13 Les Israélites recommencèrent à faire ce qui est mal aux yeux de Yahvé, et Yahvé les livra aux mains des Philistins pendant quarante ans.
t L’histoire de Samson est différente de tous les autres récits du livre. Elle raconte, de sa naissance à sa mort, la vie d’un héros local. Il est fort comme un géant et faible comme un enfant, il séduit les femmes et est trompé par elles, il joue de mauvais tours aux Philistins mais n’en délivre pas le pays. L’histoire a l’humour dru des contes populaires par lesquels on se venge d’un oppresseur, qu’on doit subir mais qu’on tourne en dérision. En contraste avec cet aspect populaire et profane, Samson est consacré à Dieu dès le sein de sa mère, et son « naziréat » est la source de sa force. C’est cet aspect charismatique qui lui a valu une place parmi les Juges. — Le récit est une collection d’anecdotes naissance de Samson, 13.2-25 ; mariage et énigme, 14.1-20 ; Samson et les Philistins, 15.1-8, 9-19, avec une première conclusion, v. 20 ; Samson à Gaza, 16.1-3 ; Samson et Dalila, 16.4-21 ; captivité et mort de Samson, 16.22-30, avec une seconde conclusion, v. 31.
2 Il y avait un homme de Çoréa, du clan de Dan,u nommé Manoah. Sa femme était stérile et n’avait pas eu d’enfant.
u La tribu de Dan avait reçu un territoire où se trouvent les localités citées ici Çoréa, Eshtaol, Timna, cf. Jos 19.40 ; elle émigra vers le nord, 17-18. Les histoires de Samson paraissent supposer une situation postérieure à cette migration dans laquelle les Philistins n’interviennent pas. Mais des clans restés sur place vivaient mêlés aux Cananéens et assujettis aux Philistins.
v Cf. 2.1 ; 6.11 et Gn 16.7. Au v. 22, l’ange s’identifie à Yahvé, comme en 6.22-23.
w Cette notice justifie le rattachement de Samson aux Juges, mais reconnaît que la victoire décisive sur les Philistins ne sera pas l’œuvre de Samson il faudra attendre Saül et David.
8 Alors Manoah implora Yahvé et dit : « Je t’en prie, Seigneur ! Que l’homme de Dieu que tu as envoyé vienne encore une fois vers nous, et qu’il nous apprenne ce que nous aurons à faire à l’enfant lorsqu’il sera né ! »
x Comme Jérémie, Jr 1.5, et le Serviteur, Isa 49.1, Samson est consacré à Dieu dès le sein de sa mère. Celle-ci doit observer elle-même les prescriptions du naziréat qui s’imposeront au fils qu’elle porte.
16 Et l’Ange de Yahvé dit à Manoah : « Quand bien même tu me retiendrais, je ne mangerais pas de ta nourriture, mais si tu désires préparer un holocauste, offre-le à Yahvé. » — En effet, Manoah ne savait pas que c’était l’Ange de Yahvé.
17 Manoah dit alors à l’Ange de Yahvé : « Quel est ton nom, afin que, lorsque ta parole sera accomplie, nous puissions t’honorer ? »
y L’ange laisse entendre que son nom est indicible. Ce n’est pas exactement un refus, car ce nom sera reconnu par l’action accomplie, cf. v. 19.
z Manoah a voulu, comme Abraham pour ses trois visiteurs, Gn 18, remplir ses devoirs d’hospitalité. Sur l’ordre de l’ange, le repas est transformé en holocauste, dans lequel Yahvé se révèle. Comparer le sacrifice de Gédéon, 6.19-22.
L’enfant grandit, Yahvé le bénit,
14 Samson descendit à Timna et remarqua, à Timna, une femme parmi les filles des Philistins.
a Le rédacteur du texte veut concilier le mariage de Samson avec son rôle d’adversaire des Philistins. Les Philistins s’étaient étendus en dehors de leur territoire propre jusque dans la montagne ; ils menaceront bientôt de dominer entièrement Israël.
5 Samson avec son père et sa mère descendit à Timnab et, comme ils arrivaient aux vignes de Timna, il vit un jeune lion qui venait à sa rencontre en rugissant.
b « avec son père et sa mère » hébr. ; c’est peut-être une addition, car cette précision ne s’accorde pas avec le v. 6.
6 L’esprit de Yahvé fondit sur lui et, sans rien avoir en main, Samson déchira le lion comme on déchire un chevreau ; mais il ne raconta pas à son père ni à sa mère ce qu’il avait fait.
