Le Sâdhou Sundar Singh – Préface

Préface

Sundar Singh, l’apôtre chrétien de l’Inde a séduit et enthousiasmé tous ceux qui ont eu, en Europe, le privilège de l’entendre. La séduction subsiste et grandit encore, quand on étudie de plus près son témoignage. L’intérêt qu’offre ce « sadhou » chrétien est celui d’une personnalité religieuse exceptionnellement douée qui découvre et s’approprie le christianisme. Alors qu’un converti se laisse habituellement instruire par son missionnaire, Sundar Singh n’a confiance qu’en l’Esprit. Guidé par la faim divine qui le tourmente, il ne s’empare que de ce qui le nourrit effectivement. Il use des doctrines avec la liberté royale d’un enfant de Dieu, il écarte celles qui lui sont inassimilables et accommode à ses besoins celles dont il se nourrit. Or, sur la base de ce subjectivisme absolu, Sundar Singh retrouve, avec d’intéressantes variantes, la mystique de saint Paul, de saint Jean, de saint François d’Assise, de Luther. Son témoignage constitue ainsi une sorte de vérification moderne de l’Évangile éternel.

En méditant l’histoire des hommes de la Bible ou celle des principaux mystiques, nous avons souvent l’impression douloureuse que tout cela est, hélas, du passé. Il nous semble que nous sommes venus trop tard, dans un monde trop vieux pour produire de semblables floraisons, et voici qu’une fleur mystique, toute semblable à celles que nous admirons dans le passé, croît et s’épanouit sous nos yeux. Ce jeune chrétien venu de l’Inde, ressemble à quelque personnage des Actes des Apôtres. Il raconte les choses qui lui sont arrivées et elles sont merveilleuses. Il décrit le Royaume des cieux par des similitudes nouvelles que chacun comprend. De l’abondance du cœur sa bouche parle, et nous écoutons, ravis. Comme les enfants qui entendent de belles histoires, nous dirions volontiers : « Encore, encore. » Nous nous attendons à des miracles et serions étonnés qu’il n’en eût point à raconter. Sans doute, celui qui fait ainsi exulter notre foi n’est pas un fils d’occident, mais il est nôtre spirituellement, puisqu’il se nourrit de l’Évangile ; en lui nous nous sentons bénis.

Les éditeurs et traducteurs anonymes de ce volume ont voulu faire entendre au lecteur français l’appel si émouvant qui se dégage de la personne et de l’enseignement de Sundar Singh. Il existe déjà en notre langue, outre la biographie de Mrs Parker, plusieurs recueils de discours du Sadhou [1]. Le présent ouvrage constitue l’exposé le plus complet de son enseignement. Comme le dit l’Introduction qu’on lira plus loin, les auteurs ont usé de tous les moyens possibles d’information. Ils ont su interroger Sundar Singh avec la minutie et la précision de savants spécialisés dans les études psychologiques.

Certains des récits du Sadhou ont été très discutés. Du fond même de l’Inde des protestations sont arrivées jusqu’à nous. Le biographe allemand de l’apôtre hindou, le professeur Heiler, les a examinées minutieusement dans un livre intitulé : Apôtre ou imposteur ? Elles lui ont paru inspirées plutôt par l’esprit de parti que par un souci de vérité. Il leur oppose une série de témoignages, fournis par des personnalités dignes de toute confiance, et qui ont eu l’occasion de bien observer Sundar Singh. Ces témoignages sont unanimes à louer sa distinction morale et la parfaite dignité de son Religion et Réalité. Le premier recueil : Par Christ et pour Christ est, de beaucoup, le plus vivant caractère. Sa sincérité et sa bonne foi nous sont donc garanties.

Cependant la sincérité n’exclut pas l’erreur. Il se peut, que porté par son imagination bien orientale, le Sadhou ait amplifié, rendu merveilleux des faits aisément explicables. Mais précisément les auteurs de ce livre ne les citent qu’à litre documentaire pour dépeindre la foi du Sadhou. Ils s’intéressent surtout à ses représentations religieuses si vives, si pittoresques et qui renouvellent si heureusement les lieux communs du christianisme. C’est cela aussi qui nous intéresse, nous avons toujours besoin qu’on nous décrive par des similitudes nouvelles les lois du Royaume des cieux.

Nous avons besoin aussi qu’on nous parle de l’Ami divin que Dieu nous a envoyé. Le Sadhou y excelle. À l’écouter, on sait de source sûre que le Seigneur est vivant, qu’il est proche, et que nous pourrions aisément jouir de sa merveilleuse paix. Nous demeurons étonnés et confus de ne pas aimer mieux Celui que Sundar Singh nous rend si aimable.

Qu’ils soient loués et bénis ceux qui se sont employés à nous faire entendre cette voix d’En Haut.

G. Bouttier.


[1] Par Christ et pour Christ ; Aux pieds du Maître.

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