis une voix qui me disait : « Saoul, Saoul, pourquoi me persécutes-tu ? »

8 Je répondis : « Qui es-tu, Seigneur ? » Il me dit alors : « Je suis Jésus le Nazôréen, que tu persécutes. » 9 Ceux qui étaient avec moi virent bien la lumière, mais ils n’entendirent pas la voix de celui qui me parlait. 10 Je repris : « Que dois-je faire, Seigneur ? » Le Seigneur me dit : « Relève-toi. Va à Damas. Là on te dira tout ce qu’il t’est prescrit de faire. » 11 Mais comme je n’y voyais plus à cause de l’éclat de cette lumière, c’est conduit par la main de mes compagnons que j’arrivai à Damas.

12 « Il y avait là un certain Ananie, homme dévot selon la Loi et jouissant du bon témoignage de tous les Juifs de la ville ;m

m Paul ne présente Ananie que comme un bon Juif, sans préciser qu’il était chrétien, 9.10, ni mentionner sa vision, 9.10-16.

13 il vint me trouver et, une fois près de moi, me dit : « Saoul, mon frère, recouvre la vue. » Et moi, au même instant, je pus le voir. 14 Il dit alors : « Le Dieu de nos pères t’a prédestiné à connaître sa volonté, à voir le Justen et à entendre la voix sortie de sa bouche ;

n Le Christ, cf. 3.14 ; 7.52.

15 car pour lui tu dois être témoin devant tous les hommes de ce que tu as vu et entendu.o

o Cf. 9.15. Ici Ananie parle au nom du « Dieu des pères », comme un prophète de l’AT. Paul doit être témoin « devant tous les hommes », sans préciser encore « devant les païens » (v. 21).

16 Pourquoi tarder encore ? Allons ! Reçois le baptême et purifie-toi de tes péchés en invoquant son nom. »

17 « De retour à Jérusalem,p il m’est arrivé, un jour que je priais dans le Temple, de tomber en extase.

p Raccourcissement des perspectives il s’est écoulé trois ans avant ce retour à Jérusalem, cf. 9.23. L’extase dont Paul parle ici n’est pas mentionnée ailleurs ; elle ne peut se confondre avec celle de 2 Co 12.1-4.

18 Je vis le Seigneur, qui me dit : « Hâte-toi, sors vite de Jérusalem, car ils n’accueilleront pas ton témoignage à mon sujet. »q

q Le grand thème de Luc dans son récit de l’apostolat de Paul, cf. 13.46-48 ; 18.6 ; 28.25-28.

19 « Seigneur, répondis-je, ils savent pourtant bien que, de synagogue en synagogue, je faisais jeter en prison et battre de verges ceux qui croient en toi ;

20 et quand on répandait le sang d’Étienne, ton témoin,r j’étais là, moi aussi, d’accord avec ceux qui le tuaient, et je gardais leurs vêtements. »

r En grec « ton martyr ». Le mot n’a pas encore son sens précis, mais on s’en approche le témoignage suprême est celui du sang. Cf. Ap 2.13 ; 6.9 ; 17.6.

21 Il me dit alors : « Va ; c’est au loin, vers les païens, que moi, je veux t’envoyer ». »s

s « Apôtre » veut dire « envoyé ». Ces paroles du Christ équivalent donc à constituer Paul apôtre, cf. Ga 1.1 ; 1 Co 9.1 ; 2 Co 12.11-12, et spécialement apôtre des païens, Ga 1.16 ; 2.7-8 ; Rm 1.5 ; 11.13 ; 15.16, 18 ; Ep 3.6-8 ; Col 1.25-29 ; 1 Tm 2.7, bien que les Actes (sauf 14.4, 14) réservent habituellement ce titre aux Douze.

Paul, citoyen romain.

22 Jusque-là on l’écoutait. Mais à ces mots, on se mit à crier : « Ôtez de la terre un pareil individu ! Il ne convient pas qu’il vive. » 23 On vociférait, on jetait ses vêtements, on lançait de la poussière en l’air. 24 Le tribun le fit alors introduire dans la forteresse et ordonna de lui donner la question par le fouet, afin de savoir pour quel motif on criait ainsi contre lui.

25 Quand on l’eut étendu avec les courroies, Paul dit au centurion de service : « Un citoyen romain, et qui n’a même pas été jugé, vous est-il permis de lui appliquer le fouet ? » 26 À ces mots, le centurion alla trouver le tribun pour le prévenir : « Que vas-tu faire ? Cet homme est citoyen romain. » 27 Le tribun vint donc demander à Paul : « Dis-moi, tu es citoyen romain ? » — « Oui », répondit-il. 28 Le tribun reprit : « Moi, il m’a fallu une forte somme pour acheter ce droit de cité. » — « Et moi, dit Paul, je l’ai de naissance. » 29 Aussitôt donc, ceux qui allaient le mettre à la question s’écartèrent de lui et le tribun lui-même eut peur, sachant que c’était un citoyen romain qu’il avait chargé de chaînes.t

t En fait, Paul restera pourtant enchaîné v. 30 ; 23.18 ; 24.27 ; 26.29. Peut-être faut-il distinguer deux sortes de chaînes les unes plus lourdes et qui constituaient déjà une peine, on les aura ôtées à Paul ; et les chaînes plus légères nécessaires à la bonne garde des prisonniers.

Comparution devant le Sanhédrin.u

30 Le lendemain, voulant savoir de quoi les Juifs l’accusaient au juste, il le fit détacher et ordonna aux grands prêtres ainsi qu’à tout le Sanhédrin de se réunir ; puis il amena Paul et le fit comparaître devant eux.

u Selon l’annonce de Jésus aux disciples, Mt 10.17-18 = Mc 13.9-10 ; Lc 21.12, Paul va comparaître devant « les sanhédrins », 22.30—23.10, « les gouverneurs » (Félix, 24), « les rois » (Agrippa, 25-26).

23 Fixant du regard le Sanhédrin, Paul dit : « Frères, c’est tout à fait en bonne consciencev que je me suis conduit devant Dieu jusqu’à ce jour. »

v La bonne conscience est caractéristique de la morale paulinienne : 1 Co 4.4 ; 2 Co 1.12 ; 1 Tm 1.5, 19 ; 3.9 ; 2 Tm 1.3, cf. He 13.18.