8 À quelque temps de là, Samson revint pour l’épouser. Il fit un détour pour voir le cadavre du lion, et voici qu’il y avait dans la carcasse du lion un essaim d’abeilles et du miel.
c Samson contracte un mariage dans lequel le mari ne cohabite pas avec sa femme, mais vient lui rendre visite en apportant des cadeaux, cf. 15.1. C’est un type de mariage connu dans d’anciens droits orientaux et chez les Arabes. Samson n’a pas amené les garçons d’honneur qui sont exigés pour la fête, ils sont fournis par le clan de la femme. Le chiffre de trente est énorme peut être veut-on l’honorer, peut-être se méfie-t-on de lui.
12 Alors Samson leur dit : « Laissez-moi vous proposer une énigme. Si vous m’en révélez le sens au cours des sept jours de festin,d et si vous trouvez, je vous donnerai trente pièces de toile fine et trente vêtements d’honneur.
d Comparer Gn 29.27, mais le mariage était consommé dès la première nuit, Gn 29.23. — L’hébr. ajoute ici « si vous trouvez »; omis par une partie des versions.
« De celui qui mange est sorti ce qui se mange, et du fort est sorti le doux. »
Mais de trois jours ils ne réussirent pas à résoudre l’énigme.
15 Au septième joure ils dirent à la femme de Samson : « Séduis ton mari pour qu’il nous révèle l’énigme, autrement nous te brûlerons, toi et la maison de ton père. Est-ce pour nous dépouiller que vous nous avez invités ici ? »
e Cette indication temporelle s’accorde mal avec la suite du texte, cf. v. 17, mais elle se rattache au v. 18. Les vv. 16-17 ne concernent que la femme de Samson. En toute hypothèse le jour décisif est le septième jour.
18 Le septième jour, avant que le soleil ne se couche,f les gens de la ville dirent donc à Samson :
« Qu’y a-t-il de plus doux que le miel,
et quoi de plus fort que le lion ? »
Il leur répliqua :
« Si vous n’aviez pas labouré avec ma génisse,
vous n’auriez pas trouvé mon énigme. »
f Sens incertain ; avec une légère correction (hahadrah au lieu de haharsah) on pourrait comprendre « avant qu’il n’entrât dans la chambre à coucher » cf. 15.1.
19 Alors l’esprit de Yahvé fondit sur lui, il descendit à Ashqelôn, y tua trente hommes, prit leurs dépouilles et remit les vêtements d’honneur à ceux qui avaient révélé l’énigme, puis, enflammé de colère, il remonta à la maison de son père.
20 La femme de Samson fut alors donnée au compagnon qui lui avait servi de garçon d’honneur.
15 À quelque temps de là, à l’époque de la moisson des blés, Samson s’en vint revoir sa femme avec un chevreau, et il déclara : « Je veux entrer auprès de ma femme, dans sa chambre. » Mais le beau-père ne le lui permit pas.
4 Samson s’en alla donc, il captura trois cents renards, prit des torches et, tournant les bêtes queue contre queue, il plaça une torche entre les deux queues, au milieu.
6 Les Philistins demandèrent : « Qui a fait cela ? » Et l’on répondit : « C’est Samson, le gendre du Timnite, car celui-ci lui a repris sa femme et l’a donnée à son compagnon. » Alors les Philistins montèrent et ils firent périr dans les flammes cette femme et son père.
g Littéralement « cuisse sur hanche ».
9 Les Philistins montèrent camper en Juda et ils firent une incursion à Léhi.
10 « Pourquoi êtes-vous montés contre nous ? » leur dirent alors les gens de Juda. « C’est pour lier Samson que nous sommes montés, répondirent-ils, pour le traiter comme il nous a traités. »
14 Comme il arrivait à Léhi et que les Philistins accouraient à sa rencontre avec des cris de triomphe, l’esprit de Yahvé fondit sur Samson, les cordes qu’il avait sur les bras furent comme des fils de lin brûlés au feu et les liens se dénouèrent de ses mains.
« Avec une mâchoire d’âne, je les ai bien étrillés.h
Avec une mâchoire d’âne, j’ai battu mille hommes. »
h L’hébr. offre ici peu de sens et la traduction suit le grec.
17 Quand il eut fini de parler, il jeta loin de lui la mâchoire : et on appela cet endroit Ramat-Léhi.i
i Littéralement « la hauteur de la Mâchoire ».
j C’est-à-dire « la source de la Perdrix ». Le nom hébreu de la perdrix signifie « l’appelant ». Ce nom géographique est expliqué par l’appel de Samson vers Dieu, v. 18. Le récit précédent voulait de même expliquer le nom de Ramat-Léhi.