2 Mais le grand prêtre Ananiew ordonna à ses assistants de le frapper sur la bouche.

w Ananie, fils de Nébédée, nommé grand prêtre vers 47 ; arrêté, envoyé à Rome et probablement destitué en 51 ou 52, puis rentré en grâce ; assassiné en 66 au début de la guerre juive.

3 Alors Paul lui dit : « C’est Dieu qui te frappera, toi, muraille blanchie ! Eh quoi ! Tu sièges pour me juger d’après la Loi, et, au mépris de la Loi, tu ordonnes de me frapper ! » 4 Les assistants lui dirent : « C’est le grand prêtre de Dieu que tu insultes ? » 5 Paul répondit : « Je ne savais pas, frères, que ce fût le grand prêtre. Car il est écrit : Tu ne maudiras pas le chef de ton peuple. »

6 Paul savait qu’il y avait là d’un côté le parti des Sadducéens, de l’autre celui des Pharisiens. Il s’écria donc dans le Sanhédrin : « Frères, je suis, moi, Pharisien, fils de Pharisiens. C’est pour notre espérance, la résurrection des morts, que je suis mis en jugement. » 7 À peine eut-il dit cela qu’un conflit se produisit entre Pharisiens et Sadducéens, et l’assemblée se divisa. 8 Les Sadducéens disent en effet qu’il n’y a pas de résurrection, ni ange, ni esprit,x tandis que les Pharisiens professent l’un et l’autre.

x Les Pharisiens croyaient que l’individu aurait part à la vie du monde futur moyennant ou bien un corps glorifié, comme un ange (cf. Mt 22.30 ; 12.15 ; 1 Co 15.42-44), ou bien une âme immortelle (« esprit »; cf. Lc 24.39). Au contraire les Sadducéens rejetaient l’une et l’autre croyance, donc toute forme de résurrection. Sur ce point-là, Paul va trouver dans les Pharisiens des alliés, cf. 4.1s.

9 Il se fit donc une grande clameur. Quelques scribes du parti des Pharisiens se levèrent et protestèrent énergiquement : « Nous ne trouvons rien de mal en cet homme. Et si un esprit lui avait parlé ? Ou un ange ? »y

y L’hypothèse paraît vouloir expliquer l’apparition sur le chemin de Damas Paul aurait pu voir une apparition de Jésus revenant des morts ; cf. 12.15 ; 23.8.

10 La dispute devenait de plus en plus vive. Le tribun, craignant qu’ils ne missent Paul en pièces, fit descendre la troupe pour l’enlever du milieu d’eux et le ramener à la forteresse.

11 La nuit suivante, le Seigneur vint le trouver et lui dit : « Courage ! De même que tu as rendu témoignage de moi à Jérusalem, ainsi faut-il encore que tu témoignes à Rome. »

Complot des Juifs contre Paul.

12 Lorsqu’il fit jour, les Juifs tinrent un conciliabule, où ils s’engagèrent par anathèmez à ne pas manger ni boire avant d’avoir tué Paul.

z En appelant sur eux la malédiction divine s’ils manquaient à leur engagement.

13 Ils étaient plus de quarante à avoir fait cette conjuration. 14 Ils allèrent trouver les grands prêtres et les anciens, et leur dirent : « Nous nous sommes engagés par anathème à ne rien prendre avant d’avoir tué Paul. 15 Vous donc maintenant, d’accord avec le Sanhédrin, expliquez au tribun qu’il doit vous l’amener, sous prétexte d’examiner plus à fond son affaire. De notre côté, nous sommes prêts à le tuer avant qu’il n’arrive. »

16 Mais le fils de la sœur de Paul eut connaissance du guet-apens. Il se rendit à la forteresse, entra et prévint Paul. 17 Appelant un des centurions, Paul lui dit : « Conduis ce jeune homme au tribun ; il a quelque chose à lui communiquer. »

18 Le centurion le prit donc et l’amena au tribun. « Le prisonnier Paul, dit-il, m’a appelé et m’a prié de t’amener ce jeune homme, qui a quelque chose à te dire. » 19 Le tribun prit le jeune homme par la main, se retira à l’écart et lui demanda : « Qu’as-tu à me communiquer ? » — 20 « Les Juifs, répondit-il, se sont concertés pour te prier d’amener Paul demain au Sanhédrin, sous prétexte d’enquêter plus à fond sur son cas. 21 Ne va pas les croire. Plus de quarante d’entre eux le guettent, qui se sont engagés par anathème à ne pas manger ni boire avant de l’avoir tué. Et maintenant, ils sont tout prêts, escomptant ton accord. » 22 Le tribun congédia le jeune homme avec cette recommandation : « Ne raconte à personne que tu m’as révélé ces choses. »

Transfert de Paul à Césarée.

23 Puis il appela deux des centurions et leur dit : « Tenez prêts à partir pour Césarée, dès la troisième heure de la nuit, deux cents soldats, soixante-dix cavaliers et deux cents hommes d’armes. 24 Qu’on ait aussi des chevaux pour faire monter Paul et le conduire sain et sauf au gouverneur Félix. »a

a Antonius Félix, un affranchi, frère de Pallas, le favori d’Agrippine, fut procurateur de Judée de 52 à 59 ou 60.

25 Et il écrivit une lettre ainsi conçue : 26 « Claudius Lysias au très excellent gouverneur Félix, salut ! 27 L’homme que voici avait été pris par les Juifs, et ils allaient le tuer, quand j’arrivai avec la troupe et le leur arrachai, ayant appris qu’il était citoyen romain. 28 J’ai voulu savoir au juste pourquoi ils l’accusaient et je l’ai amené dans leur Sanhédrin. 29 J’ai constaté que l’accusation se rapportait à des points contestés de leur Loi,b mais qu’il n’y avait aucune charge qui entraînât la mort ou les chaînes.c

b Texte occ. « ... des points de la Loi de Moïse et un certain Jésus ».

c Luc relève ces déclarations qui proclament l’innocence de Paul, cf. v. 9 ; 25.18, 25 ; 26.31 ; 28.18, comme il l’avait fait pour Jésus, cf. 3.13 ; 13.28 ; Lc 23.14-15, 22.

30 Avisé qu’un complot se préparait contre cet homme, je te l’ai aussitôt envoyé, et j’ai informé ses accusateurs qu’ils avaient à porter devant toi leur plainte contre lui. »d

d Add. « Adieu ».

31 Conformément aux ordres reçus, les soldats prirent Paul et le conduisirent de nuit à Antipatris. 32 Le lendemain, ils laissèrent les cavaliers s’en aller avec lui et rentrèrent à la forteresse. 33 Arrivés à Césarée, les cavaliers remirent la lettre au gouverneur et lui présentèrent Paul. 34 Après avoir lu la lettre, le gouverneur s’informa de quelle province il était. Apprenant qu’il était de Cilicie :

35 « Je t’entendrai, dit-il, quand tes accusateurs seront arrivés, eux aussi. » Et il le fit garder dans le prétoire d’Hérode.e

e Palais construit par Hérode le Grand et devenu résidence officielle du procurateur romain.

Le procès devant Félix.

24 Cinq jours plus tard, le grand prêtre Ananie descendit avec quelques anciens et un avocat, un certain Tertullus, et, devant le gouverneur, ils se constituèrent accusateurs de Paul. 2 Celui-ci fut appelé, et Tertullus entama l’accusation en ces termes : « La paix profonde dont nous jouissons grâce à toi et les réformes dont cette nation est redevable à ta providence, 3 en tout et partout nous les accueillons, très excellent Félix, avec toutes sortes d’actions de grâces. 4 Mais pour ne pas t’importuner davantage, je te prie de nous écouter un instant avec la bienveillance qui te caractérise. 5 Cet homme, nous l’avons constaté, est une peste : il suscite des désordres chez tous les Juifs du monde entier, et c’est un meneur du partif des Nazôréens.

f Les adversaires du christianisme n’y voient qu’un « parti », cf. 5.17, à l’intérieur du judaïsme, cf. v. 14 ; 28.22.

6 Il a même tenté de profaner le Temple, et nous l’avons alors arrêté. 7 ...g

g Les Juifs revendiquent la compétence. Cf. 25.9 ; Jn 18.31. — De nombreux témoins ajoutent ici « Nous voulions le juger d’après notre Loi, 7 mais le tribun Lysias est intervenu, qui l’a arraché de nos mains avec beaucoup de violence 8 et a ordonné à ses accusateurs de venir devant toi. ».

8 C’est par lui que tu pourras toi-même, en l’interrogeant,h t’assurer du bien-fondé de toutes nos accusations contre lui. »

h En interrogeant Paul, d’après le texte court adopté ici ; selon le texte long (voir note d), il peut s’agir d’interroger Lydias.

9 Les Juifs l’appuyèrent, assurant qu’il en était bien ainsi.

10 Alors, le gouverneur lui ayant fait signe de parler, Paul répondit :i
« Voilà, je le sais, de nombreuses années que tu assures la justice à cette nation ; aussi est-ce avec confiance que je plaiderai ma cause.

i Paul rejette l’accusation d’avoir provoqué des désordres (cf. v. 5), vv. 11-13. Il s’explique ensuite sur sa qualité de « Nazôréen » (cf. v. 5), qui ne l’empêche aucunement d’être fidèle à sa religion juive, vv. 14-16. Enfin, il se justifie du grief d’avoir profané le Temple, vv. 17-19. En conclusion, il rappelle que, lors de sa comparution devant le Sanhédrin, on n’a pu le convaincre d’aucun délit, vv. 20-21.

11 Tu peux t’en assurer : il n’y a pas plus de douze jours que je suis monté en pèlerinagej à Jérusalem,

j Littéralement « pour adorer », cf. 8.27.

12 et, ni dans le Temple, ni dans les synagogues, ni par la ville, on ne m’a trouvé en discussion avec quelqu’un ou en train d’ameuter la foule. 13 Ils ne peuvent pas davantage te prouver ce dont ils m’accusent maintenant.

Discours de Paul devant le gouverneur romain.

14 « Je t’avoue pourtant ceci : c’est suivant la Voie, qualifiée par eux de parti, que je sers le Dieu de mes pères, gardant ma foi à tout ce qu’il y a dans la Loi et à ce qui est écrit dans les Prophètes,k

k Le christianisme n’est pas une autre religion que le judaïsme, il est le judaïsme même entré en possession de son espérance séculaire. En repoussant le Christ, c’est leur propre tradition religieuse que les Juifs renient. Cf. le discours devant Agrippa, 26, l’argument traditionnel des prophéties, 2.23 ; 3.24, et les déclarations de Paul, Rm 1.2 ; 3.31 ; 10.4 ; 16.26 ; 1 Co 15.3-4 ; Ga 3, etc.

15 ayant en Dieu l’espérance, comme ceux-ci l’ont eux-mêmes,l qu’il y aura une résurrection des justes et des injustes.

l Les Pharisiens, cf. 23.6.

16 C’est pourquoi, moi aussi, je m’applique à avoir sans cesse une conscience irréprochable devant Dieu et devant les hommes.

17 « Au bout de bien des années, je suis venu apporter des aumônes à ma nationm et présenter des offrandes :n

m Seule allusion des Actes au motif réel du voyage la collecte des Églises de la gentilité à porter à Jérusalem, cf. Rm 15.25.

n Des sacrifices offerts à Dieu, cf. 21.24, 26.

18 c’est ainsi qu’ils m’ont trouvé dans le Temple ; je m’étais purifié et ne provoquais ni attroupement ni tumulte. 19 Mais quelques Juifs d’Asie... — c’est eux qui auraient dû se présenter devant toi et m’accuser, s’ils avaient quelque chose contre moi ! 20 Que ceux-ci du moins disent, eux, de quel délit ils m’ont trouvé coupable lorsque j’ai comparu devant le Sanhédrin ! 21 À moins qu’il ne s’agisse de cette seule parole que j’ai criée, debout au milieu d’eux : C’est à cause de la résurrection des morts que je suis mis aujourd’hui en jugement devant vous. »o

o Paul cherche habilement à rattacher la cause chrétienne à celle de la théologie pharisienne.

La captivité de Paul à Césarée.