16 Puis Samson se rendit à Gaza ; il y vit une prostituée et il entra chez elle.
k Hébron est à 60 km de Gaza. Cet exploit de l’Hercule danite expliquait peut-être le nom d’un lieu-dit près d’Hébron, au départ de la piste descendant vers Gaza.
4 Après cela il aima une femme de la vallée de Soreq qui se nommait Dalila.
l Des femmes ont entraîné Samson dans toutes ses aventures ; il en est sorti grâce à la force que Dieu donne à l’homme qui lui est consacré. Une dernière femme le perdra parce qu’elle lui aura fait manquer à son vœu de nazir.
5 Les princes des Philistins allèrent la trouver et lui dirent « Séduis-le et sache d’où vient sa grande force, par quel moyen nous pourrions nous rendre maîtres de lui et le lier pour le maîtriser. Quant à nous, nous te donnerons chacun onze cents sicles d’argent. »
6 Dalila dit à Samson : « Révèle-moi, je te prie, d’où vient ta grande force et avec quoi il faudrait te lier pour te maîtriser. »
10 Alors Dalila dit à Samson : « Tu t’es joué de moi et tu m’as dit des mensonges. Mais maintenant révèle-moi, je te prie, avec quoi il faudrait te lier. »
11 Il lui répondit : « Si on me liait fortement avec des cordes neuves qui n’ont jamais servi, je perdrais ma vigueur et je deviendrais comme un homme ordinaire. »
13 Alors Dalila dit à Samson : « Jusqu’à présent tu t’es joué de moi et tu m’as dit des mensonges. Révèle-moi avec quoi il faudrait te lier. » Il lui répondit : « Si tu tissais les sept tresses de ma chevelure avec la chaîne d’un tissu, et si tu les comprimais avec la batte de tisserand, je deviendrais faible et serais comme n’importe quel homme. »
m Les vv. 13-14 sont complétés d’après le grec, car le texte hébreu entre le premier emploi du mot « chaîne » et le second a disparu. — Pour comprendre l’action de Dalila, il faut imaginer un métier à tisser horizontal où la chaîne de la pièce qu’on tisse est tendue entre des piquets enfoncés dans le sol. Après chaque passage de la navette, la trame est comprimée par la batte, barre de bois manipulée par le tisserand.
15 Dalila lui dit : « Comment peux-tu dire que tu m’aimes, alors que ton cœur n’est pas avec moi ? Voilà trois fois que tu te joues de moi et tu ne m’as pas révélé d’où vient ta grande force. »
19 Elle endormit Samson sur ses genoux, appela un homme et lui fit raser les sept tresses des cheveux de sa tête. Ainsi elle commença à le dominer et sa force se retira de lui.
22 Cependant, après qu’elle eut été rasée, la chevelure se mit à repousser.
23 Les princes des Philistins se réunirent pour offrir un grand sacrifice à Dagôn, leur dieu,n et se livrer à des réjouissances. Ils disaient :
« Notre dieu a livré entre nos mains Samson, notre ennemi. »
n Dagôn était anciennement la grande divinité de la région du Moyen-Euphrate. Son culte s’étant répandu en Syrie et en Palestine, cf. le nom de lieu Bet-Dagôn, Jos 15, 41 ; 19.27. Il avait été adopté par les Philistins, qui semblent avoir très vite tout oublié de leur religion originelle. On retrouvera Dagôn dans l’histoire de l’arche, 1 S 5.2s.
24 Dès que le peuple vit son dieu, il poussa une acclamation en son honneur et dit :
« Notre dieu a livré entre nos mains
Samson,o notre ennemi,
celui qui dévastait notre pays
et qui multipliait nos morts. »
o Ajouté pour le rythme et d’après le v. 23 ; omis par hébr.
25 Et comme leur cœur était en joie, ils s’écrièrent : « Faites venir Samson pour qu’il nous amuse ! » On fit donc venir Samson de la prison et il fit des jeux devant eux, puis on le plaça debout entre les colonnes.
p La fin de Samson a une réelle grandeur il donne sa vie en mettant en œuvre pour la dernière fois, contre les ennemis de son peuple, la force qu’il tient de Dieu.
q La finale du v. constitue une deuxième conclusion dans le cycle de Samson, cf. 15.20. Samson y est assimilé aux « petits » juges.