22 Félix, qui était fort exactement informé de ce qui concerne la Voie, les ajourna en disant : « Dès que le tribun Lysias sera descendu, je statuerai sur votre affaire. » 23 Il prescrivit au centurion de garder Paul prisonnier, mais de lui laisser quelques facilités et de n’empêcher aucun des siens de lui rendre service.p

p Régime de détention assez semblable à celui dont Paul jouira à Rome.

24 Quelques jours plus tard, Félix vint avec sa femme Drusille, qui était juive.q Il envoya chercher Paul et l’écouta parler de la foi au Christ Jésus.

q Fille cadette d’Agrippa Ier (cf. 12). Elle avait abandonné son premier mari, le roi d’Émèse, pour épouser Félix.

25 Mais comme il se mettait à discourir sur la justice, la continence, le jugement à venir, Félix prit peurr et répondit : « Pour le moment, tu peux aller. Je te rappellerai à la première occasion. »

r Félix était cupide, brutal, dissolu. — Comparer l’attitude de Jean-Baptiste devant Hérode.

26 Il espérait par ailleurs que Paul lui donnerait de l’argent ; aussi l’envoyait-il assez souvent chercher pour converser avec lui.

27 Après deux années révolues, Félix reçut pour successeur Porcius Festus.s Voulant faire plaisir aux Juifs, Félix laissa Paul en captivité.t

s Nommé en 59 ou 60, mort en 62.

t « Voulant faire... »; var. occ. « Et il laissa Paul en prison à cause de Drusille ». Le droit romain frappait de sanctions les dénonciateurs qui ne soutenaient pas leurs accusations, mais dans un tel cas les accusés n’étaient pas nécessairement libérés.

Paul en appelle à César.

25 Trois jours après son arrivée dans la province,u Festus monta de Césarée à Jérusalem.

u Ou « après son entrée en fonction ».

2 Les grands prêtres et les notables juifs se constituèrent devant lui accusateurs de Paul.v Lui présentant leur requête

v Même démarche juridique que 24.1 ; cf. 25.15.

3 contre celui-ci, ils sollicitaient comme une faveur qu’il fût transféré à Jérusalem ; ils préparaient un guet-apens pour le tuer en chemin. 4 Mais Festus répondit que Paul devait rester en prison à Césarée, que lui-même d’ailleurs allait partir tout de suite. 5 « Que ceux donc d’entre vous qui ont qualité, dit-il, descendent avec moi et, si cet homme est coupable en quelque manière, qu’ils le mettent en accusation. »

6 Après avoir passé chez eux huit à dix jours au plus, il descendit à Césarée et, siégeant au tribunal le lendemain, il fit amener Paul. 7 Quand celui-ci fut arrivé, les Juifs descendus de Jérusalem l’entourèrent, portant contre lui des accusations multiples et graves, qu’ils n’étaient pas capables de prouver. 8 Paul se défendait : « Je n’ai, disait-il, commis aucune faute contre la Loi des Juifs, ni contre le Temple, ni contre César. » 9 Voulant faire plaisir aux Juifs, Festus répondit à Paul : « Veux-tu monter à Jérusalem pour y être jugé làdessus en ma présence ? » 10 Mais Paul répliqua : « Je suis devant le tribunal de César ; c’est là que je dois être jugé. Je n’ai fait aucun tort aux Juifs, tu le sais très bien toi-même. 11 Mais si je suis réellement coupable, si j’ai commis quelque crime qui mérite la mort, je ne refuse pas de mourir. Si, par contre, il n’y a rien de fondé dans les accusations de ces gens-là contre moi, nul n’a le droit de me céder à eux. J’en appelle à César ! »w

w Paul veut se soustraire à une juridiction locale qui a déjà pris parti contre lui, en réclamant une audience impartiale devant le tribunal impérial à Rome.

12 Alors Festus, après en avoir conféré avec son conseil, répondit : « Tu en appelles à César, tu iras devant César. »

Paul comparaît devant le roi Agrippa.

13 Quelques jours plus tard, le roi Agrippa et Bérénicex arrivèrent à Césarée et vinrent saluer Festus.

x Agrippa, Bérénice et Drusille (cf. 24.24) étaient trois enfants d’Agrippa Ier, cf. 12.1. Agrippa (II), l’aîné, était né en 27. Sa sœur Bérénice vivait alors auprès de lui, non sans faire jaser ; elle se trouvera, quelques années plus tard, aux côtés de Titus. Sur les territoires gouvernés par Agrippa II, voir le Tableau chronologique, à la fin du volume (à partir de l’an 48).

14 Comme leur séjour se prolongeait, Festus exposa au roi l’affaire de Paul : « Il y a ici, dit-il, un homme que Félix a laissé en captivité.

15 Pendant que j’étais à Jérusalem, les grands prêtres et les anciens des Juifs ont porté plainte à son sujet, demandant sa condamnation. 16 Je leur ai répondu que les Romains n’ont pas la coutume de céder un homme avant que, ayant été accusé, il ait eu ses accusateurs en face de lui et qu’on lui ait donné la possibilité de se défendre contre l’inculpation. 17 Ils sont donc venus ici avec moi, et, sans y apporter aucun délai, dès le lendemain, j’ai siégé à mon tribunal et fait amener l’homme. 18 Mis en sa présence, les accusateurs n’ont soulevé aucun grief concernant des forfaits que, pour ma part, j’aurais soupçonnés. 19 Ils avaient seulement avec lui je ne sais quelles contestations touchant leur religion à eux et touchant un certain Jésus, qui est mort, et que Paul affirme être en vie. 20 Pour moi, embarrassé devant un débat de ce genre, je lui ai demandé s’il voulait aller à Jérusalem pour y être jugé là-dessus. 21 Mais Paul ayant interjeté appel pour que son cas fût réservé au jugement de l’auguste empereur,y j’ai ordonné de le garder jusqu’à ce que je l’envoie à César. »

y Littéralement « au jugement d’Auguste », de même au v. 25. Comme « César », « Auguste » était un titre de l’empereur régnant (qui était alors Néron, 54-68).

22 Agrippa dit à Festus : « Je voudrais, moi aussi, entendre cet homme. »z — « Demain, dit-il, tu l’entendras. »

z De même, son grand-oncle Antipas avait désiré voir Jésus, Lc 9.9 ; 23.8.

23 Le lendemain donc, Agrippa et Bérénice vinrent en grande pompe et se rendirent à la salle d’audience, entourés des tribuns et des notabilités de la ville. Sur l’ordre de Festus, on amena Paul. 24 Festus dit alors : « Roi Agrippa et vous tous ici présents avec nous, vous voyez cet homme au sujet duquel la communauté juive tout entière est intervenue auprès de moi, tant à Jérusalem qu’ici, protestant à grands cris qu’il ne fallait pas le laisser vivre davantage. 25 Pour moi, j’ai reconnu qu’il n’a rien fait qui mérite la mort ; cependant, comme il en a lui-même appelé à l’auguste empereur, j’ai décidé de le lui envoyer. 26 Je n’ai rien de bien précis à écrire au Seigneura sur son compte ; c’est pourquoi je l’ai fait comparaître devant vous, devant toi surtout, roi Agrippa, afin qu’après cet interrogatoire j’aie quelque chose à écrire.

a Désignation de l’empereur considéré comme le détenteur d’un pouvoir royal absolu et universel, jouissant donc d’une prérogative plus ou moins divine.

27 Il me paraît absurde, en effet, d’envoyer un prisonnier sans signifier en même temps les charges qui pèsent sur lui. »

26 Agrippa dit à Paul : « Tu es autorisé à plaider ta cause. » Alors, étendant la main, Paul présenta sa défense :

Discours de Paul devant le roi Agrippa.b

2 « De tout ce dont me chargent les Juifs, je m’estime heureux, roi Agrippa, d’avoir aujourd’hui à me disculper devant toi,

b Après un exorde flatteur, vv. 2-3, cf. 24.2-3, 10, Paul proclame la parfaite conformité de sa foi chrétienne avec la croyance pharisienne en la résurrection, vv. 4-8, cf. 23.6 ; il raconte ensuite les circonstances de sa conversion, vv. 9-18, cf. 9.1-18 ; 22.3-16 ; il termine par un résumé de sa prédication, qui n’annonce le christianisme que comme l’accomplissement des Écritures, vv. 19-23, cf. 13.15-47. Derrière le différend actuel, on voit apparaître ici toute la question des rapports entre judaïsme et christianisme, cf. 24.14.

3 d’autant plusc que tu es au courant de toutes les coutumes et controverses des Juifs. Aussi, je te prie de m’écouter avec patience.

c Autre traduction « plus que personne ».

4 « Ce qu’a été ma vie depuis ma jeunesse, comment depuis le début j’ai vécu au sein de ma nation, à Jérusalem même, tous les Juifs le savent. 5 Ils me connaissent de longue date et peuvent, s’ils le veulent, témoigner que j’ai vécu suivant le parti le plus strict de notre religion, en Pharisien. 6 Maintenant encore, si je suis mis en jugement, c’est à cause de mon espérance en la promesse faite par Dieu à nos pères 7 et dont nos douze tribus, dans le culte qu’elles rendent à Dieu avec ardeur, nuit et jour, espèrent atteindre l’accomplissement.d C’est pour cette espérance, ô roi, que je suis mis en accusation par les Juifs.

d L’espérance messianique se concrétise dans la croyance en la résurrection des justes, destinés à prendre part au Royaume de la fin des temps, cf. Dn 12.1-3 ; 2 M 7.9. Cette espérance a reçu un commencement de réalisation dans la résurrection du Christ, qui devient ainsi le fondement de l’espérance chrétienne, 1 Co 15.15-22 ; Col 1.18.

8 Pourquoi juge-t-on incroyable parmi vous que Dieu ressuscite les morts ?e

e Var. vv. 7-8 « cette promesse pour laquelle nos douze tribus rendent à Dieu, nuit et jour, un culte persévérant, dans l’espoir d’en atteindre l’accomplissement ; c’est pour elle que je suis mis maintenant en accusation par les Juifs à savoir que Dieu ressuscite les morts. »

9 « Pour moi donc, j’avais estimé devoir employer tous les moyens pour combattre le nom de Jésus le Nazôréen. 10 Et c’est ce que j’ai fait à Jérusalem ; j’ai moi-même jeté en prison un grand nombre de saints, ayant reçu ce pouvoir des grands prêtres, et quand on les mettait à mort, j’apportais mon suffrage. 11 Souvent aussi, parcourant toutes les synagogues, je voulais, par mes sévices, les forcer à blasphémer et, dans l’excès de ma fureur contre eux, je les poursuivais jusque dans les villes étrangères.

12 « C’est ainsi que je me rendis à Damas avec pleins pouvoirs et mission des grands prêtres. 13 En chemin, vers midi, je vis, ô roi, venant du ciel et plus éclatante que le soleil, une lumière qui resplendit autour de moi et de ceux qui m’accompagnaient. 14 Tous nous tombâmes à terre, et j’entendis une voix qui me disait en langue hébraïque : « Saoul, Saoul, pourquoi me persécutes-tu ? Il est dur pour toi de regimber contre l’aiguillon. »f

f Expression proverbiale chez les Grecs pour caractériser une résistance inutile comme celle du bœuf qui, en donnant de la patte contre l’aiguillon, ne réussit qu’à se blesser.

15 Je répondis : « Qui es-tu, Seigneur ? » Le Seigneur dit : « Je suis Jésus, que tu persécutes. 16 Mais relève-toi et tiens-toi debout. Car voici pourquoi je te suis apparu : pour t’établir serviteur et témoin de la vision dans laquelle tu viens de me voir et de celles où je me montrerai encore à toi. 17 C’est pour cela que je te délivrerai du peuple et des nations païennes, vers lesquelles je t’envoie, moi, 18 pour leur ouvrir les yeux, afin qu’elles reviennent des ténèbres à la lumièreg et de l’empire de Satan à Dieu, et qu’elles obtiennent, par la foi en moi, la rémission de leurs péchésh et une part d’héritage avec les sanctifiés. »

g La mission de Paul est ici décrite à l’aide de traits bibliques relatifs aux grandes missions prophétiques Jérémie et le Serviteur de Yahvé.

h En 9.17-18, c’est Paul qui passe des ténèbres à la lumière en recouvrant la vue. En 22.16 (cf. 9.18), c’est Paul qui doit se purifier de ses péchés en recevant le baptême. Ainsi ce qu’il a éprouvé lui-même devient un symbole de sa mission à l’égard des autres.

19 « Dès lors, roi Agrippa, je n’ai pas été rebelle à la vision céleste. 20 Bien au contraire, aux habitants de Damas d’abord, à Jérusalem et dans tout le pays de Judée, puis aux païens, j’ai prêché qu’il fallait se repentir et revenir à Dieu en faisant des œuvres qui conviennent au repentir. 21 Voilà pourquoi les Juifs, s’étant saisis de moi dans le Temple, essayaient de me tuer. 22 Soutenu par la protection de Dieu, j’ai continué jusqu’à ce jour à rendre mon témoignage devant petits et grands, sans jamais rien dire en dehors de ce que les Prophètes et Moïse avaient déclaré devoir arriver : 23 que le Christ souffrirait et que, ressuscité le premier d’entre les morts, il annoncerait la lumière au peuple et aux nations païennes. »

Réactions de l’auditoire.

24 Il en était là de sa défense, quand Festus dit à haute voix : « Tu es fou, Paul ; ton grand savoir te fait perdre la tête. »i

i Festus est abasourdi par l’érudition biblique de Paul et aussi, sans doute, par la manière juive d’argumenter. Agrippa, lui, se tait, visiblement ébranlé voir sa réponse évasive au v. 28.

25 Sur quoi Paul de dire : « Je ne suis pas fou, très excellent Festus, mais je parle un langage de vérité et de bon sens.

26 Car il est instruit de ces choses, le roi, auquel je m’adresse en toute assurance, persuadé que rien ne lui en est étranger. Car ce n’est pas dans un coin que cela s’est passé !j

j Il s’agit des faits par lesquels s’accomplissent les Écritures (v. 23) la passion et la résurrection de Jésus, l’extension de la prédication apostolique. Tout cela est de notoriété publique.

27 Crois-tu aux prophètes, roi Agrippa ? Je sais que tu y crois. » 28 Et le roi Agrippa de répondre à Paul : « Encore un peu et, par tes raisons, tu vas faire de moi un chrétien ! »k

k Le mot a encore sa valeur de sobriquet, cf. 11.26. — Var. « Encore un peu, et tu me persuades de devenir chrétien ! » ou « Encore un peu, et tu te persuades m’avoir fait chrétien ! »

29 Et Paul : « Qu’il s’en faille de peu ou de beaucoup,l puisse Dieu faire que non seulement toi, mais tous ceux qui m’écoutent aujourd’hui, vous deveniez tels que je suis moi-même, à l’exception des chaînes que voici. »

l Jeu de mots sur le « encore un peu » d’Agrippa.

30 Là-dessus le roi se leva, ainsi que le gouverneur, Bérénice et ceux qui étaient assis avec eux. 31 En se retirant, ils parlaient entre eux : « Cet homme, disaient-ils, n’a rien fait qui mérite la mort ni les chaînes. » 32 Agrippa, lui, dit à Festus : « On aurait pu relâcher cet homme s’il n’en avait appelé à César. »

Le départ pour Rome.

27 Quand notrem embarquement pour l’Italie eut été décidé, on remit Paul et quelques autres prisonniers à un centurion de la cohorte Augusta, nommé Julius.

m La précision du récit donne l’impression d’un minutieux journal de voyage.

2 Nous montâmes à bord d’un vaisseau d’Adramyttium qui allait partir pour les côtes d’Asie, et nous prîmes la mer. Il y avait avec nous Aristarque, un Macédonien de Thessalonique. 3 Le lendemain, nous touchâmes à Sidon. Julius fit preuve d’humanité à l’égard de Paul en lui permettant d’aller trouver ses amis et de recevoir leurs bons offices. 4 Partis de là, nous longeâmes la côte de Chypre, parce que les vents étaient contraires.

5 Traversant ensuite les mers de Cilicie et de Pamphylie, nous arrivâmes au bout de quinze joursn à Myre en Lycie.

n « au bout de quinze jours » texte occ.

6 Là, le centurion trouva un navire alexandrin en partance pour l’Italie et nous fit monter à bord.

7 Pendant plusieurs jours la navigation fut lente, et nous arrivâmes à grand-peine à la hauteur de Cnide. Le vent ne nous permit pas d’aborder, nous longeâmes alors la Crète vers le cap Salmoné, 8 et après l’avoir côtoyée péniblement, nous arrivâmes à un endroit appelé Bons-Ports, près duquel se trouve la ville de Lasaïa.

La tempête et le naufrage.

9 Il s’était écoulé pas mal de temps, et la navigation était désormais périlleuse, car même le Jeûneo était déjà passé. Paul les en avertissait :

o Autre nom de la fête de l’Expiation, seul jour de jeûne prescrit par la Loi, Lv 16.29-31. Il se célébrait aux environs de l’équinoxe d’automne. La saison ouverte pour la navigation méditerranéenne durait de la fin du mois de mai, jusqu’à mi-septembre. De mi-septembre à mi-novembre la navigation restait possible mais périlleuse.

10 « Mes amis, leur disait-il, je vois que la navigation n’ira pas sans péril et sans grave dommage non seulement pour la cargaison et le navire, mais même pour nos personnes. » 11 Le centurion se fiait au capitaine et à l’armateur plutôt qu’aux dires de Paul ; 12 le port se prêtait d’ailleurs mal à l’hivernage. La plupart furent donc d’avis de partir et de gagner, si possible, pour y passer l’hiver, Phénix, un port de Crète tourné vers le sud-ouest et le nord-ouest.

13 Un léger vent du sud s’étant levé, ils se crurent en mesure d’exécuter leur projet. Ils levèrent l’ancre et se mirent à côtoyer de près la Crète. 14 Mais bientôt, venant de l’île, se déchaîna un vent d’ouragan nommé Euraquilon. 15 Le navire fut entraîné et ne put tenir tête au vent ; nous nous abandonnâmes donc à la dérive. 16 Filant sous une petite île appelée Cauda, nous réussîmes à grand-peine à nous rendre maîtres de la chaloupe. 17 Après l’avoir hissée, on fit usage des engins de secours : on ceintura le navire ; puis, par crainte d’aller échouer sur la Syrte, on laissa glisser l’ancre flottante. On allait ainsi à la dérive.

18 Le lendemain, comme nous étions furieusement battus de la tempête, on se mit à délester le navire 19 et, le troisième jour, de leurs propres mains, les matelots jetèrent les agrès à la mer. 20 Ni soleil ni étoiles n’avaient brillé depuis plusieurs jours, et la tempête gardait toujours la même violence ; aussi tout espoir de salut était-il désormais perdu pour nous.

21 Il y avait longtemps qu’on n’avait plus mangé :p alors Paul, debout au milieu des autres, leur dit : « Il fallait m’écouter, mes amis, et ne pas quitter la Crète ; on se serait épargné ce péril et ce dommage.

p C’est la deuxième intervention de Paul (vv. 33s) qui fait suite à cette remarque. Le récit de la première (vv. 21-26) semble inséré assez maladroitement dans le contexte et doubler en partie la deuxième.

22 Quoi qu’il en soit, je vous invite à avoir bon courage, car aucun de vous n’y laissera la vie, le navire seul sera perdu. 23 Cette nuit en effet m’est apparu un ange du Dieu auquel j’appartiens et que je sers, 24 et il m’a dit : « Sois sans crainte, Paul. Il faut que tu comparaisses devant César,q et voici que Dieu t’accorde la vie de tous ceux qui naviguent avec toi. »

q Devant le tribunal impérial, non pas devant Néron lui-même.

25 Courage donc, mes amis ! Je me fie à Dieu de ce qu’il en sera comme il m’a été dit. 26 Mais nous devons échouer sur une île. »

27 C’était la quatorzième nuit et nous étions ballottés sur l’Adriatique,r quand, vers minuit, les matelots pressentirent l’approche d’une terre.

r On désignait par là toute la partie de la Méditerranée située entre la Grèce, l’Italie et l’Afrique.

28 Ils lancèrent la sonde et trouvèrent vingt brasses ; un peu plus loin, ils la lancèrent encore et trouvèrent quinze brasses. 29 Craignant donc que nous n’allions échouer quelque part sur des écueils, ils jetèrent quatre ancres à la poupe ; et ils appelaient de leurs vœux la venue du jour. 30 Mais les matelots cherchaient à s’enfuir du navire. Ils mirent la chaloupe à la mer, sous prétexte d’aller élonger les ancres de la proue. 31 Paul dit alors au centurion et aux soldats : « Si ces gens-là ne restent pas sur le navire, vous ne pouvez être sauvés. » 32 Sur ce les soldats coupèrent les cordes de la chaloupe et la laissèrent tomber.

33 En attendant que parût le jour, Paul engageait tout le monde à prendre de la nourriture. « Voici aujourd’hui quatorze jours, disait-il, que, dans l’attente, vous restez à jeun, sans rien prendre. 34 Je vous engage donc à prendre de la nourriture, car c’est votre propre salut qui est ici en jeu. Nul d’entre vous ne perdra un cheveu de sa tête. » 35 Cela dit, il prit du pain, rendit grâces à Dieu devant tous, le rompit et se mit à manger.s

s Add. occ. « en nous en donnant à nous aussi ». — Tout Juif, au moment de prendre un repas, prononçait une bénédiction. Mais les termes choisis par Luc évoquent, semble-t-il, le rite eucharistique, cf. 2.42.

36 Alors, retrouvant leur courage, eux aussi prirent tous de la nourriture. 37 Nous étions en tout sur le navire deux cent soixante-seize personnes. 38 Une fois rassasiés, on se mit à alléger le navire en jetant le blé à la mer.

39 Quand le jour parut, les marins ne reconnurent pas la terre ; ils distinguaient seulement une baie avec une plage, et ils se proposaient, si possible, d’y pousser le navire. 40 Ils détachèrent les ancres, qu’ils abandonnèrent à la mer ; ils relâchèrent en même temps les amarres des gouvernails. Puis, hissant au vent la voile d’artimon, ils se laissèrent porter vers la plage. 41 Mais ayant touché un haut-fond entre deux courants, ils y firent échouer le navire. La proue, fortement engagée, restait immobile, tandis que la poupe, violemment secouée, se disloquait.

42 Les soldats résolurent alors de tuer les prisonniers, de peur qu’il ne s’en échappât quelqu’un à la nage. 43 Mais le centurion, qui voulait sauver Paul, s’opposa à leur dessein. Il donna l’ordre à ceux qui savaient nager de se jeter à l’eau les premiers et de gagner la terre ; 44 quant aux autres, ils la gagneraient, qui sur des planches, qui sur les épaves du navire. Et c’est ainsi que tous parvinrent sains et saufs à terre.

Séjour à Malte.

28 Une fois sauvés, nous apprîmes que l’île s’appelait Malte. 2 Les indigènes nous traitèrent avec une humanité peu banale. Ils nous accueillirent tous auprès d’un grand feu qu’ils avaient allumé à cause de la pluie qui était survenue et du froid. 3 Comme Paul ramassait une brassée de bois sec et la jetait dans le feu, une vipère, que la chaleur en fit sortir, s’accrocha à sa main.

4 Quand les indigènes virent la bête suspendue à sa main, ils se dirent entre eux : « Pour sûr, c’est un assassin que cet homme : il vient d’échapper à la mer, et la vengeance divinet ne lui permet pas de vivre. »

t Dikè, la justice divine personnifiée.

5 Mais lui secoua la bête dans le feu et n’en ressentit aucun mal. 6 Ils s’attendaient à le voir enfler ou tomber raide mort. Après avoir attendu longtemps, voyant qu’il ne lui arrivait rien d’anormal, ils changèrent d’avis et se mirent à dire que c’était un dieu.

7 Il y avait à proximité de cet endroit un domaine appartenant au Premier de l’île, nommé Publius. Celui-ci nous reçut et nous hébergea complaisamment pendant trois jours. 8 Justement le père de Publius, en proie aux fièvres et à la dysenterie, était alité. Paul alla le voir, pria, lui imposa les mains et le guérit. 9 Sur quoi, les autres malades de l’île vinrent aussi le trouver et furent guéris. 10 Aussi nous comblèrent-ils de toutes sortes de prévenances et, à notre départ, nous pourvurent-ils du nécessaire.

De Malte à Rome.

11 Au bout de trois mois, nous prîmes la mer sur un navire qui avait hiverné dans l’île ; c’était un bateau alexandrin, à l’enseigne des Dioscures. 12 Nous abordâmes à Syracuse et y demeurâmes trois jours. 13 De là, en longeant la côte, nous allâmes à Rhegium. Le jour suivant, le vent du Sud se leva, et nous parvenions le surlendemain à Puteoli.u

u Pouzzoles, dans le golfe de Naples. Il y avait déjà, dans ce port important, une colonie chrétienne.

14 Y trouvant des frères, nous eûmes la consolation de rester sept jours avec eux. Et c’est ainsi que nous arrivâmes à Rome.

15 Les frères de cette ville, informés de notre arrivée, vinrent à notre rencontre jusqu’au Forum d’Appius et aux Trois-Tavernes. En les voyant, Paul rendit grâces à Dieu et reprit courage. 16 Quand nous fûmes entrés dans Rome, on permit à Paul de loger en son particulier avec le soldat qui le gardait.v

v Texte occ. (adopté par la recension antiochienne) « Quand nous fûmes entrés à Rome, le centurion remet les prisonniers au stratopédarque. On permit alors à Paul de prendre un logement en dehors du camp (prétorien). » Ces renseignements complémentaires correspondent à ce qui a dû se passer effectivement. C’est le régime de faveur de la « custodia militaris » le prisonnier prend un logement à lui, mais il doit toujours avoir le bras droit lié par une chaîne au bras gauche d’un soldat qui le garde.

Prise de contact avec les Juifs de Rome.w

17 Trois jours après, il convoqua les notables juifs. Lorsqu’ils furent réunis, il leur dit : « Frères, alors que je n’avais rien fait contre notre peuple ni contre les coutumes des pères, j’ai été arrêté à Jérusalem et livré aux mains des Romains.

w Paul a voulu régler aussi vite que possible sa situation à l’égard des Juifs de Rome. Il va résumer son procès et protester une dernière fois de sa fidélité au judaïsme.

18 Enquête faite, ceux-ci voulaient me relâcher, parce qu’il n’y avait rien en moi qui méritât la mort. 19 Mais comme les Juifs s’y opposaient, j’ai été contraint d’en appeler à César, sans pourtant vouloir accuser en rien ma nation.x

x Add. occ. « mais seulement dans le désir d’échapper à la mort ».

20 Voilà pourquoi j’ai demandé à vous voir et à vous parler ; car c’est à cause de l’espérance d’Israël que je porte les chaînes que voici. »

21 Ils lui répondirent :y « Pour notre compte, nous n’avons reçu à ton sujet aucune lettre de Judée, et aucun des frères arrivés ici ne nous a rien communiqué ni appris de fâcheux sur ton compte.

y Réponse prudemment circonspecte.

22 Mais nous voudrions entendre de ta bouche ce que tu penses ; car pour ce qui est de ce parti-là, nous savons qu’il rencontre partout la contradiction. »

Déclaration de Paul aux Juifs de Rome.z

23 Ils prirent donc jour avec lui et vinrent en plus grand nombre le trouver en son logis. Dans l’exposé qu’il leur fit, il rendait témoignage du Royaume de Dieu et cherchait à les persuader au sujet de Jésus, en partant de la Loi de Moïse et des Prophètes. Cela dura depuis le matin jusqu’au soir.

z À Rome encore, Paul adresse le message évangélique aux Juifs d’abord, cf. 13.5. Le sommaire de sa prédication aux Juifs de Rome doit se comparer au discours inaugural d’Antioche de Pisidie, 13.15-41.

24 Les uns se laissaient persuader par ses paroles, les autres restaient incrédules. 25 Ils prenaient congé sans être d’accord entre eux, quand Paul dit ce simple mot :a « Elles sont bien vraies les paroles que l’Esprit Saint a dites à vos pères par la bouche du prophète Isaïe :

a Cette déclaration parallèle à celle qui suit le discours d’Antioche, 13.46-47, constitue la conclusion des Actes et en donne le fil conducteur, cf. 13.41. Elle évoque aussi les perspectives ouvertes à la fin du discours de Jésus à Nazareth, Lc 4.23-27, et par ses dernières paroles aux apôtres, Lc 24.47. Le texte d’Isa 6.9-10 (LXX) apparaît également en Mt 13.14-15 (cf. Mc 4.12) et, partiellement, en Jn 12.40. Le thème et le texte sont très familiers au christianisme primitif.

26 Va trouver ce peuple et dis-lui :
vous aurez beau écouter, vous ne comprendrez pas ;
vous aurez beau regarder, vous ne verrez pas.
27 C’est que le cœur de ce peuple s’est épaissi :
ils se sont bouché les oreilles, ils ont fermé les yeux,
de peur que leurs yeux ne voient,
que leurs oreilles n’entendent,
que leur cœur ne comprenne,
qu’ils ne se convertissent.
Et je les aurais guéris !

28 « Sachez-le donc : c’est aux païens qu’a été envoyé ce salut de Dieu. Eux du moins, ils écouteront. » 29 ...b

b Le texte occ. (suivi par la recension antiochienne) ajoute le v. 29 « Quand il eut dit cela, les Juifs s’en allèrent en discutant vivement entre eux. »

Épilogue.c

30 Paul demeura deux années entièresd dans le logis qu’il avait loué. Il recevait tous ceux qui venaient le trouver,

c Ainsi l’arrivée de Paul à Rome, qui achève un programme d’évangélisation, cf. Lc 24.47 ; 1.8, apparaît comme le point de départ d’une nouvelle expansion du christianisme. Luc avait terminé son évangile en l’ouvrant sur la perspective de la mission des apôtres ; il termine de même le livre des Actes en l’ouvrant sur l’avenir.

d Le NT n’indique pas de façon claire ce qui arriva après cette période. On suppose généralement que Paul fut libéré peut-être à la suite d’un acte de clémence de Néron. Dans ce cas, il peut avoir réalisé son ambition d’aller jusqu’en Espagne (cf. Rm 15.24). Une bonne tradition affirme qu’il mourut martyr à Rome sous Néron en 64 ou 67.

31 proclamant le Royaume de Dieu et enseignant ce qui concerne le Seigneur Jésus Christ avec pleine assurance et sans obstacle.e

e Add. occ. « disant que c’est lui, Jésus, le Fils de Dieu, par qui le monde entier doit être jugé », cf. 17.31.